Abu Sa'id Ibn Abu al-Khayr

Abu Sa'id Ibn Abu al-Khayr

Abū Saīd Abū l-Khayr

en 357/967 à Mayhana, dans le Khurāsān, il est un des premiers grands maîtres spirituels persans. Enfant, son père droguiste lemmenait aux concerts spirituels (samā) organisés par les soufis de la ville. Il reçut très tôt un enseignement spirituel auprès dun maître, Abū l-Qāsim Bishri Yāsīn, dont, plus tard, il citerait les vers dans ses sermons. Il étudia le droit shāfiīte, lexégèse du Qurān, les dogmes et les hadīths.

Présenté à Hasan as-Sarakhsī, celui-ci devint son maītre (pīr) et le poussa à prolonger la science exotérique par une réalisation intérieure. Il connut une longue période dascèse et de mortification, le conduisant à aller bien au-delà des prescriptions légales, à sisoler du monde et se consacrer tout entier au dhikr. Cette période eut pour but de briser sa nafs (son ego) et de léveiller intérieurement ; elle sinterrompit lorsque, vers 397/1006, il parvint à une certaine réalisation intérieure. Il sadonna alors au service des pauvres (khidma derwīshān). Il affirmera dailleurs que « le plus court chemin pour parvenir à Dieu consiste à procurer du repos à lâme dun musulman ».

Puis, il se mit alors à prêcher devant un auditoire de plus en plus étendu et, tout en poursuivant un travail spirituel, à offrir des réceptions somptueuses, voire extravagantes pour qui sen tenait aux apparences et qui, en général, se terminaient par un concert spirituel (samā). Perpétuellement endetté, il trouva cependant toujours des personnes riches et dévotes pour payer les sommes parfois énormes que lui coûtaient ses banquets. Surnommé de son vivant lePrince de la Voie Spirituelle”, il fut admiré par certains et décrié par dautres. Son mode de vie et son enseignement scandalisèrent en effet les savants exotéristes et même certains spirituels de son temps qui sattachaient plus à la lettre et aux pratiques mortificatoires quau degré de réalisation proprement dit. Condamné par les autorités religieuses de Nishāpur, il risqua sa vie. Mais possédant le don de lire dans les pensées, il sut toujours déjouer les attaques de ses détracteurs.

On a vu dans son attitude un précurseur des malamatiyya, ce groupe de soufis qui, dans le Khurāsān, pour atteindre au renoncement complet et à la pure sincérité, nhésitaient pas à rechercher le blâme public de leurs contemporains et, tout particulièrement, des autorités religieuses exotériques. Abū Saīd sopposa aux autorités religieuses qui sétaient alliées au sultan Mahmūd al-Ghaznawī et représentaient plus un moyen daccéder au pouvoir quaux cieux. Abū Saīd extorqua parfois de largent aux riches et à ses adversaires pour le redistribuer aux pauvres. Il se moqua aussi de ceux qui, des soufis, navaient que la défroque. Moins dun siècle après la condamnation de Hallāj, il fut le premier à le réhabiliter en déclarant quil était « celui qui, de lorient à loccident, était sans égal dans les sciences de létat spirituel ». Lui-même dans une enstase sécria dailleurs : « il ny a rien dautre que Dieu dans cette robe (laysa l-jubba illā Llāh) ». Comme Rābia, il prôna la primauté du pèlerinage intérieur sur le pèlerinage extérieur à La Mekkeune autre des pièces de la condamnation dal-Hallāj. Il contribua enfin à faire du persan la seconde langue spirituelle de lislām, après larabe, et il est aussi considéré comme un des premiers poètes à avoir utilisé le robay (quatrain formé non de quatre vers, mais de quatre hémistiches). Tout en ayant abandonné les livres et la pensée philosophique et scientifique, il rencontra et correspondit néanmoins avec Avicenne. Pour lui, le monde tout entier était langage et chaque verset du Qurān un enseignement ésotérique. Il mourut en 440/1049 dans la ville il naquit. Le récit de sa vie et de ses faits et gestes a été écrit, dans la seconde moitié du VIIe /XIIe siècle, par Muhammad b. al-Munawwar, son arrière-petit-fils. Attār et bien des grands maîtres spirituels lui vouèrent une vénération particulière même si sa silsila (chaîne initiatique) sest interrompue[1].

  1. Source : Le Livre des Haltes, Emir Abd el-Kader, traduction de Abdallah Penot, Dervy, Paris 2008, avec l'aimable autorisation de M. Jean Annestay.

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