Théodore Deck

Théodore Deck
Page d'aide sur les redirections Cet article concerne le céramiste Théodore Deck. Pour le musée, voir Musée Théodore Deck.
Autoportrait en guise de signature (Ø : 2 cm)

Théodore Deck, né à Guebwiller le 2 janvier 1823 et mort à Paris le 15 mai 1891, est une personnalité centrale de la céramique française du XIXe siècle.

Sommaire

De l'Alsace à Paris

La reproduction traduit mal l'intensité du célèbre Bleu de Deck

Né à Guebwiller dans le département du Haut-Rhin, fils de Richard Deck, teinturier en soie, et de Marguerite Hach, Joseph Théodore Deck se passionne très tôt pour la chimie et les sciences physiques. À sa sortie de l'école primaire, il reste trois ans au collège de La Chapelle-Sous-Rougemont, près de Belfort. Le décès de son père en 1840 l'oblige à revenir dans sa ville natale et à reprendre l'affaire familiale, aidé de son frère aîné. Cette reprise est un échec; la maison et l'entreprise sont vendues.
Selon certains biographes, sa vocation de céramiste se révèle au cours d'un voyage en Suisse, alors qu'il était encore au collège. Fasciné par une statue en terre cuite peinte, il demanda « Qui a fait cela ? », on lui répondit « Un potier »[1]. À l'âge de 18 ans, il entre donc comme apprenti chez le maître poêlier Hügelin père, à Strasbourg. En deux ans, il prend connaissance des méthodes héritées du XVIe comme l'incrustation de pâtes colorées à la manière de Saint-Porchaire. Cet apprentissage ne l'empêche pas d'occuper son temps libre à dessiner ou à modeler la glaise dans l'atelier du sculpteur Friedrich.
Echappant au service militaire, il effectue comme il se doit pour les compagnons poêliers-faïenciers alsaciens, un tour d'Allemagne. Son voyage d'étude le mène au duché de bade, dans le Wurtemberg, en Bavière et à Gratz (actuel sud de l'Autriche). La qualité de son travail lui permet d'obtenir d'importantes commandes en Autriche pour les châteaux des provinces et les palais impériaux, notamment le palais de Schönbrunn. Il poursuit sa route en Hongrie à Pest, à Prague, puis, remontant vers le nord par Dresde, Leipzig, Berlin et Hambourg.
Fort de son apprentissage, il arrive à Paris en décembre 1847. Recommandé par Hügelin, il se présente dans la fabrique de poêles du potier bavarois Vogt, située rue de la Roquette. La révolution de 1848 interrompt la production et Deck décide de retourner dans sa ville natale. Sa famille lui conseille alors de monter un petit atelier de terres cuites : il y réalise quelques bustes, des statuettes, des vases, des lampes et des copies d'antiques célèbres dont on peut voir quelques exemplaires au Musée Théodore Deck de Guebwiller.
Conscient que cette situation ne lui permettrait pas de subvenir correctement à ses besoins, il revient à Paris en décembre 1851 où il est employé par la veuve Dumas, fille du faïencier Vogt pour lequel il avait travaillé. Embauché comme contremaître, il fournit les dessins et modèles aux ouvriers, tout en travaillant lui-même la terre. Son travail permet certainement à la fabrique de remporter un première médaille à l'Exposition universelle de Paris en 1855.
L'année suivante, il prend la décision de s'établir non loin de son ancien employeur (20, rue Fontaine-au-Roi), utilisant probablement ses fours. Son frère, Xavier Deck, tout juste sorti du service militaire, le rejoint.

La Fabrique Deck (1858-1905)

C'est officiellement en 1858 que les frères Deck créent leur entreprise. Ils s'installent au 46, boulevard Saint Jacques un an plus tard. Dans un premier temps, les frères ne réalisent que des revêtements de poêles. Mais l'affaire marche très bien pour qu'à peine un an après leur installation ils souhaitent diversifier leur production et se lancer dans la céramique pour le revêtement des bâtiments ainsi que dans les pièces de forme.
Deck s'intéresse à la politique. En 1870, comme Alsacien, il doit choisir s'il sera Français ou Allemand. Il opte pour la première solution. Sympathisant du Parti radical, il sera adjoint au maire dans le XVe arrondissement.

Théodore Deck et les expositions

Chat bleu, Musée Théodore Deck Guebwiller

En 1861, au Salon des arts et industries de Paris qui se tient sur les Champs-Élysées, Théodore Deck expose pour la première fois ses réalisations : il s'agit de pièces à décor d'incrustation dit « Henri II » et d'autres recouvertes d'un émail bleu turquoise ou d'un décor dans le style des céramiques d'Iznik. S'il remporte une médaille d'argent, les critiques sont toutefois mitigées. L'année suivante, à l'occasion de l'Exposition internationale de Londres, il conquiert la clientèle anglaise. Il surprend en présentant comme l'année précédente son vase de l'Alhambra témoignant de dimensions exceptionnelles (1,36 m de hauteur et 2,25 m de circonférence). Le vase, réalisé à partir d'une photographies et de calques relevés par Jean Charles Davillier, est acheté par le South Kensington Museum quelques années plus tard. A cette même exposition on remarque toutefois les nombreuses craquelures de sa glaçure et également sa mauvaise adhérence à la pâte.
À l'Exposition des arts industriels de 1864, il parvient à présenter des pièces recouvertes d'émaux transparents non craquelés. Il expliquera la fabrication et les qualités de ces émaux transparents lorsqu'il publiera en 1887 son traité « La faïence »[2]. Un an après il réalise les premiers essais de reliefs sous émaux transparents. Il n'abandonnera jamais cette technique qui sera d'ailleurs reprises par nombre de grandes manufactures. Elle lui permet de faire évoluer personnages, oiseaux, fleurs, ornements en tous genres sous une glaçure turquoise, verte, jaune ou manganèse. C'est surtout un bleu superbe que le public retient de cette technique : une nuance turquoise éclatante qu'il adopte aussitôt sous le nom de Bleu de Deck ou Bleu Deck.
Théodore Deck enchaîne les innovations. À l'occasion de l'Exposition universelle de 1867, la fabrique reçoit une médaille d'argent grâce, entre autres, aux reflets métalliques qu'il obtient sur certaines pièces. Si ces expositions deviennent le moteur de ces avancées techniques, elles n'en représentent pas moins de lourdes dépenses. Certains essais sont parfois avortés, ainsi des essais de porcelaine dure à la fin des années 1860.
De la même manière que Parvillée ou que Collinot, Deck joue la carte du monumental. À l'occasion de l'Exposition universelle de Vienne en 1873, il présente une jardinière spectaculaire de deux mètres de large, adossée à un panneau de près de quatre mètres de haut. L'ensemble conservé aujourd'hui au Musée Ariana de Genève a été réalisé sur les dessins de Émile-Auguste Reiber.

Théodore Deck et les artistes

Dès leurs installation, les frères Deck réunissent chez eux leurs amis artistes et mettent en place un principe de collaboration. Suivant ce principe, Deck réalise des plats, des carreaux ou des plaques (très rarement des vases) qu'il donne à peindre à des artistes qui ont pour beaucoup déjà fait leur preuve au Salon. Les gains de vente sont divisés en deux parts équitables.
Deck forme aussi des apprentis qui feront à leur tour école. Le plus célèbre d'entre eux, Edmond Lachenal, poursuivra l'œuvre du grand céramiste jusque dans les méandres de l'Art nouveau.

Auteur d'un traité magistral sur la faïence, il devient en 1887 – reconnaissance suprême – directeur de la Manufacture de Sèvres.

Il repose depuis 1891 au cimetière Montparnasse. C'est son ami Bartholdi qui réalisa son monument funéraire.

Une importante collection de céramiques de Deck est réunie au Musée Théodore Deck (anciennement Musée du Florival) à Guebwiller.

Écrits

  • La faïence, Quantin, Paris, 1887, 300 p. (Marques de faïences, p. 273-286 ; bibliographie, p. 287-298) – texte intégral en ligne sur Gallica [1]

Notes

  1. Girodie, André, « Biographies Alsaciennes, Théodore Deck », in La Revue Alsacienne illustrée, vol. V, n° 2, Strasbourg, 1903, p. 45-50
  2. Théodore Deck, La faïence, Paris, Quantin, 1887, p.265-269. Au terme d'émaux transparents, l'on préfère aujourd'hui l'appellation glaçure alcaline transparente colorée.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Sur les autres projets Wikimedia :

  • À la Mémoire de Théodore Deck. Érection d'un Monument à Guebwiller (Alsace), sa ville natale, J. Dreyfus impr, Guebwiller?, 1911?, 4 p.
  • Jules Antoine Castagnary, « Théodore Deck », in Revue Alsacienne, 1880, p. 337-345
  • Antoinette Faÿ-Hallé, Françoise Fournière, Brigitte Grenier et al. (dir.), Théodore Deck ou L'éclat des émaux, 1823-1891 (catalogue de l'exposition à, Marseille, Centre de la Vieille Charité, 7 juillet-11 septembre 1994, organisée par le Musée Grobet-Labadié), Musées de Marseille, Marseille, 1994, 143 p. (ISBN 2-9500996-7-X)
  • André Girodie, « Biographies alsaciennes : Théodore Deck », in Revue Alsacienne illustrée, 1903, vol. V, no 11, 10 p.
  • André Girodie, Un céramiste alsacien : Théodore Deck, Art & Industrie, Nancy, 1912
  • J. Loebnitz, Article nécrologique sur M. Théodore Deck, in La Céramique et la verrerie, 1891?, p. 1-3
  • Sandor Kuthy, Albert Anker, faiences, en collaboration avec Théodore Deck, Marguerat, Lausanne, 1985, 110 p.
  • Alexandre Meichler (intro.), Théodore Deck : magicien du feu (1823-1891) (catalogue de l'exposition présentée à Guebwiller, Hôtel de Ville, du 9 octobre au 24 octobre 1976), Alsatia, Guebwiller, 1976, 23 p.
  • Théodore Deck (catalogue de l'exposition au Musée Cantini, Marseille, janvier-février 1980), Le Musée, Marseille, 1979?, 69 p.
  • Théodore Deck : la véranda des glycines, Musée du florival, Guebwiller, 1989, 16 p.
  • Théodore Deck : 1823-1891 (préface Charles Haby), Musée du Florival, Guebwiller, 1991, 55 p. (ISBN 2-908367-20-3)

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Théodore Deck de Wikipédia en français (auteurs)

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