- Père Lucien Laberthonnière
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Lucien Laberthonnière
Le père Lucien Laberthonnière (Chazelet, 5 octobre 1860 - Paris, 6 octobre 1932) est un théologien, un philosophe et un historien de la philosophie français.
Sommaire
Sa vie
Ordonné prêtre en 1886, il devint l'ami intime de Maurice Blondel après avoir eu la révélation de L'Action. Soucieux de définir ce que pourrait être une philosophie chrétienne, il oppose le « réalisme chrétien et l'idéalisme grec ». Directeur de la revue Annales de philosophie chrétienne (de 1905 à 1913), ses positions sont interrogées par divers théologiens. En 1906, l'ouvrage précédent ainsi que les « Essais de philosophie religieuse » sont condamnés par la censure romaine. En 1913, L' Index condamne les Annales. Labertonnière se soumet à l'interdiction définitive de publier quoique se soit. Blondel le lâche. Peu après sa mort, les ouvrages posthumes sont publiés sans problème. Non seulement les condamnations cessent, mais beaucoup disent découvrir en lui un « prophète ». Les temps ont changés...
Sa philosophie
Les raisons de ces difficultés et de cette réhabilitation posthume se conçoivent aisément.
1°) Laberthonnière conçoit la foi non comme l'adhésion de l'intelligence et de la volonté à la révélation objective de Dieu, mais comme une « expérience de vie » incluant la bonté, la grâce divine qui permet à l'homme de participer à la vie divine. Ces thèses furent jugées inadmissibles par les autorités ecclésiastiques. La lecture de l'encyclique Pascendi Domini Gregis [1]Pascendi peut donner une idée générale des thèses du modernisme qui avaient peut-être séduit le penseur.
2°) Laberthonnière dénonce avec vigueur ce qu'il prétend être l'influence nocive de la pensée grecque sur la pensée chrétienne. Il attaque directement le thomisme qu'il accuse d'aristotélisme. Laberthonnière expose ce qu'il interprète comme l'abîme qui sépare le dieu d'Aristote (logique, égoïste, impersonnel) et le Dieu chrétien (aimant, sauveur, créateur, charitable). Le Dieu de saint Thomas d'Aquin, pourtant reconnu comme saint et docteur commun de l'Église catholique, est vu comme un mélange improbable, illogique et contradictoire, proprement « monstrueux ». On retrouve ici la conception pascalienne du "Dieu des philosophes" qui s'oppose au "Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob". Aussi, le prêtre Laberthonnière va-t-il jusqu'à parler de l'« anti-christianisme du thomisme ». Cette critique radicale de la théologie scolastique et du docteur Angélique ne pouvait que déclencher les foudres vaticanes en pleine restauration thomiste et défense décrets du Concile Vatican I.
Mais il n'hésite pas non plus à attaquer l'agnosticisme cartésien qui voudrait bien se passer de Dieu, mais, ne le pouvant pas tout à fait « n'a pu s'empêcher de lui donner une chiquenaude pour mettre le monde en mouvement : après cela il n'a que faire de Dieu[1] ». Laberthonnière condamne cette sécularisation du monde initiée par Descartes.
3°) Il dénonce vigoureusement ce qu'il interprète comme la confusion de l'Église avec la hiérarchie ecclésiastique, la conception absolutiste de l'autorité qui défend les vérités dogmatiques, mais paraît délaisser les vertus chrétiennes de charité. Pour Laberthonnière, l'autorité vraie rayonne de bonté. Le Christ lui-même montre le chemin : autorité suprême de l'Église, il est la Charité divine en acte.
L'intellectuel doit donc être soumis au spirituel, l'idée à l'acte, l'ordre de la connaissance à celui de la charité. On voit ici le primat de l'action et de la volonté retrouvé aussi chez Blondel. Laberthonnière ne récuse bien sûr pas les vérités dogmatiques en tant que telles, mais il les subordonne à l'amour du prochain qui se traduit par le don de soi et la charité inconditionnelle que le Christ à manifesté pour toute l'humanité. Là encore, ce genre d'idées étaient trop proches du modernisme condamné par le Vatican[2]. [2]Erreurs du modernime dénoncées par l'encyclique du pape saint Pie X.
Dans sa générosité peu diplomatique, l'œuvre de Laberthonnière n'anticipe pas moins certains courants philosophiques et théologiques liés à ce qui est décrit comme une "interprétation humaniste" et non-intellectualiste du message évangélique.
Ses œuvres
- Théorie de l'éducation, 1901.
- Essais de philosophie religieuse, 1903.
- Le réalisme chrétien et l'idéalisme grec, 1904.
- Positivisme et catholicisme, 1911.
- Autour de l'Action française, 1911.
- Le témoignage des martyrs, 1912.
- Sur le chemin du catholicisme, 1913.
Publications posthumes (chez Vrin) :
- Études sur Descartes, 2 vol., 1935.
- Étude de philosophie catésienne et Premiers écrits philosophiques, 1937.
- Esquisse d'une philosophie personnaliste, 1945.
- Pangermanisme et christianisme, 1945.
- Sciut ministrator, 1947.
- Critique du laïcisme, 1948.
- La notion chrétienne de l'autorité, 1955.
Notes et références
- ↑ Cette formule célèbre de Blaise Pascal sur Descartes est souvent citée par les étudiants en philosophie comme une sorte de proverbe anonyme. Ce n'est pas le cas pourtant.
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