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Champ libre
Logo de Éditions Champ LibreRepères historiques Création 1969 Disparition 1991 Fondateur(s) Gérard Lebovici Fiche d’identité Statut Éditeur indépendant Siège social Paris
FranceSpécialité(s) Essais de critique sociale, romans, poésie, œuvres classiques de la littérature et de l'histoire militaire Titre(s) phare(s) La Société du spectacle Langue(s) de
publicationFrançais Diffuseur(s) CDE-Sodis La maison d'édition Champ Libre a été créée à Paris en 1969 par Gérard Lebovici pour publier des ouvrages qui reflètent une partie des courants de gauche critique et d’extrême-gauche non-léniniste de l'époque (gauche communiste).
Sommaire
Histoire
Secondé par Gérard Guégan, qui en est le premier directeur littéraire, Gérard Lebovici s'entoure d'une équipe qui comprend notamment Alain Le Saux et Raphaël Sorin ainsi que sa femme Floriana Chiampo. Champ Libre publie dans cet après-68 un large éventail de textes divers qui reflètent la recherche idéologique de l'époque ainsi qu'une ouverture vers la contre-culture américaine. A ses débuts, Champ Libre n'a pas de ligne éditoriale précise. La maison surfe sur la vague de 1968 et s'intéresse à l'underground, à la science-fiction, à la sexualité ainsi qu'aux classiques de l'anarchisme et du marxisme.
En septembre 1971, Champ Libre republie le livre de Guy Debord, La Société du spectacle, et édite des ouvrages qui se situent à contre-courant, comme celui du sinologue Simon Leys (de son vrai nom Pierre Ryckmans), Les habits neufs du président Mao, qui contribue à dégonfler le mythe de la révolution culturelle chinoise encore très vivace en France à cette époque surtout parmi les intellectuels et les militants. La rencontre de Lebovici et Debord en 1971 est décisive car elle marque le début d'une indéfectible amitié qui va marquer l'orientation de Champ Libre. Guy Debord aiguise le regard de l'éditeur. Champ Libre devient peu à peu à partir de 1972 un espace neuf de critique sociale en rupture avec l'édition de gauche traditionnelle, se démarquant ainsi du gauchisme "trotsko-maoïstes" alors en vogue.
En 1974, Lebovici congédie la première équipe de Champ Libre, reprochant à Guégan de publier ses propres livres et l'accusant de vouloir transformer l'entreprise en une maison d'édition commerciale comme les autres. Guy Debord prend alors une part grandissante dans le choix de publications des titres (Clausewitz, Jomini, August von Cieszkowski[1], Anacharsis Cloots, Baltasar Gracian, Bruno Rizzi[2], Jorge Manrique, les poètes des Th'ang, Omar Khayyam mais aussi Jaime Semprun, Jean-Louis Moinet et bien d'autres). Champ Libre republie également quelques grands classiques révolutionnaires ainsi que des écrivains opposés au stalinisme (Gustav Landauer, Karl Korsch, Ante Ciliga, Boris Souvarine, Nicolas Valentinov, Boris Pilniak, George Orwell).
La politique commerciale de la maison, sous l'influence de Debord, va rompre avec tous les usages habituels du milieu de l'édition : pas de publications en livres de poche des titres les plus vendus, aucun contact avec la presse, refus des prix littéraires, rupture avec tout auteur dont le comportement n'est pas en cohérence avec l'esprit de la maison. Debord, dans une lettre à Lebovici en avril 1975, considère que sur les quatre-vingts titres figurant au catalogue, il n'y a que 22 bons livres, le reste étant médiocre, voire franchement mauvais.[3]Le pourcentage de bons livres est malgré tout largement supérieur à celui de n'importe quel autre éditeur fait remarquer Debord. En mars 1978, Gérard Lebovici reconnaît dans une lettre à un de ses auteurs que « (...) l'époque y participant, je m'améliore sans doute, car je refuserais aujourd'hui bon nombre de livres figurant au catalogue Champ Libre (...) ». [4]
Les années qui suivent confirment l'originalité de Champ Libre dans le paysage éditorial. L'équipe se rétrécit : Floriana Lebovici assume l'essentiel des fonctions accompagnée par Hortensia Biscaretti di Ruffia, Catherine Nicole et un maquettiste. Floriana Lebovici introduit de nouvelles maquettes somptueuses qui vont devenir la marque de la maison. Champ Libre publie les situationnistes dont un recueil comportant les 12 numéros de la revue Internationale situationniste, mais aussi Véridique Rapport sur les dernières Chances de sauver le Capitalisme en Italie de Censor (pseudonyme de Gianfranco Sanguinetti) traduit par Guy Debord, le Précis de récupération de Jaime Semprun ou encore une réédition de De la Misère en Milieu Etudiant. En février 1979, Debord rédige une Déclaration[5] qui paraîtra en tête des catalogues de Champ libre jusqu'en 1991. Il s'agit d'une déclaration de guerre aux journalistes et aux critiques littéraires qui y sont traités de "professionnels de la falsification et de la jobardise". On peut y lire que « Champ Libre a cessé de reconnaître l'existence de la presse ».
Champ Libre n'a aucun souci d'argent. La maison est volontairement déconnectée du marché et ne cède à aucun compromis commercial. Dans L'Édition française depuis 1945 (Éditions du Cercle de la Librairie, Paris, 1998), Anita Blanc, ancienne collaboratrice de Champ Libre, explique cette indépendance : « Dégagé des soucis économiques qui sont le lot permanent des petites maisons d'édition à la production exigeante, Lebovici pourra se permettre de soutenir financièrement un catalogue de "petite vente" sans concessions commerciales et de n'éditer, même à perte, que les ouvrages qu'il estime nécessaires et sélectionnera avec rigueur. »
Après l'assassinat resté mystérieux de Gérard Lebovici en 1984, Floriana Lebovici, sur conseil de Guy Debord, rebaptise Champ Libre « Éditions Gérard Lebovici » tout en gardant le logo de Champ Libre sur la couverture des nouvelles parutions. Elle travaille avec divers conseillers dont Roger Lewinter, Marc Dachy, Michel Pétris et bien sûr Guy Debord. Debord publiera en février 1985 ses Considérations sur l'assassinat de Gérard Lebovici où il fait remarquer que « Gérard Lebovici avait publié beaucoup plus de classiques que de subversifs contemporains, mais dans un moment de décadence et d'ignorance programmées, où l'on discerne moins la révolution qui monte que la société qui descend, la publication même des classiques a passé pour un acte subversif. »
Suite au décès de Floriana Lebovici en février 1990 et au conflit opposant Guy Debord aux héritiers, les éditions sont mises en liquidation en 1991. On peut suivre les péripéties de cette rupture dans le volume 7 de la Correspondance de Debord (Fayard, 2008). Le fonds du catalogue est repris en 1992 par Jean-François Dodart et Lorenzo Valentine (fils de Floriana d'un premier mariage) sous le nom d'Éditions Ivrea (du nom de la ville natale de Floriana Lebovici) où ils poursuivent la publication des écrits de George Orwell en collaboration avec Jaime Semprun et les Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances, ou encore l'édition d'auteurs anciens tels que Machiavel, Tacite, Spinoza ou François Guichardin, et de classiques de l'anarchisme comme les Mémoires et écrits de Nestor Makhno.
Le siège des éditions Ivrea se trouve 1, place Paul Painlevé, Paris Ve et la librairie Ivrea (qui vend exclusivement les livres du fonds Champ Libre/Gérard Lebovici/Ivrea) au 27, rue du Sommerard, Paris Ve.
Collection « Chute Libre »
Une collection de science-fiction, baptisée « Chute Libre » par Jean-Patrick Manchette et dirigée par Jean-Claude Zylberstein, exista de 1974 à 1978.
Collection « Bibliothèque Asiatique »
Dirigée par René Viénet, cette collection « itinérante » sera publiée par la suite chez d'autres éditeurs, notamment en 10/18.
Notes et références
- ↑ Guy Debord, Correspondance, volume 5, Fayard, 2005, (pages 78 et 80)
- ↑ Guy Debord, Correspondance, volume 5, Fayard, 2005 (page 364)
- ↑ Guy Debord, Correspondance, volume 5, Fayard, 2005 (page 263)
- ↑ Éditions Champ Libre, Correspondance Vol. 1, 1978 (page 155)
- ↑ Guy Debord, Œuvres, coll. Quarto, Gallimard, 2006 (page 1475)
Voir aussi
Articles connexes
- Liste des livres publiés par Champ Libre
- Internationale situationniste
- Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances
Liens externes
- Illustration et quatrième de couverture de chaque ouvrage de la collection Chute libre
- Émission consacrée à Gérard Lebovici sur France Culture le 18 février 2004
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