- Sainte Wilgeforte
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Sainte Wilgeforte (ou Livrade) était une sainte de la tradition catholique. Les historiens considèrent comme acquis que ce personnage n'a jamais existé[1]. Sa légende apparaît au XIVe siècle et est sans doute originaire de Hollande[2], elle entre dans le Martyrologe romain en 1583[3]. Anciennement commémorée le 20 juillet, son nom a été retiré du calendrier liturgique.
Sommaire
Multiples légendes absurdes
Il existe au moins deux récits différents de la légende de Wilgeforte :
- Sainte Wilgeforte était une princesse sicilienne catholique du XIe siècle. Contrainte à un mariage forcé avec un roi du Portugal alors qu'elle avait fait vœu de chasteté, Wilgeforte fait une prière à Dieu pour que ce dernier la rende la plus laide possible. Le miracle a lieu et elle se retrouve affublée d'une épaisse barbe, décourageant totalement son prétendant. De colère, son propre père (païen) la fait crucifier.
- Jeune fille que des soldats ivres s'apprêtaient à violer, Wilgeforte invoque la protection divine et est exaucée puisqu'une épaisse barbe lui recouvre le visage, faisant fuir ses agresseurs. Elle est par la suite suppliciée pour sorcellerie.
Selon les récits, on prête à Wilgeforte diverses origines : elle aurait été fille d'un roi païen portugais[4], ou poitevine[5]. La constante de tous ces récits, c'est l'apparition d'une barbe et le supplice de la crucifixion. Ce sort était exclusivement réservé aux hommes et Sainte Wilgeforte est l'unique sainte de la chrétienté à être représentée crucifiée.
Une seconde légende est attribuée à Wilgeforte : elle aurait jeté un soulier d'argent à un joueur de viole.
Origine
En langue latine, on la trouve sous les dénominations Virgo fortis, Wilgefortis barbata, liberata, comeria, cumernus et Eutropia. En français, son nom se décline en Digneforte, Guilleforte, Milleforte, Virgeforte et Livrade. En italien, elle se nomme Liberate, en espagnol Librada, en anglais Uncumber, en allemand Hülpe, Gehülpe, Kümmernis, Ontkommer et Unkummer[6].
On considère traditionnellement que le nom de Wilgeforte signifie « vierge forte ». Néanmoins, en 1934, Gustav Schnürer et Joseph Ritz[7] ont proposé une autre explication : Wilgeforte viendrait de « Hilge Vartz », la « face sacrée », étymologie qui renforce la thèse d'une erreur d'interprétation : l'histoire de Wilgeforte serait en effet née d'une compréhension erronée de l'iconographie chrétienne orientale. En effet, tandis que les églises d'occident représentaient Jésus en croix nu, celles d'orient le représentaient plus souvent vêtu d'une longue tunique[8]. L'origine de ce quiproquo pourrait être le Volto Santo (Saint Vou, ou Saint Voult) de la Cathédrale Saint-Martin de Lucques (Lucca), crucifix très populaire, traditionnellement attribuée au disciple de Jésus Nicodème, dont une quantité de copies a été diffusée en Europe et qui représente un Jésus vêtu d'une robe, portant des cheveux longs, une barbe et une couronne. En effet, le miracle du « Saint Vou » de Lucques[9] a été assimilé à la légende de Wilgeforte et de nombreux objets sacrés représentent la sainte un pied nu, devant un musicien.
Statues de Sainte Wilgeforte
On trouve des statues de sainte Wilgeforte :
- dans l'église Saint-Étienne de Beauvais ;
- dans l'église de Wissant;
- dans le couvent Notre dame de Lorette à Prague
Divers
- Dans sa célèbre chanson Sans ma barbe, piquante satire sociale, François Corbier fait une référence forte à propos à Sainte Wilgeforte :
Rasé de frais comme un éphèbe
Je n'pouvais plus ouvrir ma porte
De peur qu'en plein délire la plèbe
ne me prit pour Sainte Wilgeforte
Sans ma barbe, quelle barbe !Le dramaturge et metteur en scène Mathieu Bertholet a écrit une pièce inspirée de la légende de sainte Wilgeforte. Elle a été créée par la Compagnie MuFuThe le 8 août 2008 à Sion.
Bibliographie
- Jacques Blondel, « Sainte Wilgeforte », Revue de la Société académique des antiquaires de la Morinie, 336e livraison, mars 1961.
- Jean Gessler, La légende de Sainte Wilgeforte ou Ontcommer, la Vierge miraculeusement barbue. éd. Picard, Paris, 1938.
- André Mabille de Poncheville, « Sainte Wilgeforte » in Revue de Boulogne, nº 295, novembre-décembre 1964.
Notes et références
- Nouvelle Revue théologique, Centre de documentation et de recherches religieuses de la compagnie de Jésus, Casterman 1869, p884
Une chrétienté au XIXe siècle ? La vie religieuse des populations du diocèse d'Arras, (1840-1914) Par Yves-Marie Hilaire, thèse soutenune en Sorbonne en 1976 et éditée par les presses Universitaires de Lille en 1977. p526 - Revue d'histoire ecclésiastique de Université catholique de Louvain, 1900, p.900.
- Revue d'histoire ecclésiastique de l'UCL, 1900
- Iconographie de l'art chrétien, Louis Réau, PUF, 1959 pp1342-1343
- Le masque, ou, Le père ambigu, par Jacques Bril, Payot 1983, pp175-176
- Louis Réau 1959
- Sankt Kümmernis und Volto Santo. Studien und Bilder, 1934
- Émile Mâle, Armand Colin 1922, pp256-257 L'art religieux du XIIe siecle en France,
- XIIIe siècle, qui raconte l'histoire du Saint Vou, le miracle et le martyre du ménestrel, et en profite pour égratigner au passage l'avarice du clergé. Rédigé en Langue d'oïl, sans doute originaire de la région de Fécamp, ce poème épique a été publié en 1907 par Wendelin Foerster à Erlagen sous le titre Le Saint Vou de Luques. un ménestrel trop pauvre pour faire une offrande à Jésus joue de la viole devant le Saint Vou, et la statue lui jette, en remerciement, un de ses souliers d'argent. Le Le poème du Saint Voult de Lucques est vraisemblablement une œuvre de jongleur du
Liens externes
- Saintes et travesties du Moyen Âge par Frédérique Villemur (Clio, Histoire, femmes et société).
- Sainte Wilgeforte par Frank Dufossé, sur Mincoin.com
Catégorie :- Personnage légendaire
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