Boycott, Désinvestissement et Sanctions

Boycott, Désinvestissement et Sanctions

Boycott, désinvestissement et sanctions

Logo de la campagne de boycott, désinvestissement et sanctions

« Boycott, désinvestissement et sanctions » est une campagne politique appelant à exercer toutes sortes de pressions économiques, académiques, culturelles et politiques sur Israël, lancée le 9 juillet 2005 par la société civile palestinienne rassemblant 172 organisations[1][Note 1].

Cette campagne pour transformer Israël s'organisa à l'initiative d'intellectuels et d'universitaires palestiniens ou de la diaspora palestinienne, entre 2002 et 2004[2].

Elle vise à initier et renforcer les pressions extérieures sur le gouvernement israélien pour l'amener à choisir la voie d'une solution négociée au conflit avec les Palestiniens.

Sommaire

Londres, 1989, bus affichant « Boycott apartheid ».

Arrière-plan historique

Le premier boycott pour faire pression sur Israël fut le fait de la Ligue arabe qui mit en œuvre le boycott formel du sionisme puis d'Israël dès le 2 décembre 1945[3].

Par ailleurs, au cours des années 60, 70 et 80 l'opposition internationale à l'apartheid se mue en campagne de désinvestissement, de boycott et d'embargo ; et explore avec succès ce moyen de pression.

Premiers appels et construction de la campagne

L'archevêque Desmond Tutu, figure de la lutte contre l'apartheid, appelle au désinvestissement d'Israël

Déclarations de responsables politiques sud-africains et d'universitaires anglais

Le sud-africain Ronnie Kasrils, alors ministre des services secret, né juif, déclare publiquement en avril 2002 qu'il supporte l'appel pour « l'isolation, le boycott et les sanctions » d'Israël. Il indiqua au correspondant Reuters que sa pétition « Pas en mon Nom » (“Not in my Name”) avait été signée par seulement 300 des 75 000 juifs sud-africains[4]. Quelques années plus tard, en mai 2005, il publie dans The Guardian, son argumentaire selon lequel Palestiniens et Israéliens bénéficieront tous deux d'un boycott[5].

Au printemps 2002 Desmond Tutu, prix Nobel de la paix pour sa lutte contre l'apartheid, lance une campagne de désinvestissement d'Israël, conduite par des entités religieuses et politiques pour mettre fin à l'occupation israélienne des territoires palestiniens conquis lors de l'opération militaire de 1967[6],[7],[8].

L'idée d'une campagne européenne de boycott universitaire et culturel émerge en Angleterre au printemps de l'année 2002, dans une lettre ouverte[9] signée par 125 universitaires et publiée par The Guardian[10]. Cette lettre conduit Mona Baker, de l'Université de Manchester, à révoquer deux universitaires israéliens en juin 2002. En réponse à la critique de Tony Blair, Mona Baker s'explique au Daily Telegraph et la lettre s'allonge de 700 signatures dont dix d'universitaires israéliens[11] :

« En réalité je ne boycotte pas les Israéliens, je boycotte les institutions israéliennes. Je suis convaincu que longtemps après que tout cela soit fini, comme ça a été la cas avec l'holocauste des juifs, les gens commenceront à admettre qu'ils auraient dû faire quelque chose, que c'était déplorable et que le milieu universitaire est si lâche qu'il n'avait rien fait[11]. »

Conférence aux Nations unies et réunion d'intellectuels en Palestine

En septembre 2003, lors d'une conférence internationale à l'ONU interviennent des israéliens favorables à un boycott au niveau international, puis est effectué le rapprochement avec la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud[12].

Quelques mois plus tard un groupe d'universitaires et d'intellectuels réunis à Ramallah lance la « campagne palestinienne pour le boycott académique et culturel d'Israël[Note 2] » ; donnant suite à une déclaration appelant au boycott des institutions académiques israéliennes, émise en octobre 2003 par des universitaires et des intellectuels de Palestine et de la Diaspora[2].

La Cour internationale de justice rend son avis le 9 juillet 2004 sur la barrière de séparation israélienne qui est déclarée incompatible avec le droit international[13]. Cet avis juridique conforte l'opposition à la politique d'Israël dans ses opinions et actions ; il devient l'occasion de rassembler les Palestiniens autour de l'appel principal de la campagne.

Lancement de la campagne

Forum Social Mondial de Porto Alegre

En janvier 2005, l'Occupied Palestine and Syrian Golan Heights Advocacy Initiative présente au 5ème Forum Social Mondial l'appel palestinien pour les « boycott, désinvestissement et sanctions[14]. »

L'appel de la société civile palestinienne

À l'occasion de l'anniversaire de l'avis de la Cour internationale de justice rendu sur la barrière de séparation israélienne[13], la société civile palestinienne publie le 9 juillet 2005 son appel accompagné des signatures de 172 organisations[1].

Les 12 et 13 juillet 2005, soit quelques jours plus tard, siège à Paris, à l'UNESCO, la Conférence de la société civile pour la paix au Moyen-Orient qui adopte à l'unanimité l'appel palestinien à la campagne BDS ; la résolution finale annonce un plan d'action pour « une campagne générale de boycotts, de désinvestissements et de sanctions pour forcer Israël à terminer l’occupation et à se conformer au droit international et à respecter toutes les résolutions des Nations Unies concernées »[15].

L'appel du 9 juillet 2005 déclare :

« Ces mesures punitives non-violentes devraient être maintenues jusqu’à ce qu’Israël honore son obligation de reconnaître le droit inaliénable des Palestiniens à l’autodétermination et respecte entièrement les préceptes du droit international en :
  1. Mettant fin à son occupation et à sa colonisation de tous les terres Arabes et en démantelant le Mur ;
  2. Reconnaissant les droits fondamentaux des citoyens Arabo-Palestiniens d’Israel à une égalité absolue ; et,
  3. Respectant, protégeant et favorisant les droits des réfugiés palestiniens à revenir dans leurs maisons et propriétés comme stipulé dans la résolution 194 de l’ONU[1]. »

Poursuite de la campagne

Conférence palestinienne pour la campagne

La première Conférence palestinienne BDS a lieu à Ramallah en novembre 2007 et un « comité BDS » est formé à cette occasion, composé entre autres d'Omar Barghouti (en)[16]. La conférence est ouverte par Dr. Gabi Baramki et réunit 300 activistes palestiniens conversant avec des activistes en Grande-Bretagne, Canada, Norvège, Espagne et Afrique du Sud[17].

Discours à l'Assemblée générale des Nations Unies

Le 28 novembre 2008, le président de l’Assemblée générale de l'ONU Miguel d’Escoto Brockmann appelle à envisager de participer à la campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions[18].

La campagne BDS en France

En France, lattaque contre Gaza de l'hiver 2008-2009 suscite une large prise de conscience et accélère les mobilisations autour de l'appel BDS des palestiniens. De nombreux citoyens s'organisent et mènnte des actions et campagnes coordonnées dans toute la France (Carrefour, Agrexco, Ahava, etc).

Voir notamment le blog de la campagne ici : http://campagneboycott.blogspot.com Une autre expression de cette campagne ici : http://palestine.blog.lemonde.fr

Le cas Agrexco

Une coalition internationale, appuyée par le Boycott National Committee palestinien, s'organise contre le projet d'implantation d'Agrexco à Sète et plus largement contre la présence d'Agrexco en Europe (ports de Savone en Italie et Valence en Espagne, Belgique). Le site de la coalition internationale contre Agrexco : http://www.coalitioncontreagrexco.com

Acteurs et soutiens

Article connexe : Boycott d'Israël.

La campagne est soutenue par des citoyens israéliens[19],[20], des fédérations juives pour une paix juste[15], le président de l’Assemblée générale de l’ONU Miguel d'Escoto Brockmann[18], les intellectuels Naomi Klein[21], l'historien israélien Neve Gordon [22],[23], Jean Bricmont[24], Tariq Ramadan[25], Phyllis Bennis[26]; des universitaires britanniques[27], canadiens[28], ou libanais[29], des syndicats canadiens, britanniques et sud-africains[30].

Le mouvement appelle à un boycott économique, politique, universitaire[31] et culturel. Le boycott culturel est soutenu entre autres par le musicien Roger Waters,[Note 3] les écrivains John Berger, Eduardo Galeano et Arundhati Roy[32],[33], ainsi que par les cinéastes Ken Loach[34] et Jean-Luc Godard[35].

De l'Australie[36] aux Philippines[37] en passant par le Canada ou l'Angleterre, la campagne de BDS est suivie par divers acteurs culturels, universitaires, syndicaux, économiques ou politiques. Le ralliement n'est toutefois pas unanyme[38].

En réaction à la guerre de Gaza 2008-2009, les gouvernements vénézuéliens et boliviens ont initié un boycott politique à partir du 14 janvier 2009[39].

En Irlande, l'appel au boycott est visible d'Israël depuis au moins septembre 2006[40]. Suite aux manifestations de janvier 2009 appelant au boycott[41], l’Irish Times a publié une lettre ouverte le 23 janvier 2009[42] puis le samedi 31 janvier 2009 a publié, en page 5, un « appel irlandais pour une justice en Palestine » recueillant environ 300 signataires, dont des députés, des sénateurs, des leaders politiques (dont Gerry Adams et Tony Benn), des dirigeants de syndicats, des professeurs et des artistes[43]. En France[Note 4] un appel au boycott académique est publié en février 2009 et possède une cinquantaine de signatures[Note 5],[44]. Ils appellent « en premier lieu [à] appliquer un programme de boycott, de cessation des investissements et de sanctions. »[45].

La campagne est renforcée par d'autres initiatives telles le Tribunal Russell sur la Palestine[46].

Le principal argument de soutien à la campagne BDS est que « le boycott, comme jadis pour l'Afrique du Sud, n'est qu'un moyen, non pas « d’affamer le peuple israélien », mais bien de faire comprendre aux Israéliens comme au reste du monde qu’il ne saurait y avoir d'impunité[47]. »

Notes et références

Notes

  1. « Boycott, désinvestissement et sanctions » est la traduction francophone de la campagne « Calls for Boycott, Divestment and Sanctions against Israel » qui utilise principalement la langue anglaise pour ses communications.
  2. Appellation traduite de l'anglais : The Palestinian Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel, ou PACBI. Voir (en) pacbi.org
  3. En avril 2006, Roger Waters déplace son concert prévu à Tel Aviv pour protester contre le Mur de la honte. Suite à une lettre ouverte -(en) Open letter to Roger Waters, 7 mars 2006 - il répond : « La souffrance endurée par le peuple palestinien depuis quarante ans d’occupation israélienne est inimaginable pour nous qui vivons à l’ouest et je soutiens leur lutte de libération. J’ai fait changer le lieu du concert, qui aura lieu à Wahat al Salam / Neve Shalom en signe de solidarité avec les voix de la raison, Palestiniennes ou Israéliennes, qui cherchent une voie non-violente pour une paix juste. »(en)source et (fr)traduction
  4. Auparavant, en 2002, l'université de Jussieu avait voté un accord de non-coopération. (fr) [1]
  5. dont celles de Daniel Bensaïd et Gérard Toulouse de l'Académie des Sciences, auteur de Les scientifiques et les droits de l'homme (fr)Boycotter l’apartheid, 2002

Références

  1. a , b  et c (en)Calls - (fr) Appel du 9 juillet 2005
  2. a  et b (en)Backgrounf and history, Palestinian Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel (PACBI)
  3. (en)« Jewish products and manufactured goods shall be considered undesirable to the Arab countries." All Arab "institutions, organizations, merchants, commission agents and individuals" were called upon "to refuse to deal in, distribute, or consume Zionist products or manufactured goods. » The Arab Boycott by Mitchell Bard (JVL)
  4. (en)Reuters, 23 avril 2002 - "I support the call now for the isolation and the boycott of Israel. I support sanctions"
    « Kasrils said he had discussed his support for the Palestine Support Group in South Africa and its demand for action against Israel with cabinet colleagues and with President Thabo Mbeki. » Reuters, 25 avril 2005
    (en)Can BDS really be effective in ending the Israeli occupation and oppression?, FAQ des universitaires du BDS mouvement
  5. (en)Both Palestinians and Israelis will benefit from a boycott, Ronnie Kasrils & Victoria Brittain, Ministre des Services secret sud-africain, 25 mai 2005
  6. (en)Of Occupation and Apartheid Do I Divest?, Desmond Tutu, Counter Punch, October 17, 2002
  7. (en)Israel: Time to Divest. Desmond Tutu, New Internationalist magazine, January / February 2003
  8. (en)Israeli apartheid, Desmond Tutu et Ian Urbina, 27 juin 2002. issue =275, pages 4-5, The Nation
  9. (en)Open Letter: More pressure for Mid East peace, initiée par Steven and Hilary Rose, professeurs de biologie à l'Open University et à l'Université de Bradford, publiée par The Guardian, 6 avril 2002
  10. (en)British academic boycott of Israel gathers pace, The Guardian, December 12 2002, accessed September 16 2006
  11. a  et b (en)Suzanne Goldenberg, Will Woodward, Israeli boycott divides academics, Guardian, July 8 2002
  12. (fr)Conférence internationale de la société civile à l’appui du peuple palestinien, tenue au siège de l’ONU à New York les 4 et 5 septembre 2003 par la Division des droits des Palestiniens
  13. a  et b (fr)Avis de la CIJ, 9 juillet 2004
  14. (en)Statement and call for action, janvier 2005 - (en)Al Majdal, Issue No. 28 (Winter 2005)
  15. a  et b (en) Rapport de Conférence internationale, Division for Palestinian Rights, 13 juillet 2005 (fr) Communiqué de l'UJFP, Paris, 16 juillet 2005 - Communiqué traduit de Stop The Wall le 16 juillet 2005 - Voir aussi La déclaration de la session plénière annuelle 2005 des JEPJ, 31 octobre 2005
  16. PACBI Statement on the McCarthyist Campaign against Omar Barghouti, Palestinian Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel, 3 May 2009
  17. (en)Report BDS Conference, PACBI, Ramallah, 22 novembre 2007
  18. a  et b (fr)« Aujourd’hui peut être, nous les Nations Unies, devons envisager de suivre l’exemple d’une nouvelle génération dans la société civile, qui appelle à une campagne non violente similaire de boycott, de désinvestissement et de sanctions pour faire pression sur Israël. » (fr) AG de l'ONU du 24 novembre 2008
  19. (en) Words and deeds in the Middle East Lettre publiée par The Guardian, 17 janvier 2009
  20. Boycott From Within initié par Yael Lerer
  21. a  et b (fr)Trop c'est trop, The Guardian, 10 janvier 2009 - Israel: Boycott, Divest, Sanction, The Nation', mis en ligne le 7 janvier 2009, publié dans l'hebdomadaire le 26 janvier 2009
    (fr)réaction de Robert Pollin et réponse que lui a faite Naomi Klein, ''
    La Revue internationale des livres et des idées n°10, mars-avril 2009
  22. Neve Gordon, Boycott Israel, tribune dans le Los Angeles Times, 20 août 2009. Traduite en français sur le site de l'Union juive française pour la paix.
  23. Esther Benbassa, Israël : Neve Gordon et les voix pacifistes perdent la bataille, Rue 89, 30 août 2009
  24. (fr) Trois idées simples, Le Grand Soir, 12 janvier 2009
  25. (fr) Appel de Tariq Ramadan, 6 janvier 2009
  26. (en) The Gaza Crisis, Phyllis Bennis, 28 décembre 2008
  27. (en)Growing outrage at the killings in Gaza, lettre publiée par The Guardian, 16 janvier 2009
  28. 7 janvier 2009, Ontario - Academic boycott of Israel? par Uzma Khan dans The Concordian, 2 mai 2008, Québec
  29. Academic Statement from Lebanon, Rania Masri, 18 janvier 2009
  30. (en) Ontario Union Wants Boycott of Israeli Academics, l'union des assistants d'enseignement et de recherche d'Ontario, 6 janvier 2009, publié dans The Globe and Mail
    (en)Syndicat des postes, 7 janvier 2009
    (en)Unison (syndicat de la fonction publique): 1,3 million de membres – 2007
    (en)TGWU (syndicat des ouvriers de production): 800.000 membres – 2006
    (en)Irish Congress of Trade Union: 770.000 membres – 2007
    (en)NIPSA (syndicat le plus important en Irlande du Nord): 44.000 membres – 2007
    (en)COSATU (Congress of South African Trade Unions): 1,8 million de membres – 2007
  31. (en) Boycott universitaire et culturel, site à l'initiative d'Omar Barghouti - (fr)Interview d'Omar Barghouti, 10 juillet 2007
  32. (en)We must speak out, john Berger, the Guardian, 15 dec 2006 (fr)traduction
  33. (fr)intel.be, 21 novembre 2007
  34. (en)Standout British filmmaker joins boycott of Israel, PACBI, Août 2006
  35. (fr)Lettre de remerciement, juillet 2008
  36. Maximilian Forte, un anthropologue australien : (en)Maximilian Forte, 12 janvier 2009
  37. (en)The Philippines and Israel: A History of Complicity, an Imperative for Action, Herbert Docena, 15 janvier 2009
  38. (en)Should we consider a boycott of Israeli academic institutions? No, Michael Baum, University College London, 21 juillet 2007
  39. (fr)Courrier International, 16 janvier 2009
  40. (en)Irish lecturers call on EU to boycott Israeli universities, Haaretz, 24 septembre 2006
  41. (en)Calls for boycott of Israel at Dublin protest 17 janvier 2009. Voir les articles du 8, 9, 10, 14, 17 et 21 janvier
  42. (en)Israeli offensive in Gaza, 23 janvier 2009
  43. (en)Appel irlandais, 31 janvier 2009.
    (en)Sources: PACBI & ei
  44. (fr)Collectif Interuniversitaire pour la Coopération avec les Universités Palestiniennes
  45. (fr)Universitaires français, 15.02.09
  46. Vidéo d'inauguration, Ken Coates à 1 minute 49 secondes du début
  47. (fr) « Des Israéliens saluent le boycott », communiqué de UJFP daté du 14 juillet 2007

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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