Emissions de CO2 des transports ferroviaires

Emissions de CO2 des transports ferroviaires

Émissions de CO2 des transports ferroviaires

Cet article traite des Émissions de CO2 des transports ferroviaires. En effet, le secteur des transports est un des principaux générateurs du CO2, notamment en France. On trouve facilement de grands développements et des détails sur les émissions des modes routier et aérien, notamment sur la brochure « Bilan Carbone » élaborée pour l’ADEME par Jean-Marc Jancovici, du bureau d’études Manicore, mais les données relatives au mode ferroviaire sont parcellaires et souvent limitées à des moyennes.

Ainsi l'éco-comparateur de la SNCF donne-t-il une valeur de 5,4 gCO2/voy.km correspondant à la moyenne pondérée des émissions de chacun des types de services répartis de la manière : 85% TGV, 10%TRN (TRains Nationaux, c'est-à-dire les « Corail ») et 5% TER (Trains Express Régionaux), mais n'utilise pas les valeurs données par l'ADEME qui s'étagent pourtant de 2,6 g pour un voyageur de TGV à 94,8 g pour le passager d'un TER Diesel.

L'objectif est de fournir des éléments plus détaillés, selon le mode d'exploitation et la composition des trains, pour quelques exemples-types et de mettre en avant la variété des résultats.

Sommaire

Méthodologie

La méthode de calcul adapte celle retenue par le guide du Bilan Carbone® (Calcul des facteurs d’émissions et sources bibliographiques utilisées - version 3.0 d'avril 2005) publié par l'ADEME pour les trafics routiers.

Les facteurs d'émission sont liés à :

  1. la consommation du train, soit en gazole (traction Diesel), soit en kWh (traction électrique);
  2. la construction des véhicules ferroviaires : locomotives, voitures et wagons ;
  3. la construction de l'infrastructure nécessaire pour compenser l'usure entraînée par les circulations.

Les résultats sont ramenés au passager.km ou à la tonne.km selon la nature de la circulation. afin d'être comparables plus facilement à ceux d'autres modes de transport. Le calcul est mené en utilisant les équivalent carbone, mais les résultats sont également présentés en équivalent CO2 qui sont mieux connus de l'opinion publique.

Les données unitaires sont, autant que possible, tirées du guide ADEME précité ; en particulier les facteurs d'émission liés à l'énergie s'appuient sur la situation française ; les résultats, spécialement en matière de traction électrique, ne peuvent donc être utilisés pour les autres pays. Au contraire les chiffres donnés par la SNCF sont 10 fois supérieurs pour l'étranger.

Facteurs liés à la consommation

La consommation des trains en carburant est ramenée à l'unité en utilisant le taux d'occupation, c'est-à-dire le nombre de places occupées par rapport à la capacité théorique.

Le passage à l'eqC s'effectue avec les facteurs retenus par l'ADEME : 814 g eqC par l de gazole ; 11 g eqC (40 g eqCO2) par kWh.( cf Les règles de calcul Ademe)

Facteurs liés à la construction

L'émission en eqC est liée directement à la masse en retenant le ratio utilisé pour les véhicules routiers, qui est lié à la prédominance de l'acier dans la construction des véhicules et qui semble donc adapté : 1,5 t eq C par t.

Le calcul est mené au km; il faut donc disposer du parcours total d'un véhicule sur sa durée de vie celle-ci est donnée par référence à son parcours moyen annuel et une durée de vie.

Facteurs liés à l'infrastructure

Du fait du contact rail-roue le rail se dégrade régulièrement; il faut pour reprendre les défauts le meuler régulièrement ce qui conduit à une suppression de matière ; au bout d'une certaine période, directement liée au nombre et aux caractéristiques des circulations il faut entièrement remplacer le rail ; celui-ci représente 2 fois 60 kg d'acier par mètre soit 180 t eqC par km de voie.

Les autres composants de l'infrastructure (traverses, ballast, ouvrages d'art, équipements de distribution électrique...) ont été négligés, faute de données et parce qu'a priori contribuant beaucoup moins ; cependant une étude pourrait être menée sur le ballast. Les 40 cm de ballast d'une voie TGV représentent en effet 5 t au m de voie simple ce qui conduirait en utilisant le facteur d'émission connu pour les granulats « courants » à 75 t eqC par km. La durée de vie du ballast est certes plus élevée que celle du rail mais comme il en est régulièrement apporté pour l'entretien de la voie, sa contribution pourrait être non négligeable.

Trains de voyageurs

Exemples types

Cinq trains types ont été retenus, sur la base de véhicules modernes

  • un petit autorail diesel, l'X 73500, aussi appelé « A TER », autorail monocaisse assurant les services TER principalement dans les zones non électrifiées, très répandu (plus de 300 exemplaires). Il peut emporter 81 personnes, pèse 47t à vide (54t en ordre de marche) et consomme 70l de gazole aux 100km[réf. nécessaire]. Sa longévité est estimée à 3 000 000 km sur 30 ans.
  • un autorail diesel plus important, l'X 72500, aussi appelée « X TER », dans sa version bi-caisse ; les X 72500 assurent des services TER et interrégionaux ; il en a été mis en service 117 rames. Il peut emporter 150 personnes, pèse 111t à vide (125t en ordre de marche) et consomme 200l de gazole aux 100km. Sa longévité est estimée à 3 000 000 km sur 30 ans.
  • un « autorail électrique » (qui selon les standards devrait être qualifié d'automotrice avec la dénomination de Z 27500, également appelée ZGC) l'Autorail à Grande Capacité (AGC) de Bombardier Transport, dans sa version tri-caisse électrique. L'AGC est le premier matériel de transport régional modulable et existe dans de nombreuses versions diesel, électrique ou bi-mode ; plus de 700 rames ont été commandées. Il peut emporter 208 personnes, pèse 123t à vide (136t en ordre de marche) et consomme 400kW.h d'électricité aux 100 km. Sa longévité est estimée à 3 000 000 km sur 30 ans.
  • le TGV « Réseau », à un seul niveau. Une rame peut emporter 377 personnes, pèse 383 t à vide (416 t en ordre de marche) et consomme 1 480kW.h d'électricité aux 100km. Sa longévité est estimée à 9 000 000 km sur 30 ans.
  • le TGV Duplex, à deux niveaux, qui est systématiquement utilisé sur les lignes à forte demande (Paris Sud-Est). Une rame peut emporter 545 personnes, pèse 386t à vide (424t en ordre de marche) et consomme 2 030kW.h d'électricité aux 100km. Sa longévité est estimée à 9 000 000km sur 30 ans.


Nota :

  1. les données de capacité et de masse sont aisées à trouver sur les sites de la SNCF ou de fanatiques de chemins de fer, avec quelques incertitudes sur la masse – sans impact fort
  2. les données de consommation sont beaucoup plus rares : celles de l'autorail X 73 500 ont été communiquées par la SNCF à l'occasion du débat public Poitiers-Limoges, les autres proviennent de sites internet ou pour l'AGC ont été estimées en utilisant les ratios données par l'EPFL – LITEP.
  3. la durée de vie des matériels est plus délicate à approcher ; on s'estime à dire que 30 à 40 ans représentent une durée de vie normale mais l'usage annuel est très variable ; une étude du ministère des Transports de 2000 donne une productivité technique de 250 000 km annuels pour les TGV et 75 000 km environ pour les autres matériels. 3 Millions de km sur une vie entière d'autorail manifestent déjà une longévité certaine ; le parcours moyen des AGC était annoncé à 60 000 km annuels variant entre 25 000 et 150 000km ; les chiffres retenus sont dans la fourchette haute

Le taux d'occupation est une variable essentielle ; la SNCF donne le chiffre de 70 % pour le TGV mais rien pour les autres trains. On trouve dans la littérature sans sources particulières : 45 % pour l'ensemble des trains, 33 % pour les trains de banlieue ; sachant que le trafic TGV représentait en 2005 55 % du trafic total le taux pour les autres trains devrait être de l'ordre de 20 % ; c'est ce taux qui est celui donné par le guide ADEME précité pour les bus, d'après le taux de remplissage des bus d'Ile-de-France, qui a été retenu pour les plus petits autorails, et 30 % pour les AGC. Ces taux sont a priori élevés car calculés sur l'ensemble des services – à l'heure de pointe ou à l'heure creuse, en semaine ou le week end, et sur la totalité des parcours, incluant les sections les moins chargées y compris les haut-le-pied.

S'agissant de l'infrastructure, le LITEP donne une fourchette de 600 M à 1000 M de tonnes brutes de durée de vie ; il est évoqué en France des valeurs inférieures (400 Mt) ; étant donné les exigences de qualité liées à la circulation de trains de voyageurs c'est la valeur de 600 Mt qui a été retenue.

Résultats et commentaires

Les contributions en g.eqC/km par train résultant respectivement de la consommation énergétique, de la fabrication du matériel roulant ainsi que de l'usure de l'infrastructure sont les suivantes :


Consommation Fabrication Infrastructure
Autorail X 73 500 732,6 17,6 16,5
Autorail X 72 500 1 628,0 55,5 37,5
AGC tri caisse 44,0 61,5 40,5
TGV Réseau 162,8 63,8 124,8
TGV Duplex 222,3 64,3 127,2

Pour les trains électriques, l'«amortissement écologique» des matériels et de l'infrastructure est ainsi du même ordre de grandeur que l'impact de la consommation directe d'énergie.

Il est intéressant de comparer avec les valeurs correspondantes données par l'ADEME pour l'autocar, complétées par un calcul d'émission relative à l'infrastructure routière basée sur une reconstruction entière de la route après le passage de 5 M autocars.

* Autocar  : 277,3 ; 15,0 ; 20,0

Les calculs ramenés en g.eqCO2/voy.km sont plus directement comparables entre eux et avec les autres modes ; les valeurs relatives à la consommation énergétique et totales sont les suivantes :


Consommation énergétique Consommation totale
Autorail X 73 500 165,8 173,5
Autorail X 72 500 132,7 140,2
AGC tri caisse 2,6 8,6
TGV Réseau 2,4 5,3
TGV Duplex 2,3 4,3
Autocar 33,5 37,8

La valeur du TGV (consommation) est très proche de celle annoncée par la SNCF : 2,4 g eqCO2/voy.km contre 2,6. L'écart peut provenir de la perte en ligne dans les réseaux de distribution d'électricité (RTE puis caténaire).

Les résultats sont très tranchés :

  • l'autorail diesel est un mode très peu écologique : les valeurs obtenues sont celles d'une grosse automobile. Cela est structurel car même avec des taux de remplissage multipliés par 3 ou 4 (ce qui est dans les faits quasi impossible) il présenterait des résultats moins bons que l'autocar ;
  • les trains électriques présentent de très bons résultats, dus à l'origine nucléaire de l'électricité française .

Ces valeurs sont cependant sans doute sous estimées, du fait de deux facteurs :

  1. les matériels modernes (TGV Duplex) pour être plus légers ont une caisse en aluminium, matériau dont la production entraîne des émissions environ trois fois supérieures à celles de l'acier ;
  2. les émissions liées à l'infrastructure ne traitent que du rail, et oublient l'impact des autres composants notamment le ballast, qui pourrait être significatif, en particulier lorsqu'une très bonne qualité de roulement est exigée (TGV).

Enfin pour les comparaisons multi modales il sera nécessaire de ne pas oublier les trajets d'approche qui, en règle générale et sauf milieu urbain, seront faits avec des modes beaucoup plus contributeurs en CO2

Trains de marchandises

Exemples types

Deux types de trains seulement ont été retenus : un train électrique et un train diesel :

  • un train diesel de 400 t de charge (la charge moyenne des trains de fret de la SNCF est de 350 t) soit 200 t de wagons – le rapport entre la charge maximale d'un wagon et sa tare est de l'ordre de 2 – tiré par une locomotive moderne (BB 75 000) qui pourrait d'ailleurs tirer un train deux fois plus important
  • un train électrique de 600 t de charge - soit 300 t – de wagons tiré par une locomotive électrique moderne, la PRIMA 4200 commandée par la SNCF et son concurrent VEOLIA locomotive qui pourrait également tirer des trains plus lourds.

Les locomotives ont une masse et une durée de vie respectives de 84 t et 4 000 000 km pour la BB 75000 , 91 t et 6 000 000 km pour la PRIMA 4200. La longévité des wagons est estimée à 1 500 000 km. La consommation des trains-types est de 310 l de gazole ou 2200 kW.h pour 100 km.

Ces valeurs proviennent, pour les données génériques, y compris la consommation à la t, prise sous l'hypothèse de vitesse de 100 km/h, du LITEP.

La construction des wagons est supposée entraîner autant d'émissions à la tonne que celle des locomotives ; pour l'infrastructure, le fret s'accommodant d'un état de la voie moins parfait, il a été retenu l'autre extrémité de la fourchette donnée par le LITEP, soit 1000 Mt de durée de vie.


Résultats et commentaires

Les contributions en g.eqC/km par train résultant respectivement de la consommation énergétique, de la fabrication du matériel roulant ainsi que de l'usure de l'infrastructure sont les suivantes :

  • Train BB 75 000  : 2 507,1 ; 231,5 ; 123,1
  • Train Prima 4200  : 242,0 ; 322,8 ; 178,4

alors que les chiffres du tracteur routier sont :

* Tracteur routier  : 302,0 ; 30,0 ; 50,0 (pour l'infrastructure, le calcul a été fait en estimant qu'il fallait reconstruire entièrement la voie après le passage de 2 M tracteurs routiers)

Les calculs ramenés en g.eqCO2/t.km sont plus directement comparables entre eux et avec les autres modes ; les valeurs relatives à la consommation énergétique et totales sont les suivantes :

  • Train BB 75 000  : 23,0 ; 26,2
  • Train Prima 4200  : 1,5 ; 4,5

* Tracteur routier  : 110,7 ; 140,1

De même que les locomotives retenues pourraient tirer des trains plus lourds, les valeurs des ensembles routiers prennent en compte une charge moyenne réelle de 10 t pour 25 t théoriques. Ces valeurs sont cependant sans doute un peu optimistes pour le mode ferroviaire dans la mesure où elles ne prennent pas en compte le retour des wagons vides qui est souvent indispensable.

Les résultats montrent que, même dans le cas de trains Diesel le mode ferroviaire, bien utilisé est incontestablement plus écologique que le mode routier ; en traction électrique ce sont les contributions de l'infrastructure et surtout de la fabrication des matériels qui deviennent prépondérantes.

La différence avec le transport de voyageurs provient largement du bien meilleur ratio entre masse transportée et masse déplacée : de l'ordre de 60 % dans l'exemple de train électrique contre environ 10 % en charge maximale pour les trains de voyageurs.

Notes et sources

Cet article s'appuie sur deux documents de référence :

  • Bilan Carbone® - Calcul des facteurs d’émissions et sources bibliographiques utilisées (version 3.0) Avril 2005

ADEME

  • Prices and costs in the railway sector - Baumgartner - EPFL/LITEP LITEP

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