Léopold-Eberhard de Wurtemberg

Léopold Eberhard de Wurtemberg (1670-1723), marié d'abord à Anne-Sabine Hedwiger (1676-1735) Baronne de Sponeck, se marie le 1er juin 1695 en Silésie. Divorce en 1714, puis second mariage avec Elisabeth-Charlotte Curie (1690-1733) baronne de l'Espérance (1718). Il s'agit de deux mariages morganatiques.

Biographie

Il fut sans doute le plus « mauvais » prince que Montbéliard ait connu. Il succède à son père George II de Wurtemberg en 1699.

Il embrassa d'abord une carrière militaire au service de l'Autriche. L'Empereur Germanique, Léopold Ier, l'avait nommé au rang de colonel, et il fit plusieurs campagnes en Hongrie. Il commandait la place de Tokay lorsque les Turcs en entreprirent le blocus et il les chassa de toute la contrée. Au cours de son long séjour en Silésie, il fit la connaissance de sa première mäîtresse du nom d'Anne-Sabine Hedwiger ; elle était femme de chambre à la cour des Wurtemberg Oëls où résidait Léopold Eberhard ; il la séduisit, et l'épousa secrètement alors que son père George II s'apprêtait à lui faire prendre une princesse de sang.

Pour rendre plus respectable ce mariage morganatique, à la demande pressante de Léopold aupès de l'Empereur, on fit savoir que les ancêtres de la famille Hedwiger avaient des origines nobles, ayant à maintes reprises servi l'Empire et prouvé son dévouement à tous les égards ... Toute une fausse généalogie fut construite pour justifier la requête ! L'empereur fut marqué de condescendance et en 1701, Anne-Sabine reçut le titre de comtesse de Sponeck. Léopold-Eberhard voulut encore honorer les membres de sa belle-famille : par le même acte, l'Empereur conféra aux frères de son épouse, le titre de comte de Sponeck. Cette seigneurie était un petit lopin de terre situé sur les bords du Rhin en Alsace, qui appartenait à la famille de Wurtemberg depuis des générations.

Au cours de leurs premières années de mariage, le couple eut quatre enfants :

• Léopoldine-Eberhardine, février 1697
• Georges-Léopold, décembre 1697
• deux autres enfants, moururent en bas âge.

Mais Léopold-Eberhard devint rapidement infidèle. Lors de ses campagnes contre les Turcs, il s'était lié d'amitié avec Richard Curie, dit "l'Espérance" (nom de guerre), descendant d'un sergent de justice en la ville de Montbéliard. Le barbon avait quatre filles. Les demoiselles (plus particulièrement Henriette-Edwig et Elisabeth-Charlotte) surent séduire l'époux d'Anne-Sabine.

Quand la famille fut de retour à Montbéliard à la paix de Ryswick (1697), Léopold-Eberhard persuada son épouse de se les attacher comme dames de compagnie. Toutes allaient devenir ses maîtresses qui lui donnèrent belle progéniture illégitime. Finalement, on lui compta au total, 18 enfants. Anne-Sabine Hedwiger, sa première femme, obtenait le divorce. Raison invoquée : "incompatibilité d'humeur". Après que Léopold Eberhard eût des relations durables avec Henriette-Edwig qui lui donna huit enfants, il contracta un nouveau mariage en épousant Elisabeth-Charlotte, la propre sœur d'Henriette, qu'il fit baronne de "l'Espérance" avec ses frères et sœur, titre consenti par sa très Gracieuse Majesté Impériale du Saint Empire Germanique... Allait-on en rester là ? Non ! Léopold-Eberhard devait encore marier entre eux ses propres enfants. Ainsi, Les familles de Sponeck et de l'Espérance devinrent l'objet de toutes les risées, indignations et de toutes les conversations en la bonne ville de Montbéliard ...

Déjà méprisé de ses sujets pour ses injustices et la vie licencieuse qu'il menait publiquement, il s'attacha par des méthodes frauduleuses à augmenter ses biens. On sait qu'après les désastres de la guerre de Trente Ans, le droit de déshérence avait été exercé par son devancier, Léopold-Frédéric, et que des biens vacants étaient entrés dans son domaine. Léopold-Eberhard prétendait qu'il en demeurait encore ... C'est ainsi qu'il envoya en 1713, dans chaque localité, des agents chargés de saisir en son nom les biens immobiliers dont les possesseurs étaient hors d'état de produire les titres de propriété. Cette mesure produisit d'odieuses expropriations. Les habitants trop craintifs et peu instruits n'osèrent s'y opposer avec toute l'énergie qu'il eût fallu.

Dans chaque village, et surtout dans la terre d'Etobon (près d'Héricourt), le prince s'appropriait des maisons pour y placer des fermiers de ses grands domaines. Parmi ceux-ci, se trouvaient surtout des Anabaptistes ou Mennonites, expulsés du canton de Berne et d'Alsace pour cause de religion. Les bonnes pratiques qu'ils introduisirent dans le pays pour la culture des terres et l'élevage exercèrent une heureuse influence sur les populations locales qui, peu à peu, renoncèrent à leur funeste incurie et à leur routine ; c'est à eux que l'on doit la propagation de la pomme de terre dans le pays de Montbéliard, ainsi que l'amélioration de la race bovine (vaches montbéliardaises).

Ce fut là, sans doute, l'une des rares actions positives à mettre au crédit du prince Léopold-Eberhard au cours de son règne ...

Le comportement et les excès du souverain ne pouvaient que déplaire aux bourgeois de la cité. De très graves altercations apparurent au cours de l'année 1704 ; le prince, dans son absolutisme, venait tout bonnement de retirer au Magistrat (Corps municipal) ses libertés municipales, et les bourgeois s'empressèrent de faire appel devant la Chambre impériale. Dans son outrecuidance, Léopold méprisa la démarche et considéra l'acte comme une atteinte à sa personne ! Il fit intervenir l'ennemi abhorré, en demandant au roi de France des troupes pour rétablir l'ordre ...

Au cours de l'année 1721, il se mit en devoir de régler sa succession. Il demandait au Magistrat de la cité de signer un acte par lequel tous reconnaissaient ses enfants légitimes comme seuls successeurs de ses états. Le Magistrat répondit favorablement à sa requête qui fut aussi entérinée par les bourgeois et maires des communes avoisinantes.

Quelques mois plus tard, on apprit que l'empereur Charles VI (mis au fait des agissements exécrables d'un prince d'Empire) s'opposait à ce que la Bourgeoisie de Montbéliard reconnaisse pour leurs princes et princesses les enfants du duc. Ce dernier, malade, s'isola du débat et laissa les Sponeck et les L'Espérance, divisés entre eux, se renvoyer les reproches d'infamie et mettre à nu leurs turpitudes respectives. Peu de temps après, le duc Léopold fut frappé d'une hémorragie cérébrale qui le paralysa aussi bien d'esprit que de corps.

Les descendants du duc s'acharnèrent à prendre des mesures pour faire valoir leurs droits à la succession, soutenus par des notables, souvent ballotés d'un clan à l'autre... Mais le Corps municipal refusa toute décision, prétextant qu'il attendait des instructions d'Eberhard-Louis de Wurtemberg-Stuttgart, cousin présomptif à la succession, ainsi que de l'Empereur Charles VI : les mariages de Léopold-Eberhard, le premier avec la Dame Hedwiger en Silésie, puis le second qui suivit furent déboutés en dépit de témoignages et déclarations des représentants d'Eglise. L'imbroglio l'emporta et rien ne fut reconnu pour faire droits à toute succession.

Le 25 mars 1723, le prince Léopold-Eberhard, dans un dernier soupir, rendit son âme à Dieu, âgé de 53 ans. Deux jours plus tard, on descendit de nuit sa dépouille dans la crypte de l'Église Saint-Maimbœuf de Montbéliard sans pompes ni éloges funèbres.

Enfin, par un dernier mandement, l'Empereur Charles VI s'adressa au Magistrat et aux bourgeois de la cité, ainsi qu'à tous les sujets du comté afin de s'en remettre au duc Eberhard-Louis de Wurtemberg comme souverain légitime, et à lui prêter serment de fidélité. La page était tournée ...

Sources

• Le Roman d'une Principauté, D. Seigneur. Editions Cêtre - Besançon.

Voir aussi

• Liste des comtes de Montbéliard
• Marquisat de Coligny

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