- Jean-Claude Milner
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Jean-Claude Milner, né en 1941 à Paris, est un linguiste, philosophe et essayiste français.
Sommaire
Biographie
Jean-Claude Milner, né à Paris, est d'origine juive de Lituanie et d'une mère alsacienne de tradition protestante. Il est célibataire, sans enfant. Il est le frère de Judith Milner.
Après des études en khâgne au lycée Henri-IV, il entre à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm en 1960, où il suit l'enseignement de Louis Althusser. En compagnie de son jeune camarade Jacques-Alain Miller, il devient un familier de Jacques Lacan, dont le séminaire se tient, dans ces années-là, à l'ENS. Il est un temps secrétaire du Cercle d'épistémologie de l'École. Affilié au mouvement maoïste de la Gauche prolétarienne de 1968 à 1971, il côtoie alors Benny Lévy, dont il suivra, longtemps après, l'évolution politique. À noter enfin l'importance pour la formation de Milner de l'enseignement de Roland Barthes et de la lecture de Roman Jakobson.
Il a été directeur du Collège international de philosophie de 1998 à 2001. Il a fondé et dirigé la collection « Philia », aux Éditions Verdier, de 1999 à 2004.
Le champ linguistique
Jean-Claude Milner a effectué une partie de ses études aux États-Unis, se formant au Massachusetts Institute of Technology à la linguistique chomskienne ; on lui doit la traduction française en 1971 des Aspects de la théorie syntaxique de Noam Chomsky, traduction qui établit la terminologie de l'école française de grammaire générative et contribua fortement à la réception de cette théorie en France. Sa carrière académique s'est déroulée à l'Université Paris VII où il a enseigné la linguistique dans le département de linguistique créé sous l'impulsion d'Antoine Culioli, son directeur de thèse de doctorat. De la fréquentation d'Antoine Culioli, Jean-Claude Milner retire un intérêt pour la question de la détermination et de l'articulation du sens et de la syntaxe. Son ouvrage Introduction à une science du langage (1989) fonde un projet de linguistique générale reposant sur une séparation radicale entre le sens et la syntaxe (théorie des positions syntaxiques) et une épistémologie combinant les apports de Karl Popper et Imre Lakatos. Jean-Claude Milner a suivi les développements ultérieurs de la théorie chomskienne, sans toutefois abonder dans l'hypothèse d'une justification biologique défendue par Chomsky.
Professeur à l'Université Paris Diderot, Jean-Claude Milner a également participé aux travaux de l'École freudienne de Paris.
Outre l'épistémologie de la linguistique, Milner est spécialiste des insultes en français, à l'analyse desquelles il a consacré sa thèse d'État[1].
Le champ idéologique
Depuis Le triple du plaisir (Verdier, 1997), l'œuvre de Milner présente un très net infléchissement, que son ancien camarade althussérien Alain Badiou qualifie apophatiquement de « trajectoire post-linguistique » (Logique des Mondes, p. 548). La nouvelle orientation de ses recherches, tendant à une réévaluation des catégories de l'antisémitisme (explicite depuis Les penchants criminels de l'Europe démocratique, 2003[2]), a connu l'acmé de son expression médiatique en janvier 2007, au micro de son ami Alain Finkielkraut, lorsqu'il fit une déclaration tonitruante sur l'ouvrage de Pierre Bourdieu Les Héritiers (« J'ai ma thèse sur ce que veut dire "héritiers" chez Bourdieu : Les héritiers, c'est les Juifs » ; affirmation qu'il a lui-même glosée immédiatement : « Je crois que c'est un livre antisémite » ; France Culture, 13 janvier 2007, vers 9h30[3]). Il a également dénoncé la position de Noam Chomsky à l'égard du révisionnisme, position qu'il qualifie de « naïve » (cf. Ordres et raisons de langue). Ces attaques frontales dans le champ des idéologies sont le résultat de ses réflexions sur la structure de la culture européenne, exposées dans la plupart de ses essais de la dernière décennie, du Salaire de l'idéal (1997) à L'arrogance du présent (2009).
Cette nouvelle orientation n'est cependant pas isolée et participe aux scissions radicales qui partagent l'héritage maoïste français. À une nouvelle conception essentialiste du rôle du judaïsme en Europe, Milner adjoint, comme Benny Lévy, une réévaluation de l'engagement politique[4]. Usant de son autorité de linguiste, il a publié une interprétation du poème mallarméen Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui sous les traits d'une prophétie contre-révolutionnaire (Mallarmé au tombeau, 1999). Comme chez Rancière, la lecture de Mallarmé selon une stratégie politique est à comprendre en considération du rôle clef de cet auteur pour les anciens maoïstes de la rue d'Ulm[5].
Livres et autres publications
- Arguments linguistiques, Mame, 1973
- De la syntaxe à l’interprétation. Quantités, insultes, exclamations, Le Seuil, collection « Travaux linguistiques », 1978
- L’Amour de la langue, Le Seuil, collection « Connexions du Champ freudien », 1978
- Ordres et raisons de langue, Le Seuil, 1982
- Les Noms indistincts, Le Seuil, collection « Connexions du Champ freudien », 1983
- De l’école, le Seuil, 1984
- De l'inutilité des arbres en linguistique, Département de Recherches Linguistiques, Un. de Paris VII, coll. ERA 642, 1985
- Détections fictives, Le Seuil, collection « Fictions & Cie », 1985
- Introduction à un traitement du passif, Département de Recherches Linguistiques, Un. de Paris VII, coll. ERA 642, 1986 (rééd.)
- Dire le vers, (en collaboration avec François Regnault), Le Seuil, 1987
- Introduction à une science du langage, Le Seuil, collection « Travaux linguistiques », 1989
- Constat, 1992
- Archéologie d’un échec : 1950-1993, Le Seuil, 1993
- L’Œuvre claire : Lacan, la science et la philosophie, Le Seuil, collection « L’Ordre philosophique », 1995
- « Les Dénis », dans Paroles à la bouche du présent. Le négationnisme, histoire ou politique ?, sous la direction de Natacha Michel, Éd. Al Dante, 1997
- Le Salaire de l’idéal, Le Seuil, 1997
- Le Triple du plaisir, Verdier, 1997
- Mallarmé au tombeau, Verdier, 1999
- Les penchants criminels de l'Europe démocratique, Verdier, 2003
- Existe-t-il une vie intellectuelle en France ?, Verdier, 2002
- Le Périple structural, Figures et paradigmes, Le Seuil, collection « La couleur des idées », 2002
- Constats, Gallimard, coll. Folio/Essais. (rassemble Constat, Le triple du plaisir, Mallarmé au tombeau)
- Le Pas philosophique de Roland Barthes, Verdier, 2003
- La politique des choses, Navarin éditeur, 2005.
- Le Juif de savoir, Grasset, 2007
- L'arrogance du présent. Regards sur une décennie, 1965-1975, Grasset, 2009
- La politique des choses, court traité politique 1, Verdier, 2011
- Pour une politique des êtres parlants, court traité politique 2, Verdier, 2011
- Clartés de tout, de Lacan à Marx, d’Aristote à Mao, entretiens avec Fabian Fajnwaks et Juan Pablo Lucchelli, Verdier, 2011
Bon nombre de ces livres sont traduits en espagnol (El Amor de la lengua, Los nombres indistintos, El Salario del ideal, d'ailleurs co-signé par E. Folch-Gonzalez, etc.) et en italien ("L'amore della lingua", "La scuola nel labirinto", "I nomi indistinti"). Le plaisir du langage fut traduit en anglais par la linguiste Ann Banfield (For the Love of Language).
Parmi ses articles non repris dans les ouvrages ci-dessus, il faut citer (en coll. avec Judith Milner) « Interrogations, reprises, dialogue », in Langue, discours, société. Pour Emile Benveniste, Paris, Le Seuil, 1975, p. 122-148.
Bibliographie
- Ivan Segré, « Réflexions sur "le retour du nom Juif" », dans Qu'appelle-t-on penser Auschwitz ?, Lignes, 2009, p. 177-203.
Notes et références
- Cf. De la syntaxe à l'interprétation.
- lire Pour un compte rendu argumenté et critique de ce livre, voir Philippe Zard, « L’Europe et les Juifs. Les généalogies spécieuses de Jean-Claude Milner », revue Plurielles, n° 11, 2004.
- Extrait de l'émission. Voir également « Nouvelle insanité contre Bourdieu : Finkielkraut propose d’en débattre sur France Culture » (31 janvier 2007) et « Droits de répondre et droit de répandre : Jean-Claude Milner, Alain Finkielkraut et compagnie » (8 mars 2007) par Acrimed. [MP3]
- Lire à ce propos les analyses d'Ivan Segré à la fin de son magistral Qu'appelle-t-on penser Auschwitz ?.
- Comme il l'indique lui-même, cf. Constats, p. 219-220.
Liens externes
- Jean-Claude Milner sur le site des éditions Verdier
- Interviews de Jean-Claude Milner
- Une langue bien tendue, article de Philippe Lançon paru dans Libération du 1er décembre 2006
- Résumé du livre de Jean-Claude Milner : L’Œuvre claire (1995)
- Propositions doctrinales tirées de l’Œuvre claire (Jean-Claude Milner, 1995)
- Une analyse du livre de Jean-Claude Milner : L’Œuvre claire (1995)
- Une critique du livre de Jean-Claude Milner, Le Juif de savoir (2006) Revue Exergue, juillet 2007.
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