- Jeanne-Marie Guyon
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Madame Guyon
Pour les articles homonymes, voir Guyon.Jeanne-Marie Bouvier de La Mothe-Guyon, appelée couramment Madame Guyon, née à Montargis le 13 avril 1648, morte à Blois le 9 juin 1717 est une mystique française.
Sommaire
Biographie
Jeanne-Marie Bouvier est née le 13 avril 1648 à Montargis dans une famille de riches bourgeois. Mariée à seize ans à Jacques Guyon âgé de trente-huit ans, elle aura cinq grossesses ; deux fils et une fille atteindront l'âge adulte. À dix-huit ans, elle s’éveille à la vie intérieure sous l’influence de la grâce divine suite à sa rencontre avec le « bon franciscain » Archange Enguerrand. Elle est alors conseillée par la supérieure des bénédictines de sa ville natale, la mère Geneviève Granger. Cette dernière la présente le 21 septembre 1671 à Jacques Bertot (1620-1681), qui fut un membre du cercle mystique normand de l'Ermitage dirigé par Jean de Bernières. "Monsieur Bertot", devenu confesseur à l’abbaye de Montmartre (Paris), la dirige ensuite sur le "sentier de l'amour divin".
Devenue veuve fortunée à vingt-huit ans, madame Guyon cherche à servir son Église. À partir de 1681, elle voyage, après avoir demandé conseil à plusieurs religieux, dont le fils de Marie de l'Incarnation (du Canada), dom Martin. A Gex, petite ville située près de Genève, elle refuse d’être supérieure d’un couvent éduquant des converties du protestantisme. À Thonon, situé au bord sud du lac Léman, elle compose les Torrents et découvre qu'une union spirituelle vécue sous la forme de prière silencieuse transmise de cœur à cœur est possible. À Turin puis à Verceil (Vercelli) auprès de l’évêque Ripa, elle connaît le milieu quiétiste italien. De retour à Grenoble, elle reçoit de nombreux laïcs, clercs et religieuses, à l'intention desquels elle compose son Moyen court et très facile pour l’oraison et ses Explications de la Bible.
C'est une femme d'expérience qui revient à Paris, âgée de trente-huit ans, en 1686, pour reprendre la direction du cercle spirituel qui s’était formé autour du confesseur Bertot. Accusée de quiétisme, elle est emprisonnée le 29 janvier 1688 (la condamnation de Molinos date du 27 août 1687). Délivrée en septembre de la même année, sur intervention de madame de Maintenon, qui lui sera un temps favorable, elle entreprend un apostolat auprès des Demoiselles de Saint-Cyr et s’attache de nombreux disciples, dont Fénelon, les ducs et duchesses de Chevreuse et de Beauvillier. Tous lui demeureront fidèles durant près de trente ans.
Laïque, dont l’influence sur les ducs et duchesses de Chevreuse et Beauvilliers et sur Fénelon fait jaser la Cour et apparaît dangereuse à madame de Maintenon, elle ose prétendre obéir avant tout à l'impulsion de la grâce. Ceci provoque l'incompréhension puis la colère de Bossuet qui s'exprime violemment lors du séjour volontaire de madame Guyon à la Visitation de Meaux, à la fin de l'année 1695. De son côté Fénelon est écarté de la Cour, et vivra bientôt exclusivement à Cambrai où il est nommé archevêque. Pour Étienne Perrot, continuateur de Carl Gustav Jung (dans La Voie de la transformation), il existait entre Mme Guyon et Fénelon une communauté d'âme proche du transfert psychanalytique, Mme Guyon étant l'analyste et Fénelon le patient.
Tombée en défaveur, madame Guyon tente de se réfugier dans l’isolement et le silence. Emprisonnée le 27 décembre 1695 sans raison précise (ce qui est rendu possible par l'arbitraire, aujourd'hui presque incompréhensible, propre à la « lettre de cachet »), elle sera suspectée de mauvaises mœurs et d’avoir fondé une « petite Eglise » secrète. Mais les pressions violentes du pouvoir judiciaire royal (38 interrogatoires par La Reynie puis par d’Argenson), du confesseur imposé et de l’archevêque de Paris (ces derniers affrontés en prison!) ne mèneront à rien.
Lavée de tout soupçon, elle sort de la Bastille à cinquante-cinq ans, le 24 mars 1703, sur un brancard. Il lui reste un peu plus de treize années à vivre. Elle les consacre à Blois (à Diziers) à former des disciples catholiques et protestants, les ouvrant à la vie intérieure dans une discrétion totale. Elle meurt paisiblement le 9 juin 1717.
Son influence sera notable en milieu protestant sur Poiret, Tersteegen, Wesley, les Quakers, et plus récemment Ni Tuocheng (dit Watchman Nee). Son influence demeurera cachée en terre catholique mais s'avère déterminante sur l'Abandon à la providence divine longtemps attribué au P. de Caussade.
Biographie présente antérieurement dont on vient de proposer ci-dessus une rédaction alternative :
Issue d'une famille noble et dévote, sa mère, qui dédaigne les filles, la place au couvent des Ursulines à deux ans et demi. Enfant, on raconte qu'elle reçoit peu de soins et d'éducation en raison d'une constitution maladive, et qu'elle exprime très tôt une ardeur spirituelle. À cinq ans, elle a déjà des visions.
Elle épouse en 1664, à l'âge de seize ans, Jacques Guyon du Chesnoy qui en a vingt-deux de plus. Elle regrettera vivement de ne pas s'être faite religieuse. Après lui avoir fait trois enfants, Jacques Guyon mourra en 1676 en lui laissant sa fortune.
Le Père Lacombe l’initie aux théories mystiques et aux expériences intérieures, qu’elle décrira dans la Vie de Madame Guyon. Elle entre dans des états extatiques au cours desquels elle rapporte communiquer avec Dieu, avant de décider d’enseigner le mysticisme avec le Moyen court et très facile pour l'oraison (1684). La publication de cet ouvrage où elle expose sa manière de se mettre en relation directe avec Dieu, lui attire les premières animosités.
Lors de son dernier état mystique en 1681, elle se rend à Annecy où le Père Lacombe continue de l’instruire. Lorsque les idées mystiques se propagent, l’évêque de Genève M. D’Aranthon d'Alex somme Madame Guyon et le Père Lacombe de quitter le territoire.
En 1685, Madame Guyon et le Père Lacombe se rendent en France d'où l’évêque Cardinal le Camus, condamnant leur doctrine, leur demande de partir. Ils y retournent en 1686 mais sont arrêtés en 1688 par la police de Louis XIV, toujours en raison de leurs idées. Madame Guyon accusa son frère, le Père de la Motte, d'avoir causé son arrestation. Après sept mois d'enfermement, elle est libérée et se rend chez son amie la Duchesse de Béthune-Charrost qui la présente à l’abbé de Fénelon, lui-même proche du quiétisme. Fénelon aidera Madame Guyon à répandre ses idées, et influence dans ce sens Madame de Maintenon et les filles de Saint-Cyr. Lorsque Madame de Maintenon commence à douter, elle demande l'opinion de Jacques Bénigne Bossuet, de l’évêque de Châlons et de M. Tronson sur les écrits de Jeanne Guyon. Ceux-ci les rejettent violemment et en 1694, l’archevêque de Paris ayant jeté l'opprobre sur ses livres, Madame Guyon fuit à Meaux. On lui présente 34 articles catholiques qu’elle signe et qu’elle retourne à Bossuet, mais celui-ci les recevant trop tard, elle est arrêtée dès son retour à Paris et emprisonnée à la Bastille, où elle restera cinq ans. Elle est libérée le 21 mars 1703, et finira ses jours à Blois où elle passera une dizaine d'années avant de s'éteindre le 17 juin 1717.
À partir de 1688, elle entretiendra avec Fénelon, futur archevêque de Cambrai, qui sera lui aussi accusé de quiétisme, une abondante correspondance qui s'achèvera à la mort du prélat en 1715, deux ans avant sa propre disparition.
Cette affaire qui se déroule dans la proximité de la cour de Louis XIV, est surtout marquée par l'opposition entre Fénelon et Jacques Bénigne Bossuet.
Après la publication de ses œuvres en 1704 par Poiret, un prédicateur hollandais, beaucoup de Français et d’étrangers ont commencé à l’admirer et à lui rendre visite. Puis, beaucoup de protestants ont appris ses idées.
Après sa mort Madame Guyon gagna l’admiration de beaucoup, surtout parmi les protestants. Elle a dit qu’elle n’avait jamais voulu quitter l’Église catholique. Aujourd’hui ses œuvres sont célèbres parmi la plupart des catholiques européens, mais les Français les ont oubliées. Pendant sa vie beaucoup de gens l’ont admirée pour sa vie vertueuse, et beaucoup de gens aujourd’hui l’admirent pour ses œuvres.
Bibliographie
Choix d'œuvres de Madame Guyon dans l'ordre présumé de leur composition
- c.1682 : Les Torrents spirituels dans : Les Opuscules spirituels de Madame J. M. B. de la Mothe Guyon, éd. Pierre Poiret, Cologne [Amsterdam], Jean de la Pierre, 1704 (Première partie seule complète) -- dans Les Opuscules spirituels…, 1712 (rétablissement de la seconde partie) -- dans Les Opuscules spirituels…, op.cit., 1720, reproduction anastatique avec introduction de J. Orcibal, G. Olms, 1978 -- dans Torrents et Commentaire au Cantique, éd. C. Morali, Grenoble, Jérôme Millon, Coll. «Atopia», 1992 (version primitive manuscrite) -- dans Œuvres mystiques, Paris, Honoré Champion, coll. «Sources Classiques», éd. D. Tronc, 2008 (version 1720, variantes des éd. et des mss., adjonction des précisions développées par l’auteur dans ses Justifications, repérage des passages relevés dans l’Ordonnance de l’évêque de Chartres).
- 1682 ou 1683 (peu après Les Torrents) : Moyen court et très facile pour l’oraison que tous peuvent pratiquer très aisément…, Grenoble, J. Petit. -- 1686 à Lyon & 1690 à Paris & Rouen (variantes) -- 1699 : "Moyen court et très facile…", dans Recueil de divers traitez de théologie mystique qui entrent dans la célèbre dispute du Quiétisme qui s’agite présentement en France…, Cologne, [Amsterdam] (var.) -- dans Les Opuscules spirituels de Madame J. M. B. de la Mothe Guyon…, op.cit., 1704, 1712, 1720 (var.) -- dans Le Moyen court et autres récits, une simplicité subversive, textes édités par M.-L. Gondal, Grenoble, Jérôme Millon, Coll. « Atopia », 1995. -- dans Œuvres mystiques, op.cit., 2008 (var. des éd. et des mss., adjonction des précisions des Justifications).
- de 1682 à 1709 : La Vie de Mme J.-M. B. de La Mothe Guion, écrite par elle-même, Cologne [Amsterdam], J. de La Pierre, 3 volumes, 1720 -- rééd. à l’identique par Dutoit, op.cit., 1790 -- La Vie par elle-même et autres écrits biographiques, éd., intr. et annot. D. Tronc, Étude littéraire par A. Villard, Paris, Honoré Champion, coll. «Sources Classiques», 2001 (éd. en 5 parties : 1 à 3 correspondent aux trois vol. de la Vie par elle-même, augmentée des apports d’une première rédaction restée manuscrite ; la partie 4 correspond au ms. du « récit de captivité » ; la partie 5 rassemble des témoignages sur la dernière période vécue à Blois).
- de 1681 à 1717 : Lettres chrétiennes et spirituelles sur divers sujets qui regardent la vie intérieure ou l’esprit du vrai christianisme, éd. Pierre Poiret, Cologne [Amsterdam], J. de La Pierre -- Lettres chrétiennes et spirituelles… Nouvelle éd. enrichie de la correspondance secrète de Mr. de Fénelon avec l’auteur, éd. Dutoit, Londres [Lyon], 1767-1768 -- Madame Guyon et Fénelon, la correspondance secrète : avec un choix de poésies spirituelles, présenté par Benjamin Sabler et Étienne Perrot, Paris, Dervy, 1982 (éd. partielle non critique) -- Correspondance, éd. D. Tronc, Paris, Honoré Champion, collection « Correspondances », t.I Directions spirituelles, 2003, t.II Combats, 2004, t.III Chemins mystiques, 2005. (correspondance active et passive largement augmentée notamment par l’édition du fond manuscrit préservé aux Archives Saint-Sulpice de Paris).
- après 1703 (quelques pièces depuis 1688) : Discours chrétiens et spirituels sur divers sujets qui regardent la vie intérieure, tirés la plupart de la Sainte Écriture, éd. Pierre Poiret, Vincenti, Cologne [Amsterdam], Jean de la Pierre (140 pièces auxquelles il faut ajouter 16 pièces éditées avec la correspondance) -- éd. Dutoit, Paris [Lyon], Chez les Libraires Associés, 1790. -- Écrits sur la vie intérieure, prés. D. et M. Tronc, «Les carnets spirituels», Arfuyen, septembre 2005. (15 pièces) -- Choix de 50 pièces dans: Œuvres mystiques, op.cit., 2008.
Choix d'ouvrages consacrés à Madame Guyon
- Guerrier, Louis, Madame Guyon, sa vie, sa doctrine et son influence, d'après les écrits originaux et des documents inédits. Thèse présentée à la Faculté des lettres de Paris, Orléans, H. Herluison, 1881.(ouvrage pionnier encore utilisable).
- Cognet, Louis, Crépuscule des Mystiques, Paris, Desclée, 1958. (la plus grande partie de cet ouvrage devenu classique porte sur le vécu de Madame Guyon avant 1695).
- François Ribadeau Dumas, Fénelon et les saintes folies de Madame Guyon, Genève, Éditions du Mont-Blanc, 1968.
- Françoise Mallet-Joris, Jeanne Guyon, Flammarion, 1978. (vivante évocation de la vie à la Cour, etc.).
- Masson, Pierre-Maurice, Fénelon & Mme Guyon, documents nouveaux et inédits, Paris, Hachette, 1907.
- Orcibal, Jean, «Le Cardinal Le Camus témoin au procès de Madame Guyon» (1974) p. 799-818 ; « Madame Guyon devant ses juges » (1975) p. 819-834; « Introduction à Jeanne Marie Bouvier de la Mothe-Guyon: les Opuscules spirituels » (1978) p. 899-910, dans Études d’histoire et de littérature religieuse, Paris, Klincksieck, 1997.
- Madame Guyon, Rencontres autour de la Vie et l’œuvre de Madame Guyon, Grenoble, Millon, 1997. (contributions des meilleurs spécialistes).
- Gondal, Marie-Louise, Madame Guyon, 1648-1717, un nouveau visage, Paris : Beauchesne. 1989. (reprend [L']Acte mystique, Témoignage spirituel de Madame Guyon (1648-1717), Thèse de doctorat en théologie : Facultés catholiques de Lyon : 1985).
Liens externes
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