- Concerto pour piano n° 3 de Bartok
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Concerto pour piano n° 3 de Bartók
Le Concerto pour piano n° 3, Sz 119 est le dernier des concertos pour piano, écrit par Béla Bartók, en 1945.
Sommaire
Contexte biographique
Il est écrit durant l'été 1945 (Bartók est en exil aux États-Unis) alors que le compositeur est presque ruiné et gravement malade. Il a alors deux commandes en chantier : un concerto pour alto et ce troisième concerto pour piano. Le premier est d’un apport financier sûr et immédiat mais c’est au second que le compositeur se hâte de travailler : la mort s’approche et la perspective de s’exprimer une dernière fois est là, devant lui. Il décide alors d’offrir à sa femme Ditta Pasztory une dernière œuvre qu’elle puisse jouer, si elle doit continuer à gagner sa vie comme concertiste : il a prévu de lui offrir pour son anniversaire, au début de l’automne. Il ne s’éteint que quelques jours avant, le 26 septembre.
Son fils Peter, démobilisé depuis quelques mois, vit à cette époque auprès de lui et de sa mère afin de s’occuper d’eux. Ditta perd peu à peu ses esprits face à l’incertitude de ces dernières années d'exil et Bartók est devenu trop faible pour se lever. Avec le renfort de Tibor Serly, Peter l’aide à travailler au lit : ils lui préparent le papier, tracent les barres de mesure au bout desquelles Bartók écrit déjà le mot « fin » (!!): sa musique est en tête, elle ne demande qu’à être écrite. Il ne peut finir les 17 dernières mesures (sur + de 1200) mais il laisse à Serly ses instructions pour les combler. Ce dernier n'a qu'à les orchestrer.
On ne peut s’empêcher, lorsqu’on pense à Bartók dans ces conditions, de faire le parallèle avec Mozart et son Requiem : Bartók qualifie d’ailleurs lui-même l’adagio central (et c’est la seule fois de toute sa vie) d’Adagio religioso...
La première est donnée le 8 février 1946 par l'Orchestre de Philadelphie sous la direction d'Eugene Ormandy avec György Sándor au piano.Le concerto comprend trois mouvements (Allegretto, Adagio religioso, Allegro vivace) et son exécution dure un peu moins de trente minutes.
Orchestration
L'orchestre requiert:
• 2 flûtes, la seconde jouant aussi le piccolo
• 2 Hautbois, le second jouant aussi le cor anglais
• 2 Clarinettes en La, jouant aussi 2 clarinettes en Si♭
• 1 Clarinette basse en Si♭ (jouée par la seconde clarinette)
• 2 Bassons
• 4 Cors en Fa
• 2 Trompettes en Ut
• 3 Trombones
• 1 Tuba
• Timbales
• 1 Xylophone, 1 triangle, 1 caisse et 1 tom grave, 1 grosse caisse, des cymbales et un tam-tam
• Violons, altos, violoncelles et contrebasses
Le tuba, les trombones, le cor anglais et la clarinette basse n’interviennent pas (à part une seule fois pour le trombone 1, mesures 144 et 145 dans le premier mouvement) lors des deux premiers mouvements. Le xylophone n’intervient que dans le second mouvement. Dans ce même mouvement, la trompette n'est utilisée qu’avec sourdine, et les contrebasses ne jouent que 2 notes aux 2 dernières mesures.
Sources: 2 Éditions Boosey and Hawkes (attention, la page "instrumentation" de l'édition d'avant 1994 est incomplète, il manque le cor anglais et la clarinette basse)
Il y a beaucoup de différences (dynamiques et partie soliste etc...) entre les deux éditions, surtout dans les 4 dernières pages (instrumentation).
Forme
Ce concerto est en Mi. Le premier mouvement est à 3/4, le second à 4/4 et le troisième est dominé par un 3/8 (on y trouve néanmoins des passages à 2/4 ou 3/4). Comme dans la plupart des œuvres de Bartók, toute la musique est structurée (forme y comprise) par des rapports proportionnels stricts, tous obtenus à l'aide du nombre d'or (plus exactement la forme géométrique de ce dernier : la section d'or).
Le premier mouvement à une structure de ce type relativement simple : les rapports proportionnels portent sur la durée uniquement (comme dans le premier mouvement de la Musique pour cordes, percussion et célesta). La noire est l'unité de cette durée. Cette structure est dominée par une forme ternaire allégro de sonate (le développement est lui aussi subdivisé en trois parties).
Le second et le troisième mouvement sont liés par leur structure, bien qu'ayant chacun une forme distincte. Leur structure combine des rapports proportionnels portant sur le nombre total de mesures et de pulsations (II° et III° mvt) et sur le nombre total de battues (uniquement pour le III° mvt). Il est intéressant de remarquer que le premier mouvement à une structure construite sur un seul niveau (le nombre de noires), le second mouvement sur une structure à deux niveaux (mesures et pulsations) et le troisième mouvement sur une structure à trois niveaux (mesures, pulsations et battues)...
Le second mouvement, "allegro religioso", est le forme lied (ABA) précédée d'une courte introduction. C'est clairement un hommage à Jean-Sébastien Bach : l'utilisation d'un choral et la partie à deux voix du piano, rappelant les fameuses inventions à deux voix du maitre, ne laissent aucun doute. Dans cette forme Lied, le choral (partie A) est utilisé deux fois. il est entrecoupé par un nocturne (partie B).
Le troisième mouvement est une véritable prouesse formelle : il combine une forme Lied (ABA') avec une forme Rondo (aba(A) cdc(B) aea(A'), a étant le refrain) et une forme "en arche" qui se concentre sur la partie centrale d du rondo (elle même encore subdivisée à nouveaux en trois sous-parties). De plus, une véritable fugue modale (en Do# dorien ou mode de Ré sur Do#) s'y intègre (partie b du rondo).
L'unité formelle de l'œuvre apparait in fine comme la conséquence d'un seul et même principe: ce concerto comporte trois mouvements. Chacun de ces mouvements a une forme tripartite : une forme Sonate, une forme Lied et une forme Arche/Lied/Rondo. La forme sonate a chacune de ses trois parties (exposition, développement et réexposition) composée de trois sous-parties, et sa mesure est à 3/4. Le second mouvement voit son nocturne, centre de sa forme Lied, lui aussi fractionné en trois parties. Le dernier mouvement comporte dans chacune de ses trois parties, trois sous-parties. La mesure qui y est la plus généralement employée est à 3/8. Il est de plus construit sur une structure par sections d’or établie sur trois niveaux différents.
L'importance du nombre trois, structurant toutes les formes de cette œuvre et assurant par là leur unité, apparaît donc comme un principe découlant d’une seule source : ce concerto pour piano est le n°3 ... L’unité formelle de ce concerto est alors tout entière contenue dans son intitulé. C’est une prouesse rare, la seule de toute sa production.
Discographie
Les références :
- Géza Anda et l'Orchestre symphonique de la Radio de Berlin dirigé par Ferenc Fricsay en 1960 (Deutsche Grammophon).
- Annie Fischer et l'Orchestre symphonique de la Radio de Berlin dirigé par Ferenc Fricsay.
- Stephen Kovacevich et l'Orchestre symphonique de Londres dirigé par Colin Davis en 1975 (Philips).
- Vladimir Ashkenazy et Georg Solti.
- Martha Argerich et l'Orchestre symphonique de Montréal dirigé par Charles Dutoit (EMI).
- András Schiff et l'orchestre du festival de Budapest dirigé par Iván Fischer, en avril 1996 à Budapest - Institut culturel italien.
- Jonathan Biss et l'orchestre philharmonique de Munich dirigé par James Levine
- Hélène Grimaud et le London Symphony Orchestra dirigé par Pierre Boulez
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