Georges Gusdorf

Georges Gusdorf

Georges Gusdorf est un philosophe et épistémologue français, issu d'une famille juive originaire d'Allemagne et né près de Bordeaux en 1912. Il est mort le 17 octobre 2000, à l'âge de quatre-vingt-huit ans. Il est inhumé au cimetière d'Arcachon. Georges Gusdorf a été marqué par Søren Kierkegaard et par le théologien protestant suisse Karl Barth.

Élève de Gaston Bachelard à l'École normale supérieure (ENS) de Paris, où il est préfet des études, il fait aussi des études à la Sorbonne sous la direction de Léon Brunschvicg, dans les années 1930 - l'époque d'André Lalande et d'Émile Bréhier. Il est fait prisonnier pendant la guerre entre 1940 et 1945. Il fait l’expérience d’une sociabilité intellectuelle que sa carrière universitaire ne lui permettra plus de renouveler. Il est ensuite nommé professeur à l'université de Strasbourg, occupant la chaire de philosophie générale et de logique. Il n'avait alors publié qu'une thèse, La Découverte de soi, matrice de ses futurs travaux sur la mémoire et rédigée au cours de sa longue captivité à Lübeck, pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1950, il prend la charge de répétiteur à l'ENS, préparant à l'agrégation de philosophie. Il y succède à Merleau-Ponty, et est maître d'Althusser et de Foucault.

Gusdorf raconte que dans son camp de prisonniers, le milieu des officiers de carrière était favorable à Vichy, par exemple aux thèses défendues par Jean Guitton et relayées un certain temps par Paul Ricoeur[1]. Avec quelques-uns de ses camarades, il réussit à retourner les esprits. « C'est grâce à vous que nous avons pu rentrer la tête haute », lui a dit après la guerre un officier prisonnier avec lui. La captivité a surtout été l'occasion pour Georges Gusdorf de s'intéresser à un genre qui d'ordinaire ne tente pas les philosophes, l'autobiographie. Admirateur de la ''Geistesgeschichte'' et de l'école critique fondée par Wilhelm Dilthey ainsi que de l'Histoire de l'autobiographie de Georg Misch, le gendre de Dilthey, Gusdorf polémiqua en 1975 contre l'approche à son sens formaliste de Philippe Lejeune et de son "pacte autobiographique"[2]. Georges Gusdorf reste attaché à une vision lucide de l’homme, qui est conditionné par son corps et le monde dans lequel il vit, mais qui est aussi capable de se détacher de ce déterminisme et de produire des œuvres où se manifeste sa liberté. Ces œuvres ne peuvent être réduites à des schémas formels, elles expriment un être personnel et avec lui tout un univers que l’on ne pourra jamais dévoiler entièrement et qui varie en fonction des individus, mais aussi des époques[3].

De 1966 à 1988, il publie chez Payot les quatorze volumes d'une vaste recherche encyclopédiste, Les Sciences humaines et la Pensée occidentale. En 1968, indigné par la révolte étudiante, il s'exile à l'Université Laval, située à Québec, mais revient à Strasbourg, une fois le calme revenu. Georges Gusdorf affirme avoir en quelque sorte prévu l'explosion dans son ouvrage L'Université en question, paru en 1964.

Notes et références

  1. G. Gusdorf, Le crépuscule des illusions : mémoires intempestifs, 2002, p. 207 sq.
  2. Georges Gusdorf, « De l’autobiographie initiatique à l’autobiographie genre littéraire », Revue d'Histoire Littéraire de la France, 75e année, n° 6 (nov.-déc. 1975), p. 957-994.
  3. François Genton, « Georges Gusdorf et l'autobiographie : de la théorie à la pratique », dans Anne-Rachel Hermetet et Jean-Marie Paul (dir.), Ecritures autobiographiques. Entre confession et dissimulation, Presses universitaires de Rennes, 2010, p. 21-33.

Œuvres

  • La Découverte de soi, 1948 ;
  • L'expérience humaine du sacrifice, 1948 ;
  • Traité de l'existence morale, 1949 ;
  • Mémoire et personne, 1951 ;
  • La parole, 1952 ;
  • Mythe et métaphysique, 1953 ;
  • Traité de métaphysique, 1956 ;
  • Science et foi au milieu du XXe siècle, 1956 ;
  • La vertu de force, 1957 ;
  • Introduction aux sciences humaines, 1960 ;
  • Dialogue avec le médecin, 1962 ;
  • Signification humaine de la liberté, 1962 ;
  • Kierkegaard, 1963 ;
  • Pourquoi des professeurs? Pour une pédagogie de la pédagogie, 1963 ;
  • L'université en question, 1964 ;
  • Les sciences de l'homme sont des sciences humaines, 1967 ;
  • La Pentecôte sans l’esprit sain : université 1968, 1969 (publié au Canada sous le titre : "La nef des fous Université 1968", Presses de l'Université Laval, Québec);
  • Montesquieu : Lettres persanes – Présentation par Georges Gusdorf, 1972 ;
  • Les Sciences de l’homme sont-elles des sciences humaines?, 1976 ;
  • Les révolutions de France et d’Amérique : la violence et la sagesse, 1988 ;
  • Lignes de vie (2 volumes), 1991 : Les écritures du moi (vol. 1) et Auto-Bio-Graphie (vol. 2) ;
  • Le crépuscule des illusions : mémoires intempestifs, 2002.

Collection : Les Sciences humaines et la pensée occidentale :

  • Tome I : de l'histoire des sciences à l'histoire de la pensée, 1966 ;
  • Tome II : Les origines des sciences humaines, 1967 ;
  • Tome III : La Révolution galiléenne (2 volumes), 1969 ;
  • Tome IV : Les principes de la pensée au siècle des lumières, 1971 ;
  • Tome V : Dieu, la nature, l’homme au siècle des lumières, 1972 ;
  • Tome VI : L’avènement des sciences humaines au siècle des lumières, 1973 (Grand Prix Gobert de l'Académie française);
  • Tome VII : Naissance de la conscience romantique au siècle des lumières, 1976 ;
  • Tome VIII : La conscience révolutionnaire; Les idéologues, 1978 ;
  • Tome IX : Fondements du savoir romantique, 1982 ;
  • Tome X : Du néant à Dieu dans le savoir romantique, 1983 ;
  • Tome XI : L’Homme romantique, 1984 ;
  • Tome XII : Le savoir romantique de la nature, 1985 ;
  • Tome XIII : Les origines de l’herméneutique, 1988.

Articles de Gusdorf:

  • Compte rendu de Do Kamo, Revue d'histoire de la philosophie religieuse, 30ème année, 1950, (Pp.64-68)
  • Ethnologie et Métaphysique: l'unité des sciences humaines, Ethonologie Générale, Paris, Encyclopédie de la Pléiade, Ed. Gallimard, 1968, (Pp. 1772-1815).

Sources

  • Éric Bourde, Gusdorf l'entêté dans le Libération du jeudi 7 mars 1991
  • Dominique Dhombres, Georges Gusdorf dans Le Monde du 24 octobre 2000
  • François Genton, « Georges Gusdorf et l'autobiographie : de la théorie à la pratique », dans Anne-Rachel Hermetet et Jean-Marie Paul (dir.), Ecritures autobiographiques. Entre confession et dissimulation, Presses universitaires de Rennes, 2010, p. 21-33.
  • Pierre Nzonzi, "Le mythe dans la pensée de Georges Gusdorf", Thèse dirigée par Monsieur Didier Deleule, professeur, Paris X, Nanterre, soutenue le 15 décembre 2003, à Paris X, Nanterre. Jury: Madame Martine de Gaudemar, Présidence du jury, Paris X, Nanterre; Monsieur Robert Damien, rapporteur, professeur, Université de Franche-Conté; Monsieur François Guerry, rapporteur, professeur, Université Lyon III.

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