- Meirieu
-
Philippe Meirieu
Philippe Meirieu, né le 29 novembre 1949 à Alès, est un chercheur et écrivain français, spécialiste en sciences de l'éducation et en pédagogie inspirateur de réformes pédagogiques (instauration des modules au lycée ainsi que des IUFM au début des années 1990). Il occupe actuellement les fonctions de professeur en sciences de l'éducation à l'Université Lumière-Lyon 2 où il enseigne à l'Institut des sciences et pratiques d'éducation et de formation (ISPEF)[1].
Il se définit lui-même comme un militant et un homme de gauche. En s'appuyant sur les écrits des grands pédagogues (de Rousseau à Freinet), il met en exergue les tensions qui sont inhérentes à l'éducation. Il a grandement contribué à diffuser en France les principes pédagogiques issus de l'Éducation nouvelle. Il ambitionne ainsi de participer au renouvellement des pratiques d'enseignement afin de répondre au défi de l'éducation de masse.
Philippe Meirieu a été l'objet de vives critiques, notamment de la part de Liliane Lurçat[2], Jean-Paul Brighelli, l'association Sauver les lettres[3] ou l'association Reconstruire l'École[4].
Sommaire
Parcours
Après une maîtrise[5] obtenue à Paris, il devient professeur de philosophie en lycée. Il décide d'enseigner à l'école primaire et passe le CAP d'instituteur[6], puis enseigne le français en collège. Il passe une thèse d'État en 1983 en sciences humaines. Philippe Meirieu devient professeur en sciences de l'éducation à l'Université Lumière-Lyon 2.
De 1990 à novembre 1993, il a été membre du Conseil national des programmes[5]. En parallèle, il crée en 1991 la collection Pédagogies chez ESF éditeur. Encore aujourd'hui, il est le directeur et l'un des principaux auteurs de cette collection.
À la rentrée 1993-94, Philippe Meirieu a repris, à côté de ses activités universitaires, un enseignement de français dans un lycée professionnel de Vénissieux. De 1994 à 1998, il est directeur de l'Institut des sciences et pratiques d'éducation et de formation (ISPEF) de l'université Lumière-Lyon 2[7]. De 1998 à 2000, il est directeur de l'INRP, dont il démissionne estimant que « la poursuite de la rénovation pédagogique est gravement compromise »[8].
Il devient directeur de l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) de l'Académie de Lyon jusqu'en 2006. Il renonce à postuler à un nouveau mandat. Il ne souhaitait pas, en effet, être nommé par le ministre de l'Éducation nationale, Gilles de Robien, se sentant trop en désaccord avec les décisions prises, ces dernières années, dans le domaine éducatif, pour assumer ces responsabilités. Il enseigne à nouveau à l'ISPEF de l'université Lumière-Lyon 2.
En 2006, il est parrain du projet culturel et éducatif « Cité des savoirs du XXIe siècle » pour l'île Seguin avec d'autres personnalités telles que Régis Debray, Albert Jacquard ou Axel Kahn. Il est membre du comité de parrainage de la Coordination française pour la Décennie de la culture de paix et de non-violence et du conseil scientifique de l'ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie).
Depuis septembre 2006, il est responsable de la chaîne de télévision éducative Cap Canal. Dans ce cadre, il s'occupe, entre autres, du magazine Cap Infos qui traite de toutes les questions pédagogiques liées à l'école et à la formation des professeurs[9].
Théories pédagogiques
Selon lui, le rôle de l'école est à la fois d'instruire et d'éduquer, la finalité étant l'émancipation de l'élève et le développement de son autonomie. De ce fait, comme l'avait démontré aussi Olivier Reboul, tout enseignant est confronté à un certains nombre de contradictions :
- l'enseignant (et plus globalement tout éducateur) doit s'efforcer de transmettre des normes sociales pour favoriser l'insertion de l'enfant dans la société. Mais il doit aussi lui apprendre à penser par lui-même et à examiner de manière critique les règles sociales existantes. L'éducation à la liberté revêt donc un caractère paradoxal.
- il existe de même une tension entre la nécessité de faire acquérir à l'élève des savoirs qui sont nécessaires à sa formation et la prise en compte de ses centres d'intérêt. En effet, tout apprentissage véritable nécessite la mobilisation de l'intérêt de l'élève. Seuls les savoirs scolaires faisant sens pour l'élève pourront être assimilés durablement. Il est donc tentant de promouvoir à l'école des thèmes ou des activités qui sont susceptibles de déclencher l'intérêt immédiat de l'élève. Cependant, en privilégiant les centres d'intérêt des élèves, l'enseignant risque de ne pas ouvrir à de nouveaux objets de connaissance et à de nouvelles pratiques culturelles. Philippe Meirieu résume le problème ainsi : « L'intérêt de l'élève est-ce ce qui l'intéresse ou plutôt ce qui est dans son intérêt ? Car de toute évidence, ce qui l'intéresse n'est pas toujours dans son intérêt et ce qui est dans son intérêt ne l'intéresse pas vraiment[10] ».
Pour expliquer — voire dépasser — ces contradictions, Meirieu met en avant le fondement éthique de l'éducation. Il énonce ainsi deux postulats qui sous-tendent l'acte éducatif :
- le postulat d'éducabilité (inspiré du philosophe et pédagogue Herbart, successeur de Kant à la chaire de Königsberg): toute personne est susceptible d'être éduquée, et je suis capable, en personne, de l'éduquer. C'est ce principe qui conduit l'enseignant à faire évoluer ses pratiques pédagogiques de manière à faire évoluer positivement les élèves, tant sur le plan cognitif que dans le domaine socio-affectif.
- le postulat de liberté est le pendant du principe d'éducabilité. Dans les sociétés démocratiques, l'éducation ne peut être assimilée au dressage. Ses résultats sont donc incertains car en dernière instance, l'apprentissage est du ressort de l'élève. « L'enseignant doit donc donner au sujet la possibilité d'exprimer ses propres projets individuels et collectifs[11] ».
Il met avant tout l'accent sur le fait que chaque élève est différent et que les classes sont inévitablement hétérogènes. Face à cette hétérogénéité, il propose d'utiliser la pédagogie différenciée et plus particulièrement les groupes de besoin. Pour autant, il ne faut pas enfermer l'élève dans un type psychologique figé, ce qui finirait par faire ressembler l'Ecole à une raffinerie, avec ses tubes, chacun destiné à un certain sous-produit. Bref, Meirieu, qui passe pour le type même du Pédagogue, est tout autant un critique des dérives de la pédagogie.
Critiques
Des enseignants contestent ses théories éducatives basées sur l'« élève apprenant » plutôt que sur des savoirs fondamentaux. « Philippe Meirieu a été très souvent pris à parti par les “républicains” ou les “disciplinaristes” qui l'accusent d'avoir contribué à la baisse du niveau des élèves ainsi qu'à l'effondrement de l'autorité des enseignants par son idéologie “pédagogiste”, égalitariste et démagogique[12]. » Il a été contesté par des enseignants tels que Natacha Polony[13], Agnès Joste[14], Jean-Paul Brighelli[15], et Christine Tasin[16].
De vives polémiques ont opposé Alain Finkielkraut et Philippe Meirieu. Ce dernier a été amené à écrire le 8 mai 2000 une lettre ouverte à Alain Finkielkraut publiée dans Le Monde : « De quelle couleur sera l’étoile dont on affublera demain, si les clercs que vous représentez venaient, par malheur, à nous gouverner, les pédagogues comme moi ?[17] » Finkielkraut nuance ses accusations personnelles en 2008 contre Philippe Meirieu en le qualifiant d'« homme de dialogue »[18].
Engagement politique
En 2009, les dirigeants d'Europe Écologie lui demandent de prendre la tête de leur liste dans la région Rhône-Alpes pour les élections régionales de 2010[19]. Meirieu, qui dit avoir longtemps soutenu le Parti socialiste et ne plus s'y reconnaître[19], accepte la proposition mais sa nomination en tête de liste doit être validée par les instances d'Europe Écologie et des Verts[19].
Publications
- L'éducation peut-elle être encore au coeur d'un projet de société ? (avec P. Frackowiak), Paris, Ed. de l'Aube, 2008
- Frankeinstein pédagogue, Paris, ESF éditeur, 2007
- Pédagogie : le devoir de résister, Paris, ESF éditeur, 2007
- Une autre télévision est possible, Chronique sociale, 2007
- La Pédagogie entre le dire et le faire, Paris, ESF éditeur, 2007
- École, demandez le programme, ESF éditeur, 2006
- Lettre à un jeune professeur, ESF éditeur, 2005
- Nous mettrons nos enfants à l'école publique, Editions Mille et une nuits, 2005
- Le monde n'est pas un jouet, Desclée de Brouwer, 2004, traduit en espagnol et en catalan
- Faire l'école, faire la classe, ESF éditeur, 2004
- Deux Voix pour une école, avec Xavier Darcos, Desclée de Brouwer, 2003
- Des enfants et des hommes, ESF éditeur, collection Pédagogies, 1999
- L'École ou la guerre civile, avec Marc Guiraud, Plon, 1997
- Apprendre... oui mais comment, ESF éditeur, collection Pédagogies, 1995 (réédition 2009)
- L’École mode d’emploi : des méthodes actives à la pédagogie différenciée, ESF éditeur, 1989
- L’Envers du tableau. Quelle pédagogie, pour quelle école ?, ESF éditeur- 1993
- Le Choix d'éduquer, ESF éditeur, collection Pédagogie, 1991 (réédition en 2007), 198 pages (ISBN 978-2-7101-1866-4)
- La Machine-école, avec Stéphanie le Bars, Gallimard, 1991
Liens externes
Notes et références
- ↑ Site de l'ISPEF
- ↑ http://www.lire-ecrire.org/dossiers/debacle-de-lecole/les-theories-analyses-et-commentaires/un-apotre-de-leducation-nouvelle-philippe-meirieu.html
- ↑ http://www.sauv.net/robienmeirieu.php
- ↑ http://www.r-lecole.freesurf.fr/Asso/Historique.htm
- ↑ a et b Site de l'académie de Grenoble
- ↑ « Leçons de pédagogues, de Pestalozzi à Freinet, Makarenko, Montessori... », entretien avec Philippe Meirieu.
- ↑ Site de l'ISPEF
- ↑ Propos recueillis par le Sgen-CFDT
- ↑ (fr) « Philippe Meirieu » sur le site officiel de Cap Canal.
- ↑ Philippe Meirieu, Faire l'école, faire la classe, 2004.
- ↑ (fr) [pdf] Phillipe Meirieu, « Histoire des doctrines pédagogiques, séance 5 : L'articulation entre éducabilité et liberté dans l'action pédagogique... ou “L'action pédagogique comme ruse” » sur le site officiel de Philippe Meirieu
- ↑ Site de Philippe Meirieu
- ↑ http://www.france5.fr/images/emissions/008867/28/riposte_20080420.asx
- ↑ « Cérémonie des vœux 2006 : Philippe Meirieu demande la suppression d’une heure de français et de mathématiques en seconde. », 15 janvier 2006
- ↑ « Un livre indispensable », 5 avril 2009
- ↑ « Lycées : quand Meirieu approuve Sarkozy, les Républicains ont raison de craindre le pire », 26 août 2008
- ↑ « Adieu Finkielkraut », Le Monde, 8 mai 2000
- ↑ « Education : on revoit la copie » sur France 3
- ↑ a , b et c Frédéric Crouzet, « Philippe Meirieu prêt à mener la liste Europe Écologie », in 20 minutes (édition de Lyon), jeudi 10 septembre 2009, p. 3
- Portail de la France
- Portail du Grand Lyon
- Portail de l’éducation
Catégories : Personnalité en éducation | Pédagogue français | Pédagogue du XXe siècle | Pédagogue du XXIe siècle | Enseignant à l'Université Lyon II | Naissance en 1949 | Naissance à Alès
Wikimedia Foundation. 2010.