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Café philosophique
Un café philosophique est une discussion philosophique ouverte à tous, organisée dans un café ou dans un autre lieu public. Un café-philo n’est pas une conversation informelle dans un bistrot où l’on « refait le monde », comme son nom pourrait le laisser croire, mais plutôt une séance de discussion organisée, avec un horaire bien précis, un sujet choisi et un animateur compétent. Le sujet est souvent décidé en commun au début de la séance, sur une liste de propositions des participants.
Tout le monde peut y participer, entrer et sortir à sa guise, ce qui a contribué à démystifier la philosophie et a encouragé des milliers de participants à approfondir leur réflexion, à renouer avec la lecture philosophique et à prendre la parole en public.
Sommaire
Principes
L’esprit qui règne dans un café-philo est celui de tolérance, d’ouverture et de pluralisme, ce qui en fait une pratique propre à des sociétés démocratiques. Le fondateur Marc Sautet tenait à ce que la philosophie reprenne sa place au milieu des débats de la société contemporaine, comme instrument de pensée critique et de liberté, favorisant la vigilance et la lucidité chez des citoyens responsables. C’est pourquoi aussi chaque café-philo est autonome et aucune institution, parti ou secte n’a jamais pu s’en emparer pour en faire un instrument idéologique ou de recrutement, malgré plusieurs tentatives, aucune association n’a pu, non plus, se prévaloir de fédérer ces lieux, plutôt autogérés, ni ses animateurs, plutôt libertaires et farouchement indépendants.
Cette pratique innovante s’est imposée de fait et cela a donné à la langue une nouvelle expression : « café-philo », qui, au moins en France, est venue signifier une sorte de dispositif de discussion, expression pouvant aussi s’appliquer à des séances dans d’autres lieux que des cafés, comme des bibliothèques, des médiathèques, centres culturels, maisons des jeunes, foyers d’immigrés, maisons d’accueil pour SDF et, même, séminaires d’entreprise.
Elle est prisée par des agents culturels et acteurs sociaux, car elle stimule la prise de parole responsable, l’esprit de dialogue et le débat citoyen. Des institutions comme l’Éducation nationale en France s’emparent à leur tour de l’idée développant ce type de débats dans les classes. Elle se pratique jusque dans des prisons ; de même, entreprises et collectivités locales proposent des cafés-philo lors des séminaires de formation.
Le phénomène café-philo, parce qu’il est né à Paris, a pu être mis en rapport avec les salons littéraires du XVIIIe siècle} et aussi avec l’époque où Sartre et ses amis tenaient des réunions dans les cafés du quartier latin, mais ce ne sont là que des précédents prestigieux pour un phénomène bien différent. L’élément commun, en dehors de celui de Paris, serait un certain goût de l’expression orale, du bon l’usage de la parole et une certaine culture de la rhétorique.
Historique
Cette pratique originale de la philosophie dans la cité est née à Paris, en décembre 1992 au Café des Phares, place de la Bastille, avec le philosophe Marc Sautet, qui y menait une discussion publique tous les dimanches matin à 11 heures. Il y acquit une certaine popularité grâce à son charisme et au fait que le phénomène a intéressé les médias.
Marc Sautet est décédé en 1998, mais le café-philo du Café des Phares existe toujours, animé par une équipe qui se relaie. Des séances ont lieu tous les dimanches matin de l’année et l’endroit est devenu une véritable institution parisienne, avec une moyenne entre 80 et 100 personnes chaque dimanche de l’année, recevant, de temps en temps des personnalités du monde intellectuel, comme Edgar Morin ou des universitaires de renom comme Christian Godin, ainsi que, régulièrement, la visite de journalistes et de curieux du monde entier. Le Café des Phares s'est récemment doté d'un site web qui propose des archives audio des débats, des articles écrits et commentés par les participants ainsi que plusieurs forums de discussion.
L’expérience du Café des Phares fût vite imitée en d’autres lieux parisiens et à partir de l’année 1995, l’idée essaima dans d’autres grandes villes en France et en Europe, puis ailleurs, un peu partout dans le monde.
Après une période de fort développement (1995 – 1998), de présence médiatique et même de mode, le phénomène semble se stabiliser. Beaucoup de ces cafés-philo créés un peu à la hâte ont disparu, d’autres se sont consolidés depuis : Rotonde de la Mouette (Paris 16e), Le Bastille, (aussi pl. de la Bastille), Forum – 104 (104, rue de Vaugirard à Paris 6e), ainsi que de nombreux autres en province (ou certains durent aussi depuis des longues années, comme à Poitiers et Narbonne. A Montpellier, le Café Philo fut créé en décembre 1995 par Colette Djaffo qui l'anima pendant 3 ans tous les jeudis soirs, depuis ce Café Philo se scinda et l'un d'eux se nomme le Café de la Libre Parole et est toujours en fonctionnement) et dans les pays francophones avant de devenir véritablement un phénomène international.
Des idées proches ont fait leur apparition, avec du succès, notamment le « ciné-philo » au cinéma L’Entrepôt, à Paris 14e, où le débat de café-philo est précédé d’un film choisi pour son intérêt philosophique. Le ciné-philo a été créé en 1997 par le philosophe et musicien d’origine chilienne Daniel Ramirez, qui est aussi animateur au Café des Phares et au café-philo du Forum-104 ; cette initiative a été déjà imitée en France, en Belgique et ailleurs dans le monde.
Il existe aussi des cafés « psy », cafés « socio » ou cafés théologique, réunissant des gens qui veulent discuter librement des sujets qui les intéressent, mais ces pratiques s’apparentent plutôt à la conférence ou au salon littéraire, avec un intervenant invité que l'auditoire interroge à la fin de sa prestation.
L’esprit du café-philo est plutôt de mettre en valeur les interventions du « public » lui-même, sans exposé de départ ni intervenant privilégié. Il s’agit d’inviter les gens à aller plus loin dans leur propre réflexion. Dans ce sens, le rôle de l’animateur s’avère important, il doit avoir des compétences diverses : une formation solide en philosophie, une grande ouverture d’esprit, des connaissances de dynamique de groupes, de l’écoute et de la mémoire, pour retenir, organiser et mettre en relation les multiples contributions des participants, sans que cela sombre dans le désordre ou dans le hors sujet. L’animateur se sert du questionnement philosophique, de l’ironie et de la maïeutique, un peu comme Socrate le faisait dans les dialogues de Platon ; il s’efforce de pousser les participants à aller au-delà des simples opinions ou des préjugés, pour s’approcher de la pensée argumentée, il doit être aussi en mesure de comprendre les grands enjeux du sujet choisi, faire des recadrages et si possible une synthèse finale. Il se doit aussi de garder une certaine neutralité en matière politique, religieuse ou éthique, afin d’inciter les participants à s’exprimer sans autocensure, de veiller à la tenue correcte et respectueuse des débats et à l’équité dans la distribution de la parole, ce qui s’avère parfois bien difficile.
Une certaine variété de formule existe dans les cafés-philo. D’aucuns chargent des participants de certains rôles : présentation du sujet, distribution de la parole, synthèse finale ; certains préfèrent démarrer la discussion à partir de la lecture d’un texte, d’autres, d’une citation, même d’une image ; des disputations comme dans les facultés de théologie au Moyen Âge ont été organisées au Café des Phares de Paris.
Un apport important à la réflexion sur ce phénomène a été menée par le pédagogue Michel Tozzi, créateur du café-philo de Narbonne[1], dans le CRDP de Montpellier et à la revue Diotime l’Agora. À noter les cafés-philo de Bruxelles où l’un des premiers cafés-philo hors de France a été fondé par Jean Noël, avec souvent la présence des invités de renom.
Bibliographie
- Marc Sautet, Un café pour Socrate, Robert Laffont, 1995
- Claude Courouve, Démocratie et anarchie dans les cafés de philosophie, Esprit, n° 239, janvier 1998, pp. 200-205.
- Jacques Diament, "Les Cafés de Philosophie", L'Harmattan, 2003
- Comprendre le phénomène café-philo, ouvrage collectif, direction Yannis Youlountas, préface Edgar Morin, Éditions La Gouttière, 2003.
- Revue Diotime-L’Agora, périodique du CRDP Languedoc-Roussillon, n° 9 mars 2001
- Michel Tozzi, Les enjeux de l’animation d’un café-philo, n° 13, mars 2002 (dossier Les cafés philosophiques).
Liens internes
Liens externes
- http://www.cafe-philo-des-phares.info
- Site des cafés Philo à Bruxelles
- Café Philo "Paroles" de Wavre
- Café Philo "Palabres" de Louvain-la-Neuve
- Café Philo de New York, par Bernard Roy
- Café Philo de Narbonne
- Café Philo d'Apt (Vaucluse)
- Café Philo de Picardie, Les Petits Socratiques
[accordphilo]*http://www.accordphilo.com/
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