- Église mariavite
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L'Église mariavite est une Église dite « catholique » et chrétienne indépendante qui est née d'un schisme dans l'Église catholique de Pologne au début du XXe siècle. Au début, il s'agissait d'un mouvement intérieur visant à une réforme du clergé polonais, mais après un conflit avec des évêques polonais elle est devenue une Église séparée et indépendante qui compte actuellement suivant ses chiffres plus de 35 000 fidèles en Pologne et 5 000 familles en France[1].
L'Église mariavite est un des mouvements religieux qui se sont développés en Pologne ou parmi des communautés polonaises à l'étranger. L'autre exemple est l'Église catholique nationale polonaise fondée aux États-Unis. Les raisons qui ont conduit à l'établissement de ces deux Églises sont différentes. Les dirigeants de l'Église nationale polonaise se sont battus pour l’égalité de traitement des immigrants polonais dans l'Église catholique des États-Unis qui était à cette époque entre les mains des Irlandais et des Allemands. Les dirigeants du mouvement mariavite visaient à une réforme spirituelle du clergé et des communautés catholiques en Pologne, pays qui était alors divisé entre trois États (voir : Partitions de la Pologne). Bien qu'au commencement l'Église mariavite n'eût rien à voir avec le protestantisme, certains à présent décèleraient entre eux quelques points communs, ils seront plus amplement discutés ci-dessous.
Histoire
Situation de l’Église catholique en Pologne sous l’Empire russe
L'histoire du mouvement mariavite remonte à la deuxième moitié du XIXe siècle. En 1887, Feliksa Kozłowska fonda un ordre religieux de femmes selon la Règle de sainte Claire, ordre qui plus tard fut appelé l'Ordre des Sœurs mariavites, mais au début ce n'était qu'une communauté religieuse catholique parmi bien d'autres. Feliksa était auparavant (1883) entrée dans un autre ordre catholique créé par un frère capucin, le bienheureux Honorat Koźmiński. Toutes ces organisations religieuses étaient illégales selon les lois de l'Empire russe. C'est dans cette partie de la Pologne, divisée entre les trois pays voisins, que la situation de l'Église catholique était la plus mauvaise. Après le Soulèvement de janvier 1863 les autorités impériales avaient interdit l'établissement d'organisations nationales polonaises, y compris dans le domaine religieux. Beaucoup de couvents avaient été dissous. Le clergé catholique en secteur russe n'avait pas une bonne instruction, contrairement aux prêtres des secteurs autrichien et prussien. L'unique université de théologie était à Saint-Pétersbourg. On critiquait souvent les prêtres pour leur conduite et on leur reprochait d'exploiter les paysans. C'est dans cette situation difficile qu'est apparu le mouvement mariavite.
Révélation de Feliksa Kozłowska - 1893-1903
En 1893 Feliksa Kozłowska, en religion sœur Maria Franciszka, reçut sa première révélation. On donne la date du 2 août 1893 comme celle de la fondation du nouveau mouvement religieux du « mariavitisme », qui devait par la suite devenir une Église séparée et indépendante. Le nom de « mariavite » vient des mots latins : Mariae vitam (imitans) - ([celui qui imite] la vie de Marie). Plusieurs visions de sœur Maria Franciszka entre 1893 et 1918 furent recueillies en 1922 dans le volume intitulé Dzieło Wielkiego Miłosierdzia - (L'Œuvre de la Grande Miséricorde), qui est la source religieuse la plus importante pour les mariavites à côté de la Bible. Dans sa révélation la fondatrice reçut l'ordre de se battre contre le déclin moral du monde, particulièrement contre les péchés du clergé. Sa première vision lui ordonna d'organiser un ordre des prêtres, les mariavites, qui chercherait à promouvoir le renouvellement de la vie spirituelle du clergé. Le but le plus important était d'étendre l'adoration perpétuelle du Très Saint Sacrement et le culte de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Dans leur vie quotidienne ils revenaient à la tradition franciscaine d'une vie ascétique - jeûnes, modestie et simplicité dans les vêtements et dans la vie. Ils recommandaient aux fidèles la confession fréquente et la communion. Il faut souligner que ces prêtres constituaient l'élite du clergé polonais de ce temps-là - il s'agissait des jeunes prêtres qui avaient terminé leurs études de théologie à l'Université de théologie de Saint-Pétersbourg; c'étaient souvent des professeurs et chargés de cours dans les séminaires et occupaient des fonctions comme supérieurs de séminaire ou comme fonctionnaires de chancellerie épiscopale.
Tentatives pour légaliser le mouvement - 1903-1906
Pour sœur Maria Franciszka et les prêtres mariavites, le mouvement qui venait de se créer devait être le moyen de fonder une mission intérieure destinée à réformer l'Église. On ne se proposait pas de créer une Église différente. Les évêques polonais préféraient ignorer les activités des mariavites, surtout par crainte des autorités russes. Jusqu'à 1903, l'existence du mouvement n'a pas été officiellement reconnue par les autorités catholiques dans la Pologne divisée et occupée. C'est cette année-là que les provinciaux de l'ordre des mariavites décidèrent de présenter les textes des révélations et l'histoire du mouvement aux évêques de trois diocèses concernés : Płock (où sœur Maria Franciszka vivait), Varsovie et Lublin. Les deux derniers refusèrent d'accepter ces documents. Seul l'évêque de Płock, craignant un développement rapide et anarchique du mouvement, les accepta et commença le processus canonique. Les chefs du mouvement furent interrogés et les documents envoyés au Saint-Siège. Un mois plus tard, la délégation de mariavites se rendit à Rome pour convaincre le pape de reconnaître l'ordre. Ils durent attendre le conclave et l'élection d'un nouveau pontife. Pendant ce temps, ils choisirent comme Minister Generalis (Ministre Général) de l'ordre, Jan Maria Michał Kowalski, qui était alors la personne la plus en vue dans le mouvement. Finalement, après deux semaines d'attente, ils présentèrent leur requête au Pape Pie X.
En juin 1904 une deuxième délégation se rendit à Rome pour convaincre la Curie romaine de l'importance de leur mission. Le pape les bénit à nouveau et leur promit une suite favorable. La décision finale fut prise par la Congrégation du Saint-Office, devenue la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. La décision, prise en août, un mois après l'audience du pape fut annoncée en décembre 1904, et stupéfia la communauté mariavite : les révélations de Feliksa Kozłowska étaient écartées comme de simples « hallucinations ». Le mouvement était dissout et tout contact était interdit entre les prêtres et la fondatrice. Tous les historiens actuels reconnaissent que c'est la hiérarchie polonaise à son sommet qui a joué le rôle le plus important pour aboutir à une telle décision, car elle était très hostile au mouvement mariavite. L'évêque de Płock s'était rendu à Rome peu avant la décision du Saint Office. Après cette annonce deux autres délégations mariavites furent envoyées au Vatican. La première, avec le prêtre mariavite Skolimowski, demanda au pape de permettre aux mariavites de se réunir une fois par mois pour leurs exercices spirituels. La deuxième délégation qui représentait le « peuple mariavite », (c'est-à-dire les paysans des paroisses où les prêtres étaient mariavites) fit l’éloge du clergé mariavite en se plaignant du clergé ordinaire qui se souciait si peu des pauvres.
Avec le temps l'attitude des mariavites changea. Au lieu d'obéir aux recommandations du Saint-Siège ils se rebellèrent contre elles. Feliksa se résigna à couper tout contact avec les autres religieuses et les prêtres et elle se plia à toutes les décisions des évêques et du pape. Mais la patience des mariavites était à bout. Ils ne pouvaient pas cacher qu'ils avaient perdu toute confiance après tant de promesses qui n'avaient abouti à rien. Ils reprochaient à juste titre aux évêques polonais l'échec de leurs démarches au Vatican et comprenaient qu'ils ne pouvaient rien pour réformer la structure de l'Église. En février 1906, ils informèrent le Saint-Siège qu'ils se séparaient de leurs évêques, parce qu'ils s'estimaient persécutés par eux. Réprimandés par le pape qui les reçut ils promirent de se soumettre, mais de fait leur situation resta imprécise pendant longtemps. D'une part ils gardaient l'espoir que leur cause finirait par aboutir à Rome ; d'autre part les autorités catholiques du pays commençaient à mettre en œuvre la décision du Saint-Office. Comme le conflit avec les évêques s'aggravait, les prêtres mariavites décidèrent de se séparer de la structure religieuse en Pologne, mais ils espéraient toujours une décision de Vatican constatant que les évêques en Pologne avaient eu tort de soutenir les prêtres corrompus. Pour la première fois l'évêque de Płock les appela hérétiques, quoique le Vatican n'eût pas encore prononcé une telle condamnation. Ce fut le commencement d'un grand nombre d'actions contre les mariavites avec des moqueries contre eux et leur fondatrice Kozłowska, sans parler de violences plus grandes. Un grand nombre de leurs prêtres furent suspendus. Néanmoins nombre de partisans décidèrent de les soutenir, se séparant ainsi de la structure catholique. Les mariavites s'arrangeaient d'ailleurs pour renouer des contacts fréquents entre eux.
Dans leur dernière lettre à l'archevêque de Varsovie, en mars 1906, les mariavites demandèrent l'annulation de toutes les décisions qui avaient été prises contre eux. Mais la réponse finale de Rome fut « Non ». En avril 1906, le pape Pie X prépara l'encyclique Tribus circiter (il y a environ trois ans) où il approuvait la décision du Saint-Office. Il critiquait sévèrement Feliksa Kozłowska et l'attitude des prêtres envers elle, voyant qu'ils la traitaient comme une sainte et presque à l'égal de Notre-Dame. Cette position du Saint-Siège fut une nouvelle déception pour les mariavites. Cette fois-ci ils décidèrent de persister dans leur avis et ne pas obéir au pape. En décembre 1906, Feliksa Maria Franciszka Kozłowska et Jan Maria Michel Kowalski furent excommuniés. Tous leurs disciples, prêtres et fidèles, furent condamnés et ne furent plus considérés comme des membres de l'Église romaine. De toute l'histoire de l'Église, Kozłowska a été la première femme à avoir été personnellement excommuniée par le Saint-Siège (par opposition aux femmes qui auparavant ne l'avaient été que pour leur adhésion à des groupes déclarés hérétiques).
L'Église mariavite - Première période (1906-1921)
Le mouvement fut légalisé par les autorités russes en tant que « secte tolérée » en novembre 1906, alors que le conflit avec la hiérarchie catholique était à son comble. Six ans plus tard elle a été officiellement reconnue comme une Église particulière et indépendante. En 1906, on comptait de cinquante à soixante mille mariavites regroupés en seize paroisses. Cinq ans plus tard, des sources historiques font état de 160 mille partisans. Cela montre la grande popularité à l'époque d'un mouvement qui n'avait aucun précédent dans l'histoire de l'Église catholique en Pologne. Cette conversion massive était aussi le résultat paradoxal de la politique des évêques qui, par mesure disciplinaire, avaient exilé beaucoup de mariavites comme curés de campagne, leur permettant ainsi de se créer beaucoup de partisans, ce qu'ils n'auraient pu faire s'ils étaient demeurés professeurs ou directeurs de séminaires, ou fonctionnaires à l'évêché, restant ainsi dans les centres urbains. C'est la raison pour laquelle l'Église mariavite a pu tellement se répandre dans une grande partie de la Pologne et possède de nombreux centres, créant des îles mariavites au sein d'une mer catholique.
L'organisation de l'Église mariavite donne à chaque membre le droit de parler des problèmes de la communauté comme dans les communautés protestantes. Les mariavites ne s'occupèrent pas seulement de questions religieuses, mais ils étendirent leurs activités à la culture, à l'éducation et aux œuvres sociales. Ils eurent bientôt leurs propres écoles, leurs jardins d'enfants, leurs bibliothèques, leurs magasins, leurs maisons d'édition, leurs restaurants et leurs asiles pour les pauvres, leurs orphelinats et leurs ateliers. Très rapidement ils construisirent un grand nombre de nouveaux lieux de culte, ce qui accrut les soupçons et l'hostilité de l'Église romaine. En 1911, ils achevèrent leur église principale à Płock, qu'ils appelèrent le Sanctuaire de la Pitié et de la Charité. Ils achetèrent aussi 5 km² de terrain près de Płock qu'ils appelèrent Felicjanów d'après le nom de Feliksa Kozłowska. Une autre chose qui les rapprocha de la tradition protestante fut le choix de la langue locale comme langue liturgique, ici le polonais depuis 1906. Séparés de l'Église catholique, ils souhaitèrent se réintégrer dans la succession apostolique et avoir leur propre évêque légitime. Ils entrèrent en contact avec l'Église vieille-catholique d'Utrecht par l'entremise du général Kireïev. En 1909, le premier évêque mariavite reçut à Utrecht la consécration épiscopale. En 1919, ils adoptèrent officiellement le nom d'Église vieille-catholique des mariavites.
La mort de Feliksa Kozłowska en 1921 marqua la fin de la première époque du mouvement mariavite, quand le mouvement de réforme intérieur s'est transformé, involontairement au début, en création d'une Église nouvelle. Cette période fut pour les mariavites celle de leur plus grand succès, où ils développèrent pour leurs fidèles beaucoup d'activités. Cependant, graduellement le nombre des adhérents diminua et en 1921 il ne restait plus officiellement que 43 000 mariavites. Néanmoins, si l'on considère le nombre d'établissements qu'ils ont créés, les bâtiments qu'ils ont construits et les revues et les livres qu'ils ont publiés, c'est tout de même impressionnant.
Sous l'administration de l'archevêque Kowalski (1921-1935)
Après la mort de sa fondatrice l'Évêque Kowalski (plus tard il prit le titre d'archevêque) devint le chef de l'Église mariavite. Il était l'associé le plus proche de Kozłowska, qui jusqu'à sa mort exerça sur lui une forte influence. Le respect envers « Mateczka » passa à Kowalski et très rapidement il devint la seule et unique autorité sur les mariavites. Il introduisit dans son Église un grand nombre de changements, qui tendaient à la faire différer du catholicisme romain. Ses innovations relevaient – dans un sens très large – du modernisme théologique et dogmatique, mais elles suscitèrent de vives controverses, non seulement de la part des catholiques, mais chez les mariavites eux-mêmes. L'introduction des mariages entre prêtres et religieuses (1924) et le sacerdoce de femmes (1929) furent les points les plus discutés. Ces changements allèrent jusqu'à perturber les relations avec les Vieux-Catholiques. Dans les années 1920 et les années 1930 Kowalski chercha à établir un dialogue œcuménique avec d'autres Églises. Il proposa d'abord une union avec l'Église catholique polonaise nationale, ensuite il voulut approfondir les contacts avec l'Église orthodoxe et d'autres Églises de Tradition orientale. Au début des années 1930, il envoya même aux évêques catholiques des lettres où il proposait une réconciliation. Aucune de ces tentatives n'aboutit.
Après la crise de 1935
Avec ses partisans, l'archevêque Kowalski se retira de Płock à Felicjanów, village qui devint le quartier général de l'Église catholique des mariavites laquelle compte peut-être dans les 3 000 fidèles. L'archevêque Kowalski confirme toutes les décisions et introduit le culte public de Feliksa Kozłowska, la « Mateczka » (Petite Mère), l'« épouse du Christ » et la « nouvelle Rédemptrice du monde » ! Cette doctrine est fort éloignée du catholicisme apostolique et romain qui était la religion de la fondatrice et c'est un repli sur soi sectaire qui isole ces mariavites du mouvement œcuménique. L'archevêque Kowalski mourut à Dachau pendant la Seconde Guerre mondiale. Son successeur fut son épouse, la femme-évêque Izabela Wiłucka. Après 1946, le chef de cette Église a été l'évêque Józef Maria Rafael Wojciechowski, qui est mort en avril 2005 et auquel a succédé une femme-évêque Beatrycze Szulgowicz.
L'opposition menée par l'évêque Feldman a réuni la majorité des mariavites. Ils ont décidé d'abandonner la plupart des innovations de Kowalski et de revenir aux idées et aux règles qui existaient à l'origine et jusqu'à la mort de Kozłowska. Cette branche de l'Église mariavite est la plus importante et elle compte environ 25 000 adeptes en Pologne et 5 000 en France (surtout à Paris) ; contrairement à l'Église catholique en Europe, le clergé est encore jeune et les deux tiers des prêtres ont entre 25 et 45 ans[2]. L'Église vieille-catholique des mariavites s'est montrée très active dans le mouvement œcuménique de l'après-guerre. Avec d'autres Églises, elle a créé le Conseil Œcuménique Polonais et renoué des contacts avec d'autres Églises vieilles-catholiques.
Les relations entre les mariavites et les catholiques
Depuis les années 1970, on peut observer des efforts et un processus de réconciliation entre l'Église et les Vieux-Catholiques mariavites. Les évêques polonais se sont excusés des incompréhensions qui s'étaient produites au début du mouvement mariavite. Également leur attitude envers Kozłowska a changé et ils ont reconnu qu'elle était une femme profondément religieuse et d'une grande piété. En 1972 le jésuite Stanisław Bajko, secrétaire de la Commission épiscopale polonaise pour l'œcuménisme, a fait une étude théologique sur les révélations de Kozłowska et n'y a trouvé aucune trace de discordance avec la doctrine catholique. Les mariavites ont voulu aussi se servir du fait que le Saint-Siège a reconnu comme vraie la révélation de Faustyna Kowalska de la Grâce du Seigneur, ce qui est pour eux un signe évident que Dieu a adressé ce message aux hommes.
Le changement dans l'attitude de l'Église catholique polonaise est en relation avec les réformes de Vatican II. Devenue plus ouverte, l'Église a reconnu les fautes passées de certains de ses évêques. Quelques érudits soulignent que ce qui est arrivé avec le mouvement mariavite au début du XXe siècle n'aurait pas été possible après Vatican II, l'Église étant alors plus conservatrice qu'aujourd'hui. Les réformes ne pouvaient pas venir « d'en dessous », proposées par les croyants, les simples prêtres ou les religieuses, mais seulement d'en haut. C'était le pape qui seul pouvait entériner des réformes suggérées par la base, comme pour la communion des jeunes enfants sous Pie X, ou la réforme du chant liturgique. De plus la moindre critique contre les évêques ou le pape était considérée comme complètement inacceptable. Quiconque essayait au-dehors de faire quelque chose était considéré comme un orgueilleux et un rebelle. L'Église catholique ne voulait pas entendre parler d'un mouvement de réforme de l'Église venant de l'intérieur. Bien que de nos jours il soit difficile de comprendre beaucoup de décisions prises par la hiérarchie de l'Église catholique romaine dans la première décennie[réf. nécessaire] du XXe siècle, nous devrions aussi tenir compte de la situation en Pologne à cette époque. Les évêques étaient tenus en bride par les Russes. Et puis l'insuffisance du système éducatif du clergé et le sentiment d'insécurité qu'elle provoquait chez beaucoup de prêtres était également un facteur important dans l'hostilité qu'ont rencontrée les mariavites.
Nombreux sont les commentateurs qui expliquent l'attitude hostile envers le mouvement mariavite par le rôle joué par Feliksa Kozłowska. C'était la conséquence de la place qu'on assignait aux femmes dans la société d'alors où l'Église pensait que les femmes devaient être modestes et subordonnées aux hommes qui dirigeaient les fidèles. On considérait l'influence de Kozłowska comme trop grande; et pour cette raison elle était souvent victime d'attaques violentes (on l'appelait souvent l'incarnation du diable, comme dans l'article satirique de 1906 « Là où le diable ne peut pas aller, il enverra une femme »). Dès 1897 ses activités avaient commencé à être critiquées par l'évêque de Płock. On s'en prenait surtout au fait que de son vivant elle fut traitée par beaucoup de mariavites comme une sainte. Cette accusation n'est pas tout à fait sans fondement, car les mariavites la regardaient comme une personne très bonne et très pieuse, même avant la condamnation injustifiée du pape, mais une telle situation était loin d'être unique dans les annales du christianisme. Il est vrai aussi que sa biographie a été rédigée dans un style hagiographique par l'archevêque Kowalski, et qu'il a fini par l'appeler l'« incarnation de l'Esprit Saint sur terre ».
Les premières mesures contre le mouvement et son développement furent prises en 1903, après la présentation officielle de son existence. L'archevêque de Varsovie interdit en son sein l'observation de certaines dévotions pourtant tolérées par la tradition catholique, comme l'adoration du Saint-Sacrement et le culte de Notre-Dame du Perpétuel Secours ; on trouvait que ces dévotions y étaient célébrées de manière exagérée.
Après son apparition le mouvement fut bien vite la cible d'un grand nombre d'attaques. Les journaux publiaient des articles satiriques contre les mariavites et les chansonniers se moquaient d'eux. Il en résulta des actions violentes contre les églises et les chapelles mariavites. L'année la plus difficile fut 1906, quand par endroits on assista à certaines émeutes et que des mariavites même furent assassinés. Ces incidents étaient généralement liés à des problèmes de propriété, parce qu’en beaucoup d'endroits les prêtres mariavites avec l'appui de la majorité des fidèles des paroisses voulaient reprendre les églises, que souvent ils avaient construites eux-mêmes, mais qu'elles avaient été légalement confisquées au profit de l'Église catholique.
La situation de l'Église pendant l'entre-deux-guerres fut d'autant plus pénible que les catholiques étaient largement majoritaires en Pologne. Les mariavites étaient toujours victimes d'un grand nombre de préjugés. Il se produisit même de véritables « pogroms » contre eux. À cette époque les chefs de l'Église furent très souvent poursuivis en justice dans l'intention évidente de les discréditer comme organisation religieuse et dans l'espoir de les anéantir. L'archevêque Kowalski dut comparaître vingt fois ; entre autres il fut accusé de blasphèmes contre Dieu, la Bible, l'Église et les Sacrements, de trahison envers son pays, de socialisme, de communisme, de vol, de fraudes, de mensonges, etc. On lui reprocha même des abus sexuels qui auraient eu lieu dans le couvent de Płock. En 1931, il fut arrêté et resta en prison un peu plus d'un mois, sur la base du concordat entre la Pologne et Rome, qui interdisait aux prêtres catholiques de se marier, leur mariage étant considéré comme un « outrage aux bonnes mœurs » et une condamnation à une peine de prison étant prévue. Les autorités catholiques utilisèrent cet article du code pour porter plainte contre lui et le faire enfermer, après que toutes les autres tentatives aient échoué[2]. Des articles parurent en nombre dans la presse réclamant la criminalisation de l'Église mariavite; ils émanaient de sources catholiques avec l'approbation des évêques de Pologne.
Très souvent, on accusait les mariavites d'être pro-russes et pro-socialistes. Leur légalisation par les autorités tsaristes était pour leurs accusateurs une preuve manifeste qu'ils collaboraient avec les occupants, même si c'était la seule façon pour l'organisation de fonctionner normalement et conformément aux lois. (Il n'y a aucune preuve que le groupe ait bénéficié des privilèges spéciaux de la part des autorités tsaristes, au-delà du droit d'exister comme une organisation religieuse légale.) Il est vrai que les premiers mariavites avaient conscience des problèmes que connaissaient les ouvriers et qu'ils avaient beaucoup d'activités sociales. Mais on rattachait tout cela à leur doctrine religieuse. Dès le début ils durent lutter contre l'image qu'on leur avait donnée dans le peuple d'avoir trahi la patrie. Pour beaucoup de Polonais, la nationalité polonaise ne faisait qu'un avec la foi catholique. Refuser cette foi, c'était refuser la nationalité. Pourtant les mariavites se sentaient très attachés à la Pologne, bien qu'ils fussent victimes d'innombrables actes de violence. La raison qui les avait poussés à quitter l'Église catholique était leur intime conviction que ce qu'ils faisaient était vraiment bon et juste. La personnalité charismatique de Feliksa Kozłowska les aida et leur permit de traverser les moments les plus difficiles. Ils avaient été très déçus par l'attitude de la hiérarchie catholique envers la mission divine qu'ils estimaient leur avoir été commandée par Dieu. Les deux côtés, raidis dans leur position, finirent par devenir complètement inflexibles. La conviction profonde des mariavites était beaucoup plus forte que leur peur de se voir insultés et accusés d’être des traîtres. Par la suite, le mouvement perdit une grande partie de son enthousiasme initial et certains des croyants l'abandonnèrent – un grand nombre d'entre eux pendant la crise en 1935.
L'histoire des relations entre mariavites et catholiques pourrait se diviser en deux périodes. La première quand l'Église mariavite est née et s'est peu à peu constituée. Cette période a été remplie de méfiance réciproque, de soupçons et d'insultes. Les passages les plus difficiles se situent entre 1906 et 1911, peu de temps après la séparation des mariavites, et entre 1923 et 1937, quand le nationalisme polonais était le plus exalté. La deuxième période fut l'après-guerre, affectée par deux événements : la situation difficile de toutes les Églises dans la Pologne communiste et les décisions de Vatican II. Ces circonstances favorisèrent l'ouverture d'un dialogue et de relations moins tendues entre les dénominations chrétiennes. Le progrès dans la réconciliation œcuménique entre l'Église vieille-catholique mariavite et l'Église catholique de Pologne est maintenant un fait incontestable, même si la dénomination dite de Felicjanów reste intransigeante et rejette toute possibilité de rapprochement avec les catholiques. Des deux côtés les attitudes des croyants sont toujours fondées sur des stéréotypes et des préjugés et les mariavites restent méfiants et soupçonneux. Ils considèrent les déclarations catholiques comme des gestes dénués de signification et qui ne changent vraiment rien, comme le rappellent encore quelques incidents désagréables, quand par exemple, dans l'Encyclopédie catholique publiée récemment, on a appelé les mariavites « la seule hérésie polonaise » ; les éditeurs ont présenté leurs excuses et promis de corriger dans les éditions ultérieures. Il reste beaucoup à faire pour réconcilier les deux Églises.
Il faut signaler que dans la résidence du pape à Castel Gandolfo se trouve un observatoire réputé. Or, dans les années 1980 on a permis de faire des observations à un astronome polonais, qui était en même temps un prêtre et un professeur de l'Église vieille-catholique mariavite, le révérend Konrad Maria Pawel Rudnicki, et le pape Jean-Paul II - fait sans précédent – lui a permis de célébrer la messe mariavite dans sa chapelle privée.
Notes
- Chiffres communiqués par les Mariavites de France
- Renseignement communiqué par les Mariavites de France
Liens externes
On trouvera des renseignements sur le site des Mariavites
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Mariavite Church » (voir la liste des auteurs)
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