Roger Agache

Roger Agache

Roger Agache est un archéologue[1] français né à Amiens (Somme) le 16 août 1926 et décédé le 17 septembre 2011[2],. Il est l'un des pionniers de l'archéologie aérienne en France.

Sommaire

Parcours

Mézières-en -Santerre (Somme). Dans la brume hivernale, voici une fascinante réapparition fantomatique de l’habitation principale d’une villa gallo-romaine. Photo : R. Agache / Ministère de la Culture

Docteur en Histoire de l'Art et d’Archéologie, il est correspondant de l’Institut de France (Académie des inscriptions et belles-lettres). Il a mené au départ des recherches sur le Paléolithique et le Néolithique dès 1945, puis il s'est orienté à partir de 1959 vers l'archéologie aérienne de la France du Nord, dont il est considéré comme l'un des principaux pionniers. Il a été directeur des Antiquités préhistoriques du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie de 1963 à 1985, chargé de cours à l’Université de Caen, puis chercheur au CNRS.

Il est l'auteur de plus de 200 publications (cf. infra). Ses travaux ont été couronnés par le CNRS, l'Académie d'Architecture et l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Il a reçu le Grand Prix national d'Archéologie (1983) puis le Grand Prix de Géographie (1978) pour ses travaux sur les cartes archéologiques. Un hommage particulier lui a été rendu en 1992 lors du colloque international d'archéologie aérienne d'Amiens dont les actes lui ont été dédiés. Ces derniers ont été publiés dans une numéro spécial de la Revue archéologique de Picardie[3].

Principaux apports

Roger Agache a publié depuis 1960 des milliers de photographies de traces « d’empreintes du passé ». Ces hiéroglyphes de la terre, au premier abord énigmatiques, n’ont cependant rien de mystérieux. L'archéologie aérienne n’est pas une discipline ésotérique. Elle est accessible et compréhensive pour tous. Les photographies publiées par Roger Agache sont souvent complétées par de remarquables aquarelles de reconstitutions, réalisées par Jean-Claude Blanchet, en tenant compte des résultats de fouilles effectuées sur des sites découverts d’avion : Roger Agache a toujours affirmé que les vues aériennes doivent être contrôlées au sol, que des sondages et des fouilles sont indispensables.

Ses prospections ont été consacrées à l’archéologie de la France du Nord (Picardie, Normandie, Nord Pas-de-Calais et ses abords), mais, dans ses publications, il a constamment cherché à donner une portée plus générale en prenant des exemples dans des paysages agraires variés : pays de bocage, plaines ouvertes de grande culture, sols pauvres crayeux, sols fertiles de limons, sols alluviaux de graviers… C’est donc un échantillonnage représentatif de ce que l’on peut observer d'avion, un peu partout en France.

Conchil-le-Temple (Pas-de-Calais). Par temps sec, les céréales sont plus vertes au-dessus des anciens fossés circulaires de l’Âge du bronze et des grands enclos rectilignes de l’Âge du fer. Photo : R. Agache / Ministère de la Culture

La Picardie a été la première région à être systématiquement prospectée, hiver comme été, depuis près de cinquante ans. De nombreux survols ont été effectués aussi bien en période de fortes pluies qu’en période de sécheresse. Roger Agache a privilégié les survols hivernaux : c'est grâce à l’humidité rémanente des terres nues que les résultats les plus étonnants ont été obtenus par mauvais temps, quand la brume commence à se lever et, mieux encore, entre les giboulées de mars. Pour autant, il n'a pas négligé les anomalies de la croissance des cultures au printemps ou en été, car elles ont l’avantage d’être alors moins évanescentes, mais le repérage immédiat au sol est alors difficile.

Givre, rosée, ressuyage brutal des terres font apparaître comme par miracle et avec une netteté stupéfiante ces vestiges du passé, mais d’une manière si brève et sous des angles si précis, que l’on se demande parfois si on n’a pas rêvé, d’autant plus qu’il faut souvent attendre des années pour que ces tracés réapparaissent. Le rôle du prospecteur aérien est donc de fixer par la photographie, le fugace, l’évanescent, afin de contrôler ensuite sur le terrain ces images fantomatiques.

Dans ses publications, ses vues aériennes sont complétées par de nombreuses photos prises au sol, car , paradoxalement, l’archéologie aérienne apprend à regarder à ses pieds ! On s’aperçoit alors que certains tracés auraient pu être facilement discernés dans la campagne, surtout l'hiver. C’est d’ailleurs le meilleur moyen de choisir des moments propices aux survols. Il n’y a pas de formules magiques pour les prévoir : le bon sens, l’observation et la fréquentation du monde agricole suffisent largement.

Site Web

Verberie (Oise). Avant la fouille. Maison gauloise apparaissant dans le blé mûr. Lors de la sécheresse de juin 1976 alors que le jaunissement des céréales est déjà bien avancé, le blé reste encore vert par endroits. La structure ovalaire qui apparaît montre qu’il s’agit d’un site archéologique de type alors inconnu. Grâce à l’image obtenue, il sera facile de piqueter le terrain et de bien limiter le secteur à décaper. Photo : R. Agache / Ministère de la Culture

Dans le site web du Ministère de la Culture qu’il a réalisé avec Jean-Claude Blanchet, il a voulu montrer d’une façon aussi claire que possible que l’archéologie aérienne a ses principes, ses moyens, ses possibilités et ses objectifs[4].

Les méthodes et techniques y sont exposées avec le plus de simplicité possible, en se référant aux résultats obtenus, essentiellement dans la France du Nord.

Voir, c’est apprendre à voir. Ce site Web est d’abord un recueil d’images de la mémoire du passé. Il faut s'entraîner à décrypter ces « hiéroglyphes » de la terre, au premier abord déroutants et énigmatiques. Les vestiges n’apparaissent qu’à l’observateur vigilant qui sait discerner certains tracés inattendus, généralement en discordance avec le paysage actuel si familier. Des notions de base sont apportées pour apprendre à interpréter et dater ces structures archéologiques à partir de résultats obtenus par les fouilles de contrôle, comme des données issues des recherches dans la bibliographie et les archives. Des mises en garde sont faites contre les illusoires et simplistes « clefs d’interprétation ».

Verberie (Oise). Dès la moisson faite, la fouille est entreprise sous la direction scientifique de Jean-Claude Blanchet. On observe alors des trous de poteaux délimitant un vaste bâtiment rectangulaire, aux extrémités légèrement arrondies, de vingt mètres sur douze mètres cinquante. Les trente neuf tours de poteaux (qui apparaissent comme des points verts sur la photo précédente) maintenaient un mur extérieur en bois et en torchis. La charpente était soutenue par six gros poteaux internes. Les fosses attenantes à cette construction ont livré du matériel du IIe et IIIe siècle avant notre ère. Photo : R. Agache / Ministère de la Culture

L’archéologie aérienne n’est pas une nouvelle science, mais un nouveau regard sur le passé. Elle consiste à rechercher du ciel les traces du passé et surtout à fixer par des images photographiques les anomalies révélatrices, souvent fugitives, pour les étudier attentivement, les archiver et comparer les images obtenues au fil des saisons. La vision aérienne donne le recul nécessaire à la bonne compréhension du paysage et des phénomènes révélateurs, parfois difficilement perceptibles au sol, et parfois même pas du tout.

Le site Web du ministère de la Culture doit nécessairement être consulté dans ses différentes rubriques dont voici les quatre principales :

  • La discipline et ses enjeux, où sont évoqués l’historique de ses recherches en France et à l’étranger, l’inventaire de la carte archéologique, la protection du patrimoine et un portrait de Roger Agache réalisé par Jean-Claude Blanchet.
  • Les indices révélateurs et leur extraordinaire polymorphisme, en avion comme au sol, sont exposés avec une abondante illustration. Des exemples sont donnés, des sources de confusions et d’erreurs parfois cocasses.
  • La prospection elle-même : techniques et méthodes. Comment préparer une mission aérienne, comment s’y prendre, quelles sont les techniques de prises de vues, etc.
  • Les découvertes et les résultats. C’est la rubrique la plus importante car les résultats sont considérables, d’autant plus qu’ils sont confrontés avec les données des fouilles récentes, surtout en Picardie où des chantiers sont menés à bien pour la période du Néolithique au Moyen Âge. L’archéologie aérienne ne fournit que des indices et le dernier mot revient toujours aux fouilles, même quand il s'agit de tracés se rapportant à l'époque moderne (voyez quelques exemples pour les deux dernières guerres).

Les recherches d’avion et les grandes fouilles scientifiques qui suivirent ont complètement renouvelé et bouleversé nos connaissances, notamment en ce qui concerne les grandes fermes isolées de la noblesse gauloise et les sanctuaires de cette période… Pour l’époque romaine, on a maintenant une image fascinante de toute l’implantation rurale qui, en Picardie, était totalement inconnue : camps romains, temples, théâtres, thermes et des centaines de villas aux plans stéréotypés, rigoureusement géométriques. Bref, une campagne profondément romanisée et bien mise en valeur. On comprend que Christian Goudineau, professeur au Collège de France, ait pu parler ici de « l’apport ahurissant » de l’archéologie aérienne.

Enfin, ce site est complété par un jeu interactif dans lequel l’internaute teste ses « qualités de prospecteur ». Cette séquence ludo-éducative, entièrement conçue avec la technologie flash, s’adresse tout particulièrement aux jeunes, leur offrant la possibilité d’approfondir leurs connaissances.

Longtemps considérée avec suspicion, l'archéologie aérienne est aujourd’hui devenue une opération prioritaire pour la gestion du patrimoine enfoui. La France est prospectée d’avion avec de très grands succès par une cinquantaine de spécialistes, grâce aux efforts considérables mis en place par le ministère de la Culture et des Collectivités territoriales. Enfin, dans ce site web du ministère de la Culture (mission de la recherche et de la technologie), la législation de l’archéologie est rappelée, ainsi que les adresses de toutes les directions régionales des Affaires Culturelles où les autorisations doivent être obligatoirement demandées. Enfin, on trouvera dans ce site Web une bibliographie détaillée des publications de Roger Agache dont on ne donne ici que les principaux titres.

Notes et références

  1. notice BNF no FRBNF12367402p
  2. « Le dernier envol de Roger Agache », Le Courrier Picard', 20 septembre 2011
  3. numéro spécial 17, 2 volumes, 1999
  4. www.archeologie-aerienne.culture.gouv.fr


Bibliographie sélective

  • Agache R. (1962) - Vues aériennes de la Somme et recherche du passé. Bulletin de la Société Préhistorique du Nord, n° spécial 5, 73 pages, 93 fig.; Amiens.
  • Agache R. (1964) - La prospection aérienne sur sols nus et l'inventaire archéologique de la Somme, pp. 49-58, 6 fig. Actes du colloque international d'archéologie aérienne, du 31/08 au 3/09/1963, SEVPEN, Paris.
  • Agache R. (1964) - Archéologie aérienne de la Somme. Bulletin de la Société préhistorique du Nord, n° spécial 6, 67 p., 178 fig.
  • Agache R. (1970) - Détection aérienne des vestiges protohistoriques, gallo-romains et médiévaux dans le bassin de la Somme et ses abords. Bulletin de la Société Préhistorique du Nord, Amiens, n° spécial 7, 220 pages, 448 photos. Dans le retirage de 1971, la qualité des planches photographiques a été nettement améliorée.
  • Agache R. ( (1975) - La campagne à l'époque romaine dans les grandes plaines du nord de la France d'après les prospections aériennes. In : Aufstieg und Niedergang der römischen Welt, vol. II, n° 4, Walter de Gruyter, Berlin-New-York, pp. 658 à 713, 12 figures, 27 photos.
  • Agache R. (1976) - Les fermes indigènes d'époque pré-romaine et romaine dans le bassin de la Somme. In : Cahiers Archéologiques de Picardie, n° 3, pp. 117-138, 42 fig.
  • Agache R. (1978) - La Somme pré-romaine et romaine d'après les prospections à basse altitude. Mémoires de la Société des Antiquaires de Picardie, Amiens, n°24, 515 p., 273 photos, 41 fig. La plus importante étude régionale dont les conclusions sur l'habitat antique dépassent largement le cadre régional; un complément d'une centaine de photos nouvelles est paru dans les Cahiers Archéologiques de Picardie en 1979, n° 6, pp. 33-90.
  • Agache R. (1988) - L'archéologie aérienne. Encyclopaedia Universalis, Paris, t.2, pp. 517-523, 18 photos.
  • Agache R. et Bréart B. (1975) - Atlas d'archéologie aérienne de Picardie. La Somme Protohistorique et Romaine. Société des Antiquaires de Picardie, Amiens; 2 grands volumes in plano, t. 1 : présentation et répertoire, 164 pages et 196 fig.; t. 2, cartes archéologiques couleurs, 18 feuilles I.G.N. au 1/50 000e. Le seul atlas d'archéologie aérienne publié en France.

Filmographie partielle

  • Archéologie aérienne du nord de la France - Détection des vestiges protohistoriques et gallo-romains Production SFRS-CERIMES 1973. Auteurs : Roger Agache. Réalisateur  : J.-P. Baux.
  • Méthodes modernes de fouilles archéologiques Production SFRS-CERIMES 1967. Auteurs : Roger Agache, J. Combier, Henry de Lumley, André Leroi-Gourhan. Réalisateur  : J.-P. Baux.
  • R. Agache, le détective du ciel - (réalisateur : P. Goethals). Coproduction Cercle bleu (série portrait F3 L E00614) et FR3 Nord-Picardie, 26 min, 1997
  • L'archéologue volant : R. Agache - (réalisateur : J. Mitsch). Cinquième chaîne et FR3 Sud dans la série Les dessous de la terre de Francis Duranthon, 27 min, 26 octobre 1999 et 24 janvier 2000
  • Interview de R. Agache. In: Gens du Nord et de Picardie, sous la direction de J. Paugam, 55 min, 1988 (première diffusion : 13/12/1988)

Liens externes


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Roger Agache de Wikipédia en français (auteurs)

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