- Église abbatiale de Notre-Dame de Bernay
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Église abbatiale de Notre-Dame de Bernay
L'abbaye Notre-Dame de Bernay est située à Bernay dans l'Eure en Haute-Normandie. C'est la plus ancienne église abbatiale de Normandie encore debout.
Elle fut fondée par Judith, femme de Richard II du duc de Normandie au XIe siècle.
Sommaire
Histoire
Lors de son mariage avec Richard II duc de Normandie, Judith, fille du duc de Bretagne, reçoit en cadeau un douaire qui comporte entre autres les terres de Bernay. Elle décide de consacrer Bernay à la fondation d'un monastère dédié à Notre-Dame.
La construction débute en 1010 mais Judith meurt en 1017 les travaux étant inachevés. En 1025 son mari Richard II décide de reprendre la construction et confie le chantier à l'abbé Guillaume de Volpiano, architecte italien ancien moine de Cluny, renommé notamment pour avoir participé à l'achèvement des monastères à Fécamp, à Jumièges, ou encore, Troarn. Il meurt en 1031.
Pendant quelques temps Bernay n'a pas d'abbé propre mais dépend de gardiens. C'est en 1061 qu'apparaît Vital, premier abbé dont les textes font mention. Il reste jusqu'en 1076, date à laquelle Guillaume le Conquérant le place à la tête de Westminster. Ensuite l'histoire de Bernay est mal connue. On sait qu'en 1249, un grave incendie ravage une partie du bâtiment. Au XVe siècle, on remanie le bas-côté Nord de la nef et l'abside de l'abbatiale. En 1563, l'amiral de Coligny saccage l'abbaye et pille les trésors et les archives. En 1628, Bernay est prise en main par les mauristes qui y commencent de vaste travaux. À cette occasion, les deux travées les plus occidentales de l'église et les deux absidioles du chevet furent rasées. En 1790 l'abbaye est supprimée et fut affectée à divers usages municipaux. Le bras nord du transept disparaît en 1810 et l'abside est détruite en 1827. Au XIXe siècle, la tour centrale est supprimée. L'édifice est restauré en 1978, ce qui permet de comprendre l'importance qu'elle a eu au XIe siècle.
Description
Plan
L'église possède un plan en croix latine.
La façade Ouest de l'édifice est droite et était simplement pourvue de contreforts plats. Au XVe siècle, les moines la détruisirent et amputèrent la nef des 2 travées les plus occidentales. La nef se comprenait 1 vaisseau principal et 2 collatéraux le tout divisé en 7 travées. A l'origine elle était charpentée. Les deux 1ère travées comportaient des voutes d'arêtes. Le collatéral Nord a été complètement repris au XVe siècle, les travées ont reçut des voutes sur croisées d'ogives avec nervures à pénétration et clefs pendantes. Le collatéral Sud est divisé en travées carrées par doubleau. Sur chaque travée a été établie une petite coupole très plate que les spécialistes font remonter au maximum au XVIIe siècle siècle. Elle a peut être remplacée une croisée d'arête. La croisée du transept supportait autrefois une tour centrale carrée qui a disparu au début du XIXe siècle. Elle est constituée par 4 arcs plein cintre. Le transept est saillant. Les 2 bras comportaient chacun une absidiole orientée peu profonde. Seul le bras Sud est resté intact alors que le bras Nord a été détruit en 1810. Le chevet est organisé selon la tradition bénédictine classique. On a donc un chevet échelonné à 3 chapelles précédées d'une travée droite aussi large que la nef. L'abside principale en cul de four est dans l'alignement du vaisseau principal. Elle est plus profonde que les 2 petites chapelles qui l'encadrent. Les bas-côtés du chevet étaient voutés d'arêtes sur plan carré. Selon les plans anciens, les 2 collatéraux du chœur se terminaient par un chevet plat et l'on dit que l'abside du vaisseau principal était à 5 pans depuis le XVe siècle.
Nef intérieure côté Sud
L'église est construite en appareil mixte. Les 5 travées sont toutes identiques.
La nef comporte 3 niveaux d'élévation :
- 1er niveau: une grande arcade plein cintre qui repose sur une pile presque carrée à laquelle viennent se coller des colonnes engagées qui supportent un arc doubleau pour soutenir la voute des bas-côtés. A l'intérieur de l'arcade, il y a une demie colonne engagée qui repose sur un mince dosseret sur lequel repose un arc en tore assez épais qui est une moulure ronde, semi-cylindrique. Tous les chapiteaux des colonnes sont sculptés. Les bases de ces colonnes sont moulurées simplement.
- 2ème niveau: alternance de baies géminées plein cintre et d'arcades aveugles peu profondes qui brisent l'unité des surfaces. Les baies géminées sont séparées par une colonnette surmontée d'un chapiteau évasé et se trouvent dans l'alignement des grandes arcades.
Cette alternance traduit une certaine phase expérimentale sur le traitement structurel et plastique des murs. Les baies géminées donnent sur des combles dans lesquels on accède par les escaliers situés dans les croisillons du transept. Cela forme une galerie ou tribune au dessus du collatéral. Le mur est donc composé de 2 épaisseurs: c'est un effet de composition pour alléger la structure générale.
- 3ème niveau: fenêtre haute dans l'alignement des baies géminées et grandes arcades ce qui permet un éclairage direct de la nef.
L'ouverture de ces fenêtres hautes était possible car la nef était charpentée. Il n'y avait donc pas trop de risque pour la solidité du mur.
Cette élévation typique est appelée Mur épais normand
On remarque qu'il existe une certaine correspondance entre ces trois niveaux: l'alignement grande arcade, baie géminée et fenêtre haute ainsi que celui des piles composées et des fausses fenêtres introduit un certain rythme dans l'élévation. Cela souligne la continuité des volume et une recherche esthétique.
Derrière les grandes arcades du rez de chaussé, on distingue le collatéral Sud: il est divisé en travées par des doubleaux de section carrée retombant sur des pilastres adossés aux piles de la nef. Sur chaque travée a été établie une petite coupole sur pendentif très plate appareillée en moellons de dimension réduite qui date au moins du XVIIème siècle. Des baies ont été percées dans les murs pour assurer un éclairage. Au dessus des voutes des collatéraux s'ouvrent les baies géminées renforcées du côté des combles par de puissants arcs de décharge destinés à raidir les murs gouttereaux dépourvus de contreforts.
Transept, mur Ouest
La croisée du transept est formée de 4 gros piliers. Ces massifs cruciformes supportaient la tour. Le pilier cruciforme est caractéristique de l'art roman. Le croisillons Sud est délimité par un immense arc outre passé qui repose sur un colonne engagée avec chapiteaux sculptés. Le coté occidental du croisillon communique avec le collatéral Sud par une arcade en plein cintre à l'intérieur duquel sont inscrits 2 pilastres supportant un arc en tore. A côté se trouve une arcade plein cintre aveugle qui est percée d'une baie ébrasée qui éclaire directement le croisillon. Cette arcade repose sur des colonnes presque monolithes. Le mur oriental est percé de 3 fenêtres romanes en plein cintre simple sans mouluration qui donnent sur la galerie. La galerie est éclairée directement par des baies. Cette galerie assure donc la circulation dans les parties hautes de l'édifice. Ce passage n'est pas dissimulé et fait partie de l'élévation intérieure.
Toute cette partie est réalisée en grand appareil.
Sculpture
La sculpture apparaît principalement dans l'abbatiale sur les chapiteaux et les bases de certaines colonnes engagées.
Pendant la 1ère moitié du XIe siècle, 3 ateliers d'une grande diversité se répartissent les décors sculptés
- Le 1er atelier a décoré les parties basses du chœur et une partie du transept Sud en développant les formes tronconiques à tablettes: volume triangulaire du chapiteau surmonté d'un bandeau de pierre lisse.
Les thèmes sculptés:
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- Masques humains en tête de feuille
- Grand oiseaux
- Chapiteau signé de son auteur Isembard. Il témoigne d'une influence arabe ou byzantine de par la disposition des animaux répartis symétriquement par rapport à l'arbre de vie.
- Le 2ème atelier a sculpté les bases et les chapiteaux des parties hautes du cœur ainsi que quelques chapiteaux du transept. Cet atelier a privilégié les motifs géométriques et les entrelacs
Les sources d'inspirations seraient méridionales mais rappellent l'art celte qui a imprégné la Normandie.
- Le 3ème atelier a effectué des chapiteaux antiquisant d'inspiration corinthienne.
On remarque qu'il y a une hésitation dans le style architectural ce qui donne à Bernay une place à part.
Spécificités
- Plan basilical avec chevet échelonné de type bénédictin.
- Les piles composées car elles sont expérimentales.
- L'élévation à trois niveaux qui au 2ème étage est composé de baies géminées préfigurant le principe du triforium.
- Le passage mural. Cet élément architectural porte le nom de Mur épais normand.
Contexte
L'église de Bernay est liée à l'histoire des ducs de Normandie et à la conquête de l'Angleterre. C'est l'un des édifices majeurs des débuts de l'art roman en Normandie.
Comparaison
- plan: Cluny III
- élévation: Abbaye de Jumièges
Bibliographie
- Lucien Musset, Normandie romane, t. 2, La Haute-Normandie, Éditions Zodiaque, La Pierre qui Vire, 1974.
Voir aussi
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