- Marie-France Tristan
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- Yves Hersant, dans sa Préface à la Scène de l’écriture : « M.F.T. n’a pas seulement mené à bien un grand travail d’érudition : elle a revivifié des pages mortes, ou qu’on s’était hâté de dire telles ».
- Jean-François Maillard, Compte rendu de la Scène de l’écriture, Revue A.R.I.E.S ., vol. 4, 2004, n°2, p. 239-242 : « Cet essai thématique de type mythocritique s'attache moins à préciser les sources effectivement utilisées par Marino qu'à présenter une synthèse de sa philosophie et de sa cosmologie, puis à déployer les grandes figures mythologiques présentes dans son poème sacré, dont Adonis constitue bien évidemment le cœur. L'ouvrage de M.F.T. (est) l'un des rares en langue française sur le sujet ».
- Marzio Pieri, Introd. à l’Adone de G. B. Marino, Trento, la Finestra, 2004 (p. XLIV- XLV) : « En matière marinienne, la nouvelle proposition, à la fois la plus fondée et, par sa vertu propre, la plus retentissante – comme une véritable explosion – nous est venue de la France (...). C’est dans l’histoire littéraire que s’inscrit le monument que M.F.T., pour conclure un travail de vingt ans, a consacré à Marino poète philosophe. Disons-le haut et fort : c’est l’œuvre la plus importante qui ait jamais été écrite sur Marino ».
- Marzio Pieri Ibid., p. XLVI : « Une aventure spirituelle véritable et vraiment rare, où nous avons pour seul recours, parfois, la diction cristalline d’une langue critique parfaite ».
- Ruggero Guarini (Corriere del Mezzogiorno, 17 juin 2006) : « La Scène de l’écriture de M.F.T. est peut-être l’hommage critique le plus grandiose qui ait jamais été consacré à la figure et à l’œuvre de notre immense poète».
- La Scène de l'écriture, Essai sur la poèsie philosophique du Cavalier Marin (1569-1625). Préface Yves Hersant, Paris, Honoré Champion, 2002, 754 pages.
- Sileno barocco, Il 'Cavalier Marino' fra sacro e profano, La Finestra Editrice, 2008, 464 pages.
- L'art des devises au XVI° siècle en Italie : une théorie du symbole, in Emblèmes et devises au temps de la Renaissance, Paris, J. Touzot, 1981, p. 47-63.
- Contre-Réforme et Epoque baroque, in Précis de littérature italienne, Paris, PUF, 1982, p. 175-214, réed. 1995.
- La mythologie comme système de représentation du monde et de la condition humaine dans l'Adone' de G.B. Marino, Coll. Turin 1983, in Manierismo e letteratura, A. Meynier, 1986, p.407-424.
- Marino, in Patrimoine littéraire européen, De Boeck, 1996 (vol 8).
- L'œil et l'orbite dans l'œuvre de G.B. Marino, in L'Œil fertile, Univ. Grenoble III, IRIS, 1997, p. 67-75.
- Le miroir et le sceau dans l'œuvre de G.B. Marino, in Représentations et figurations baroques, Coll. Oslo 1995, Conseil norvégien de la recherche scient., 1997, p. 47-57.
- Marino et Du Bartas : deux poètes de la création, Coll. intern. Marino en France, CIRRI , 1998.
- Psyché et Actéon, deux figures antithétiques du voyeurisme chez G.B Marino in Caractères et passions au XVII° siècle, dir. Didier Soulier, Université de Dijon, 1998.
- Fiction et réalité dans l'œuvre de G.B. Marino in Réalisme et réalité en question au XVII° siècle, Coll. Dijon 2000, dir. D. Soulier, Centre de recherches 'Cultures et civilisations du XVII° européen', p. 85-95, Dijon, 2002.
- La poésie scientifique du Cavalier Marin, Coll. Mulhouse 2000, in La Naissance de la science dans l'Italie antique et moderne, Peter Lang, 2004, pp. 229-250.
- Anamorphose(s), in revue Sigila n° 17, Paris, GRIS-France, 2006, p.21-36.
- Le “Palais de l’Art” dans l’“Adone” de G.B. Marino (Chant X, 116-182 et svtes), in Maître et passeur. Per Marziano Guglielminetti, Alessandria, Ed. dell’Orso, 2008, p. 237-264.
- L'Adone (L’Adonis) de Giambattista Marino (1623), 20 chants, 40984 vers endécasyllabes, Paris, Les Belles Lettres.
- Cf. G. Gusdorf, Mythe et métaphysique, Paris, Flammarion, 1953 ; La révolution galiléenne, 2 vol., Paris, Payot, 1969.
- Voir F. Secret, Les Kabbalistes chrétiens de la Renaissance (1964), Paris, Arma Artis, 1974, et Milan, Archè, 1985.
- Voir G. G.Scholem, Les grands courants de la mystique juive, Paris, Payot, 1968).
- E. d’Ors, Du baroque, Paris, Gallimard, 1935.
- J. Rousset,La littérature de l’âge baroque en France, Circé et le Paon, Paris, José Corti, 2002 ; Intérieur et extérieur. Essais sur la poésie et sur le théâtre au XVIIè siècle, Paris, José Corti, 1968.
- S. Sarduy, Barroco, Paris, Seuil, 1975.
- G., Les structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Bordas, 1960 ; Figures mythiques et visages de l’œuvre : de la mythocritique à la mythanalyse, Paris, Berg International, 1979.
- M. Fumaroli, L’âge de l’éloquence, Genève, Droz, 1980 ; L’école du silence. Le sentiment des images au XVIIè siècle, Paris, Flammarion, 1994.
- L. Bolzoni, L’universo dei poemi possibili (Studi su Francesco Patrizi da Cherso), Rome, Bulzoni, 1980.
- C. Ossola, Autunno del Rinascimento, Florence, Olschki, 1971.
- E. Raimondi, Letteratura barocca. Saggi sul Seicento italiano, Florence, Olschki , 1961 ; Rinascimento inquieto, Palerme, Manfredi, 1965 ; Poesia come retorica, Florence, Olschki, 1980.
- E. Garin, La cultura filosofica del Rinascimento italiano, Florence, Sansoni, 1961]
- A. Ingegno, Filosofia e religione nel Cinquecento italiano, Florence, Sansoni, 1977 ; Cosmologia e filosofia nel pensiero di Giordano Bruno, Florence, La Nuova Italia, 1978.
- C. Vasoli, Filosofia e religione nella cultura del Rinascimento, Naples, Guida, 1988.
- P. Rossi, Clavis universalis. Arti della memoria e logica combinatoria da Lullo a Leibniz (1960), Bologne, Il Mulino, 1983 ; La scienza e la filosofia dei moderni. Aspetti della rivoluzione scientifica, Turin, Bollati Boringhieri, 1989.
- F. Yates, Giordano Bruno et la tradition hermétique (1964), trad. fcse Paris, Dervy, 1988 ; L’art de la mémoire (1966), trad. fcse Paris, Gallimard, 1966.
- E. Cassirer, Individu et cosmos dans la philosophie de la Renaissance (1927), trad. fcse Paris, Éd. de Minuit, 1983.
- Jacob Boehme, Paris, Vrin, 1971. A. Koyré, Mystiques, spirituels, alchimistes du XVIIè siècle allemand (1955), Paris, Gallimard, 1971 ; Du monde clos à l’univers infini, Paris, PUF, 1961 ; La philosophie de
- G. Pozzi, La Parola dipinta, Milan, Adelphi, 1981.
- M. Pieri, Per Marino, Padoue, Liviana, 1976.
- F. Giorgio veneto, Harmonia mundi, La Finestra editrice, 2008
- Gilles Deleuze, Le pli (Leibniz et le baroque), Paris, Éd. de Minuit, 1988] Cf. en particulier
- M. Éliade, Forgerons et alchimistes (1956), Paris, Flammarion, 1977 ; Aspects du mythe, Paris, Gallimard, 1963 ; Le Mythe de l’Eternel retour. Archétypes et répétition, Paris, Gallimard, 1949 ; Le sacré et le profane, Paris, Gallimard, 1965.
- Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Magie artificielle des effets merveilleux, Paris, Perrin, 1969 (Flammarion, 1984). Cf.
- Chaïm Perelman, Rhétorique et philosophie, Paris, PUF, 1952, et L’empire rhétorique, Paris, Vrin, 1977 ; Ernesto Grassi, Rhetoric as Philosophy (1980) ; trad. fsce La métaphore inouïe, Paris, Quai Voltaire, 1991. Cf.
- P. Ricoeur, Le conflit des interprétations. Essais d’herméneutique, Paris, Seuil, 1969.
- Cf.Recherches pour une sémanalyse, et Semeiotikè, Paris, Seuil,1969]
- E. Tesauro, Il Cannocchiale aristotelico, Turin, 1670 ; cf. Yves Hersant, La métaphore baroque d'Aristote à Tesauro, Paris, Seuil, 2001]
Marie-France Tristan, née Salques à Grenoble le 18 novembre 1942, agrégée de littérature italienne, docteur d'État es-lettres (1999), Maître de conférence à Paris-Sorbonne (1971-2002), est spécialiste de l’époque baroque, et plus particulièrement du poète et philosophe italien Giambattista Marino, dit le Cavalier Marin (1569-1625).
Elle est mariée à l'écrivain Frédérick Tristan (Prix Goncourt 1983).
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Parcours scientifique
Les recherches de Marie-France Tristan sur le Cavalier Marin s’inscrivent dans le cadre du renouveau d’intérêt pour le baroque littéraire et artistique qui s’est manifesté dans la seconde moitié du XXè siècle, ainsi que pour les courants d’idées qui l’ont accompagné, notamment sur le plan philosophique et religieux (outre la révolution scientifique instaurée par Galilée[1], cf. entre autres la tradition de l’Hexaméron, la cabale chrétienne[2], ou la cabale d’Isaac Louria[3].
Sous l’égide du médiéviste Paul Renucci, qui explicita le lien entre monde antique et modernité, et dans la continuité des travaux d’Eugenio d'Ors[4], de Jean Rousset[5], de Severo Sarduy[6], de Gilbert Durand[7], ou bien de Marc Fumaroli[8], et en Italie de Lina Bolzoni[9], de Carlo Ossola[10] et d'Ezio Raimondi[11], ou encore, dans un domaine plus spécifiquement scientifique ou philosophique, d'Eugenio Garin[12], d'Alfonso Ingegno[13], de Cesare Vasoli[14], ou de Paolo Rossi[15], en Angleterre de Frances Yates[16], en Allemagne d'Ernst Cassirer[17], et en France d'Alexandre Koyré[18], elle a écrit principalement deux ouvrages qui sont la synthèse de vingt ans de recherches (colloques et articles), et qui renouvellent en profondeur l’interprétation de l’œuvre marinienne en l'orientant dans une direction nettement philosophique.
Ces recherches sont confortées par la republication complète des œuvres de Marino aux Editions La Finestra sous la direction du Professeur Marzio Pieri. Le poème mythologique L’Adone à lui seul, malgré sa taille monumentale (près de 41 000 vers endécasyllabes), a connu 6 rééditions intégrales depuis le milieu des années 70.
Promotion d’une image : Marino poète philosophe
Tout en s’inscrivant dans le sillage de chercheurs italiens tels que Benedetto Croce et Giovanni Getto, et plus récemment de Giovanni Pozzi[19] et de Marzio Pieri[20], M.F. Tristan donne à ses propres travaux une orientation radicalement originale. À travers un essai de plus de 700 pages, elle se propose de sortir le Cavalier Marin de l’ornière où l’ont enfoncé trois siècles de rationalisme et de pseudo-réalisme, pour lui rendre sa véritable dimension de « poète philosophe » : loin d’être seulement le chantre d’une poésie de l’affectation et de l’ekphrasis trompeuse, de la meraviglia gratuite, et d’une rhétorique échevelée, ce découvreur et ami du peintre Nicolas Poussin, hôte d’honneur du roi Louis XIII à Paris (1615-1623), mérite à bien des égards d’être rapproché, notamment en matière de théogonie et de cosmogonie, de philosophes tels que Francesco Zorzi[Georges de Venise et son Harmonia mundi, dont Marino s’est ouvertement inspiré)[21], Giordano Bruno ou Tommaso Campanella, et annonce certains aspects majeurs de la pensée de Leibniz[22]. C’est le traité des Dicerie sacre (1614) qui fournit à cet égard le plus de matière à réflexion, et qui apporte l’éclairage nécessaire à la juste compréhension de l'articulation entre fable mythologique et symbolisme judéo-chrétien. D'autre part, dans l'ensemble de l'œuvre marinienne, le vaste réseau des mythes gréco-latins s'avère être d'une très grande richesse et originalité (cf. Mircea Eliade[23], ainsi que les ouvrages de Marcel Détienne, de Georges Dumézil, et de Jean-Pierre Vernant).
Textes à énigmes
Marino a été mis à l’Index en 1627 pour son libertinage trop affiché, pour son mélange jugé sacrilège du sacré et du profane, et plus globalement en raison du caractère hétérodoxe de sa philosophie largement teintée d’hermétisme, de cabale et d’alchimie, et marquée par les plus récents courants scientifiques.
De ce fait, l'œuvre marinienne (et en particulier l’immense poème mythologique l’Adone, publié en 1623) s’inscrit délibérément dans la catégorie des textes à énigmes, qui requièrent une méthode d’approche critique spécifique s’apparentant à la lecture d’une anamorphose (en l’occurrence non pas picturale, mais poétique)[24], et exigeant la transgression d’une lecture purement littérale et le passage à une lecture allégorique, voire anagogique. Cette méthode, qui s’appuie sur l’idée que la véritable rhétorique est d’ordre philosophique[25], s’inspire notamment de certaines propositions de Paul Ricoeur[26], de Julia Kristeva (distinction entre génotexte et phénotexte)[27], et de Jacques Derrida (dans le fait d’ériger le « non dit » et l’indicibilité en constituants essentiels et foyers vivants de l’acte d’écrire). Le texte anamorphique, tendu entre les extrêmes de l’unité et de la multiplicité, du signe et du sens, en relation avec la doctrine du « tout est en tout », s’inscrit dans le jeu infini des interférences sémantiques et des réseaux métaphoriques tel qu'il fut notamment explicité au XVIIè siècle par le rhétoricien Emanuele Tesauro[28].