- Programme de Langlands
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En mathématiques, le programme de Langlands est encore, au début du XXIe siècle, un domaine de recherche actif et fertile en conjectures. Ce programme souhaite relier la théorie des nombres aux représentations de certains groupes. Il a été proposé par Robert Langlands en 1967.
Sommaire
Relation avec la théorie des nombres
La première étape du programme, réalisée bien avant les travaux de Langlands, peut être vue comme la théorie des corps de classes. La loi de réciprocité d'Artin (en) s'applique à une extension de corps de nombres algébriques dont le groupe de Galois est abélien, et considère les représentations de dimension 1 de ce groupe de Galois à valeurs dans le groupe multiplicatif du corps de base. Plus précisément, des fonctions L associées à ces représentations unidimensionnelles sont identiques à certaines séries L de Dirichlet (les analogues de la fonction zêta de Riemann construites à partir des caractères de Dirichlet). La correspondance entre ces différentes sortes de fonctions L constitue la loi de réciprocité d'Artin.
Pour les groupes de Galois non-abéliens et pour leurs représentations de dimensions plus élevées, on peut encore définir les fonctions L d'une manière naturelle : les fonctions L d'Artin.
Le contexte des représentations automorphes
La premier pas de Langlands fut de trouver la généralisation appropriée des fonctions L de Dirichlet qui permettraient la formulation de l'énoncé d'Artin dans un cadre plus général.
Auparavant, Hecke avait relié les fonctions L de Dirichlet avec les formes automorphes (en) (fonctions holomorphes sur le demi-plan supérieur de qui satisfont certaines équations fonctionnelles). Langlands généralisa alors celles-ci aux représentations cuspidales (en) automorphes, qui sont certaines représentations irréductibles de dimension infinie du groupe général linéaire GLn sur l'anneau adélique de . (Cet anneau garde une trace de tous les complétés de , voir nombres p-adiques).
Langlands associa des fonctions L à ces représentations automorphes, et conjectura que chaque fonction L d'Artin issue d'une représentation de dimension finie d'un groupe de Galois d'un corps de nombres est égale à une fonction L issue d'une représentation cuspidale automorphe. Ceci constitue la « conjecture de réciprocité de Langlands ».
Un principe général de fonctorialité
Langlands généralisa encore son programme : à la place du groupe linéaire général GLn, d'autres groupes réductifs (en) peuvent être considérés. De plus, en se donnant un tel groupe G, Langlands construit un groupe de Lie LG, puis, pour chaque représentation cuspidale automorphe de G et chaque représentation de dimension finie de LG, il définit une fonction L. Une de ses conjectures prédit que ces fonctions L satisfont une certaine équation fonctionnelle généralisant celles des fonctions L les mieux connues.
Puis, il formule un « principe de fonctorialité » très général. Deux groupes réductifs et un morphisme entre les groupes L correspondants étant donnés, cette conjecture relie leurs représentations automorphes d'une manière qui est compatible avec leurs fonctions L. Cette conjecture de fonctorialité implique toutes les conjectures présentées jusque là. Cette construction est d'une nature analogue à celle des représentations induites (en) - qui, dans la théorie plus traditionnelle des formes automorphes, a été appelée un relèvement, est connue dans certains cas particuliers, et est covariante (tandis qu'une représentation restreinte (en) est contravariante). Les tentatives pour obtenir une construction directe n'ont produit que des résultats conditionnels.
Toutes ces conjectures peuvent être formulées pour des corps plus généraux à la place de : les corps de nombres algébriques (le cas originel et le plus important), les corps locaux, et les corps de fonctions (extensions finies de où p est un nombre premier et est le corps des fonctions rationnelles sur le corps fini à p éléments).
Idées conduisant au programme de Langlands
Dans un contexte très large, le programme a été construit sur des idées existantes : la philosophie des formes cusp (en), formulée quelques années plus tôt par Israel Gelfand, le travail et l'approche d'Harish-Chandra sur les groupes de Lie semi-simples, et en termes techniques la formule des traces de Selberg et d'autres.
Ce qui, initialement, était très novateur dans le travail de Langlands, excepté la profondeur technique, était de proposer une connexion directe à la théorie des nombres, mêlée avec la structure organisationnelle hypothétique (ce qui a été appelé fonctorialité).
Par exemple, dans le travail d'Harish-Chandra, on trouve le principe de ce qui peut être fait pour un groupe de Lie semi-simple (ou réductif), ce qui pourrait être fait pour tous. Par conséquent, une fois que le rôle de certains groupes de Lie de dimension basse tels que dans la théorie des formes modulaires a été reconnu, et rétrospectivement, avec dans la théorie des corps de classes, la voie est ouverte aux spéculations pour au moins pour n > 2.
L'idée de forme cuspidale provient des courbes cuspidales dans les courbes modulaires mais aussi a un sens visible dans la théorie spectrale comme un « spectre discret », qui contrastait avec le « spectre continu (en) » des séries d'Eisenstein. Elle devint beaucoup plus technique pour les groupes de Lie plus grands, parce que les sous-groupes paraboliques (en) sont plus nombreux.
Et, du côté des formes modulaires, il y avait des exemples tels que les formes modulaires de Hilbert (en), les formes modulaires de Siegel (en) et les fonctions thêta.
Prix
Les parties du programme concernant les corps locaux ont été complétées en 1998 par Michael Harris, Richard Taylor et Guy Henniart et concernant les corps de fonctions en 1999. Laurent Lafforgue a reçu la médaille Fields en 2002 pour son travail sur le cas du corps de fonctions. Ce travail prolongeait les recherches menées par Vladimir Drinfeld, pour lesquelles celui-ci a reçu la médaille Fields en 1990. Seuls des cas particuliers concernant les corps de nombres ont été démontrés, certains par Langlands lui-même.
Langlands a reçu le Prix Wolf en 1996 et le prix Nemmers en mathématiques (en) en 2006 pour son travail sur ces conjectures. Laurent Lafforgue (en 2000), Gérard Laumon et Ngô Bảo Châu (en 2004), Michael Harris (de) et Richard Taylor (en 2007) et Jean-Loup Waldspurger (en 2009) ont reçu le Clay Research Award pour leurs travaux sur le programme et Ngô Bảo Châu la médaille Fields en 2010 pour sa preuve du lemme fondamental (en).
Bibliographie
- Pierre Colmez, Éléments d'analyse et d'algèbre (et de théorie des nombres), Éditions de l'École Polytechnique, 2010
- (en) Stephen Gelbart (de), An Elementary Introduction to the Langlands Program, Bulletin of the AMS v.10 no. 2, avril 1984
- (en) Edward Frenkel (en), Lectures on the Langlands Program and Conformal Field Theory, arXiv:hep-th/0512172
- (en) Daniel Bump, Joseph Bernstein (en) et Stephen Gelbart, An Introduction to the Langlands Program (ISBN 978-3-76433211-2)
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Langlands program » (voir la liste des auteurs)
Catégories :- Fonction zêta
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