- As (monnaie)
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L'as (du latin aes, « bronze ») était une monnaie de bronze ou de cuivre de la Rome antique. Son poids et son aspect ont considérablement évolué au fil des siècles.
Sommaire
L’as sous la République
Dans son histoire des débuts de la République romaine au Ve siècle av. J.‑C., Tite-Live fait référence à l’as comme unité de compte, par exemple dans les évaluation du cens ou dans les montants d’amendes[1]. Au début du IIIe siècle av. J.‑C., on se sert de gros lingots de bronze (jusqu’à 5 livres romaines soit environ 1,6 kg), fondus sous forme rectangulaire, à l'effigie d'un bœuf ou d'un mouton (aes signatum). Peu maniable, l’aes signatum cesse d’être fabriqué au milieu du IIIe siècle. À la même époque apparaît l’aes grave ou aes libralis (c'est-à-dire bronze d’une livre), coulé en forme ronde, avec une masse théorique normalisé, en théorie car les variations de coulée d’un moulage à l’autre engendraient des écarts de masse. Assez lourd à l’origine (une livre romaine soit 320 g), cet as est subdivisé en monnaies plus petites, distinguées par les marques sur les faces. Ceci donne par exemple la série suivante émise entre 290 et 240 av. J.-C.[2] :
Aes rude
Aes rude (bronze brut ou non travaillé) est un type de pré-monnaie romaine constitué en pièces irrégulières de bronze. Techniquement on ne peut parler de monnaie parce qu’elle en a pas la forme, il y manque les signes d’identification, sa valeur et l’autorité qui émet.
Les populations d'Italie Centrale, Rome compris, utilisaient en principe pour les échanges, comme métaux, uniquement le cuivre et le bronze.
Au début furent utilisés des pièces de métal de formes irrégulières, de diverses dimensions, directement issues de la fusion à l’état brut et sans aucune finition. Leur valeur était déterminée par la masse, qui n’était pas uniforme et variait de 3 kg jusqu’à 0,5 kg. Vu leur poids considérable, ces lingots doivent être interprétés comme réservés à la thésaurisation plutôt qu'au commerce quotidien. Ces lingots circulaient au centre de l’Italie, même si quelques lingots ont été découverts à Parme et Bologne.
Vue la grande variété de lingots, en masse et en forme, on suppose qu’ils étaient fabriqués selon les besoins. À partir du VIIe siècle av. J.‑C., des “types” ou “empreintes”, dont la plus connue est le « rameau », sont apposés sur les lingots, certainement pour les différencier d’autres pièces analogues ou pour en faciliter la découpe. Des lingots présentant ce genre d’empreinte ont été découverts dans différents points d’Italie, Bologne, Parme, Marzabotto, Mantoue, en Ombrie et en Toscane. Un de ces lingots a été découvert dans un puits pour offrandes à côté du temple de Déméter à Bitalemi près de Gela en Sicile, et d’après la stratigraphie, est daté de 560-540 av. J.-C.[3] D’autre empreintes adoptées sont l’arête de poisson ou une étoile à huit pointes.
Dans un second temps, pour réduire les opérations de pesée, sont utilisées des formes plus régulières avec un signe indiquant la valeur, dites aes signatum. En général, il s’agit de pièces de bronze de formes approximatives parallélépipédiques ou ovoïdales sur une ou deux faces, de fabrication présumée privée et non étatique.
Plus tard, vers le IIIe siècle av. J.‑C. on commence à émettre des 'aes grave.
Aes Signatum
Aes signatum, (en latin, bronze, cuivre contresigné), est le terme que les numismates modernes utilisent pour désigner des lingots de bronze coulé qui étaient utilisés en Italie centrale avant l’émission de Aes grave[4].
L’ aes signatum fut produit dans la première moitié du IIIe av.J.-C., et suit l’ Aes rude.
La masse des barres était d’environ 1,5 kg et avait une valeur de 5 as. Les aes signatum n’avaient pas de valeur faciale et donc n’avaient pas d’empreintes fixes, ces lingots, comme les aes rude, valaient ce qu’ils pesaient et pour cela, ils étaient « taillés » selon le besoin. Les lingots présentaient des figures, une par face, presque des empreintes primitives. Par exemple les couples : Achille tenant un éclair sur une face et Pégase sur le revers, une épée et un fourreau, un éléphant et un porc. Ce dernier type a permis de dater le lingot de 275 av. J.-C., année de la défaite de Pyrrhus Ier et du transfert à Rome, pour la première fois, de ces pachydermes, qui impressionnèrent le peuple. La présence du porc s'explique par le passage de Élien[5] selon lequel ces animaux furent utilisés pour épouvanter les éléphants ; en fait les porcs une fois couverts de poix furent enflammés et les grognements émis épouvantèrent les pachydermes.
Les aes signatum furent remplacés par les aes grave.
Aes grave ou aes libralis
Avec le terme aes grave (bronze lourd) les écrivains romains indiquaient les monnaies pesantes en bronze des premiers temps de la république.
En numismatique, on désigne ainsi les monnaies coulées de bronze du IVe et IIIe siècle av. J.‑C. émises en Italie centrale par diverses populations, et caractérisées par un signe indiquant la valeur.
Dans les premières séries, un As pesait 320 gr environ, soit une livre romaine ou 12 onces, d'où son appellation aes libralis (du latin libra, livre), et la masse des sous-multiples était directement proportionnel à leur valeur, un « semis » (qui valait 1/2 As), et ainsi de suite jusqu’à l’Once, de la valeur de 1/12 d’As. Dans cette série, les monnaies étaient toutes coulées, et différenciées par le motif sur la face et le revers. Le tableau ci-dessous donne la série dérivée de l'as libralis de 320 g environ, émise durant la période -290 à -250 environ[4].
La masse de l'As passe vers 250 et de 12 à 10 onces soit 260 gr environ et ses sous-multiples connaissent une diminution proportionnelle, alors que les valeurs nominales restent inchangées. Des motifs différents permettent de distinguer les nouvelles séries.
l'As frappé
La frappe de l'as commence au début du IIIe siècle, lors de la guerre contre Pyrrhus. La seconde guerre punique voit l'apparition de monnaie romaines d'argent, le denier valant 10 as et le sesterce valant 2 as et demi, et provoque plusieurs dévaluations de l’as[6].
La masse théorique de l’as évolua ainsi durant la République[7],[8]:
Évolution de la masse de l’As républicain Date Type Poids en once Poids en gramme vers 300 as libralis 12 onces 320 g vers 250 as libralis 10 onces 270 g 217 as semilibralis 6 onces 164 g 214 as quadrantalis 3 onces 82 g 211 as sextantalis 2 onces 55 g 178-170 as uncialis 1 once 27 g 91 as semiuncialis 1/2 once 14 g Les dates sont approximatives et av. J.-C., et la chronologie de la période instable de l'as durant la seconde guerre punique ne se retrouve pas d'un auteur à l'autre. Le tableau suit principalement Georges Depeyrot, spécialisé dans les questions numismatiques, tandis que Marcel Le Glay situe l'as de 4 onces en 217 et d'une once en 211 [9]
Les motifs sur la face permettaient de distinguer l’as et ses sous-multiples, tandis que tous les revers arboraient une proue de navire.
As et ses sous-multiples (IIe siècle) Monnaie Valeur Motif face Motif revers Dupondius 2 as Minerve Proue As as Janus Proue Semis ½ as Saturne Proue Triens 1/3 as Minerve Proue Quadrans ¼ as Hercule Proue Sextans 1/6 as Mercure Proue Uncia 1/12 as Rome Proue Semiuncia 1/24 as Mercure Proue Vers 145 av. J.-C., le rapport entre l'as et les monnaies d'argent fut modifié[10] :
En 80 av. J.-C., l’atelier monétaire de Rome arrêta ses émissions de monnaies de bronze, as et ses sous-multiples, par pénurie de cuivre. L’as cessait d’être une unité de compte, au profit du sesterce. Le commerce international romain employait le denier d’argent, et pour les échanges locaux, les anciens ateliers de villes d’Orient et quelques ateliers régionaux en Espagne ou en Gaule couvraient les besoins de petites monnaies. Les as frappés avant 80 av. J.-C. restèrent en circulation jusqu’à l’empire.
L’as sous l’Empire
Les guerres civiles firent réactiver la frappe romaine en bronze, par des ateliers locaux en divers points de l’empire, en Orient, en Espagne et en Narbonnaise, particulièrement à Nîmes. En 19 av. J.-C., Auguste réorganisa les émissions de façon cohérente, et reprit la frappe de l’as dans les ateliers impériaux de Rome et de Lugdunum, avec les cotations suivantes[11] :
- un denier d’argent = 16 as
- un sesterce en laiton de 25 g = 4 as
- un dupondius en laiton de 12,5 g = 2 as
- un as de 1/30e de livre de cuivre, soit 10,8 g
- un semis de 1/60e de livre de cuivre = ½ as
- un trians de 1/112 de livre de cuivre = 1/3 as
Ce système reste en vigueur jusqu’au IIIe siècle. Néron dans sa réforme de 64 alterne pour les émissions d’as entre laiton, métal dédié au sesterce, et cuivre, mais l’on revient à l’as de cuivre après sa mort en 68[12].
Le sesterce et le denier prennent progressivement le pas sur l'as, qui disparait de la composition des trésors de la période des Antonins [13]. La crise monétaire et économique du IIIe siècle mit fin aux émissions de monnaie de cuivre et de bronze.
L’as sous le Bas Empire
Les émissions de bronze reprennent sous Dioclétien, mais ses successeurs ne parviennent pas à créer un système stable. Les types de monnaies de bronze varient, et leur poids diminue, sans que l'on connaisse leur dénomination précise. Par convention et malgré le peu de ressemblance avec l'as des siècles précédents, les numismates désignent par aes 2, aes 3 et aes 4 les petites monnaies de bronze émises durant les règnes des Valentiniens et de Théodose Ier [14]. La règle de dénomination est la suivante[15] :
- Aes ou AE1 : plus de 25mm de diamètre
- Aes 2 ou AE2 : entre 21 mm et 25mm de diamètre
- Aes3 ou AE3 : entre 17 mm et 21mm de diamètre
- Aes4 ou AE4 : moinns de 17mm de diamètre
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- Site généraliste sur les monnaies romaines avec de nombreux ouvrages
- Site consacré à la numismatique antique : définitions, articles, notices biographiques
- (en) Catalogues des monnaies romaines de la république et du haut-empire
Bibliographie
Ouvrages généralistes
- Georges Depeyrot, La monnaie romaine : 211 av. J.-C. - 476 apr. J.-C., Éditions Errance, 2006, 212 p. (ISBN 2877723305)
- (en) Akerman John Yonge, A Manual of Roman Coins, Londres 1865. Lien vers l'ouvrage
- Babelon Ernest, Moneta in Mémoire de l'Académie des Inscriptions et des Belles-Lettres, Paris 1913. Lien vers l'ouvrage
- Cohen Henry, Description Historique des monnaies frappées sous l'Empire Romain, deuxième édition, Paris, 1880-1892. Lien vers l'ouvrage
- (en) Gnecchi Francesco, Roman Coins Elementary Manual, Londres 1903. Lien vers l'ouvrage
- (de) Imhoof-Blumer Friedrich, Porträtköpfe auf Römischen Münzen der Republik und der Kaiserzeit, Leipzig 1892. Lien vers l'ouvrage
- Georges Hacquard, Guide romain antique, Hachette, 2005, 50e éd., 224 p. (ISBN 2010004884)
- Marcel Le Glay, Rome, grandeur et déclin de la république, Perrin, 1990, 406 p. (ISBN 2262007519)
- Mommsen Theodor, Histoire de la monnaie romaine, traduction par Le duc de Blacas, Tome I, II, III et IV. Tome I Tome II Tome IV
Ouvrages spécialisés
- (la) De Bye Jacques, Imperatorum Romanorum a Julio Caesare ad Heraclium usque Numismata Aurea, Anvers 1627. Lien vers l'ouvrage
- De Schodt Alphonse, Terme sur les médailles d'Octave-Auguste, in Revue belge de numismatique, Bruxelles 1883. Lien vers l'ouvrage
- De Witte Jean, Médailles de Bonosus, in Revue numismatique, Paris 1859. Lien vers l'ouvrage
- Merlin Alfred, Les revers monétaires de l'empereur Nerva, Paris 1906. Lien vers l'ouvrage
Notes et références
- Tite-Live, Histoire romaine, livre II
- Georges Depeyrot, La monnaie romaine : 211 av. J.-C. - 476 apr. J.-C.
- Orlandini P. 1965-67,Depositi votivi di bronzo premonetale nel santuario di Demetra Thesmophoros a Bitilemi, in "Annali dell'Istituto Italiano di Numismatica".
- Depeyrot 2006, p. 11) (
- Élien, De Natura animalium I, 38.
- Le Glay 1990, p. 74) >(
- Depeyrot 2006, p. 14) (
- Hacquard 2006, p. 105) (
- Le Glay 1990, p. 116) >(
- ISBN 2011455421), p 75 Michel Christol, Daniel Nony, Rome et son empire, des origines aux invasions barbares, Hachette, collection HU, 2003, (
- Depeyrot 2006, p. 32-33) (
- Depeyrot 2006, p. 51) (
- Depeyrot 2006, p. 121) (
- Depeyrot 2006, p. 173) (
- (en) Ancient Greek & Roman Coins, Size Scales for Ancient Coins
Catégories :- Numismatique romaine
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