Almicantarat

Almicantarat

Astrolabe

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Astrolabe perse du XVIIIe siècle

L'astrolabe (du grec astrolabus signifiant « instrument pour prendre la hauteur des astres »[1] ou Almincantarat, Almicantarat (de l'arabe المقنطرة : Al-Muqantara) est une double projection plane (le plus souvent une projection polaire) qui permet de représenter le mouvement des étoiles sur la voûte céleste. Le principe de sa construction est connu depuis l'époque grecque ; mais son utilisation courante n'a été répandue que par les astronomes de l’Islam, à partir du VIIe siècle. D'usage limité pour les observations astronomiques, il sert surtout pour l'astrologie, l'enseignement de l'astronomie, et le calcul de l'heure le jour par l'observation du soleil ou pendant la nuit par l'observation des étoiles. Dans sa forme simplifiée, l'« astrolabe nautique », ce fut le principal instrument de navigation depuis le XVIe siècle jusqu'au XVIIIe siècle, au moment où fut inventé le sextant.

Sommaire

Fonctionnement

L'astrolabe superpose deux instruments scientifiques.

Mesure des hauteurs des astres

Lame d'un astrolabe du XIe siècle.

Un astrolabe se compose d'un disque gradué en degrés (rapporteur) avec un bras tournant attaché à son centre, l'alidade. La marque 0° sur le cercle est alignée avec l'horizon. L'alidade pivote sur son axe et est pointée vers le soleil ou une étoile afin de lire l'angle représentant la hauteur du soleil ou d'une étoile majeure connue par rapport à l'horizon, sur les repères du disque. L'astrolabe se tient verticalement à la main par un anneau ; les astres sont visés en tournant le viseur jusqu'à ce que l'un d'eux soit vu par les deux bouts. La valeur en degrés obtenue par le viseur sur l'arc peut être convertie en degrés de latitude du point d'observation. Si une étoile, ou tout autre corps céleste, est visé à l'extrémité du bras mobile, la position de l'étoile peut être lue (« prise ») sur le cercle gradué. L'étymologie grecque du nom provient de cette action : astro = étoile, labe = prendre.

Cette fonction est la seule réalisée par les « astrolabes nautiques », utilisés pour la navigation maritime, et qui ne présentent pas la partie centrale.


Calcul de l'heure

Le centre de l'astrolabe est un abaque permettant de déterminer l'heure à partir de la hauteur de l'astre, et de là, sa direction.

Quand le rete tourne en fonction du temps local, la position des étoiles qu'il matérialise se déplace sur le plateau mater, où peuvent être lues les hauteurs et les directions. Réciproquement, l'instrument peut être ajusté à la position mesurée, le temps pouvant alors être lu sur l'échelle.

La hauteur de l'astre visée étant connue, on fait tourner le rete jusqu'à ce que le repère du rete correspondant à l'astre coïncide avec la graduation de la hauteur sur la mater. Dans cette position, l'astrolabe est réglé à l'heure locale, et la direction de l'axe peut être lue sur l'autre famille de graduation de la mater. Pour une lecture correcte, il faut savoir si l'astre visé est ascendant (à l'orient) ou descendant (à l'occident), ce qui ne pose guère de problème à l'observateur entraîné.

Utilisation

Astrolabe planisphérique généré par un logiciel.

L'astrolabe est avant tout un instrument destiné à lire l'heure solaire ou stellaire en un endroit donné, pour effectuer des observations astronomiques ou astrologiques. Quand il est destiné à être utilisé en voyage, il dispose d'un jeu de plusieurs plateaux appelés tympan, permettant d'ajuster la représentation du ciel local en fonction de la latitude du lieu.

Une araignée représentant le cercle écliptique et pointant la position des principales étoiles du ciel peut tourner autour de l'axe. Parfois une règle graduée est ajoutée pour relever la hauteur d'un astre ou pointer un repère sur le limbe de l'astrolabe.

Construction

Astrolabe arabe de 1208

L'intérêt d'une telle projection stéréographique de la voûte céleste est essentiellement pratique et esthétique : avec cette projection, tous les cercles (de hauteurs, d'azimuth,...) sont transformés en cercles, ce qui en facilite grandement le tracé, et conduit à un résultat beaucoup plus esthétique. Sans cette contrainte de réalisation, une projection centrale arbitraire pourrait être retenue.

La rete n'est qu'une armature destinée à supporter la matérialisation du zodiaque d'une part, et les pointeurs des principales étoiles d'autre part. Cette armature est souvent une véritable œuvre d'art à elle seule. Elle tend à paraître symétrique par rapport à l'axe des solstices, alors que les positions stellaires ne le sont naturellement pas.

L'astrolabe est le plus souvent dimensionné de manière à ce que le cercle du zodiaque soit pratiquement tangeant à la bordure extérieure. Les étoiles représentées sont donc restreintes à celles située au dessus du tropique du Capricorne. Sirius est donc toujours représentée, souvent Antarès, mais généralement pas Fomalhaut.

Datation d'un astrolabe

Astrolabe décalage.jpg

L'astrolabe est un instrument suffisamment précis pour que la précession des équinoxes y soit manifeste : même les astrolabes du XVe siècle ne sont plus utilisables de nos jours. Sur la gravure, la pointe la plus en haut à droite, qui clôt le cercle externe, et marque la position de Antarès, est sensiblement dans l'alignement de la graduation 28° du Scorpion (238°). Cette étoile est actuellement (Y2000) à 247°, soit 7° du Sagittaire. La précession des équinoxes étant de 1° pour 72 ans, la différence de 10° correspond à un âge de l'ordre de 700 ans (l'original est donné pour 1208, la différence vient probablement de ce que la gravure a introduit de petits écarts supplémentaires).

Dans l'astrolabe du XVIe siècle ci-dessous, la position d'Antarès est donnée à 0,5° du Sagittaire, soit un décalage de 6.5° et un âge apparent de l'ordre de 470 ans. L'astrolabe étant daté de 1569, l'écart (de 40 ans, soit un demi-degré) paraît simplement dû aux erreurs de réalisation et de lecture.

Histoire et origine

Astrolabe du XVIe siècle.

L'astrolabe a probablement été inventé par Hipparque puis décrit par Ptolémée. L'astrolabe en laiton est originaire de Perse (Iran) et amélioré dans le monde islamique. À cet égard, Sigrid Hunke n’hésite pas à affirmer « Alors que les Grecs ne connaissaient que fort peu de manières de s’en servir, un ouvrage d’Al-Khovaresmi [mort en 847] sur l’astrolabe en cite déjà quarante-trois… »[2].

Selon Ibn Nadim, le premier astrolabe arabe était fait par Ibrahîm Ibn Habîb Al-Fazâri [mort en 188 H.][3], puis des traités succédèrent à tel point qu’on peut assigner à chaque astronome arabe au moins un ou deux ouvrages sur cet instrument. Le résultat est une grande quantité de traités sur l’astrolabe, la plupart sous forme de manuscrits éparpillés dans les bibliothèques nationales et internationales. Ces traités peuvent être réparties en deux catégories : les traités de conception, d’une part, et les traités d’utilisation de l’autre.

À titre d’exemple, l’Étude exhaustive des méthodes possibles pour construire l’astrolabe. est un ouvrage dans lequel Al-Birûnî [362-440 H / 973-1048] « présente encore des modèles servant à montrer la marche du soleil et de la lune (boîte à lune) comme aussi le mécanisme des éclipses ».[4] Et après l’insertion des planches des planètes dans l’astrolabe par les astronomes arabes, ils parvenaient à calculer le mouvement apparent des planètes connues, avec une précision impressionnante. Ibn al-Zerqellu [1029?-1087?] trouva même le moyen de réduire ces diverses planches à une seule ‘planche des sept planètes’, dont l’avers en porte quatre et le revers trois, le même tracé d’épicycle servant pour toutes. La plus grande curiosité de cette œuvre, selon Dominique Urvoy, est le dessin des orbites non pas circulaires mais ovoïdes (baydi) [sic].[5]

Nombre de chercheurs et d'historiens de la science ont cité l'idée que du matériel astronomique arabe était bel et bien exporté ou importé en Occident médiéval. A cet égard, Sedillot nous apprend « qu'au Moyen Age, l’instrument astronomique par excellence est l’astrolabe qu’en pays d’Islam, savants ingénieux et artistes habiles perfectionnent à l’envie ».[6]

Sigrid Hunke mentionne elle aussi que l’astrolabe fut chaleureusement accueilli par l’occident. L'astrolabe atteint l'Europe vers 970, par l'intermédiaire du moine Gerbert d'Aurillac, qui le ramena d'Espagne, d'où il rapporta nombre de connaissances scientifiques transmises par les Arabes, qui occupaient en partie la péninsule ibérique.Pendant trois siècles on se contenta de les importer. Les Musulmans, sachant combien les Chrétiens recherchaient leurs articles, en fabriquaient tout spécialement pour l’exportation qu’ils ornaient d’inscriptions latines.[7]

L'auteur anglais Geoffrey Chaucer (v.13431400) a écrit un traité sur l'astrolabe pour son fils. Au XVe siècle, le fabricant d'instrument français Jean Fusoris (v.13651436) a commencé à les vendre dans son magasin à Paris, avec des cadrans solaires portatifs et d'autres instruments scientifiques populaires à cette époque.

Ce sont les Portugais qui aboutissent à partir de 1485 à des progrès décisifs en adaptant l'astrolabe à la navigation maritime et en dressant des tables (regimientos) permettant de calculer la déclinaison magnétique. Le problème de la longitude ne sera résolu qu'avec l'invention du chronomètre (2e moitié du XVIIIe siècle).

Annexes

Bibliographie

  • L'Astrolabe, R. D'Hollander, Institut Océanographique Editeur, 1999
  • Astrolabes cartes du Ciel, J.-N. Tardy, Edisud, 1999
  • Les instruments de l'astronomie ancienne de l’Antiquité à la Renaissance.Philippe Dutarte, 2004
  • Cueillir les étoiles : autour des astrolabes de Strasbourg / Francis Debeauvais, Paul-André Befort ; préface d'Agnès Acker ; présentation de William Shea, Strasbourg, 2002 - ISBN 2-84512-019-2.

Notes et références

  1. Dictionnaire Grec-Français de Bailly. Paris : Librairie Hachette, 16e éd., 1950, p. 293. (1re éd., 1894).
  2. Sigrid Hunke, Le Soleil d’Allah brille sur l’Occident. Notre héritage arabe. Traduit de l’Allemand par Solange et George de Lalène. Paris : Editions Albin Michel, 1963, p. 90. (Edition allemande : Allahs Sonne Uber dem Abendland. Unser Arabisches Erbe. 1960, Deutsche Verlags-Anstalt, Stuttgart.)
  3. Al-Fihrist. Teheran : ed. Riza Tajaddud, 1971, p. 332
  4. L’Oeuvre d’al-Birûnî. Essai bibliographique par D. J. Boilot, in MIDEO (Mélanges Institut Dominicain d’Etudes Orientales du Caire). N° 2, 1955, p. 191.
  5. Dominique Urvoy, Pensers d’Al-Andalus. La vie intellectuelle à Cordoue et Séville au temps des empires berbères. (Fin XIè siècle-début XIIIè siècle. Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 1990, p. 141.
  6. Supplément au traité des instruments astronomiques des Arabes, Paris, 1844, pp. 149-194
  7. Hunke, Op. cit., pp. 90-91

Voir aussi

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Voir « astrolabe » sur le Wiktionnaire.

Articles connexes

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