Achille Tondu

Achille Tondu

Achille Tondu, astronome de l’Observatoire de Paris sous Cassini IV puis à la Cour de Turquie à Constantinople près laquelle il avait été placé à la demande de Halil Hamid Pasha (en) par Mr de Choiseul-Gouffier, l’ambassadeur de France auprès de la Sublime Porte, est né le 18 avril 1760 à Noyon et mort en 1787 à Constantinople.

Sommaire

Jeunesse

Achille Tondu est un frère cadet de Pierre Hélène Tondu, dit Lebrun, le journaliste, homme politique et Ministre des Affaires Etrangères du premier gouvernement de la République Française rassemblé autour de Danton à la suite de la journée du 10 août 1792.

Fils de Christophe-Pierre Tondu, un bourgeois aisé de Noyon, marguillier de la paroisse Saint Martin de cette ville, et détenteur de divers offices, et d'Elisabeth-Rosalie Lebrun[1],il est né le 18 avril 1760 à Noyon, où il a été baptisé paroisse Sainte-Madeleine sous les prénoms de Georges Achille.

Il rejoint son aîné au collège Louis-le-Grand, à Paris, comme lui grâce à l'une des bourses d'études dite du collège d'Inville administrées conjointement par les chanoines de leur ville de Noyon et ceux de la ville d'Arras (ce type de fonctionnement , très courant au XVIIIème siècle, était la base de l'organisation des grandes institutions éducatives, d'ailleurs la plupart du temps tenue par des religieux, tels les Jésuites à Louis le Grand). Camille Desmoulins, également boursier au titre d’un autre « collège », de Laon (Ain), et qui a exactement son âge y sera son condisciple[2]. Achille y démontre à l’égal de son aîné un talent certain pour les disciplines scientifiques.

Les difficultés financières importantes de leur père à conduit son frère, plus âgé de six ans, qui a excellé dans les matières scientifiques à Louis-le-Grand où il avait même entamé une carrière d’enseignant, à solliciter en 1777 une position de pensionnaire à l'Observatoire de Paris, dont les conditions de fonctionnement sous Cassini, quatrième du nom, sont en ces années plutôt misérables. Achille l'y rejoint en 1778[3], il est alors tout juste âgé de 18 ans, et il ne peut guère être au mieux que l’assistant de son frère[4], tous deux y partagent très probablement la petite chambre attribuée à ce dernier, dite « salle de veille » qui jouxte le deuxième cabinet d'observations [5]

Carrière d’astronome

Achille fait ses classes d’astronome par de longs et minutieux relevés des tâches solaires tout au long de 1778[6].

Début 1779, son frère abandonne son état de clerc et quitte l'Observatoire de Paris pour un itinéraire de rupture qui le mènera dans un premier temps à dix années d’exil à Liège. Achille reste auprès de Pierre Méchain, pour le compte duquel il partira en mission d'observations et de mesures dans les Antilles sans doute dès 1782 : il est détaché auprès de l’intendant de Guadeloupe Mr Foulquier[7], qui se flatte d’astronomie et a souhaité créer un office d’astronome pour animer ce qu’il qualifie pompeusement d’ « observatoire »[8]. Il y est en tout cas en 1783, année où il réalise des observations des satellites de Jupiter et d’une éclipse de lune[9] et des mesures des marées[10].

Il rentre en France fin 1783 ou début 1784, selon les sources en raison de problèmes de santé, mais ses lettres de 1784 ne font aucune allusion à cette raison.

En 1784, Mr de Choiseul-Gouffier prépare son départ pour Istanbul, où il vient d’être nommé ambassadeur. La capacité de la Sublime Porte à détourner l’attention de l’Empire austro-allemand d’ambitions en Flandre est un élément central de la stratégie de politique étrangère de Mr de Vergennes, qui règne sur ce ministère depuis de longues années. La France aide l’empire Ottoman à se moderniser et soutient vivement son vizir, Halil-Pacha[11], un réformateur conscient du retard des Turcs en matière d’armements, de technologie et qui se pique d’intérêt pour les sciences en général. Pour flatter Halil-Pacha, qui avait formé une école d'artillerie et de génie , pour laquelle on traduisait les livres élémentaires des écoles d’ingénieurs de France[12], et le vice-amiral Capitan-Bey[13], qui avait des instruments d’observations astronomiques et qui avait fait traduire l’Abrégé d'astronomie de Lalande[12], Mr de Choiseul-Gouffier cherche donc à s’entourer de scientifiques. Faute de pouvoir décider l’un des astronomes titulaires de l’Observatoire, il se résigne à examiner le jeune Achille Tondu que lui recommande Méchain. Achille Tondu à qui son expédition aux Antilles a donné le goût des lointains exotiques y trouve aussi, peut-être surtout, une possibilité d’amélioration substantielle de ses conditions matérielles, la rétribution de leurs aides par les astronomes de Cassini étant misérable, alors qu’il doit soutenir une sœur encore célibataire[14], et sans doute aussi sa mère, alors que son frère ainé, devenu journaliste par conviction libertaire, tire le diable par la queue à Liège.

De 1785 à 1787, il procède à des mesures de longitude qu’il transmet à l’Observatoire, notamment en 1785 à Tarapia (pour l’étoile "phi" du Sagittaire), aux Dardanelles et à Smyrne, il réalise des chronométrages de plusieurs occultations faits aussi par ailleurs a Paris, objet de calculs par Mechain. Achille Tondu semble s’être attiré les faveurs de Halil-Pacha au-delà de toutes les espérances de Mr de Choiseul-Gouffier. Très vite, dès début 1785, Halil-Pacha demande à l’ambassadeur de lui céder son jeune astronome à qui il compte donner des responsabilités pour son propre compte, une opportunité inespérée pour Achille Tondu. Halil-Pacha en fera un professeur titulaire d’hydrologie à l’Université d’Empire d’Istanbul[15]. Achille Tondu hésitera avant d’accepter, se demandant quel rôle l’ambassadeur entend vraiment lui faire jouer.

Il meurt en 1787, dans des circonstances qui restent à documenter. Notons toutefois que le vizir Halil Pacha avait été exécuté en 1785 pour conspiration en faveur du futur sultan Selim III et le vice-amiral Capitan-Bey non dénommé, avec lequel il était très probablement en relations proches avait été décapité en octobre 1787 selon Lalande[12].

Travaux scientifiques

Les circonstances et la brièveté de sa vie (il meurt à tout juste 27 ans) n’ont guère permis à Achille Tondu de laisser son nom dans l’Histoire de l’astronomie par quelque découverte retentissante ; il semble toutefois avoir joui d’une excellente réputation dans le petit cercle des astronomes européens, une poignée de chercheurs passionnés, souvent dénués de moyens, et tributaires de mécénats, qui échangent leurs précieuses et difficiles mesures et s’efforcent notamment de préciser les questions de longitude, de distances et de forme de la Terre par l’analyse de mesures d’un même phénomène en des endroits différents (« occultations » d’astres, éclipses…).

La disparition d'Achille Tondu est ainsi déplorée par Jérôme Lalande en 1794[16] Ses calculs de longitude pour différentes villes de la côte de l’Hellespont et de la mer Noire seront jugés plusieurs décennies plus tard d’excellente qualité. Dès 1785, Cassini l’aurait envisagé pour tenir l’un des trois postes « d’élève-astronome » dont il venait d’obtenir la création[15]; il est très probable qu’Achille Tondu aurait accepté avec enthousiasme, il est tout aussi probable que Mr de Choiseul-Gouffier s’y soit opposé pour ne pas indisposer Halil Pacha. Achille Tondu déclinera la proposition par une lettre datée du 26 février 1785 à Constantinople

Notes et références

  1. François Moureau, Anne-Marie Chouillet, Jean Balcou, Dictionnaire des journalistes (1600-1789): supplément, Centre de recherche sur les sensibilités, Université des langues et lettres de Grenoble, 1984, 212 pages, pp. 106-107 (ISBN 290270934X).
  2. « Mémoires « authentiques » de Maximilien de Robespierre »Par Charles Reybaud
  3. son nom apparaît pour la première fois le 9 avril 1778 dans le Journal des Observations de Mr Cassini, "Histoire de l'Observatoire de Paris de sa fondation a 1793" de Charles Wolf 1902, chez Gauthier-Villars- Page 244
  4. Journal des sciences, des lettres et des arts: Histoire de l'Astronomie en 1794, par Jérôme Lalande, édité par Millin, Noël et Warins, tome premier, imprimerie du magasin encyclopédique, rue St Honoré n°94 l'an troisième (1795) ; Lalande y précise que Achille Tondu avait été formé à l’astronomie par son frère aîné
  5. Charles Wolf, "Histoire de l'Observatoire de Paris de sa fondation à 1793", 1902, chez Gauthier-Villars, p93, p243, p369-372, p384.
  6. archives des cahiers de mesures de l’Observatoire de Paris, 1778, Achille Tondu
  7. Joseph-François Foulquier (1745-1789), a fait ses études à l'école militaire de Sorèze,conseiller au Parlement de Toulouse, intendant de la Guadeloupe puis de la Martinique, graveur, selon l'article Sorèze
  8. selon une mention des Annales, Volume 2- Page A-10 Université de Toulouse. Observatoire astronomique, magnétique et météorologique de Toulouse - 1886.
  9. Sur les traces des Cassini: astronomes et observatoires du sud de la France par Paul Brouzeng, Suzanne Débarbat p193, lettre de Mr Fouquier datée du 11 octobre 1783
  10. Tondu. Observations de la Marée faites en 1783 à la Basse Terre de Guadeloupe. Archives de l'Académie des. Sciences, pochette de Séance du 09/06/1784
  11. Halil Hamid Pasha,grand vizir du 31 décembre 1782 au 30 avril 1785, voir Liste des grands vizirs ottomans et Halil Hamid Pasha (en)
  12. a, b et c Journal des sciences, des lettres et des arts par Millin, Noel et Warins, tome premier, imprimerie du magasin encyclopédique, rue St Honore n°94 l'an troisième (1795)- Histoire de l'Astronomie en 1794, par Jérôme Lalande
  13. il s'agit d'un titre donné au commandant de la flotte; Lalande ne donne pas son nom
  14. lettre à Cassini
  15. a et b The Vicissitudes of a Scientific Institution - a Decade of Change at the Paris Observatory, by S.L.Chapin, S. L, JOURN. HISTORY OF ASTRONOMY V.21, NO. 3/AUG, P.239, 1990
  16. Journal des sciences, des lettres et des arts par Millin, Noel et Warins, tome premier, imprimerie du magasin encyclopédique, rue St Honore n°94 l'an troisieme (1795)- Histoire de l'Astronomie en 1794, par Jerome Lalande

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