Jean-Hugues Matelly

Jean-Hugues Matelly
Jean-Hugues Matelly
Naissance 10 décembre 1965
Montpellier
Nationalité Drapeau de France France
Profession Officier de gendarmerie
Autres activités politologue, sociologue, écrivain
Formation Institut d'études politiques de Toulouse - université des Sciences Sociales - Doctorat en science politique - Ecole des Officiers de la Gendarmerie Nationale

Jean-Hugues Matelly, le 10 décembre 1965 à Montpellier (France), est chef descadron de la Gendarmerie nationale française mais aussi politologue, sociologue et auteur dessais et romans.

Sommaire

Biographie

Jean-Hugues Matelly est un officier français menant de front une carrière militaire dans la Gendarmerie nationale et des travaux universitaires dans le champ de la sécurité au sein du Centre dÉtudes et de Recherches sur la Police (CERP) à l'Institut d'études politiques de Toulouse, puis du Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales (CESDIP), laboratoire du CNRS.
Dans le cadre militaire, il se distingue dabord par des réflexions innovantes et critiques, en matière dusage du jeu de guerre en formation tactique, de réflexions éthiques et juridiques sur la problématique de lordre illégal ou encore quant aux limites de la preuve génétique en matière judiciaire[1] et aux potentialités de nouvelles formes de management[2].

Sur le plan universitaire ses travaux portent essentiellement sur la sociologie de la police et particulièrement des gendarmes dans lexercice de leurs fonctions de police judiciaire, sur les politiques publiques de sécurité et lévaluation statistique des phénomènes de délinquance.

Sa liberté de ton et danalyse lont régulièrement conduit à être sanctionné par la hiérarchie militaire sur le fondement du devoir de réserve[3]. Il sexprime dailleurs régulièrement en faveur de la libéralisation de lexpression individuelle et collective des militaires français[4], dont le statut général des militaires limite significativement les libertés publiques, eu égard à la situation des soldats de la plupart des pays européens. Ses commentaires sur la situation de la Gendarmerie nationale sont souvent remarqués[5]. Il a été un des fondateurs, voire pour certains observateurs le « leader[6] », du mouvement « Gendarmes et citoyens ».
Le 25 mars 2010, il est radié des cadres par "mesure disciplinaire" par un décret du président de la République, non publié au Journal Officiel[7], mais les effets de ce décret sont partiellement suspendus par le Conseil d'État le 29 avril 2010[8].

Le 12 janvier 2011, le Conseil dÉtat annule le décret du président de la République estimant que, si « M. Matelly a effectivement manqué à ses obligations en faisant état publiquement, dans les médias, de son opposition à la politique dorganisation des deux grands services français dédiés à la sécurité publique », ladministration, « alors quelle disposait dun éventail de sanctions large (notamment la possibilité de prendre une mesure de retrait temporaire demploi allant jusquà douze mois) » […] « a prononcé à lencontre de cet officier de gendarmerie une sanction manifestement excessive »[9]. Toutefois, la direction générale de la gendarmerie nationale décide d'engager une nouvelle procédure disciplinaire à son encontre[10],[11],[12].

Le chevauchement de lactivité professionnelle, des travaux de recherche et dun certain engagement militant posent nécessairement la question de la neutralité axiologique de certaines de ses publications scientifiques. La stigmatisation dont il semble faire lobjet dans certains milieux militaires conservateurs paraît pouvoir sinterpréter suivant des schémas classiques dassimilation de linnovation à la déviance. Le 6 avril 2011, l'Observatoire national de la délinquance, dans le compte-rendu de son conseil d'orientation, précise que suite à l'invitation de son président, M. Alain BAUER, Jean-Hugues MATELLY s'est porté candidat pour un poste à l'OND à la condition que son institution de tutelle, la Gendarmerie nationale, donne son accord. Il pourrait ainsi concilier son activité professionnelle à la Gendarmerie et ses activités de chercheur.

Carrière militaire

Commandant de Compagnie de Blois (98), rapporteur à la Commission des recours des militaires, contrôleur de gestion pour la région Picardie.

Recherches universitaires et écriture

Expression publique et devoir de réserve des militaires

Le statut de militaire enferme, en France, dans un cantonnement juridique spécifique, limitant notamment la liberté dexpression et dassociation. Ce cadre et la tradition de «Grande muette», plus contraignants que dans la plupart des pays occidentaux[réfnécessaire], sont parfois avancés comme des explications de la relative pauvreté de la pensée militaire[13] en France[14]. Le nouveau statut général des militaires de 2005 fut présenté comme assouplissant le régime de la réflexion et de lexpression militaire, même si, comme lindiquait le rapport de la commission de révision du statut «Force est de constater que le temps nest plus le colonel de Gaulle publiait "Vers larmée de métier" et que les militaires participent peu aux débats sur la défense

Cest dans ce contexte que Jean-Hugues Matelly prend position sur ce thème dans larticle « La libre censure des militaires » publié par le quotidien Le Monde[15]. Il y soutient que le projet de nouveau statut nopère quune libéralisation dapparence et que les mécanismes juridiques et sociaux censurant lexpression des militaires sen trouvent, au contraire renforcés. Il développe cette thèse, sous langle de la sociologie militaire, dans la revue Les Champs de Mars[16] et, sous langle juridique, dans lActualité Juridique du Droit Administratif[17]. Ces réflexions semblent pour partie liées à lexpérience personnelle quil tire des réactions de ladministration militaire face à la médiatisation de certaines de ses publications antérieures sur dautres thèmes : « Quel avenir pour les gardiens de la cité ? »[réfnécessaire] ou encore « Une obligation de résultats pour les gendarmes[18] ? »

A léchelle de lhistoire contemporaine des armées françaises, les sanctions pour manquement au devoir de réserve paraissent cependant très rares, ou alors peu connues parce que ne donnant lieu ni à publicité ni à contentieux juridique. Lun des cas les plus célèbres reste ainsi celui du général Jacques Pâris de Bollardière. La rareté des décisions du Conseil dÉtat qui, un temps, avait semblé veiller à faire progresser le droit applicable aux militaires au même rythme que celui des détenus[19] mais qui depuis, semble avancer plus rapidement dans la définition du statut pénitentiaire et de son contrôle par le juge[20], ne permet nullement de préciser les limites objectives du devoir de réserve des militaires. La jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de lHomme semble plus libérale que le juge administratif suprême français[21], mais na jamais eu à se prononcer sur le cas des soldats français», ainsi, La CEDH a déclaré irrecevable, le 15 septembre 2009, une requête de Jean-Hugues Matelly[22].

Si la problématique juridique est incontournable, la question sociale associée à la liberté dexpression des militaires ne paraît pas encore posée dans le débat public. Rien nindique, au-delà du développement dassociations, telles lAdefdromil, ou de forums internet, tels Gendarmes & Citoyens (auquel Jean-Hugues Matelly a contribué), quune meilleure définition de la liberté dexpression est un problème social majeur pour les militaires. Les questions salariales ou liées au temps de travail (pour les gendarmes) paraissent plus prégnantes.

Néanmoins, en juillet 2009, une nouvelle procédure intentée contre le chef descadron Matelly, envoyé devant un conseil denquête militaire pour avoir cosigné, en qualité de chercheur associé à son laboratoire du CNRS et avec dautres chercheurs, un article critique « Feu la gendarmerie nationale » concernant le rattachement de la gendarmerie au ministère de lIntérieur et certains aspects des politiques publiques en matière de sécurité[23] », semble marquer lentrée du débat dans la sphère politique. En effet, « laffaire Matelly » en vient à être évoquée à lAssemblée nationale durant les débats sur la loi « gendarmerie », le 2 juillet 2009 ainsi que lors de la séance des questions au gouvernement le 7 juillet 2009[24] ou encore commentée dans les médias par des députés[25]. Divers commentateurs rapprochent par ailleurs plusieurs contentieux récents qui tendraient à démontrer un durcissement supplémentaire de la conception française du devoir de réserve. Le plus emblématique est certainement celui qui oppose, aujourd'hui encore, le commandant de police Philippe Pichon, mis en examen pour violation de secret professionnel, à la haute hiérarchie du ministère de l'Intérieur[26].

Prises de position d'organisations syndicales et de collectifs de chercheurs

Dès l'automne 2009, le collectif Indépendance des Chercheurs a explicitement apporté son soutien à Jean-Hugues Matelly[27]. Des chercheurs ont également signé la pétition mise en ligne par Isabelle Voidey[28]. Plus récemment, la radiation des cadres de Matelly a déclenché une cascade de réactions, parmi lesquelles des prises de position du Syndicat National des Agents des Douanes (SNAD) CGT[29], du Syndicat National des Chercheurs Scientifiques (SNCS-FSU)[30] et du collectif Sauvons la Recherche qui a à son tour lancé une pétition[31]. Indépendance des Chercheurs a également souligné la nécessité d'une liberté d'expression pour les militaires, notamment à propos de leur statut et de leurs conditions de travail[32], a fortiori dans un contexte la politique européenne pourrait notamment rendre incertain l'avenir de la Gendarmerie Nationale et des corps équivalents d'autres pays[33].

Travaux

Analyse synthétique des contributions de la personne

  • Gendarmerie et police judiciaire criminelle : l'enquêteur face à l'organisation, thèse de doctorat, Science politique, Toulouse 1, 2004, dact., 619 f.

Bibliographie

Articles

« La peur du jeu de rôle », Les Cahiers de l'IRSA, 1999, n°3 "Imaginaire de leffroyable. Monstres, crimes et catastrophes", p. 125-136.

« Une obligation de résultats pour les gendarmes ? » in «  Quartiers sensibles ici et ailleurs », Cahiers de la sécurité intérieure, no 49, 2002, p. 187-206.

« Les limites d'un management de la sécurité : le cas de la gendarmerie française », Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique, 2003, no 4, p. 483-500.

« Une activité de police judiciaire gagnée par la fièvre médiatique ? Les enseignements d'une enquête menée auprès de la Gendarmerie nationale française », Cahiers de la sécurité intérieure, no 55, 1er trimestre 2004, p. 219-240.

« La liberté critique du militaire : incertitudes et enjeux », Les Champs de Mars, 2005, no17, p. 165-181.

« Lincertaine liberté critique du militaire », Actualité juridique droit administratif, no 39, 21 novembre 2005, p. 2156-2161.

« Feu la Gendarmerie nationale», Pouvoirs locaux, no 80, 2009, p. 12-13.

Interventions publiques et interviews

« Quand la police résout plus de 100% des affaires », Libération, 11 janvier 2007.

« La gendarmerie enterrée, à tort, dans lindifférence générale » Rue89, 30 décembre 2008

Annexes

Notes et références

  1. « Critique de la preuve génétique », Revue de la Gendarmerie nationale, 2e trimestre 2000, n° 195, p. 87-98.
  2. Deux articles parus en 2003 dans Le Trèfle (n°96 et 97), revue dune association éponyme dofficiers de gendarmerie.
  3. Ces sanctions, source de contentieux administratif donneront lieu à une abondante jurisprudence, par exemple : Conseil dEtat, référé, 22 mars 2002, n° 244321, Conseil dEtat, 10 novembre 2004, n° 256573.
  4. Notamment dans une longue tribune publiée le jour de lexamen du nouveau statut général des militaires français par lAssemblée nationale : / « La libre censure des militaires », Le Monde, 14 décembre 2004.
  5. J.-Y. Fontaine, « Faut-il punir le soldat Matelly ? », Marianne2, 1er décembre 2007
  6. J.-Y. Fontaine, / « Syndicalisme électronique en gendarmerie », Libération, 18 avril 2008.
  7. (fr)Un officier de gendarmerie radié pour avoir critiqué le rapprochement avec la police sur www.lemonde.fr. Consulté le 15 juillet 2010.
  8. (fr)Le juge des référés du Conseil dÉtat suspend en partie lexécution du décret radiant des cadres, à titre disciplinaire, M. Matelly sur www.conseil-etat.fr. Consulté le 15 juillet 2010.
  9. (fr)Communiqué du Conseil d'Etat relatif à l'annulation du décret présidentiel de radiation des cadres du chef d'escadron Jean-Hugues Matelly sur www.conseil-etat.fr/cde/. Consulté le 12 janvier 2011.
  10. Jean-Hugues Matelly : "C'est une décision qui fera date"
  11. La radiation du gendarme Matelly est annulée
  12. La radiation du gendarme Matelly annulée, une nouvelle procédure lancée
  13. On note cependant, entre quelques rares auteurs, les ouvrages du général Vincent Desportes.
  14. . Parmi divers ouvrages sur ces questions : Clara Bacchetta, « Quelle liberté dexpression professionnelle pour les militaires », Economica 2004 ; Roseline Letteron, « La liberté dexpression des fonctionnaires en uniforme », Economica, 2000.
  15. « La libre censure des militaires », Le Monde, 14 décembre 2004.
  16. J.-H. Matelly « La liberté critique du militaire : incertitudes et enjeux », Les Champs de Mars, 2005, no17, p. 165-181. .
  17. J.-H. Matelly « Lincertaine liberté critique du militaire », Actualité juridique droit administratif, n°39, 21 novembre 2005, p. 2156-2161.
  18. Les Cahiers de la sécurité intérieure, n°49, 2002, pp. 187-206.
  19. Les arrêts Marie et Hardouin, en 1995, marquent, par exemple, la recevabilité du recours pour excès de pouvoir des militaires et des détenus contre les sanctions disciplinaires qui leur sont infligées, respectivement par la hiérarchie militaire et par ladministration pénitentiaire.
  20. Le contrôle croissant de ladministration pénitentiaire.
  21. On se référera par exemple à larrêt Gubi c. Autriche du 19 décembre 1994 : violation de larticle 10 et, en sens inverse à la décision Camacho Lopez Escobar c. Espagne du 20 mai 2003 : irrecevabilité et non-violation de larticle 10.
  22. n° 30330/04)
  23. « Gendarmerie : le commandant Matelly menacé de graves sanctions.
  24. Séance des questions au gouvernement du 7 juillet 2009,
  25. Le Télégramme : « Laffaire Matelly en embuscade »,
  26. « Lindépendance des fonctionnaires sous le feu du pouvoir politique », « Devoir de réserve : la France sur la ligne dure »
  27. « Le gendarme Matelly sera-t-il radié des cadres ? (I) », « Affaire Matelly : la position du CESDIP »
  28. « Pétition en ligne contre la radiation de Jean-Hugues Matelly, commandant de gendarmerie, sociologue, politologue, chercheur »
  29. « Le SNAD-CGT soutient Jean-Hugues Matelly »
  30. « Communiqué de presse du SNCS (30/03/2010) »
  31. « Pétition "Réintégration de M. Matelly et indépendance de la recherche" »
  32. Le gendarme Matelly sera-t-il radié des cadres ? (III)
  33. Jean-Hugues Matelly, radié des cadres, Affaire Matelly, gendarmerie et liberté d'expression

Lien externe

Sur les autres projets Wikimedia :

Autres sources


Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Jean-Hugues Matelly de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Нужно решить контрольную?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Devoir de réserve dans la fonction publique française — Dans la fonction publique française, le devoir de réserve « interdit au fonctionnaire de faire de sa fonction l’instrument d’une propagande quelconque »[1]. Il s agit d une application du principe de neutralité du service public,… …   Wikipédia en Français

  • Delinquance — Délinquance La délinquance est une conduite caractérisée par des délits répétés, considérée surtout sous son aspect social mais également pénal. Il s agit principalement de délits opérés à petite échelle, et la connotation péjorative du mot est… …   Wikipédia en Français

  • Délinquant — Délinquance La délinquance est une conduite caractérisée par des délits répétés, considérée surtout sous son aspect social mais également pénal. Il s agit principalement de délits opérés à petite échelle, et la connotation péjorative du mot est… …   Wikipédia en Français

  • Délinquance en France — La délinquance en France est l ensemble des délits commis sur une période et au sein d un groupe donnés en France. Sommaire 1 Types 2 Observation et mesures 2.1 Critiques 3 Evolution …   Wikipédia en Français

  • Devoir De Réserve — Le devoir de réserve est une notion souvent évoquée, mais qui pourtant n existe pas dans le droit administratif de la fonction publique en France. Le texte de référence est la Loi n° 83 634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des… …   Wikipédia en Français

  • Devoir de reserve — Devoir de réserve Le devoir de réserve est une notion souvent évoquée, mais qui pourtant n existe pas dans le droit administratif de la fonction publique en France. Le texte de référence est la Loi n° 83 634 du 13 juillet 1983 portant droits et… …   Wikipédia en Français

  • Devoir de réserve — Le devoir de réserve est une notion souvent évoquée, mais qui pourtant n existe pas dans le droit administratif de la fonction publique en France. Le texte de référence est la Loi n° 83 634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des… …   Wikipédia en Français

  • École des officiers de la gendarmerie nationale — Devise Pour la patrie, l honneur et le droit Informations Fondation 1901 Type …   Wikipédia en Français

  • Alain Bauer — lors du salon du livre de Paris 2011. Naissance …   Wikipédia en Français

  • Police de proximité en France — Patrouille des policiers de quartier à Paris La police de proximité est initialement une doctrine d emploi de la police nationale instaurée à partir de 1998 par le gouvernement de Lionel Jospin et globalement supprimée à partir de 2003 par… …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/855167 Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”