Seconde Guerre numantine

Sommaire 1 Conquête romaine de l'Hispanie et résistance de Numance 2 Première bataille de Numance 3 Premier siège de Numance 4 La dernière guerre de Numance 5 Organisation des troupes romaines 6 Le deuxième siège 7 La chute

Conquête romaine de l'Hispanie et résistance de Numance

La conquête des peuples de la péninsule ibérique par la république romaine avait ses exceptions. Des peuples comme les Arévaques, les Vaccéens ou les Lusitaniens opposèrent une grande résistance, et des villes comme Numance envoyèrent même des ambassadeurs à Rome pour traiter directement avec le sénat romain.

Quintus Caecilius Metellus Macedonicus (consul en -143), qui avait conquit et soumis une grande partie de la péninsule, ne parvint pas à venir à bout de Numance et de Termance. Il fut remplacé par Quintus Pompeius, qui ne parvint pas non plus à soumettre les deux villes celtibères.

En -153, les habitants de Segeda, se rebellèrent contre les romains, en tardant à fournir des soldats, refusant de payer l'impôt, et se fortifièrent pour faire face aux légions consulaires de Fulvius Nobilior, qui laissa 6000 hommes dans la bataille et du fuir jusqu'à ce que le renfort de la cavalerie romaine puisse retourner la situation en sa faveur. Les arévaques survivants se réunirent à Numance et décidèrent de continuer la guerre. Trois jours plus tard, Fulvius Nobilior se présenta devant les portes de Numance avec une armée dont la première ligne était formée par 10 éléphants et 500 cavaliers numides venus d'Afrique.

Première bataille de Numance

Les numantins et leurs chevaux s'effrayèrent devant les éléphants et coururent se réfugier dans leur ville jusqu'à ce qu'un jet de pierre blessa un éléphant, qui pris de fureur se rua contre les légionnaires, imités par le reste de son espèce. Cette attaque provoqua de nombreuses victimes parmi les assiégeants, et l'armée de Numance en profita pour poursuivre les romains, qui perdirent 4000 hommes (contre 2000 numantins). Fulvius Nobilior ne voulut rien tenter de plus et passa l'hiver dans son campement, avec peu de vivres et les attaques continuelles des numantins. Au printemps de -152, Quintus Pompeius releva Nobilior et le remplaça par Claudius Marcelus, qui vint avec 500 chevaux et une infanterie de 8000 hommes. Ceux-ci devaient être recrutés par tirage au sort en raison du manque de volonté des citoyens romains pour aller combattre les ibères.

Premier siège de Numance

Le préteur Quintus Pompeius avait 30.000 soldats et 2.000 cavaliers qui perdit au fur et à mesures des embuscades, jusqu'à ce que fatigué, il envoya ses troupes contre Termance (Termes) et tenta d'affamer Numance, en déviant une rivière (probablement le Tera). Les soldats de Numance, commandés par Megara, parvinrent à déjouer cette tentative, en causant de nouveau de lourdes pertes aux romains. Quintus Pompeius essaya alors de mettre fin à la guerre en échangeant des prisonniers, et reçut de la part de Numance des richesses. Il négocia et parvint finalement à un accord. Remplacé par Marcus Popilius Lenas, cet accord fut annulé par le Sénat de Rome, qui le considéra honteux, et il fut décidé de poursuivre la guerre. Popilius fut remplacé par Hostilius Mancinus, dont l'échec fut encore plus cuisant que ses prédécesseurs, puisqu'il fut battu à chaque bataille par les numantins. Il termina encerclé dans son campement, et menacé de mort lui et son armée, accepta la paix. Numance se limita à désarmer les romains en échange de la paix. Mancinus fut rappelé à Rome avec les ambassadeurs de Numance. Il fut remplacé par le consul Emilius Lepidus, qui après avoir été battu à Numance, choisit de poursuivre jusqu'à la région des vaccéens et assiéga Pallentia (actuelle Palence), où après quatre ans d'attaque, il échoua de nouveau. Cependant il détruisit les champs de céréales vaccéens pour éviter qu'il approvisionnent Numance. Revenu à Rome, il fut condamné à être livré aux numantins.

Ces 18 années de lutte firent de Numance l'un des symboles de la résistance à Rome.

La dernière guerre de Numance

Cette succession d'humiliations décida Rome en -134 à envoyer son meilleur soldat, le vainqueur de Carthage, Scipion Émilien.

La première difficulté qui se posa à Rome pour désigner Scipion comme chef de l'armée qui assiégeait Numance, écrit l'archéologue espagnol José Ramón Mélida, fut qu'il ne remplissait pas les conditions de temps nécessaire pour le consulat, mais le sénat, selon l'historien grec Appien, décréta que les tribuns pouvaient déroger à la règle sur le temps, comme ils l'avaient fait pendant la guerre punique, y resteraient en place l'année suivante. Le prestige de Scipion comme général fit que de nombreux romains voulurent s'engager sous ses ordres, mais le sénat n'y consentit pas, puisque Rome devait faire face à d'autres conflits. Scipion protesta, car il ne voulait pas faire la guerre contre Numance avec la même armée vaincue et démoralisée en garnison en Hispanie. Le Sénat dut donc lui consentir qu'il puisse y ajouter des troupes mercenaires d'autres villes et d'autres rois, écrit Appien, qui s'offrirent volontairement par intérêt. De plus, avec quelques personnes choisies et fidèles formant la "cohorte des amis", il demanda un financement. Comme le Sénat le lui refusa, autorisant seulement quelques revenus, Scipion, selon le rapporte Plutarque, répondit que "son argent et celui de ses amis lui suffisait". Ainsi fut l'effort personnel que ce soldat expérimenté fit pour cette entreprise. Il avait réunit un corps d'armée de 4000 hommes qu'il plaça sous le commandement de son neveu. Il partit au devant de ces hommes avec quelques uns pour l'Hispanie, où l'attendaient des forces plus nombreuses.

Organisation des troupes romaines

Lorsqu'il arriva, il dut d'abord lutter contre le moral de ses propres troupes avant même de pouvoir affronter les numantins. L'armée romaine était partagée entre l'indiscipline, la superstition et la mollesse. Plutarque rapporte quelques événements éloquents. "Un jour il découvre les mules d'un tribun militaire appelé Menimius, chargées de vases et ornées de pierres précieuses" et il lui dit: "Tel que tu es, tu es devenu inutile pour moi et pour la patrie pour 30 jours, mais pour toi même pour toute la vie". Il découvre un autre "qui portait un bouclier très décoré" et le réprimande ainsi "Un très beau bouclier en effet, jeune homme, mais il vaut mieux pour un romain faire confiance à sa main droite qu'à sa main gauche". Il vit que durant les marches l'infanterie utilisait des chevaux, et il s'exclama: "Que peut-on attendre à la guerre d'un homme qui ne sait pas marcher?".

Il chassa, selon Appien, tous les marchands, prostituées, devins et augures, à qui les soldats consternés par tant d'infortunes donnaient trop d'importance. Il expulsa les serviteurs, vendit les charriots, équipages et mules, ne conservant que les purement nécessaires, et interdit d'utiliser les animaux durant les marches. Il ne permit à personne de conserver comme équipement plus qu'une broche, une marmite de bronze et un verre. Il indiqua que les repas soient de viande rôtie ou cuite. Il interdit les lits, et il était le premier à dormir sur une natte.

Appien écrit: "Pour que personne ne se perde durant les marches, comme avant, c'était toujours un escadron carré qui marchait, sans qu'il soit permit de changer la place assignée. Durant la marche, il parcourait fréquemment l'arrière-garde, il faisait mettre pied à terre aux cavaliers, et à leur place il mettait les malades, et ce qui fatiguait trop les bêtes, il le distribuait entre les hommes à pied. S'il faisait une halte, il disposait comme sentinelles autour du camp les mêmes hommes qui avaient servi de batteurs durant la marche, et faisait en sorte qu'un autre escadron de cavalerie batte la campagne."

Durant cette période d'entraînement et de réforme de son armée, Scipion n'eut avec Numance que de légères escarmouches, suffisamment pour se faire connaître d'eux. Il répétait "les généraux austères et rigides sont très utiles à leurs hommes, et les doux et libéraux apportent beaucoup d'aide aux ennemis, parce que leurs troupes, bien que contentes, ne savent pas obéir, alors que celles des austères sont obéissantes et prêtes à tout". Lorsqu'il eut rendu le moral à ses soldats, soumis et habitués au travail et à la fatigue, il déplaça son camp près de Numance, en faisant attention à ne pas diviser ses troupes, comme firent les autres, ni à se battre avant d'explorer le terrain. "C'est insensé", disait-il "de s'aventurer pour de faibles motifs. Le capitaine qui entre en action sans nécessité de le faire est imprudent, de même que celui qui se risque lorsque l'occasion le demande est excellent. Les médecins n'utilisent pas la chirurgie avant les médecines.

Le deuxième siège

Prudent et sagace, Scipion conçut le plan de guerre de réduire, encercler et assiéger les numantins, jusqu'à ce qu'à bout de force ils se rendent. Ainsi, pour leur enlever l'appui et la faveur des autres peuples, il se dirigea d'abord contre les vaccéens à qui les numantins achetaient des vivres, moissonna leurs champs, recolta ce qu'il put pour l'approvisionnement de ses troupes et brûla le reste. Comme les pallentiens de Complanio étaient hostiles aux fourrageurs romains, il envoya pour les repousser Rutilius Rufus, alors tribun et écrivain de ces faits, selon Appien, et alors que Scipion lui-même lui couvrait la retraite, il put le sauver avec sa cavalerie. Finalement, il alla passer l'hiver devant Numance, et pour l'encercler il fit construire sept campements que le professeur Schulten est parvenu à découvrir. Selon Appien, Scipion ne préta pas attention aux fréquentes sorties par lesquelles les numantins cherchaient à le provoquer, et il fit encercler la ville par sept forts, un fossé et une palissade dont le périmètre était le double que celui de la ville (9,25km). Il fit construire en plus un deuxième fossé, fortifié avec des pieux, doublé d'un mur de huit pieds de large et dix pieds de haut, sans créneau, le long duquel se succédaient des tours tous les 30 mètres. Comme il ne pouvait pas construire un pont sur le fleuve Duero, par lequel les assiégés recevaient des troupes et des vivres, il fit lever deux forts sur chaque rive et à l'aide de grandes cordes, il tendit sur la largeur du fleuve de grandes poutres. Sur ces poutres, il avait également fait clouer des piques et des aiguilles, ce qui rendait impossible le passage des bateaux ni même de nageurs. Sur les tours il plaça des catapultes, des ballistes et d'autres machines, fit approvisionner de pierres et de flèches les créneaux, fit mettre en garnison dans les forts des archers et des frondeurs. Sur les 60.000 hommes dont il disposait, il disposa la moitié pour garder le mur, 20.000 pour les sorties nécessaires et 10.000 de réserve. Tous les jours il parcourait le périmètre. Selon Appien, c'était la première fois qu'un militaire utilisait cette stratégie d'assiègement contre un adversaire qui ne refusait pas de se battre.

La chute

Après quinze mois de siège, la ville tomba, vaincue par la faim, à l'été -133. Ses habitants choisirent de se suicider plutôt que de se rendre. Ils brûlèrent la ville pour qu'elle ne tombe pas aux mains de romains. Les quelques survivants furent vendus comme esclaves.

Scipion renonça à son titre d'Africain pour prendre celui de Numantin.

La résistance héroïque de Numance est devenue presque légendaire, au point qu'elle est entrée dans la langue espagnole on parle de « résistance numantine » pour qualifier une résistance exemplaire.

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