- Hatha-yoga
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Hatha yoga
Le Hatha-Yoga (sanskrit हठयोग haṭhayoga) est la forme la plus connue du Yoga en Occident. Ce terme signifie entraînement par l'exercice physique (pour le sens exact de yoga voir l'article). Ce yoga doit ses lettres de noblesse aux Yoga-Sûtra de Patañjali (IIe s. av. J.-C. ?) et à la Hathayoga-Pradîpikâ de Svâtmârâma (XVe s. ?) auquel il faut ajouter la Ghéranda-Samhitâ et la Shiva-Samhitâ.
Il est appelé la voie de la volonté et se résume souvent en Occident à la pratique posturale, mais il n'est pas limité à son aspect purement physique (force-santé-souplesse-bien-être).
La pratique du Hatha-Yoga est une recherche de l'unité de toutes les modalités physiques et psychiques qui nous composent. La pratique met l'accent sur l'expérimentation des opposés complémentaires :
- féminin / masculin,
- mouvement / immobilité,
- inspiration / expiration,
- résistance / lâcher-prise.
Posture, respiration, méditation, peuvent tour à tour culminer dans la pratique. Avec la maturité et dans une difficulté croissante, elles se combinent par deux : postures/respiration ou postures/méditation, et par trois : postures/respiration/méditation.Le Hatha-Yoga prétend construire un pont entre l'extérieur et l'intérieur, le matériel et le spirituel, l'être essentiel et l'être existentiel.
Le Hatha-Yoga promeut un équilibre de ces contraires par la mise en pratique des âsanas, du prânâyâma, de dhyâna et du dhârana.
Sommaire
Physio-anatomie du Hatha-Yoga
À un niveau intermédiaire, le pratiquant persévérant commence une connaissance de soi où progressivement vont apparaître les habitudes qui entretenaient des pensées ou des attitudes négatives. Lorsque les pratiques (posturale, respiratoire ou autre) deviennent à leur tour objet de méditation, concentration et stabilité mentale ont atteint un niveau certain de qualité. La méditation occupe une place plus importante que les autres pratiques, le corps étant libéré de ses tensions. À un niveau de pratique très poussé, l'illusion des projections et identifications personnelles (la mâyâ) disparait, permettant au Soi de se révéler dans sa véritable nature[1].
Au fil des années de pratique, les différences entre les techniques de yoga s'amenuisent, puisque toutes convergent vers le même but ; la concentration perd de son caractère volontariste pour devenir attention sans intention[2]. Progressivement cette attention s'intègre à tous les instants de la vie, même dans les plus petits événements. Le devoir quotidien perd de sa pesanteur, en permettant l'ouverture au discernement et à l'humilité[3].
Principes
Les divers mouvements et positions sont appelées âsanas (आसन āsana) et leur exécution nécessite une complète présence au geste ainsi qu'un patient engagement afin de coordonner tous les éléments qui y sont mis en jeu. Dans le Hatha-Yoga il est dit que le corps est un laboratoire où peuvent être vécus en direct les réussites comme les échecs. Cette recherche pragmatique se doit de rester constamment avertie des abîmes d'orgueil que représentent les prouesses corporelles. L'orgueil est effectivement en totale contradiction avec les objectifs d'humilité et d'harmonie que la tradition du yoga a tracés depuis des millénaires.
Dans son aspect purement physique, le Hatha-Yoga ne diffère que peu d'un entraînement physique ou sportif.
- La coordination avec la respiration.
- Respecter l’ordre d’un enchaînement de postures nécessite d'entraîner sa concentration, et incite le pratiquant à s’interroger sur la logique du fonctionnement de la mécanique corporelle. Coordonner l’inspiration avec les mouvements demande plusieurs mois. Classiquement la coordination de la respiration avec les mouvements et positions reste dans la logique de la plupart des sports : l'inspiration accompagne les mouvements et positions en ouvertures, et l'expiration les mouvements ou position en fermeture
- L'assouplissement.
- Comme d'autres formes d'entraînements physique, la pratique régulière du Hatha-Yoga permet de conserver ou de récupérer une capacité d'amplitude dans les mouvements. La souplesse est très différente d'une personne à l'autre, selon, par exemple : l'âge, le mode de vie, et d'éventuelles pathologies (traumatismes ou rhumatismes), etc... Elle peut varier sur une même personne, d'un jour à l'autre, d'une articulation à l'autre, ou selon la latéralité.
- Le renforcement musculaire.
- Une fois passée la période de la petite enfance (4-5 ans), le mode de vie actuel n'entretient plus suffisamment la musculature, qui tend à s'affaiblir. Il y a donc un entretien à mettre en place favorisé par le travail postural.
- Deux sortes de contractions peuvent être mises en jeu :
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- Les contractions dynamiques :
- Elles se rencontrent pendant les mouvements. Des contractions musculaires entraînent ou freinent les mouvements. Ainsi dans une flexion en avant de type uttanâsana[4], la contraction des extenseurs de hanche provoquera la remontée du buste. L'attention permet de relâcher ces même extenseurs pour permettre la descente en douceur.
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- Les contractions statiques :
- Une fois qu'une position a été prise il n'y a plus de mouvement et son maintien demande une contraction musculaire sélective. Si des muscles non indispensables au maintien de la position ont été sollicités, la posture manque de grâce et devient épuisante. Maintenir la posture tout en prêtant attention à ce qui ce passe dans le corps va permettre d'affiner et d'ajuster le geste en libérant des tensions inutiles. En bout de ligne, le terme âsana devient synonyme d'aisance, comme se plaisait à le souligner Alain Daniélou[5].
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Territoire d'élection des postures
- Limitation ostéo articulaire.
- Par sa propre forme et celle de ses surfaces articulaires, l’os permet ou limite les mouvements. Par exemple, en extension, le bec de l'olécrane se loge dans la fossette olécranienne et fait butée ; en fin d'extension, les deux os arrivent dans le prolongement l’un de l’autre. L’extension du coude est donc très limitée.
- Le muscle
- Il est à la fois contractile et élastique. Si dans une posture un muscle est étiré, un certain allongement se produit, qui peut être durable. La plupart des muscles du corps peuvent devenir des entraves au mouvement, soit parce que leur enveloppe aponévrose est rétrécie, soit parce que leurs fibres sont dans un état de contraction musculaire (tonus) trop important et s'opposent aux étirements ; le stress entraîne souvent une contraction rémanente qui devient inconsciente et permanente (épaules hautes, mâchoires serrées).
- L'articulation
- Le cartilage est un tissu destiné à protéger l'os qu'il recouvre. Il permet ou limite la mobilité de l'articulation. Sa surface lisse permet le glissement d'autres surfaces équivalentes. Si les contraintes qu'il reçoit dépassent son seuil de résistance, il peut être lésé : aminci ou fissuré.
- Les tissus qui entourent directement l'articulation : les capsules et les ligaments, assurent passivement le maintien des articulations tout en permettant les mouvements propres à chacune.
- Ces tissus sont, pour la plupart, peu élastiques (c'est-à-dire que si on les déforme en les distendant, ils ne reprennent pas ensuite leur longueur initiale). Ils doivent être respectés comme tels. En effet, ils sont riches en nerfs sensitifs. Ce sont eux qui informent le cerveau de leurs éventuels étirements lors des mouvements.
États du muscle dans la posture
Dans une posture, le muscle peut se trouver dans trois états :
La détente
- Pour un relâchement optimal du muscle, il faut que l'articulation mobilisée ne soit ni en besoin de maintien, ni en risque de luxation. La posture classique de relaxation est savasana.
- L'étirement
- Quand il est actif, l'étirement éloigne les points d'insertion du muscle dans la limite d'une impression bénéfique, sans rapport avec la sensation de déchirement ou de brûlure. Cette situation amènera un assouplissement, si le rythme de l'exercice est lent.
- La contraction
- Lorsque le muscle se contracte, il tente de rapprocher ses points d'insertion. En fait, bien souvent lors de sa contraction le muscle subit un étirement latent, soit par son antagoniste, soit par la gravitation. Quand le muscle agoniste se contracte, automatiquement son antagoniste (qui produit le mouvement contraire) se détend.
Autres conséquences des postures
- Le yoga pose deux règles simples pour la synchronisation respiratoire lors des enchaînements dynamiques :
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- de préférence inspirer dans une posture d'ouverture et éviter d'inspirer dans un mouvement qui comprime la cage thoracique.
- l'expiration devrait logiquement avoir lieu sur une flexion, tout en sachant qu'expirer dans une extension ne constitue pas une erreur physiologique.
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- L'allongement de l'expiration prépare une meilleure inspiration. Elle favorise un meilleur fonctionnement du diaphragme. Cet approfondissement du souffle aide à diminuer le flux des pensées.
- La concentration va inclure des aspects divers comme la vitesse, l'adresse et la coordination. Du point de vue du yoga, persévérer dans la stabilité posturale, favorise la concentration et à la longue, la stabilité psychologique. Tout en favorisant un meilleur fonctionnement du diaphragme, l'attention portée au souffle aide à diminuer le flux des pensées. Ces apprentissages de base nécessitent plusieurs mois de pratique.
- La pratique régulière des âsanas et du prânâyâma déployée dans une ambiance tranquille et sans compétition, conduit à un moment de silence, d'arrêt des perturbations du mental[6].
- Au fil des années de pratique, la concentration perd de son caractère volontariste pour devenir attention sans intention. Progressivement cette attention s'intègre à tous les instants de la vie, même dans les plus petits événements. Le devoir quotidien perd de sa pesanteur, en permettant l'ouverture au discernement et à l'humilité.[3].
La pratique posturale de base du Hatha-Yoga
En Occident, la grande majorité des séances de yoga s'articule autour d'un certain nombre de postures organisées selon les niveaux des participants et l'objectif de la séance (Bhavana). La respiration peut être rythmée au sein des postures ou concentrée pendant un temps privilégié. La séance se termine généralement par un moment de relaxation. Ces trois constituants peuvent être disposés de manière très différente selon les écoles, le moment de la journée, l'âge et l'attente des participants. Moins fréquemment, des extraits des Yoga Sutras peuvent être chantés, ainsi que des mantras ; cette étape est plus fréquente dans son contexte, en Inde.
Toute posture (âsana) que le corps peut adopter sera du yoga tant que l’intensité respectera le contentement qui ressortira de cette pratique. La non-violence envers son propre corps, l’humilité, sont des principes qui évitent de confondre yoga et acrobatie. Les postures peuvent être statiques. Quand elles sont dynamiques, elles peuvent se pratiquer selon un enchaînement précis, souvent selon un ordre respiratoire particulier.
Il faut une certaine expérience pour prendre une posture dans une détente « structurée », avec une respiration régulière ainsi qu’un bon alignement vertébral coordonné avec les alignements des autres segments corporels.
Les postures ont un impact :
- En termes d’étirement, ce qui favorise un drainage musculaire et soulage les douleurs issues des tensions.
- En termes de massage des organes internes, par compression et décompression successives
- En termes de concentration et d’une certaine connaissance de soi, pour pouvoir contracter les muscles nécessaires à l’architecture de la posture ou au contraire détendre ceux qui s’y opposent.
La respiration (pranayama)
Les quatre phases de base de la respiration sont explorées : l'inspiration, la rétention poumons pleins, l'expiration et la rétention poumons vides. Dans les niveaux avancés de pratiques, d'autres phases sont explorées.
Différents exercices mettent l’accent sur :
- une ou plusieurs de ces quatre phases,
- la vitesse et le rythme d'exécution lent, soit rapide,
- une narine seule ou deux narines alternées ou deux narines ensemble,
- une production ou une absence de son,
- une durée compatible avec les capacités du pratiquant.
Ces techniques de prânâyâma permettraient le développement de la concentration en diminuant la dispersion mentale, et lorsqu'une base de recueillement suffisante a été établie, le corps et l'esprit pourraient acquérir une vigueur et une vitalité nouvelle en puisant à même l'énergie du prâna.
Elle favoriseraient aussi l'aptitude à supporter les stress par la prise de conscience du rythme irrégulier de la respiration, pour la ramener vers un rythme plus lent.
André Van Lysebeth, dans son ouvrage : Pranayama,la dynamique du souffle Paris, Flammarion, 1981, émet l'hypothèse que le prana correspond aux ions négatifs (électrons) de l'air environnant. Cependant, la théorie pranique préscientifique y voit une force vitale possiblement plus fondamentale, à la base de toute vie et toute conscience.
La relaxation
On pourrait dire de la relaxation que c'est un samâdhi mineur ou un entraînement à la méditation. Cette phase, qui conclut généralement la séance, s’accomplit en position assise ou allongée, et vise l’éclosion d’un sentiment de paix. Elle s’accompagne d’une respiration lente et profonde, de suggestions, ou de sons très doux.
La relaxation prépare à la méditation. La méditation selon qu'elle est objective ou non, et/ou volitive[7] ou non, accède à des niveaux différents[8].
La méditation
La concentration posturale ou respiratoire va inclure des aspects divers comme la vitesse, l'adresse et la coordination. Du point de vue du yoga, persévérer dans la stabilité posturale, favorise la concentration et à la longue favorise une stabilité psychologique. La pratique régulière des âsanas et du prânâyâma déployée dans une ambiance tranquille et sans compétition, conduit à un moment de silence, d'arrêt des perturbations du mental[9]. En cela, le hâtha yoga est considéré comme une phase préparatoire à la méditation profonde.
Complément
Le Hatha-Yoga a été consigné par écrit sous forme d'un système particulier rédigé par Swami Swatamarama, un sage yogique du XVe siècle en Inde, auteur de Hathayoga-Pradîpikâ.
Le Hatha-Yoga essaye d'équilibrer le corps et l'esprit (c'est le sens de la signification symbolique de Ha = Soleil, Tha = Lune) par des exercices physiques ou asanas, le contrôle de la respiration, la relaxation et la méditation. L'enseignement des asanas fut originalement pratiqué pour améliorer la santé physique et vider l'esprit afin de préparer à la méditation dans la recherche de l'éveil.
En occident, le Hatha-Yoga est devenu assez populaire en tant que pratique d'exercices purement physiques se détachant de son but originel. Actuellement, il est estimé que 30 millions d'américains pratiquent le Hatha-Yoga.
Extrait de Shvetâshvatara Upanishad (2.8-15), « Tenant son corps fermement avec les trois parties érigées, et guidant avec son esprit ses sens jusqu'au cœur, un homme sage avec l'équipement du Brahman peut dépasser toutes les craintes provenant des flots... Quelqu'un qui pratique les préceptes yogiques aperçoit ici la nature du Brahman. »
Lexique
- âsana sont les postures
- prânâyâma, les exercices de respiration qui visent au contrôle du souffle - et donc de l'énergie
- pratyâhâra, la maîtrise du système nerveux
- dhârana, le contrôle du mental
- dhyâna, la méditation et la recherche spirituelle
Notes et références
- ↑ 157. Le Soi - cette Réalité permanente - est distinct du corps grossier, distinct de ses caractéristiques (la faiblesse, la vigueur, etc.), de ses modes d'activité et de ses états (l'enfance, l'adolescence, etc.). Et c'est Lui - l'âtman - qui en est le Spectateur permanent. page 46, Camkaracarya, Viveka-Cuda-Mani, cf biblio. infra.
- ↑ Expression fréquemment utilisée par Jean Klein.
- ↑ a et b Y.S. II-47 : Grâce à la méditation sur l'infini et au renoncement à l'effort-volonté.
- ↑ Posture du grand étirement
- ↑ Alain Daniélou, Yoga, Méthode de réintégration, Ed. L'Arche, Paris, 1997.
- ↑ Y.S. I-2 : Le yoga est la cessation des activités (tourbillonnantes) automatiques du mental.
- ↑ Terme utilisé par Jean Klein pour résumer l'intervention de la volonté et en cela celle de l'égo également.
- ↑ Il existe quatre niveaux correspondants de samâdhi décrits dans les Y.S. : savitarka samâdhi, nirvitarkâ samadhi, savichâra samadhi et nirvichâra samadhi
- ↑ Y.S. I-2 : Le yoga est la cessation des activités (tourbillonnantes) automatiques du mental.
Annexes
Bibliographie du Hatha-Yoga
Textes fondateurs
- Svâtmârâma, Hathayoga-Pradîpikâ (XVe s. ?), trad. Mi Tara, Fayard, 2007.
Études sur le Hatha-Yoga
- Lionel Coudron Mieux vivre par le yoga, Paris, J'ai lu, 1997
- André van Lysebeth Pranayama, la dynamique du souffle, Paris, Flammarion, 1971
- Eva Ruchpaul Hatha-Yoga, Paris, éditions Denoël, 1965
- Clara Truchot Hatha-Yoga : Les Torsions vertébrales, santé et souplesse du dos, Paris, Courrier du Livre 1998
- Yvonne Millerand Guide pratique de Hatha-Yoga, Paris, Calmann-Lévy, 2° éd., 1988
- André van Lysebeth J'apprends le Yoga, Ed. Flammarion
- André van Lysebeth Ma séance de Yoga, Ed. Flammarion
- André van Lysebeth Je perfectionne mon Yoga, Ed. Flammarion
Articles connexes
- Yoga
- Postures et respirations du hatha yoga
- Liste des postures de hatha yoga
- Salutation au Soleil
- Asana
Catégorie : Hatha yoga
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