Identification À L'agresseur

Identification À L'agresseur

Identification à l'agresseur

L'identification à l'agresseur constitue un mécanisme de défense. Selon le point de vue psychanalytique, elle désigne un processus psychique inconscient qui vise à protéger le Moi en cas d'agression (ou suite à l'agression), et plus encore à le protéger d'un conflit interne ou d'une confrontation pénible avec la réalité.

Du point de vue de la psychanalyse, l'identification à l'agresseur est à la source du syndrome de Stockholm, comportement étrange par lequel la victime chercherait à comprendre, voire à protéger, son agresseur.

Sommaire

Les origines

Cette notion a été développée, avec un sens légèrement différent, par Sándor Ferenczi au Congrès de Weisbaden en 1932 et par Anna Freud en 1936.

L'identité de l'enfant abusé est encore très fragile : elle vole en éclat lors du traumatisme. Sa personnalité se morcèle : Ferenczi parle d'atomisation. Pour conjurer la sidération, et survivre au choc, l'enfant s'identifie à la personne qui l'abuse, telle qu'elle est au moment de l'effraction. La victime va donc internaliser l'agresseur, ses pulsions autant que ses répulsions (son "ça" et son "surmoi"), d'où les vécus de honte qui suivent également le choc.[1]

Anna Freud a présenté un autre aspect de cette tragédie psychique en mettant l'accent sur l'imitation ultérieure, par la victime, des comportements de l'agresseur.

Imitation du profanateur

Poursuivant les recherches de S. Ferenczi sur le traumatisme, Saverio Tomasella propose la formulation "indentification à l’agresseur et à l’agression". La personne violentée internalise le violenteur, son acte et son intention. La haine double la jouissance ; elles sont désormais incluses dans la psyché du sujet.[2]

"La profanation est un acte délibéré d’une personne sur une autre en vue de la déshumaniser. […] L’interdit de penser enferme le sujet dans l’impuissance à repérer, à dénoncer et à interroger. Il fige l’être dans le passé, par une fascination envers le moment traumatique, sur lequel il reste fixé."[3] Les cauchemars à répétition ou certaines phobies trouvent là leur origine.

L’agression sexuelle induit souvent une addiction psychique par obnubilation autour de l’acte qui hante le sujet et une addiction physique à l’excitation artificiellement imposée au moment de l’effraction.[4] Renversé en son contraire, ce mécanisme à double face génère déni de l’agression et inhibition sexuelle. "Dans cette double dépendance réside aussi une des explications de la complexité du phénomène mimétique par lequel l’identité de la personne abusée peut en arriver à se confondre avec celle de l’agresseur autant qu’à la réalité dégradante et trop intense de l’agression."[5]

Incorporation de l'agresseur, autodestruction et mélancolie

Jacques Dufour met en perspective l'identification à l'agresseur comme comportement autodestructeur assurant l'oubli forcé de l'agression, par une douleur encore plus forte infligée à soi-même. Néanmoins, ce stratagème vient parfois masquer une profonde blessure mélancolique découlant de l'abandon de l'enfant agressé par l'autre parent, complice de l'agresseur. La vie affective est éteinte au profit d'une activité intellectuelle brillante et surabondante.

Eléments bibliographiques

  • Jacques Dufour, "La beauté du diable et la vérité du mal. Identification à l'agresseur, identification à l'abandonné", Revue Française de Psychanalyse, volume 73, PUF, 2009.
  • Christian Jouvenot, Freud, un cas d'identification à l'agresseur, PUF, 2003.
  • Sandor Ferenczi
    • Confusion de langue entre les adultes et l’enfant, Payot, 2004.
    • Le traumatisme, Payot, 2006.
  • Claude Nachin, Les fantômes de l'âme, A propos des héritages psychiques, L'Harmattan, 1993.
  • Olivier Pariset, "Identification à l'agresseur et travail du contre-transfert", Revue Française de Psychanalyse, volume 73, PUF, 2009, pp. 109-124.
  • Saverio Tomasella, "Identification à l'agresseur et à l'agression", Habiter son corps, Eyrolles, 2006, pp. 67-70.

Références

  1. Serge Tisseron, La honte, psychanalyse d'un lien social, Dunod, 1992.
  2. S. Tomasella, Oser s’aimer, Eyrolles, 2008, p. 95.
  3. Oser s’aimer, p. 130.
  4. S. Tomasella, Vivre en relation, Eyrolles, 2006, p. 70.
  5. Vivre en relation, p. 70.
  • Portail de la psychologie Portail de la psychologie
Ce document provient de « Identification %C3%A0 l%27agresseur ».

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Identification À L'agresseur de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Поможем написать курсовую

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Identification a l'agresseur — Identification à l agresseur L identification à l agresseur constitue un mécanisme de défense. Selon le point de vue psychanalytique, elle désigne un processus psychique inconscient qui vise à protéger le Moi en cas d agression (ou suite à l… …   Wikipédia en Français

  • Identification à l'agresseur — L identification à l agresseur est un mécanisme de défense théorisé par Sándor Ferenczi et Anna Freud. Elle désigne un processus psychique inconscient qui vise à protéger le sujet durant une agression ou suite à cette agression. Secondairement,… …   Wikipédia en Français

  • IDENTIFICATION — Dans l’acception psychologique de la notion, la forme d’identité la plus directement accessible est celle qu’a dégagée, en rupture avec la tradition cartésienne, la critique de la substantialité du moi. «Le soi (Self ), écrit Locke, est cette… …   Encyclopédie Universelle

  • Identification (Psychologie) — Pour les articles homonymes, voir Identification. L identification désigne le fait de se reconnaître dans une caractéristique, ou une personne extérieure à soi. Sommaire 1 Nature des identifications 1.1 …   Wikipédia en Français

  • Identification (psychologie) — Pour les articles homonymes, voir Identification. L identification désigne le fait de se reconnaître dans une caractéristique, ou une personne extérieure à soi. Sommaire 1 Nature des identifications 1.1 …   Wikipédia en Français

  • Identification (psychanalyse) — Pour les articles homonymes, voir Identification. L identification désigne le fait de se reconnaître dans une caractéristique, ou une personne extérieure à soi. Sommaire 1 Nature des identifications 1.1 Identification hys …   Wikipédia en Français

  • PERSONNALITÉ — Le mot « personne » est devenu si abstrait que, vide de sens, il peut servir, tel l’Être des métaphysiciens, à sa propre contradiction, et Ulysse en usait déjà pour berner Polyphème. « Rarement mot fut plus fluctuant », écrivait en 1937 G. W.… …   Encyclopédie Universelle

  • Mecanisme de defense — Mécanisme de défense Goya, Los Caprichos. Les mécanismes de défense désignent, en psychanalyse, les processus utilisés par le Moi dans une perspective adaptative. Sommaire …   Wikipédia en Français

  • Mécanisme De Défense — Goya, Los Caprichos. Les mécanismes de défense désignent, en psychanalyse, les processus utilisés par le Moi dans une perspective adaptative. Sommaire …   Wikipédia en Français

  • Mécanisme de défense — Goya, Los Caprichos. À l origine, en psychanalyse et pour Sigmund Freud les mécanismes de défenses ou défense(s) désignait tous les stratagèmes ou procédés dont se sert le Moi dans des conflits éventuellement névrotiques. Ces défenses sont… …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”