Vaccin contre le virus Ébola

Vaccin contre le virus Ébola

Le virus Ébola est un virus enveloppé à ARN simple brin de polarité négative appartenant à la famille des Filoviridae. Principalement retrouvé dans certaines régions d’Afrique, ce virus cause des fièvres hémorragiques importantes qui sont souvent mortelles. Il s’en est donc trouvé important de développer un vaccin rapidement contre ce virus. De plus, comme il s’attaque principalement aux primates non-humains et aux humains, le bioterrorisme devient une cause importante de la découverte d’un vaccin efficace. En revanche, plusieurs obstacles limitent les recherches et le développement d’une protection efficace, mais cette découverte marquera une avancée importante dans le domaine de la vaccination.

Sommaire

Historique

La mise en place du vaccin contre le virus Ébola est devenue importante avec l’arrivée du bioterrorisme[1],[2].

Dès 1980, un vaccin à base de virus inactivés s’est trouvé efficace chez les cobayes, mais pas chez les primates non-humains[3], ce qui retarde les essais sur les humains, puisque les primates non-humains ont un système immunitaire très semblable à celui de l’homme. D’autres vaccins utilisant des protéines recombinantes ont été essayés par la suite, mais ne se sont pas avérés plus protecteurs.

En 1997, une équipe de chercheurs développa un vaccin qui semblait immuniser des cochons d’Inde. Ce groupe de Howard Hughes Medical Institute avait injecté un vaccin ADN dans les muscles des cobayes. Les animaux ont été protégés de l’infection après avoir été infectés par le virus à deux reprises, soit deux et quatre mois après l’immunisation[4].

En 2000, une équipe de Vaccine Research Center, National Institute of Health et une équipe de Special Pathogens Branch, Centers for Disease Control and Prevention, ont concocté un vaccin générant une immunité tant cellulaire qu’humorale chez les macaques cynomolgus[3]. Infectés par une forte dose du virus Ébola Zaïre de 1976, les animaux vaccinés furent tous asymptomatiques pendant plus de six mois et ce, sans qu’il n’y ait de virus détectable dans leur organisme après l’exposition initiale[5]. Cette étude démontra qu’il est possible de développer un vaccin préventif contre le virus Ébola chez les primates non-humains en quatre doses seulement[6].

En 2003, les mêmes auteurs qu’en 2000, associés cette fois au laboratoire P4 de l’USAMRIID (Fort Detrick, Maryland, USA), ont amélioré leur processus de vaccination chez le macaque pour qu’il puisse être administré en une seule dose. Le nouveau mélange d’adénovirus effectué permettait une induction d’anticorps beaucoup plus rapide que précédemment. Quatre semaines après la nouvelle immunisation, les macaques infectés ont tous survécu et ce, toujours sans trace de virémie[6].

C’est en 2007 qu’une question fut réglée[7]. L’opportunité de vérifier si le vaccin fonctionne après l’infection par d’autres souches que l’Ébola Zaïre (ZEBOV) et l’Ébola Soudan (SEBOV) est survenue par la découverte d’une nouvelle souche dans la région de Bundibugyo en Ouganda (BEBOV)[8],[9]. Le Dr Nancy J. Sullivan et ses collègues du National Institute of Allergy and Infectious Diseases décidèrent d’essayer une stratégie de vaccination appelée prime-boost ou amorce-rappel en français[1],[7]. Cette stratégie utilise des vecteurs ADN ainsi que des vecteurs d’Adénovirus recombinants (rAd5) afin d’assurer une réponse immunitaire en cellules T autant qu’en cellules B et ainsi induire une protection croisée contre BEBOV[10],[11]. La question fut donc réglée lorsque l’équipe prouva que sur les quatre macaques cynomolgus immunisés avec un vaccin efficace contre ZEBOV et SEBOV ont survécu à l’infection par BEBOV[6].

Tout récemment, on a pu expérimenter la stratégie prime boost sur un petit groupe d’humain, qui a permis de prouver que cette technique est sécuritaire en ce qui a trait à la stimulation d’une réponse immunitaire[7]. En revanche, nous sommes au tout début de l’expérimentation humaine et il n’y a pas encore de confirmation de protection totale contre l’infection par Ébola.

Type de vaccin

Le vaccin utilisé en 1997 consistait en une injection intramusculaire d’un plasmide ADN exprimant la protéine virale Ébola[4]. Déjà à cette époque, les recherches suggéraient que les protéines de surface de l’enveloppe du virus en question pouvaient générer une réponse immunitaire. C’est alors que les chercheurs ont décidé d’utiliser cette technique et ont inséré les gènes responsables de ces protéines dans des bactéries circulaires appelées plasmides. C’est une fois injecté dans les muscles que le plasmide a pu transmettre les protéines recombinantes du virus aux cellules animales soit ici des cobayes. La conclusion en a été que la réponse d’anticorps engendrée ainsi que la réponse par les cellules T a été suffisante pour arrêter le virus.

Cette méthode de développement de la vaccination est aussi utilisée pour l’influenza, la malaria ainsi que la tuberculose.

En 2000, le vaccin produit contenait une combinaison d’ADN avec un vecteur adénoviral codant pour des protéines virales[5]. Comme les équipes travaillant sur le virus Ébola l’ont précédemment découvert, cette équipe a respecté l’idée de stimuler la réponse immunitaire plutôt que la réponse d’anticorps. Le vaccin concocté favorisait donc la prévention et consistait à limiter la propagation de l’infection par les macaques cynomolgus. En seulement quatre injections du vaccin, on a pu arriver à une excellente immunisation.

Le vaccin de 2003, ne consistant qu’à réduire le nombre de doses administrées, on favorisa la réponse d’anticorps, puisque, pour être efficace, un vaccin se doit de stimuler non seulement la réponse à immunité humorale, mais aussi la réponse lymphocytaire cytotoxique[6]. Le vaccin ne fut donc qu’une amélioration de celui concocté en 2000, afin de ne procéder qu’à une injection simple pour obtenir une réponse immunitaire aussi efficace sinon meilleure.

C’est en 2007 qu’on changea de stratégie. On opta pour la stratégie prime boost qui consiste en une administration première d’un vaccin prime à ADN codant pour la majorité des protéines de surface se trouvant sur l’enveloppe des souches Ébola Zaïre et Ébola Soudan. Quelques mois plus tard, on procède à l’administration de la partie boost basée sur un adénovirus atténué qui produit aussi des fragments de protéines de surface de l’Ébola qui sont aussi reconnus par le système immunitaire[7].

Population cible

Avec ce vaccin, on prévoit vacciner les gens qui vivent dans les endroits où l’infection à différentes souches d’Ébola est fréquente[7]. Le but de ce vaccin est aussi de vacciner la majorité du personnel médical afin de protéger leur vie et contrôler la propagation de l’infection[12]. Tous les autres travailleurs dans le domaine de la santé et surtout les chercheurs se trouvant dans les laboratoires seront également vaccinés. On parlerait aussi de faire vacciner le personnel militaire[1].

Problématique

Plusieurs obstacles ont retardé le développement d'un vaccin efficace contre le virus Ébola.

Réservoir naturel

Le réservoir naturel du virus Ébola étant inconnu, il est plus difficile pour le système de santé publique d’en faire la prévention[5]. Il devient donc important de développer rapidement un système de protection. Cette problématique limite aussi les chercheurs à bien comprendre les spécificités pathogéniques associées à ce virus[4].

Personnel

Une autre problématique est qu’il faut recruter du personnel compétent et autorisé à diriger ce genre de recherches[12]. Comme le virus Ébola est un virus très dangereux, le risque pour les scientifiques d’en être infecté est assez élevé.

Laboratoire

Le niveau de risque associé au virus en question est très élevé. Il est donc important d’avoir un laboratoire très sécuritaire. Un laboratoire de niveau P4 est donc nécessaire pour ce type de virus[6]. D’autant plus qu’il n’existe qu’un nombre limité de ces installations à haut confinement possédant un personnel fiable, capable et autorisé à effectuer de telles recherches[2]. Le support industriel étant aussi très important dans ce type de recherches, les coûts engendrés sont plutôt élevés. La limitation est que ce vaccin est développé sans but d’en faire commerce[1]. Il y a donc beaucoup d’investissement à faire, sans entrée d’argent attendue.

Adénovirus

L’usage d’un adénovirus pour concevoir le vaccin est très intéressant et fonctionne bien sur les modèles rongeurs ou primates non-humains. En revanche, une partie de la population humaine possède une immunité innée contre ce type de virus[1]. Cela limite donc les possibilités en ce qui concerne les souches d’adénovirus. Un vaccin efficace peut donc être produit à partir d’un adénovirus canin ou autre, mais l’emploi d’un adénovirus humain ne constitue pas la meilleure stratégie d’immunisation.

Autres virus

Les virus étant simplement tués, soit inactivés, sont inefficaces dans ce type de vaccin, puisqu’ils engendrent une réponse d’anticorps uniquement. Les chercheurs ont démontré que nous avons besoin d’une réaction médiée par la production de cellules T qui génèrent une réponse immunitaire humorale assez forte pour empêcher et même éliminer l’infection[2]. Il faut donc utiliser un virus atténué pour générer ce type de protection.

Autres traitements

Il n’existe aucun traitement antiviral ni de prophylaxie contre le virus Ébola[5],[6]. Les traitements visent plutôt à diminuer les symptômes engendrés par ce virus et à améliorer la qualité de vie du patient. Les traitements symptomatiques sont administrés pour les cas graves qui doivent être réhydratés afin de maintenir les fonctions rénales et l’équilibre électrolytique. Ce traitement permet de mieux combattre l’infection et l’état de choc[13].

Espoirs

Avec ce vaccin on espère d’abord limiter la propagation de la maladie. Si cette immunisation fonctionne, la stratégie utilisée contre ce virus marquera une avancée importante dans le développement de la vaccination[14]. D’autres types de fièvres hémorragiques souvent mortelles, causées par des virus semblables au virus Ébola, demandent encore beaucoup de recherches comme le virus Marburg et le virus Lassa.

On espère que ce vaccin nous permettra de vacciner tout le personnel soignant et les gens ayant pu être exposés au virus. En vaccinant les personnes les plus à risques, on souhaite remarquer une sorte de barrière immunitaire autour d’eux et ainsi protéger la population entière[14].

Notes et références

  1. a, b, c, d et e Heinz Feldmann, Steven Jones, Hans-Dieter Klenk, Hans-Joachim Schnittler. Ebola virus: from discovery to vaccine. Nature Reviews (Immunology) Vol.3, août 2003 p. 677-685.
  2. a, b et c http://www.informationhospitaliere.com/actualite-11499-vaccin-virus-ebola.html
  3. a et b Lupton HW, Lambert RD, Bumgardner DL, Moe JB, Eddy GA. Inactivated vaccine for Ebola virus efficacious in guinea pig model. Lancet 1980;2:1294-1295
  4. a, b et c Ann Arbor, MI, Access excellence the national health museum. http://www.accessexcellence.org/WN/SUA11/ebola198.php
  5. a, b, c et d Sullivan N.J. et al. (2000) Developpement of a preventive vaccine for Ebola virus infection in primate. Nature : 605-609.DOI : 10.1038/35046108
  6. a, b, c, d, e et f Sylvain Baize, Vincent Deubel, médecine sciences, vol.19, no12, 2003, p. 1183-1184 Fièvre hémorragique à virus Ebola : un vaccin en dose unique efficace chez le primate/ Accelerate vaccination for Ebola hemorrhagic fever. http://id.erudit.org/iderudit/007389ar
  7. a, b, c, d et e Speakingofresearch.com/2010/05/21/a-shield-against-the-nigthmare-ebola-virus-vaccine-success/
  8. PLoS pathogens, Open Access Freely Available online. Newly Discovered Ebola Virus Associated with Hemorrhagic fever Outbreak in Uganda (2008) Vol.4, Issue 11, e10000212
  9. Ebola Hemorrhagic Fever Associated with Novel Virus Strain, Ouganda, 2007-2008. Emerging Infectious Disease Vol.16, No 7, 2010 p. 1087-1092
  10. Sara Klink, One Ebola Virus Vaccin Offers Protection for Three Viral Species (2010) Promega Connections. promega.wordpress.com/2010/06/02/one-ebola-virus-vaccine-for-three-species/
  11. LE Hensley et al. Demonstration of cross-protective vaccine immunity against an emerging pathogenic Ebolavirus species. PLOS Pathogens Online open-access publication (2010) DOI:10.1371/journal.ppat.1000904
  12. a et b Vaccine for Ebola virus. Society for General Microbiology. (2008) www.eurekalert.org/pub_releases/2008-03/sfgm-vfe032808.php#
  13. www.virus-ebola.com/traitements.shtml
  14. a et b USA Today (Society for the Advancement of Education) Possible cure for Ebola virus-Vaccines (fév.2004) findarticles.com/p/articles/mi_m1272/is_2705_132/ai_113302299/

Voir aussi

Articles connexes


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