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Théorie spectrale des graphes
La théorie spectrale des graphes s'intéresse aux rapports entre le spectre d'un graphe et ses propriétés, et fait partie de la théorie algébrique des graphes. Un graphe peut-être représenté par plusieurs matrices, et les valeurs propres d'une matrice constituent son spectre. On s'intéresse en général à la matrice d'adjacence et la matrice laplacienne normalisée.
Sommaire
Matrices et leurs relations
Soit un graphe G = (V,E), où V dénote l'ensemble des sommets et E l'ensemble des arêtes. Le graphe possède | V | = n sommets, dénotés par et | E | = m arêtes, dénotées par . Chaque élément de la matrice d'adjacence A du graphe G est défini par :
Graphe Représentation par une matrice d'adjacence Représentation par une matrice laplacienne (non normalisée) La matrice des degrés D est une matrice diagonale où les éléments Dii correspondent au nombre de connexions du sommet i, c'est-à-dire à son degré. En utilisant cette matrice et la précédente, on peut également définir la matrice laplacienne L = D − A; on obtient sa forme normalisée L' par L' = D − 1 / 2LD − 1 / 2 = I − D − 1 / 2AD − 1 / 2, où I dénote la matrice identité, ou on peut aussi l'obtenir directement par chacun de ses éléments :
Enfin, la matrice d'incidence M d'un graphe G = (V,E) est la matrice de dimensions | V | x | E | dans laquelle l'entrée bij vaut 1 si le sommet vi est une extrémité de l'arête xj, et 0 sinon. On a l'ensemble de relations suivantes[1], où I dénote la matrice identité :
- A = MMT − D
- Pour la matrice d'adjacence du line graph L(G), A = MTM − 2I
- Pour la matrice d'adjacence du graphe de subdivision S(G),
Le spectre d'une matrice est l'ensemble de ses valeurs propres ; par extension, on parle du spectre du graphe. On rappelle que la multiplicité algébrique d'une valeur propre λ est la puissance du monôme (X − λ) dans le polynôme caractéristique (i.e. la multiplicité de la racine dans le polynôme caractéristique). Il est également possible de modifier le polynôme caractéristique pour prendre en compte d'autres propriétés du graphe : on considère par défaut le polynôme PG(λ) = | λI − A | , mais on peut aussi s'intéresser à des variantes[1] telles que RG(λ) = | λI − D − A | ou QG(λ) = | D | − 1 * | λD − A | .
Spectre de la matrice d'adjacence
La matrice du graphe est positive, et elle ne peut être réduite si le graphe est connexe. Dans le cas d'un graphe non-orienté, la matrice est symétrique et hermitienne, c'est-à-dire que où est la matrice adjointe de A. La trace de la matrice est égale à deux fois le nombre de boucles : en effet, un élément sur la diagonale indique la présence d'une boucle et la trace est la somme de ces éléments. Nous avons les propriétés suivantes[1] :
- Le rayon spectral ρ(A) de la matrice, c'est-à-dire sa plus grande valeur propre, satisfait pour un graphe connexe. La borne inférieure est atteinte dans le cas d'un chemin et la supérieure par un graphe complet.
- Si le graphe est k-régulier alors ρ(A) = k et la multiplicité de ρ(A) donne le nombre de composantes connexes.
- Toutes les valeurs propres sont nulles si et seulement si le graphe ne contient pas de cycle.
- Le graphe ne contient un cycle de longueur impaire que si − ρ(A) est aussi une valeur propre.
- S'il y a k valeurs propres distinctes, alors le diamètre D satisfait .
- La taille t du stable maximum satisfait où p − ,p0,p + sont respectivement le nombre de valeurs propres plus petites, égales ou supérieures à 0.</math>.
- où χ(G) est le nombre chromatique et q la plus petite valeur propre.
Spectre de la matrice laplacienne normalisée
La valeur propre λ1 est appelée la connectivité algébrique du graphe. Les propriétés essentielles du spectre sont résumées ci-dessous[2] :
- λ0 = 0.
- si le graphe est connexe.
- Si et que G est un graphe complet alors , sinon .
- Si le graphe est connexe alors λ1 > 0. Si λi = 0 et alors G a exactement i + 1 composantes (i.e. graphes connexes).
- .
Parmi les autres propriétés de cette matrice, son déterminant donne le nombre d'arbres couvrants du graphe.
Applications
Analyse des réseaux
La plupart des mesures effectuées sur des réseaux concernent le coefficient de clustering, la distance moyenne ou la distribution des degrés : l'utilisation des techniques spectrales est minoritaire, mais « les expériences en pratique suggèrent que l'analyse spectrale peut être bien adaptée aux données irrégulières [...] tandis que le coefficient de clustering est bien adapté pour les données plus régulières (et a donc été utilisé abondamment par les physiciens pour l'étude des grilles, cristaux, etc.) »[3]. En particulier, le spectre de différents échantillons de l'Internet au niveau des routeurs a été mesuré[3] : les auteurs de l'étude ont observé des différences au niveau géographique, proposant comme explication que le réseau en Amérique du Nord soit à un stade plus avancé que celui d'Asie et d'Europe; ces mesures ont aussi été comparées à celles relevées sur des modèles visant à être représentatifs de propriétés trouvées dans l'Internet, et essentiellement aucun des modèles ne correspondait à l'Internet au niveau du spectre.
Références
- ↑ a , b et c (en)Dragos M. Cvetkovic et Michael Doob et Horst Sachs - Spectra of Graphs, Heidelberg, Leipzig, 1994, (ISBN 3335004078).
- ↑ (en)Fan R. K. Chung - Spectral Graph Theory, Regional Conference Series in Mathematics, numéro 92, publié par l'American Mathematical Society, 1997.
- ↑ a et b (en) Christos Gkantsidis, Milena Mihail et Ellen Zegura - Spectral Analysis of Internet Topologies, IEEE Infocom, 2003.
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