- Idéologie réactionnaire
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Réaction (politique)
Une réaction désigne la politique prônant et mettant en œuvre un retour à une situation passée réelle ou fictive, révoquant une série de changements sociaux, moraux, économique et politiques. Un partisan de la réaction est nommé « réactionnaire ». Le terme s'oppose à révolutionnaire, à progressiste, ces derniers emploient le mot de façon raccourcie, « réac », pour désigner péjorativement toute personne identifiée comme réactionnaire qui s'oppose aux idéaux progressistes. Réactionnaire s'oppose encore dans une moindre mesure en raison du flou sémantique à conservateur.
La pensée réactionnaire rejette un présent perçu comme « décadent » et prône un retour vers un passé idéalisé voire fictif. Le terme serait apparu au cours de la Révolution française de 1789 pour qualifier le mouvement qui s'opposait aux changements initiés par les révolutionnaires et voulait revenir à l'Ancien régime.
Dans le Manifeste du Parti communiste, Karl Marx affirme que les « classes moyennes [...] combattent la bourgeoisie parce qu'elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes. Elles ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l'envers la roue de l'histoire.[1] »
Le régime de Vichy était une forme de régime typiquement réactionnaire.
Les religions sont parfois qualifiées de réactionnaires par les militants qui se revendiquent du progressisme. Cela provient en partie de l'opposition de ces derniers à des philosophes religieux comme Louis de Bonald, Joseph de Maistre et François-René de Chateaubriand, et en partie de ce que Karl Popper a appelé la croyance progressiste dans le caractère manifeste de la vérité, qui conduit ceux-ci non pas à construire la connaissance mais à chercher quels obstacles s'opposeraient à la manifestation de la vérité, à identifier la religion comme génératrice de préjugé et au final à chercher à abolir la religion.
Sommaire
Usage polémique
Le terme « réactionnaire » est parfois utilisé, dans un contexte polémique, pour désigner de manière péjorative une personne s'opposant à certains changements de la société. C'était dans les régimes communistes une insulte adressée aux dissidents et aux démocraties libérales occidentales. Dans L'Opium des intellectuels (1955), le philosophe français Raymond Aron note également que le terme de réaction peut servir à forger un ennemi imaginaire pour faciliter la cohésion d'un camp politique. Il écrit par exemple que « radicaux et socialistes ne se sont réellement accordés que contre un ennemi insaisissable, la réaction »[2].
Usage contemporain
Plus récemment en France, le terme a été utilisé par Daniel Lindenberg, dans Le Rappel à l'ordre : enquête sur les nouveaux réactionnaires, pour qualifier des intellectuels de nouveaux réactionnaires. Au-delà de ce livre, l'expression "réactionnaire" ou "nouveau réactionnaire" est utilisée pour désigner une frange d'intellectuels et de décideurs qui selon leurs détracteurs se retrouvent dans une apologie de l'ordre moral, de la sécurité et de l'identité. Le terme "réactionnaire" stigmatise la conversion d’un certain nombre d’intellectuels, parfois initialement marqués à gauche, à un paradigme de croyances nostalgiques qui, face à l’évolution de la société et du monde jugée négativement, prônent le retour à « l’ordre, l’autorité, la restauration des valeurs [...], voire le culte des racines et des identités constituées ». Pour Maurice Maschino du Monde Diplomatique, les personnes publiques concernées sont ainsi : Alain Finkielkraut, Eric Zemmour, Ivan Rioufol, Pascal Bruckner, Alexandre Adler, Philippe Muray, Pierre-André Taguieff, Shmuel Trigano, Régis Debray, Luc Ferry, ainsi que les écrivains Michel Houellebecq et Maurice Dantec, auxquels il ajoute des publications telles que Marianne ou la revue Panoramiques[3].
Un des intellectuels visés, Pierre-André Taguieff, y a répliqué avec un ouvrage intitulé Les Contre-réactionnaires. Le progressisme entre illusion et imposture. Il y développe la thèse que les véritables réactionnaires sont ceux qui se cachent derrière le terme de progressistes et utilisent le terme de réactionnaire pour disqualifier leurs opposants dans une optique de terrorisme intellectuel voire d'« inquisition »[4]. Pour Taguieff, « le progressisme, c'est la foi dans le progrès sans l'esprit critique ni le sens de la tolérance, avec la conviction dogmatique de posséder la vérité et d'être installé dans le Bien. »« Si les réactionnaires n'avaient pas existé, les progressistes les auraient inventés. Lorsqu'ils n'existent plus, ils les inventent. »[5]
L'accusation de réactionnaire est parfois retournée contre des mouvements qui s'identifient comme progressistes, ainsi du mouvement anti-OGM, celui contre les centrales nucléaires, des partisans du principe de précaution, des écologistes de gauche ou celui des opposants à la mondialisation[6],[7].
Le philosophe Rémi Brague pose quant à lui la question : « Le prétendu "réactionnaire" est-il le seul vrai "progressiste" ? »[8]
Voir aussi
Notes et références
- ↑ Karl Marx, Manifeste du Parti communiste, chapitre 1 : « Bourgeois et prolétaires ».
- ↑ Raymond Aron, L'Opium des intellectuels, 1955, p.20 (édition Agora 1986)
- ↑ http://www.monde-diplomatique.fr/2002/10/MASCHINO/16996
- ↑ Pierre-André Taguieff, Les contre-réactionnaires, Denoël, 2007, pp. 62 & 485.
- ↑ Taguieff, ibid, introduction, [lire en ligne]
- ↑ « Les écologistes sont ils réactionnaires ? », Conscience Politique
- ↑ Pour Cécile Philippe dans C'est trop tard pour la terre, « les faucheurs d’OGM menacent le progrès de la science au nom d’une vision conservatrice de l’agriculture »
- ↑ « Rémi Brague, la voix romaine » Le Figaro littéraire, 15 octobre 2007
Bibliographie
- Benjamin Constant, Des réactions politiques, 1797, [lire en ligne]
- Pierre Milza, Fascismes et idéologies réactionnaires en Europe, Armand Colin, 1969.
- Emil Cioran, Essai sur la pensée réactionnaire, Fata Morgana, 1977.
- François Huguenin, Le conservatisme impossible : libéralisme et réaction en France depuis 1789, Paris, La Table ronde, 2006
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