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L’Éducation sentimentale
Pour les articles homonymes, voir L'Éducation sentimentale (homonymie).L’Éducation sentimentale Édition de 1870.
Auteur Gustave Flaubert Genre Roman Pays d'origine France Lieu de parution Paris Éditeur Nelson Date de parution 1869 L’Éducation sentimentale, histoire d’un jeune homme est un roman écrit par Gustave Flaubert, et publié en 1869.
Le cœur du récit est tiré du roman de Sainte-Beuve : Volupté, qu’Honoré de Balzac avait déjà traité et d’une certaine manière réécrit avec le Lys dans la vallée. Le roman de Flaubert reprend le même sujet[1] selon des règles narratives entièrement neuves, réinventant le roman d'apprentissage pour lui donner une profondeur et une acuité jamais atteinte. Malgré une critique négative lors de sa parution, il est devenu, depuis Proust, un livre de référence pour les romanciers du XXe siècle.
Le roman, rédigé à partir de septembre 1864 et achevé le 16 mai 1869 au matin, comporte de nombreux éléments autobiographiques (tels la rencontre de Madame Arnoux, inspirée de la rencontre de Flaubert avec Élisa Schlésinger). Il a pour personnage principal Frédéric Moreau, jeune provincial de dix-huit ans venant faire ses études à Paris. De 1840 à 1867, celui-ci connaîtra l’amitié indéfectible et la force de la bêtise, l’art, la politique, les révolutions d’un monde qui hésite entre la monarchie, la république et l’empire. Plusieurs femmes [Rosanette, Mme Dambreuse] traversent son existence, mais aucune ne peut se comparer à Marie Arnoux, épouse d’un riche marchand d’art, dont il est éperdument amoureux. C’est au contact de cette passion inactive et des contingences du monde qu’il fera son éducation sentimentale, qui se résumera pour l’essentiel à brûler, peu à peu, ses illusions.
Le personnage de Frédéric, sans doute inspiré à Flaubert, pour une bonne part, par ses propres expériences de jeunesse, est aussi la figure définitive d'une génération nourrie par le courant d'idées romantique le plus large. Ainsi, en même temps qu'il exalte la pureté de son amour pour Madame Arnoux, celle-ci empêche Frédéric de choisir la moindre situation dans une société, celle du Second Empire, qui mise beaucoup sur la carrière et l'idée de parvenir. En cela, Frédéric est ce que Marthe Robert a nommé le "Bâtard moyen"[2], plein de rêves qui le détournent de l'action, en opposition avec le Bâtard de l'époque de Napoléon, où conquérir le pouvoir était à la portée de toute volonté, immortalisé par Balzac avec le personnage de Rastignac.
Les différents personnages que côtoie Frédéric sont eux aussi autant de types d'un genre nouveau, représentant chacun les idées reçues d'un milieu bien défini et agissant en fonction des codes stéréotypés qui sont ceux de leur classe. On trouve ainsi le bourgeois parvenu en Jacques Arnoux, la bourgeoisie d'affaires avec le ménage Dambreuse, le petit bourgeois rêvant de pouvoir dans le personnage de Deslauriers, ami de collège de Frédéric, la courtisane avec Rosanette... Cette diversité permet la peinture d'un monde entier, celui de la fin de la Monarchie de Juillet à Paris. En cela, on peut voir ce roman, ainsi que l'a fait Pierre Bourdieu, comme un champ d'expérimentation sociologique[3]. C'est aussi ce point de vue qui permet de placer Flaubert comme l'un des phares du réalisme.
Justement parce qu'il cherche à pointer les idées toutes faites de chaque milieu, L'éducation sentimentale est aussi d'un bout à l'autre traversé par l'ironie : le narrateur se refuse à intervenir directement, et se borne à chercher la connivence avec le lecteur, par de discrètes allusions à un cliché, ou grâce au style indirect libre si souvent analysé. Les opinions des personnages se trouvent ainsi discréditées par leur propre attitude, ou par la description objective de ce qu'eux ne voient qu'au travers du filtre de leur préjugés. Les quelques mots de Frédéric, au terme de la description peu amène du pillage des Tuilleries par le peuple en février 1848, nous offrent un exemple marquant de cette ironie : le narrateur dépeint les ivrognes et les brutes, les blessés s'entassant dans les pièces dévastées. "N'importe, dit Frédéric, moi, je trouve le peuple sublime". Il ne fait que nier la réalité au profit de ses présupposés romantiques.
Quoique moins connu que Madame Bovary, L'éducation sentimentale est un roman complet, où le style de son auteur est arrivé à pleine maturation, et où le monde qu'il construit méticuleusement est celui qu'il connaît d'expérience. La fresque ainsi créée est à la fois un bilan du romantisme et le tableau précis d'une époque, faisant de Flaubert l'initiateur spirituel du naturalisme. Maupassant et Émile Zola le considèreront comme leur maître.
Flaubert avait écrit, de janvier 1843 à janvier 1845, une première Éducation sentimentale qui succédait à la rédaction de Novembre, achevée le 25 octobre 1842.
Notes et références
- ↑ André Maurois, Prométhée ou la vie de Balzac, Hachette, 1965.
- ↑ Marthe Robert, Roman des origines et origines du roman, Gallimard, 1971.
- ↑ P. Bourdieu, Prologue aux Règles de l'art
Film télévisé
Film de Marcel Cravenne · 1981 avec Jean-Pierre Léaud, dans le rôle de Frédéric Moreau, Françoise Fabian dans le rôle de Madame Arnoux et Catherine Rouvelle dans le rôle de Rosanette.
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