- Bataille De Nicopolis
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Bataille de Nicopolis
Bataille de Nicopolis
Jean Froissart, Chroniques Flandre, Bruges, XVe s. (Bibliothèque nationale de France) Informations générales Date 25 septembre 1396 Lieu Nicopolis (Bulgarie) Issue Victoire décisive des Ottomans Belligérants Empire ottoman
SerbieHongrie
France
ValachieCommandants Bayezid Ier
Stefan LazarevicSigismond de Luxembourg
Jean sans PeurForces en présence environ 12 000 hommes[1] environ 20 000 hommes[1] Conquête ottomane des Balkans La Bataille de Nicopolis a lieu le 25 septembre 1396 (certains la datent du 28) sur la rive droite (sud) du Danube (aujourd'hui Nikopol en Bulgarie). Le sultan ottoman Bayezid Ier (Bajazet en français), fils de Mourad Ier) et le prince Stefan Lazarevic de Serbie[2] battent une croisade menée par Sigismond de Luxembourg, roi de Hongrie.
Sommaire
Contexte
La bataille constitue un des tournants de la conquête des Balkans par les armées de l’Empire Ottoman. Alors que les Paléologues rivalisent avec les Cantacuzènes pour le pouvoir à Constantinople, ces derniers demandent par deux fois - en 1346 et en 1352 – l’aide de l’armée ottomane pour combattre leurs rivaux. Lors de sa dernière intervention, cette armée, au lieu de franchir de nouveau le Bosphore, décide de s’installer en Thrace. Les Ottomans conquièrent la Thrace et asservissent la Bulgarie et la Serbie.
Le basileus Manuel II Paléologue et le roi de Hongrie Sigismond Ier, relayés par le pape Boniface IX, demandent l’organisation d’une croisade qui repousserait les forces ottomanes au-delà du Bosphore. La France et l’Angleterre, qui observent à cette époque une trêve dans les combats de la guerre de Cent Ans, répondent dans un premier temps à l’appel bien qu’en définitive seule la France envoie 10 000 soldats - dont 1 000 chevaliers et écuyers - auxquels viennent s’ajouter des troupes d'Allemands, d’Alsaciens, de Tchèques, de Transylvains et de Valaques, ainsi que des Chevaliers Teutoniques menés par leur Grand Prieur Frédéric de Hohenzollern.
Principaux chefs de guerre chrétiens
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- Jean sans Peur, comte de Nevers, fils de Philippe II de Bourgogne, commandant de l'ost français,
- Sigismond Ier de Luxembourg, roi de Hongrie,
- Jacques II de Bourbon, comte de la Marche, comte de Castres
- Jean de Vienne, amiral de France,
- Jean II Le Meingre, dit Boucicaut, maréchal de France,
- Philippe d'Artois, comte d'Eu, connétable de France,
- Guillaume des Bordes, porte-oriflamme de France,
- Enguerrand VII de Coucy
- Guy VI de la Trémoille
- Regnault de Roye, chambellan du roi,
- Philibert de Naillac, Grand-maître des Hospitaliers de Rhodes
- Nicolas de Gara, grand palatin de Hongrie,
- Mircea, prince de Valachie,
- Henri de Bar, gendre d'Enguerrand de Coucy...
Préparatifs de la bataille
Les armées alliées à la Hongrie établissent leur jonction à Bud (Buda) en juillet.
Sigismond propose aux chefs chrétiens une stratégie plutôt défensive, conseillant d'attendre l'armée de Bayezid plutôt que de se porter au devant des troupes ottomanes. Toutefois cette stratégie est rejetée, lors du discours d'Enguerrand de Coucy, porte-parole des chevaliers français. « pour conquérir toute la Turquie, et pour aller en l'Empire de Perse... »
Sur leur route vers Nicopolis, les croisés capturent Vidin, puis prennent la ville de Rachova (Oryahovo en Bulgarie) dont une partie des habitants est gardée en otage, contre l'avis de Sigismond. Cet épisode marque le début d'une méfiance entre hongrois et français qui durera pendant toute la croisade.
Les croisés sont alors accusés de pillage et de maltraitance en traversant les territoires musulmans. Toutefois, il faut garder à l'esprit que les chroniqueurs de l'époque recherchaient une raison à l'échec de la croisade, en blâmant l'immoralité des croisés. Leurs affirmations sont impossibles à vérifier, et donc sujettes à caution.
Les croisés continuent vers Nicopolis, prenant quelques places, mais délaissant une citadelle d'où partiront des messagers pour prévenir le sultan turc Bayezid de l'arrivée de l'armée chrétienne.
Le siège
Nicopolis est une cité fort bien défendue par des tours et de fortes murailles et les croisés n'ont apporté aucun engin de siège. Après avoir tenté quelques échelades, sans succès, et échoué dans une tentative de sape, il apparaît que la cité ne pourra être prise par la famine qu'après un long siège.
Ainsi qu'ils l'avaient déjà fait pendant leur voyage, les nobles de l'armée chrétienne s'installent dans un faste confortable, profitant de la vie pendant que dure le siège. Ceux-cis pensent que le sultan Bayezid se trouve loin, peut-être même de l'autre côté du Bosphore. La suffisance du commandement est telle qu'ils négligent d'organiser des missions de reconnaissances. Ce sont donc les fourrageurs, chargés de rapporter du foin pour les chevaux, qui les premiers signalent des opérations de l'armée ottomane. Ces premiers rapports sont même négligés, notamment par Boucicaut, craignant que la nouvelle ne démoralise les croisés [3].
En réalité, le sultan assiège Constantinople et est en mesure d'accourir au secours de Nicopolis dès l'annonce de son siège. Les Ottomans sont d'autant mieux renseignés que le duc de Milan Gian Galeazzo Visconti les a informés des mouvement de l'armée chrétienne[4].
Sigismond finit par envoyer le comte Jean de Maroth en reconnaissance; ce dernier confirme à son retour que l'armée de Bayezid opère près de Tirnovo, à une centaine de kilomètre du camp croisé. La nouvelle est apprise des habitants de Nicopolis, qui la célèbrent dans la joie. Malgré cela, le commandement chrétien reste persuadé que le sultan n'attaquera pas.
L'un des rares chefs croisés à se préoccuper de reconnaissance est Coucy. Il organise une sortie avec 500 archers et cavaliers, afin de prendre au piège une colonne de l'armée turque, fraichement repérée. L'embuscade a lieu dans un défilé, et la petite armée de Coucy obtient une victoire écrasante, annihilant la colonne turque.
Cette bataille sort enfin les croisés de leur léthargie, en admiration devant l'audace et la réussite des chevaliers français. Toutefois, cette victoire attise la jalousie entre les chefs Français, D'Eu n'ayant pas participé à la bataille, et accusant Coucy d'avoir risqué la vie des hommes de son expédition. Cette rivalité deviendra une des grandes causes de la défaite finale.
La bataille
A l'annonce de l'arrivée de l'armée turque, les croisés s'affolent et se préparent en toute hate. Certains sont encore en train de dîner, d'autres sont saouls, et la confusion voire la panique s'installe dans plusieurs unités. A ce moment, les prisonniers de Rachowa sont tous exécutés. Cet acte de barbarie est dénoncé jusqu'en Europe occidentale [5].
Jean de Nevers et les chevaliers français ont exigé de constituer l'avant-garde de l'armée chrétienne, par fierté, et ceci contre l'avis du commandement hongrois et valaque, pourtant plus familier des stratégies turques pour les avoir affrontées sur les champs de bataille. Sigismond alors divise ses troupes en trois parties: Nicolas de Gara au centre, à la tête des troupes hongroises, allemandes, tchèques, alsaciennes et flamandes ainsi que les Chevaliers Teutoniques; le flanc droit de cette armée, les Transylvains menés par Stefan Lazkovitch et les Valaques sur le flanc gauche. Sigismond commande directement la réserve.
En face, Bayezid aligne son avant-garde composée d'archers à pied (azab) et de janissaires, qui masque le champ de pieux destiné à briser l'assaut de la cavalerie adverse. Le gros de l'armée ottomane, en particulier sa cavalerie (archers ou akindji et spahis), et de ses alliés serbes reste caché derrière les collines.
La première charge de la chevalerie française se heurte à la présence des pieux et doit poursuivre le combat sans ses chevaux. Les chevaliers, cuirassés dans leurs harnois, résistent aux volées de flèches de l'archerie ottomane et enfonce l'infanterie adverse. Les Ottomans comptent de très nombreuses victimes et la chevalerie française entend pousser son avantage, attaque et défait la cavalerie ottomane qui fuit vers l'arrière-garde.
Bien que toujours à pied, les chevaliers poursuivent les fuyards en direction des collines et finissent par tomber sur le gros de l'armée de Bayezid. Ils sont écrasés par le nombre; de nombreux chevaliers sont tués - dont Jean de Vienne - et les principaux chefs de guerre français sont capturés - Jean de Nevers, Enguerrand de Coucy, Boucicaut, Philippe d'Artois...
Voyant l'ost français en difficultés[6], Sigismond tente de rétablir l'équilibre avec l'infanterie restante. Toutefois l'entrée en jeu de la cavalerie lourde serbe de Stefan Lazarevic fait pencher la balance en faveur des Ottomans et Sigismond, comprenant que l'issue de la bataille ne fait plus de doute, choisit d'éviter la captivité et prend la fuite sur un vaisseau de la flotte vénitienne.
La bataille est terminée et l'ost des croisés capitule.
Après la bataille, bilan
En représaille de l'exécution des mille otages de Rachova et des lourdes pertes que son armée a dû essuyer dans cette bataille, Bayezid fait massacrer la plupart des prisonniers croisés, soit environ trois mille. Seuls les plus fortunés sont épargnés et réduits en esclavage dans l'attente du paiement de rançons très élevées : par exemple, le duc Philippe II de Bourgogne doit payer la somme astronomique de 100 000 florins pour la libération de son fils Jean de Nevers. La somme réclamée par Bayezid pour la libération de ses 24 prisonniers de marque aurait atteint 200 000 ducats. Certains chevaliers français, tels Philippe d'Artois ou Enguerrand de Coucy meurent néanmoins en captivité ou sur le chemin du retour.
Dans les cours française et bourguignonne, au delà de la consternation née lorsque la nouvelle de la défaite arrive par un chevalier picard du nom de Jacques de Helly, on fête le retour des chevaliers rançonnés comme de véritables héros et on s'empresse d'imputer la débacle à Sigismond ou à la lâcheté de certains alliés qui auraient fui le combat - les Valaques ou les Transylvains... Pour sa part, Sigismond n'a guère à souffrir de la défaite de la croisade qu'il avait appelé de ses vœux puisqu'il sera élu empereur romain germanique en 1433.
La défaite de Nicopolis marque la fin des croisades pour l'Europe Occidentale. Les combats continuent à l'ouest - jusqu'à la complète libération de la Péninsule ibérique - et en Méditerranée mais les nations des Balkans doivent désormais compter sur leur propres forces pour arrêter la conquête ottomane, avec les conséquences que l'on connaît: la chute de Constantinople un demi-siècle plus tard et la présence de l'Empire Ottoman dans les Balkans jusqu'au début du XXe siècle...
Notes et références
- ↑ a et b Certains chroniqueurs ont largement exagéré l'importance des forces en présence. Les historiens Hans Delbruck (History of the Art of War, T3, Madieval Warfare, 1983) ou Ferdinand Lot (L'art militaire et les Armées au Moyen-Age en Europe et dans le Proche Orient, T2, Paris, 1946) ont émis des hypothèse beaucoup plus vraisemblables, compte tenu, de la topographie des lieux et de la diversité des témoignages. Le général Radu Rosetti, après avoir visité les lieux, limite l'ost croisé à quelques 9 000 à 16 000 hommes, et les troupes ottomanes à environ 10 000 à 20 000 combattants (Considérations sur quelques effectifs d'armées)
- ↑ Vassal du sultan depuis la bataille de Kossovo (1339)
- ↑ Chronique du Religieux de Saint Denys
- ↑ D'après Froissart, la trahison du duc de Milan fut motivée par la volonté de faire payer à la France son opposition à ses visées sur Gênes. D'autres sources évoquent un courrier du duc au basileus, contenant des informations sur les troupes chrétiennes et intercepté par Bayezid
- ↑ Tuchman, 558-559
- ↑ Selon Froissart, Sigismond se serait alors adressé en ces termes à Philibert de Naillac: « Nous perdrons huy la journée par le grant orgueil et beubant de ces François; et, se ils m'euissent creu, nous avions gens a plenté pour combatre nos ennemis »
Bibliographie
- Aziz S. Atiya, The Crusades in the Later Middle Ages. New York, 1965.
- Aziz S. Atiya, The Crusade of Nicopolis. New York, 1978.
- Norman Housley, ed., Documents on the Later Crusades, 1274-1580. New York, 1996.
- Jonathan Riley-Smith, The Oxford History of the Crusades. Oxford, 1995.
- Jean Froissart, Chroniques - Livre IV, 1389-1400.
- Pierre Naudin, Cycle Gui de Clairbois IV - Les chemins de la honte 1 & 2, Aubéron 2000 & 2001
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