Prothèse totale de hanche

Prothèse totale de hanche

Prothèse de hanche

Radiographie d'une prothèse de hanche

Une prothèse de hanche est un dispositif articulaire interne qui vise à remplacer l'articulation de la hanche et lui permettre un fonctionnement quasi normal, en tout cas permettant la marche.

  • Une PTH dite de « première intention » est une prothèse posée sur une hanche en principe "vierge", par opposition à
    • la "reprise de PTH" ou même
    • "la PTH de reprise" d'une hanche déjà opérée, voire déjà infectée.

Sommaire

Histoire des prothèses 1920-1980

Prothèses de hanches 1920-1980

« Tantale servit aux Dieux les membres de son fils Pelops. Les Dieux indignés ressuscitèrent Pelops. Une épaule déjà mangée par Demeter fut remplacée par une articulation divoire » (Ovide, Métamorphose, livre 6, vers 410-415).

Du fond de la mythologie, la première endoprothèse était née.

Au début du vingtième siècle, les chirurgiens orthopédistes sont confrontés à deux types datteinte de la hanche: larthrose et la fracture du col du fémur. Les conséquences de larthrose sont connues. Avec lusure, du cartilage disparaît, ce précieux revêtement qui permet le glissement harmonieux de la tête du fémur à lintérieur de la cavité cotyloïdienne. Pour remplacer le cartilage perdu, de nombreux matériaux sont interposés entre la tête du fémur et le cotyle : plâtre, buis, caoutchouc, plomb, zinc, cuivre, or, argent ou fragment de vessie de porc ….
Aucune de ces interfaces ne convient : trop fragile, trop mou, trop toxique.

Les premiers résultats convaincants sont obtenus, en 1923, par Smith-Petersen. Ce jeune chirurgien de Boston a déjà fait parler de lui en inventant au début de son internat une nouvelle voie dabord antérieure de la hanche. Lors de son exercice il extirpe du dos dun patient un éclat de verre resté en place une année et parfaitement supporté par lorganisme. Lobservation de cette réaction lui donne lidée dune application orthopédique. Il fait construire de fins moules de verre quil interpose entre les deux surfaces de la hanche. Cette lentille de quelques millimètres dépaisseur « guide le travail de réparation de la nature». Hormis sa fragilité linconvénient majeur de cette méthode reste la nécrose de la tête fémorale liée à la section des vaisseaux pendant lopération.

A la même époque Hey-Groves (1922) propose une autre approche particulièrement intéressante dans les fractures du col. En effet lors de ce traumatisme la vitalité de la tête fémorale est compromise par le cisaillement des minces vaisseaux qui lirriguent. Il remplace donc la tête dans sa totalité par une sphère divoire de même calibre. Sa fixation est assurée par un manche qui traverse la diaphyse fémorale. La prothèse prend à la fois la place de la tête fémorale et de la surface articulaire quelle porte. Cette intervention reste un cas isolé bien que le résultat soit satisfaisant quatre ans après lintervention.

Les prothèses fémorales

Malgré de nombreuses recherches le matériau idéal solide et bien toléré par lorganisme se fait attendre. Une solution est proposée en 1936 par le Dr. Venable. Après avoir expérimenté de longues années les effets de différents métaux sur los celui-ci conclut à la supériorité de lalliage Chrome-Cobalt-Molybdène pour les applications orthopédiques. Il lappelle Vitalium.

En 1939 Harold Bohlman reprend les travaux de Venable et met au point la première prothèse fémorale en métal (Vitalium). Celle-ci remplace la tête du fémur et le cartilage qui la recouvre. Cette solution fait disparaître le risque de nécrose rencontrée dans les suites des cupules dinterposition. Cependant une nouvelle question se pose : comment faire tenir cette tête prothétique ? Bohlman choisit de fixer la tête métallique à la corticale externe du col fémoral par un clou. Les deux premières opérations se soldent par un échec ce qui amène Bohlman à verticaliser le clou.

Durant les années qui suivent quelques tentatives voient le jour. Les résultats sont peu concluants et les interventions très peu nombreuses.

Ce sont les frères Judet qui conçurent, en France, en 1946, la première prothèse posée en nombre (on dénombrait moins de dix tentatives précédentes). Jean Judet n'avait jamais aimé le blocage de larticulation (arthrodèse) proposé à lépoque pour soulager les arthroses sévères. Il préférait réséquer la tête fémorale pathologique et articulait le col fémoral dans le cotyle car « en arthrodèsant une hanche douloureuse vous substituez une infirmité à une autre ». À partir de 1946 les deux chirurgiens remplacent la tête retirée par une sphère de même calibre en méthacrylate de méthyle plus connu sous le nom de plexiglas. Celle-ci est fixée sur un pivot traversant de part en part le col du fémur. Dans tous les cas les résultats immédiats sont bons puis décevants dès le moyen terme. Ces échecs sont dus à une intolérance aux débris dusure de lacrylique qui sera définitivement abandonné en 1949.

Austin Moore a déjà conçu avec Bohlman en 1940 une méga prothèse métallique peu posée. Le procédé de fixation révolutionnaire quil propose pour maintenir la tête fémorale date lui de 1950 : la tête métallique sera portée par une tige fichée dans le canal médullaire du fémur. Depuis cette date la quasi-totalité des implants fémoraux reprendront ce concept de tige intra médullaire.

A cette époque, Moore est le chirurgien de l'Hôpital Psychiatrique de létat de Columbia, qui dispose de 7000 lits. Les fractures du col du fémur sont fréquentes chez des patients en général âgés, souvent en mauvais état général. Le pronostic de cette lésion est transformé. Quelques jours après l'opération les opérés évoluent dans les couloirs de l'hôpital ce qui est très nouveau. À l'époque la fracture du col du fémur était une cause de mort fréquente chez le vieillard. La prothèse de Moore est en Vitallium. Une fenêtre est pratiquée dans la queue prothétique pour permettre la repousse de los. Un trou est placé à la partie supérieure du col. Il sera utilisé, si nécessaire, pour extraire la prothèse.

Au début les poses seffectuent par voie dabord antérieure. Lopération est difficile et les résultats médiocres : les luxations sont fréquentes. Moore modifie donc la technique opératoire. Il utilise un abord de plus en plus postérieur que lon surnommera en clin dœil « labord du Sud » ou voie de Moore. La prothèse fémorale simple prend en charge les pathologies liées à la tête fémorale. Cette solution est très utile pour le traitement des fractures du col du fémur.

Toutefois dans larthrose, face à la tête métallique, le cartilage usé du cotyle reste inchangé. Ce traitement nécessite une prothèse totale ou la tête fémorale et le cotyle sont remplacés.

Les prothèses totale de hanche

De l'autre côté de lAtlantique, Mac Kee cherche à résoudre le double problème posé par larthrose de hanche. Lusure du cartilage est bilatérale. Il propose de changer les deux surfaces. Son choix se porte sur le métal. La nouvelle tête fémorale roulera dans le cotyle osseux recouvert dune coque métallique. Suivant son exemple le couple de glissement métal contre métal entre tête et cotyle deviendra la solution proposée pendant de nombreuses années par les concepteurs de prothèses de hanche.

Mac Kee conçoit un premier prototype en 1941 suivi dune première pose10 ans plus tard. Ses recherches se poursuivront 40 ans. Dès ses débuts la fixation à los reste le problème principal. La pièce cotyloïdienne est fixée par une grosse vis postérieure inspiré des vis darthrodèses de lépoque. La pièce fémorale se fixe à la corticale diaphysaire par une plaque.

En 1951 Mac Kee implanta pour la première fois trois de ces prothèses totales de hanche. Dans deux cas la prothèse est en acier inoxydable et se descelle en moins dun an. La troisième est en Vitalium, recommandé par Venable depuis 1936. Cet alliage ne présente pas cette tendance si commune au « grippage ». La prothèse resta en place plus de trois ans, avant que le col prothétique ne casse, ce qui redonne lespoir au chirurgien après toutes ces années de travail.

En 1953, Mac Kee rencontre son confrère Américain, le médiatique Thompson. Celui-ci propose, depuis 1952, un modèle ressemblant à la prothèse de Moore mais sans fenêtre. Il le convint de la fiabilité de la fixation de la prothèse fémorale par une tige intra médullaire. Le modèle suivant comporte donc une pièce fémorale type Thompson avec une tête un peu plus petite pour pouvoir sarticuler à lintérieur du cotyle prothétique métallique.

Ce modèle est utilisé de 1956 à 1960. 26 personnes seront opérées. Les résultats sont assez satisfaisants à plus de 10 ans. Mais dans 10 cas sur 26 cest un échec par descellement. À lépoque Mac Kee attribue cette mauvaise tenue des implants aux frottements répétés dune pièce métallique sur lautre. Pour résister à cette sollicitation, il cherche à améliorer le système de fixation des implants. La véritable cause de ces descellements ne sera comprise que bien plus tard.

Jusquen 1960 Mac Kee propose comme solution au problème posé : soit une tige Vitalium portant une grosse tête femorale s'articulant dans un cotyle métallique en Vitalium, et une tenue des deux composants par fixation mécanique ; soit une tige fémorale et une grosse vis cotyloïdienne

Les résultats de ce type de prothèse sont inégaux. Malgré les améliorations apportées par Mac Kee, il persiste dans un grand nombre de cas des descellements précoces. À lépoque la cause en est attribuée au frottement ou « grippage » entre les deux pièces métalliques trop contraignant pour la méthode de fixation mécanique des implants.

Ce nest que bien plus tard, en 1974, que lon comprendra la raison véritable de ces descellements : lorganisme humain réagit face aux débris dusure relargués dans la nouvelle articulation. Les macrophages éliminent les particules étrangères et sattaquent, dans le même temps, à los environnant : cest lostéolyse qui ronge los et fragilise la fixation prothétique.

Les prothèses totales cimentées

C'est le professeur John Charnley qui est à l'origine d'une véritable révolution dans le domaine de la prothèse de la hanche.

Son concept s'appuie sur plusieurs principes complémentaires et totalement innovants : nouveaux matériaux, fixation au ciment, nouvelle taille de tête prothétique, nouvelle opération. C'est à partir de 1970 que plus d'un million de ses prothèses seront posées. Il s'en pose encore aujourd'hui.

Charnley proposa une diminution du frottement entre les deux surfaces articulaires, qui était responsable du « grippage » dans les prothèses métal-métal. C'est donc en 1959 qu'il mesura le coefficient de frottement d'une articulation normale et la compara à celui d'un patin glissant sur de la glace. Bien sûr, les technologies de l'époque ne permettaient pas encore de fabriquer des pièces articulées avec des coefficients de friction aussi faibles, surtout dans le cas des mouvement pendulaires lents et en pleine charge. Dans ses expériences, Charnley confirma néanmoins que les propriétés mécaniques de larticulation venaient du cartilage articulaire et non du liquide synovial.

Charnley chercha un matériau pour remplacer le cartilage détruit dans le coxarthrose. Mais celui-ci devait offrir un faible coefficient de friction et pouvoir être toléré par l'organisme, c'est-à-dire biocompatible. À cette époque, c'était le polytétrafluoroéthylène ou Téflon qui semblait remplir ces critères. C'est donc Charnley qui développa le concept d'articulation synthétique en recouvrant les surfaces articulaires d'une fine pellicule de ce plastique. Ces minces cupules donnèrent des résultats immédiats. Mais comme les cupules de Smith-Petersen, il y avait le problème de la nécrose ischémique. Les résultats ne furent pas au rendez-vous mais Charnley venait de faire l'expérience d'un nouveau matériau : le plastique.

En 1960 Charnley décida alors de diminuer encore le risque de descellement en diminuant le frottement entre la pièce fémorale et la pièce cotyloïdienne. Il séloigna du diamètre naturel dune tête de fémur passant de 41 millimètres à 22 millimètres. La démonstration était mathématique : plus la tête fémorale est petite et moins la surface de frottement est importante. Ce fut la fameuse « prothèse à faible friction » (low-friction arthroplasty). Ce petit diamètre de tête fémorale avait un autre avantage : il laissait plus de place pour le cotyle en Téflon à lintérieur de los cotyloïdien. Lépaisseur du cotyle a donc pu être augmentée.

Charnley s'intéressa aux prothèses de Moore qui résolvait le problème de la nécrose ischémique en remplaçant la tête fémorale. Mais comme les frères Judet, elles ont le problème de descellement. Grâce aux travaux du docteur Wiltse publiés en 1957, Charnley retient la possibilité dutiliser lacrylique autodurci comme méthode de fixation prothétique. Lacrylique est déjà utilisé par les dentistes. À partir de 1959, les prothèses seront fixées avec du polyméthacrylate de méthyle quil appellera ciment à os . Une dizaine de patients ont été opérés et comme prévu, les résultats furent bien meilleurs que ceux obtenus avec la même prothèse sans ciment. Après avoir vu ces résultats, Charnley proposa donc de cimenter ses prothèses.

Afin d'améliorer les performances de ses prothèses au niveau du cotyle tout en diminuant encore le coefficient de frottement, il fera frotter sur le Téflon plutôt que sur du cartilage abimé. Sa prothèse devint alors totale. Pour le cotyloïde il reprit ses premiers cotyles en Téflon et posa des prothèses que lon peut qualifier dhybrides, composées dun cotyle de type « cartilage artificiel » de son invention en face dun élément fémoral en métal, de type Moore, fixé au « ciment à os ». Les résultats furent assez bons ; mais le cotyle très fin susait rapidement et continuait à se desceller dans un grand nombre de cas.

Mais du fait que la tête fût plus petite, la pression que la cupule subissait était grande et s'usait de ce fait beaucoup trop vite. Charnley ne revint pas en arrière, persuadé que le principe de la petit tête était le bon, il préféra trouver un matériau plus solide que le Téflon. Il prit en 1962 le polyéthylène. Celui-ci possède un coefficient de friction contre lacier 5 fois supérieur au Téflon mais sa résistance à lusure est 500 à 1000 fois supérieure. La prothèse de Charnley sera donc cimentée avec une petite tête métallique de 22 mm roulant dans un cotyle en polyéthylène.

Un nouveau problème se présenta chez les patients opérés : les petites têtes fémorales se luxaient plus fréquemment. Charnley essaya de changer sa voie d'opération et proposa une solution : la trochantérotomie. Elle nécessitait une incision latérale, ainsi qu'un sectionnement du grand trochanter pour dégager larticulation. Celui-ci devra être cerclé avec des fils métalliques en fin dintervention ce qui devait retendre les muscles fessiers, éléments stabilisateurs de la hanche. Cette technique permettait de réduire grandement les risques de luxation avec une reprise de l'appui du côté opéré cinq semaines après l'opération.

Charnley proposa donc au monde orthopédique une triple solution au problème posé : la première était une baisse de friction et donc un faible taux d'usure par roulement d'une tête métallique de petit diamètre dans un cotyle épais en plastique polyéthylène, la seconde solution est une fixation des composants par un ciment acrylique, et la dernière est la voie d'abord : la section de l'os trochantérien pour retendre les muscles fessiers et diminuer les risques de luxation dues au petit diamètre de la tête fémorale prothétique

Ce trépied établissait un juste équilibre entre les trois risques : usure, descellement et luxation

Devant les résultats impressionnants de son concitoyen Charnley, Mac Kee commence à cimenter lui aussi ses prothèses en 1960. Il utilise le même ciment. Il fixe lélément fémoral et lélément cotyloïdien, ce que ne fait pas Charnley au début. La prothèse utilisée est métal-métal associant un composant fémoral de type Thomson à un cotyle qui perd sa grande vis postérieure du fait de la fixation au ciment.

Cest à cette époque que Farrar rejoint Mac Kee. Le problème principal auquel ils sont confrontés est le conflit entre le large col de la prothèse de Thomson et le bord du cotyle métallique dans les mouvements de grande amplitude. En 1961 le col est affiné. En 1965 lélément fémoral est redessiné avec un col étroit à section biconcave comme sur la tige fémorale de Charnley.

En 1974, la persistance des descellements est enfin comprise : ce nest pas la forme de la prothèse qui est en cause, ni le ciment, mais les débris métalliques dus aux frottements métal sur métal. Cette métallose induit une réaction de lorganisme source du descellement. Comme Charnley, Mac Kee et Farrar décident donc dabandonner le couple métal-métal pour utiliser une cotyle polyéthylène à haute densité. Après 35 ans de loyaux services le couple métal-métal disparaît du paysage orthopédique dans lattente du progrès des biomatériaux.

Toutefois ce changement de couple de friction ne suffira pas. Face aux têtes prothétiques de gros diamètre les cotyles en polyéthylène restent fins. Lusure est bien plus importante. Ceux-ci sont pulvérisés en quelques années. Les petites têtes fémorales de type Charnley permettent une plus grande épaisseur de plastique.

McKee commentait avec esprit en 1982: we always learn more from our failures than our successes

Le Suisse Maurice Müller ne souhaite pas utiliser la voie dabord proposée par Charnley. Il préfère à la section de los trochantérien une voie postérieure de Moore. Cette voie permet à ses patients une reprise de lappui immédiat alors que la trochanterotomie préconisée par Charnley induit une période de non appui de plus dun mois.

En contre partie, le risque de luxation saccroît avec la voie postérieure. Pour y remédier, Müller augmente dans un premier temps le diamètre de la tête fémorale de 22 mm. à 32 mm. Le taux de luxation diminue mais lusure du cotyle polyéthylène est alors plus importante. Le trépied proposé par Charnley doit trouver un nouvel équilibre. À partir de la voie postérieure considérée comme moins agressive un nouveau consensus sétablit entre luxation et usure. Le diamètre de la tête fémorale sera de 28 mm.

La forme de la tige cimentée proposée par Müller est également différente. Cette tige sera surnommée la prothèse « banane » à cause de sa forme. Le cotyle est également en polyéthylène.

Müller propose une variante à la triple solution proposée par Charnley :

  • Friction faible par roulement dune tête métallique de diamètre 28 mm dans un cotyle épais en plastique polyéthylène. Toutefois le taux dusure sera plus important quavec une tête de 22mm.
  • Fixation des deux composants par un ciment acrylique comme pour Charnley.
  • Voie dabord postérieure ce qui permet une reprise immédiate de lappui.

Les années 70

Au début des années 1970 le monde de lorthopédie connaît et analyse avec un certain recul, tant temporel que numérique, les résultats de la technique de Charnley. Ils sont bons et même très bons.

La fixation par le ciment résout le problème de la tenue des prothèses de hanche à tel point quelle devient obligatoire aux États-Unis à partir de 1972. En association le faible taux de friction entre petite tête métallique et cotyle permet de diminuer lusure du couple de frottement.

Avant Charnley une prothèse devait durer 5 voire 10 ans, ce qui la réservait aux personnes les plus âgées. Avec Charnley, les prothèses durent souvent plus de 15 ans. Le temps passe. Au début des années 1980 les premiers descellements surviennent.

En occident, des centaines de milliers de prothèses totales de hanche sont posées chaque année. Merle dAubigné participe à la diffusion de ce type de prothèse en France à lHôpital Cochin elle sont toujours posées aujourdhui par la même voie dabord : la trochanterotomie.

Cependant certains éléments vont progressivement modifier lutilisation systématique du ciment. Les patients ont changé. Il devient de moins en moins admissible de souffrir dune maladie de la hanche et les opérés sont de plus en plus jeunes. Le travail demandé à larticulation artificielle est de plus en plus proche dune articulation normale avec reprise dactivité en force voire sportive.

« Le ciment acrylique se trouve donc peu adapté à ces nouvelles conditions. Los humain, surtout chez le jeune sujet, est une structure évolutive en perpétuelle activité de remodelage en fonction des contraintes biomécaniques à la marche et à leffort. » Jean-Alain Epinette.

La poursuite des prothèses sans ciment entre 1970 et 1980

Durant cette période la prévalence des techniques proposées par Charnley est telle que les initiatives pour sen éloigner sont peu nombreuses et le fait de personnalités marquantes.

Deux axes de recherches soffrent à ces chirurgiens : lexploration de nouveaux types de fixation plus performants que le ciment et celui dun nouveau couple de friction : le couple céramique-céramique. Durant cette décennie ce couple prometteur est imaginé et adapté par un seul chirurgien, véritable précurseur, le français Boutin.

La fixation

En 1956, Siwash, un chirurgien soviétique, met au point en URSS la première prothèse totale de hanche à ancrage direct tant pour la tige que pour le cotyle. Très innovante, la surface extérieure de la pièce cotyloïdienne comporte trois couronnes d'aspérités tranchantes et fenêtrées en « pétales » ou en « rosace » destinées à l'ancrage osseux direct. Posée pour la première fois en 1956, ce concept, élaboré en URSS, passera inaperçu. Il sera découvert en Europe quinze plus tard.

Entre 1970 et 1980 différentes propositions de fixation de la tige fémorale sans ciment voient le jour : par Judet en France (1971) ; Lord En Angleterre (1974) ; Engh aux États-Unis (1977); Zweimüller en Autriche (1979)

Judet propose en 1971 une prothèse à ancrage direct. Il nomme cet alliage à base de cobalt le porométal parce que les billes qui le recouvrent sont séparées par des pores. Il pose 1611 de ces prothèses jusquen 1975, mais de nombreux échecs surviennent dues aux mauvaises caractéristiques mécaniques et métallurgiques des implants. Pourtant le coup denvoi est donné et de nombreux modèles vont se développer en France.

En France, le Professeur Lord propose, en 1974, sa prothèse madréporique qui ressemble au corail vivant : le madrépore. Sa surface est composée de billes de 1 mm. Malheureusement cette tige présente plusieurs inconvénients : difficultés dextraction majeures et mauvaise adaptation à long terme os-prothèse ce qui entraîne parfois une résorption osseuse autour de la tige. Ces problèmes ont alors suscité un certain discrédit sur ce type dimplant.

Aux USA, lutilisation du ciment acrylique en chirurgie est interdit jusquen 1967, puis devient obligatoire à partir de 1972. Cest en 1969 que Welsch et coll. commencent un travail de recherche considérable sur la fixation sans ciment. En 1971 naît un revêtement métallique poreux. C'est en 1977 que Engh commence à utiliser ce « porous-coat » sur la tige fémorale de ses prothèses.

En 1979 Zweimüller présente à Vienne une prothèse fémorale dont la particularité est sa forme pyramidale à section rectangulaire. Le principe de fixation est lautoblocage cortical. La tige en titane présente une rugosité de 3 à 5 microns ce qui améliore la fixation primaire sur los. Après 25 ans de recul cette tige sans ciment donne dexcellents résultats à très long terme et est toujours abondamment posée.

Le couple de friction

Les céramiques seront exploitées pour la qualité de la friction céramique sur céramique et pour leur biocompatibilité qui permet un macro-ancrage. Cest P. Boutin, de Pau, qui ouvre la voie en 1970 avec une prothèse totale de hanche dont le cotyle est en céramique et la pièce fémorale en deux parties : une tête en céramique fixée sur un corps en acier.

Comme pour les couples précédents, métal-métal ou métal-plastique, la fixation des deux composants est un souci constant car le cotyle céramique accepte mal le ciment et la fixation de la tête sur la tige métallique, par collage ou vissage, est incertaine. En 1971 le cotyle devient non cimenté. Lancrage est direct par des reliefs macro-géométriques de 1 mm. En 1975 des plis de surface sont pratiqués sur la tige ce qui permet une implantation sans ciment. En 1977 la tête céramique est fixée sur la tige par un emmanchement conique.

Une anecdote rapporte que cette innovation majeure de P.Boutin serait née de l'observation du système de rotation à faible friction des tourelles des chars Leclerc alors basés dans l'important centre militaire de Pau proche de sa clinique. Cette histoire résume le difficile parcours de la pensée créative : rouages complexes ou simple coup de Pau ?

À lissue de cette décennie s'ouvre le concept de la fixation sans ciment par traitement de surface ainsi que celui d'un nouveau couple de frottement dit dur-dur.

Début 2000

Les techniques de fixation sans ciment se développent. La tige fémorale a une surface traitée qui permet son intégration à los. La solution choisie pour le cotyle est celle dune coquille métallique impactée dans los spongieux : le « metal back ». Comme pour le fémur, sa surface extérieure est traitée par des minis reliefs qui permettent son intégration à los du bassin. Les surfaces de la tige et du cotyle prothétique sont volontiers recouvertes dun composant primaire de los : lHydroxyhapatite. Ce fin revêtement accélère lintégration des pièces métalliques.

De nouveaux couples de friction apparaissent. Le couple céramique-céramique prend son essor. La tête fémorale est fixée sur un cône morse, le cotyle est enchâssé dans une coque « metal back ». Un autre couple réapparaît depuis quelques années : le métal-métal. En effet grâce aux progrès dusinage lusure de ce couple est maintenant très faible.

Avec la bonne résolution des problèmes liés à limplant, certains chirurgiens sintéressent à lévolution de la voie dabord. Ces voies mini invasives par mini incision ont été décrites par voie postérieure : Docteur François Prigent ; ou par voie antérieure : Docteur Frédéric Laude. Elles ont un avantage esthétique et surtout fonctionnel car elles épargnent les muscles de la hanche.

Une nouvelle dimension est donnée au respect de larchitecture de la hanche naturelle (notion d'offset). Le choix de la prothèse se fait sur des calques à la fois en longueur mais aussi en largeur. Ces implants s'adaptent à lanatomie du patient afin de conserver les tensions musculaires inchangées.

En 2008

La prothèse totale de hanche (PTH) est une intervention chirurgicale dont lefficacité et la régularité des résultats sont remarquables en assurant

  • le soulagement des douleurs ;
  • lamélioration de la fonction ;
  • l'amélioration de la qualité de vie.

La longévité de la prothèse dépend de plusieurs facteurs dont les principaux sont le type dimplant, la méthode de fixation, la technique de pose (et donc le chirurgien et son équipe).

Lexcellence des résultats de la prothèse de hanche pousse à étendre les indications de cette opération à des sujets

  • aux exigences fonctionnelles lourdes ;
  • aux problèmes danatomie compliqués.

Grands principes de ce traitement

Bilan pré-opératoire

Indications

Tête du fémur lésée

Choix de l'implant

Planification du geste chirurgical

Technique chirurgicale

Modifications architecturales avant et après la mise en place d'une prothèse totale de hanche

Un patient qui a besoin d'une prothèse de hanche en raison d'une destruction de son articulation (traumatique, dégénérative, tumorale, métabolique...) est opéré selon une voie d'abord antérieure ou postérieure.

Dans le cas général, l'intervention, réalisée sous anesthésie générale ou sous rachianesthésie, dure moins de deux heures et le saignement est inférieur à 500 cm³.

Soins post-opératoires

Le patient est en général levé le lendemain en appui total et peut se déplacer avec des cannes béquilles vers le 3e ou 4e jour post opératoire. Il sort de l'hôpital vers cette date pour retourner à son domicile si les conditions le permettent ou pour être admis dans un centre de convalescents. Il restera sous anticoagulants, le plus souvent sous cutanés, pour 5 semaines habituellement. La durée de réhabilitation pour obtenir les pleins bénéfices de la prothèse et retrouver une marche correcte est habituellement de un mois et demi.

Résultats du traitement

Les résultats fonctionnels des prothèses de hanche sont remarquables : l'immense majorité des patients retrouve une marche quasi normale et sans douleur en quelques semaines, et cela pour plusieurs années.

  • Ce serait - si l'on excepte peut-être les grands allongements et les grands déaccourcissements de membres inférieurs en cas de forte inégalité, du point de vue des résultats fonctionnels, par l'ancienneté plus que par le nombre (genoux) la plus remarquable des interventions faites sur l'appareil locomoteur.

Aléas et complications

Infection

L'infection après PTH est heureusement peu commune ; de nous jours, le chiffre de 0.5% pour la PTH est admis en cas de PTH de première intention (Garvin KL et Hanssen AD., 1995), même chez l'obèse.

Le facteur pris isolément le plus important de prévention d'infection précoce serait le recours aux antibiotiques en péri-opératoire (Espehaug B, Engesaeter LB, Vollset SE, et al., 1997).

Une technique opératoire soigneuse, une réduction des allées et venues dans la salle d'opération (personnel néophyte, anesthésiste en nombre insuffisant...), des combinaisons spéciales pour les opérateurs et une circulation d'air à flux laminaire seraient de nature à réduire ce risque d'infection initiale (Garvin KL et Hanssen AD., 1995).

L'infection dite tardive ou à distance de la prothèse serait le résultat de bactérémie.

Les directives de certaines institutions, telles que l'American Academy of Orthopaedic Surgeons (AAOS) sont en faveur de la prescription - au moins au cours des deux années qui suivent la pose de la prothèse - d'antibiotiques de manière préventive à tous les candidats à un geste chirurgical dentaire ou autre susceptible de s'accompagner de bactériémie.

Luxation

La luxation de la prothèse peut être due à un problème de positionnement de celle-ci, de faiblesse musculaire, de balance des tissus mous lors de la chirurgie, d'anatomie, ou à l'imprudence du patient. Cette complication n'implique pas toujours la reprise. L'abord postérieur est statistiquement un peu plus à risque pour ce genre de complication.

Lésion nerveuse

Lésion vasculaire

Ossifications ectopiques

Fracture per-opératoire

Complications tardives

Déscellement de l'implant

Usure du polyéthylène et ostéolyse

Elles sont en rapport avec les matériaux posés et l'activité du patient, qui est le problème principal mais n'est pas prévisible pour un patient et une prothèse donnée car elle dépend de multiples facteurs. Aussi, il est difficile de donner à un patient une estimation de la durée de vie de sa prothèse. Certes chez les patients de moins de 55 ans, les patients très actifs physiquement, les patients obèses avec un Indice de masse corporelle élevé sont plus à risque pour un descellement précoce de l'arthroplastie. Les meilleures séries font état de plusieurs dizaines d'années pour le moment, mais surtout chez des patients peu actifs.
Pour pallier ce dernier problème, on a développé des prothèses utilisant des surfaces de frottement différentes du couple original de Charnley métal et polyéthylène, incluant métal-métal ou des céramiques industrielles dont les résultats sont très encourageants

Résorbtion de l'os au contact de la prothèse ("stress shielding" au niveau de la tige fémorale)

Fracture péri-prothétique

Voir aussi

Voir la vidéo sur l'arthrose et la prothèse totale de hanche dans l'encyclopédie médicale Vulgaris [1]

Voir la vidéo de l'opération de la prothèse totale de hanche sur http://www.mini-post.com

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  • prothèse — [ prɔtɛz ] n. f. • 1695; gr. prosthêsis 1 ♦ Partie de la chirurgie relative au remplacement d organes, de membres, par des appareils. Appareil de prothèse. Étudier la prothèse. Spécialt Partie de la dentisterie qui concerne la confection des… …   Encyclopédie Universelle

  • HANCHE — Située à la racine du membre inférieur, l’articulation de la hanche, ou coxo fémorale, unit le fémur au bassin. Comme son homologue du membre supérieur, l’épaule, la hanche est une énarthrose mobile autour d’une infinité d’axes. Cependant, les… …   Encyclopédie Universelle

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