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Massacre des Innocents
Le massacre des Innocents est le nom donné à un épisode relaté dans l'Évangile selon Matthieu en même temps que la Fuite en Égypte : le meurtre de tous les enfants de moins de deux ans dans la région de Bethléem, ordonné par Hérode peu après la naissance de Jésus.
Cet épisode est absent des autres Évangiles et des premiers apocryphes. Voilà ce que dit l'Évangile selon Matthieu, chap. 2 : « [16] Alors Hérode, voyant qu'il avait été joué par les mages, se mit dans une grande colère, et il envoya tuer tous les enfants de deux ans et au-dessous qui étaient à Bethléem et dans tout son territoire, selon la date dont il s'était soigneusement enquis auprès des mages. [17] Alors s'accomplit ce qui avait été annoncé par Jérémie, le prophète: [18] On a entendu des cris à Rama, Des pleurs et de grandes lamentations: Rachel pleure ses enfants, Et n'a pas voulu être consolée, Parce qu'ils ne sont plus. » L'épisode est parallèle à celui de la noyade des enfants hébreux mâles, au début de l'Exode[1]. Il s'inscrit dans la logique des massacres perpétrés par Hérode le Grand, assimilé à Pharaon, dans le monde juif du Second Temple[2].
Sommaire
Le massacre des Innocents dans la tradition chrétienne
Pour le christianisme, les « Saints Innocents » sont les enfants de moins de deux ans massacrés par Hérode à Bethléem : Dieu permet le massacre des Saints Innocents pour faire d’eux les prémices de la rédemption de Jésus-Christ.
Augustin d'Hippone dépeint ainsi la scène : « Les mères s’arrachaient les cheveux ; elles voulaient cacher leurs petits enfants, mais ces tendres créatures se trahissaient elles-mêmes ; elles ne savaient pas se taire, n’ayant pas appris à craindre. C’était un combat entre la mère et le bourreau ; l’un saisissait violemment sa proie, l’autre la retenait avec effort. La mère disait au bourreau : "Moi, te livrer mon enfant ! Mes entrailles lui ont donné la vie, et tu veux le briser contre la terre !" Une autre mère s’écriait : "Cruel, s’il y a une coupable, c’est moi ! Ou bien épargne mon fils, ou bien tue-moi avec lui !" Une voix se faisait entendre : "Qui cherchez-vous ? Vous tuez une multitude d’enfants pour vous débarrasser d’un seul, et Celui que vous cherchez vous échappe !" Et tandis que les cris des femmes formaient un mélange confus, le sacrifice des petits enfants était agréé du Ciel. »
Jean, dans l'Apocalypse, montre les Saints Innocents entourant le trône de l’Agneau parce qu’ils sont purs, et Le suivant partout où Il va. « Demanderez-vous, dit Bernard de Clairvaux, pour quels mérites ces enfants ont été couronnés de la main de Dieu ? Demandez plutôt à Hérode pour quels crimes ils ont été cruellement massacrés. La bonté du Sauveur sera-t-elle vaincue par la barbarie d’Hérode ? Ce roi impie a pu mettre à mort des enfants innocents, et Jésus-Christ ne pourrait pas donner la vie éternelle à ceux qui ne sont morts qu’à cause de Lui ? Les yeux de l’homme ou de l’ange ne découvrent aucun mérite dans ces tendres créatures ; mais la grâce divine s’est plu à les enrichir. » L’Église a établi leur fête dès le IIe siècle.
Historicité
Macrobe (c. 395-436) parle d'un massacre d'enfants par Hérode : « Quand l'[empereur Auguste] apprit que parmi les enfants de Syrie de moins de deux ans qu'Hérode Roi des Juifs avait fait tuer, se trouvait son propre fils, il dit qu'il valait mieux être le cochon d'Hérode que son fils »[3]. Pour Paul Veyne, ce témoignage d'un païen atteste l'historicité du massacre même si « son souvenir a servi à motiver la naissance légendaire, à Bethléem, de Jésus de Nazareth »[4]
Thème artistique
Le massacre des Innocents est un thème que de nombreux artistes ont exploité, en tant que prétexte à des compositions sophistiquées mettant en scène des corps entremêlés au sein d'une action violente.
Des artistes de la Renaissance se sont inspirés de bas-reliefs romains de la bataille entre les Lapithes et les Centaures pour représenter des personnages nus comme dans le Massacre des Innocents d'Amico Aspertini. Le Massacre des Innocents de Guido Reni, peint en 1611 dans un format vertical inhabituel, se trouve à Bologne.
Plusieurs peintures de Pierre Paul Rubens illustrent ce thème. L'une d'elles, actuellement à Munich, fut gravée par Paulus Pontius en 1643, ce qui explique l'existence de reproductions dans des pays aussi lointains que le Pérou.
Le Massacre des Innocents de Rubens fait partie des peintures les plus coûteuses du monde[5]. Kenneth Thomson en a fait donation à la Art Gallery of Ontario de Toronto.
Guernica de Picasso (1937) est une des dernières apparitions du thème : ce tableau reprend notamment certains motifs du tableau de Poussin.
Notes et références
- ↑ Voir L'historicité de Jésus par le pasteur André Gounelle et "fuite de Joseph en Égypte" sur Akadem.
- ↑ Voir Autour de la figure d'Hérode, par Michel Remaud, dans Un écho d'Israël.
- ↑ Macrobe Saturnales, II, 11 « "Cum audisset inter pueros quos in Syria Herodes rex Iudaeorum intra bimatum iussit interfici filium quoque eius occisum, ait: Melius est Herodis porcum esse quam filium »
- ↑ Paul Veyne Païens et chrétiens devant la gladiature Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, 1999, 111-2 p. 895 [1]- il renvoie aussi à Perowne Stewart Hérode le Grand et son époque, Hachette, 1958
- ↑ après avoir été achetée par Kenneth Thomson pour 49,5 million£ GBP en 2002 lors d'une vente aux enchères organisée par Sotheby's
Voir aussi
- Fuite en Égypte
- Le Massacre des Innocents (Guido Reni)
- Portail du christianisme
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