Communication animale

Communication animale

La communication animale est l'ensemble des échanges d'information entre différents individus depuis leur émission jusqu'à leur réception. La communication intraspécifique s'intéresse aux échanges entre individu de la même espèce et la communication extraspécifique implique des individus d'espèces différentes.

Le monde biologique est rempli dodeurs, de sons, de mouvements et de signaux électriques par lesquels les animaux interagissent entre eux dans différents contextes tels lattraction du partenaire, la compétition pour les ressources, la recherche de la nourriture, … Toute communication implique au minimum deux individus, un émetteur et un récepteur. Lémetteur produit un signal qui est le support physique de linformation. Le signal entraîne une modification du comportement/état physiologique du récepteur. Le récepteur peut parfois utiliser cette information pour prendre des décisions qui se traduisent par une réponse comportementale. La réponse du récepteur est susceptible davoir des conséquences sur la survie de lémetteur aussi bien que sur la sienne propre. Tout échange dinformation entre deux animaux nest pas assimilable à une communication (ex. une souris qui fait du bruit en se déplaçant ne communique pas avec la chouette qui la chasse ; lécholocation qui permet à un animal de sorienter dans lespace ou de repérer ses proies grâce à lécho de ses propres sons nest pas une communication). On considère quil y a communication quand ce processus représente un bénéfice en termes de survie de lindividu, du groupe, de lespèce. On se restreindra ici à la communication intra spécifique, éliminant de fait les situations plus ou moins litigieusesmais parfois réelles - une espèce utilise les signaux dune autre.

La compréhension des phénomènes de communication animale demande denvisager les étapes suivantes :

  • le décryptage du fonctionnement de la chaîne de transmission de linformation en envisageant la diversité des signaux utilisés
  • leurs modalités de production par lanimal émetteur
  • leur transmission dans lenvironnement
  • leur réception par lanimal récepteur
  • lanalyse des rôles biologiques des communications
  • les modalités de codage de linformation
  • létude des implications évolutives des communications

Avec deux questions bien différentes : comment les processus de communication évoluent (en quoi participent-ils de la réponse adaptative de lorganisme à son milieu) ? Et en quoi les communications jouent-elles un rôle dans lévolution des espèces ? Enfin, se pose la question de lintérêt de la connaissance des mécanismes des communications animales dun point de vue appliqué, tant dans le domaine de la protection des espèces animales, que de celui de la lutte contre les nuisances. Comme pour tout comportement animal, létude de la communication peut être abordée sous les quatre angles suivants[1] :

  1. les causes « immédiates » du comportement (modalités de production, transmission et réception des signaux)
  2. langle ontogénétique (génétique du comportement de communication, apprentissage de la production des signaux et de leur contexte dutilisation)
  3. langle des rôles biologiques (fonctions) de la communication
  4. langle évolutif (double point de vue : adaptation des signaux de communication à leurs fonctions & rôle de la communication dans les processus dévolution des espèces).

Létude du comportement animal est ainsi au carrefour de nombreuses disciplines : physiologie (dont les neurosciences mais aussi létude de lensemble des grandes fonctions vitales telles que la nutrition et la reproduction), écologie et évolution bien sûr, mais aussi anatomie, génétiquePour envisager la communication animale, il faut donc adopter un point de vue intégratif et ne pas hésiter à changer déchelle dans lexplication des phénomènes.

Sommaire

La chaîne de transmission de linformation

Les signaux, supports physiques de linformation

  • signaux chimiques (phéromones : molécules, souvent émises en « bouquets », milieux aériens et aquatiques, peuvent être rémanents ou non, plus ou moins volatils, souvent grande intra spécificité),
  • signaux visuels (ondes électromagnétiques, statiques et/ou dynamiques, dépendants de la qualité et de la quantité de lumière ambiante sauf en grand profondeur sous-marine les photons sont générés par lanimal lui-même, propagation sensible aux obstacles physiques telle la végétation),
  • signaux acoustiques et vibrations du substrat (ondes mécaniques, produites par vibrations de structures anatomiques, soit via passage de flux dair, soit par frottement entre deux surfaces dures, utilisables dans leau comme dans lair, grande portée potentielle, faible rémanence),
  • signaux tactiles,
  • signaux électriques (dans leau seulement, nécessité dorganes spécialisés dorigine musculaire, utilisés essentiellement par des poissons, surtout en milieu trouble).

Un signal est donc un processus physique (en principe une onde ou assimilable à une onde), qui code de linformation via des paramètres de fréquence, damplitude et temporels (paramètres de fréquence : ex. son aigu/grave ; paramètres damplitude : ex. intensité sonore ; paramètres temporels : rythme démission & modulations de fréquence et damplitude). Les signaux chimiques peuvent être assimilés à une onde : spectre de fréquence : composition moléculaire du signal + concentration relative des composés, amplitude : concentration du bouquet phéromonal, paramètres temporels : variations dans le temps de la composition et de la concentration du bouquet phéromonal.

La production des signaux

Des organes souvent spécialisés.

  • un exemple dorgane producteur de signal de communication montrant :
    • lexistence de structures anatomiques spécialisées dans lémission dun signal donné (ex. syrinx des oiseaux chanteurs, cymbale des homoptères, stridulation du grillon, glandes phéromonales des abeilles, larynx des mammifères …)
    • la présence dun contrôle nerveux et éventuellement hormonal (ex. noyaux du chant dans le cerveau des oiseaux).
  • Certains signaux sont plus difficiles à émettre, plus coûteux en énergie. Les propriétés des signaux sont fonction de la biophysique et de la biochimie de lémission et de ladéquation entre lorgane émetteur et lenvironnement.

Des organes pilotés par la génétique, lapprentissage et le contexte. La capacité à émettre un signal de communication peut être piloté par divers facteurs, susceptibles dinteragir de façon compliquée.

  • possible contrôle génétique de la structure des signaux produits (ex. expériences de croisement inter-spécifique avec effet sur le rythme du chant chez grillon, drosophile).
  • rôle limitant des capacités anatomo-physiologiques de lanimal (ex. seuls de « gros » animaux peuvent émettre des sons graves ; lhomme ne peut pas émettre dultrasons…).
  • possible apprentissage de la production des signaux (le modèle expérimental le plus abouti est celui des oiseaux chanteurs : il faut décrire ici des expériences disolement des oisillons permettant de mettre en évidence que les jeunes doivent apprendre leur chant en copiant un tuteur. Ce modèle est également loccasion de changer déchelle pour létude des processus biologiques en jeu : cest dans les noyaux cérébraux moteurs pilotant le chant chez loiseau qua été mise en évidence pour la première fois une neurogenèse chez un vertébré adulte).
  • possible apprentissage du contexte dutilisation (un exemple livresque est celui des signaux dalarme chez les singes vervets des cris de trois structures acoustiques différentes sont émis dans trois contextes de prédation différents : attaque aérienne par un aigle, attaque terrestre léopard par exemple, et arrivée dun serpent. Lutilisation adéquate de ces cris par les jeunes est soumise à un apprentissage).
  • la décision denvoyer ou non un signal à un moment donné, son niveau de complexité et de puissance (son intensité) sont fonction de létat énergétique et psychologique de lémetteur, ainsi que des risques encourus (prédation, présence de congénères compétiteurs ou alliés, modulation hormonale, etc…).

La transmission des signaux dans lenvironnement

  • Pour passer de lémetteur au récepteur, tout signal devra traverser un « canal de transmission » selon le terme consacré (on dit aussi « canal de propagation »). Cette traversée na rien danodine pour la communication : le canal de transmission va agir comme un filtre, modifiant le signal émis. La conséquence est majeure : le signal reçu par lanimal récepteur ne peut être identique au signal envoyé par lémetteur. Cette contrainte, potentiellement majeure, pèse sur tout processus de communication.
  • la portée dun signal dépend de ses caractéristiques physiques et des contraintes du milieu. On peut citer comme exemple la différence entre les milieux ouverts (i.e., sans végétation) et les milieux forestiers pour la propagation des signaux acoustiques et visuels (ex. réverbération des sons en forêtmodification de la durée des signaux), la différence eau/air pour la propagation des sons (le milieu aquatique est idéal pour la transmission des ondes sonores), limportance des courants deau et dair pour la propagation des phéromones.

La réception des signaux

La réception du signal par lanimal émetteur est bien sûr une étape cruciale du processus de communication. Cette partie doit détailler les processus par lesquels les signaux sont intégrés par lorganisme au niveau de structures réceptrices (transduction en signaux nerveux), comment linformation est décodée et les conséquences sur lanimal récepteur en termes détat physiologique et de réponse comportementale.

  • Chimioréception, photoréception, électroréception, audition. Un exemple détaillé dune des modalités permettra de présenter lensemble de la chaîne de réception depuis la stimulation de lorgane récepteur, le codage nerveux, jusquà lintégration par le système nerveux central (exemples pouvant être utilisés : organe auditif chez le grillon champêtre ; organe voméronasal des mammifères ; réception des phéromones par lantenne du Bombyx ; œil des Vertébrés, etc…).
  • En vue dune généralisation, les principes suivants doivent être explicités : un récepteur sensoriel est une fenêtre ouverte sur le monde extérieur (cest un filtre, sensible à une certaine bande passante du signal ; ex. loreille des chauve-souris est sensible aux ultrasons, pas loreille humaine), en charge de la transduction du signal de communication en un signal nerveux.

Interprétation des signaux et décision

  • perception et classification du signal par le système nerveux central : reconnaissance, éventuelle discrimination entre les signaux et classification des signaux perçus.
  • interprétation du signal et extraction de linformation du signal. Traitement de linformation (ex. rôle des aires associatives corticales chez Vertébrés).
  • élaboration de la réponse au signal (décision) sur la base de linterprétation du signal par le système nerveux central. Des alternatives à une réponse comportementale directe existent, telle lattente de la réception de signaux complémentaires. Mise en jeu possible de la mémoire à court et long terme.

Conclusion

La triade « émetteur-signal-récepteur » constitue le schéma de base de la communication. Cependant, la situation est la plupart du temps plus complexe : les systèmes naturels sorganisent souvent en « réseaux de communication », chaque individu peut-être à la fois émetteur et récepteur. La possibilité dauditeurs non souhaités, parasitant linformation, est également fréquente.

Les fonctions de la communication

Deux aspects sont envisagés ici. Tout dabord la question du codage de linformation. On a déjà expliqué quun signal de communication est un processus physique, support de linformation. Il faut montrer ici comment la structure du signal peut coder de linformation, et envisager la diversité des informations codables. Ensuite, létendue des rôles biologiques des communications animales dans trois contextes essentiels : les relations entre partenaires sexuels, les relations parents-jeunes, les relations avec les autres individus de lespèce.

Le codage de linformation

Quest-ce quun code ?

  • en utilisant un exemple, on montre comment coder de linformation dans un signal. Un exemple pratique car assez simple est celui des signaux lumineux de certaines lucioles : leur fréquence dallumage et la « forme » du signal dépend de lespèce. La danse des abeilles fournit un autre exemple en principe assez connu (même si cette fameuse danse est en fait loin davoir livré tous ses secrets: « distance à la nourriture », « direction par rapport au soleil », « nature de la nourriture » sont codées par des paramètres distincts. Un autre exemple peut être trouvé dans les modalités du codage de lidentité spécifique et individuelle dans le chant de loiseau.
  • Notion de codage discret (un répertoire de plusieurs signaux de structure différente, chacun codant pour une ou plusieurs informations différentes) et de codage gradé ou gradué (un type de signal dont les caractéristiques peuvent être modifiées graduellement pour coder une information différente ; ex. aboiement du chien).

Ces considérations devraient être suivies ou précédées dun bref exposé des principes de la théorie de linformation (notion de volume/quantité dinformation, de bande passante, de rapport signal/bruit, de redondance de linformation).

Informations codées dans les signaux de communication

Pour illustrer la puissance des codes utilisés par les communications animales, on liste les différentes informations susceptibles dêtre portées par les signaux : signatures didentité (espèce, groupe, sexe, individu), informations liées à lenvironnement (ex. présence et localisation de la nourriture, de prédateurs), informations liées à létat (physiologique et mental) de lémetteur (parades nuptiales, signaux montrant létat de réceptivité sexuelle, âge…). On nattend pas ici de détails sur ces informations. En effet, lexposé des rôles biologiques des communications animales va en donner loccasion.

Le choix du partenaire et la sélection sexuelle

  • signaux informant sur lidentité spécifique et les caractéristiques individuelles de lémetteur (état physiologique, réceptivité sexuelle, niveau dagressivité, statut social dominant, dominé, son histoire de vie, patrimoine génétique).
                             Ex lezard lacerta monticola.jpg
  • souvent utilisation de plusieurs canaux de communication concomitamment (signaux visuels, acoustiques et chimiques ; ex. lors des parades nuptiales des cervidés).
  • en règle générale, la présence dun fort risque de prédation entraine la diminution de la préférence pour un signal sexuel visible.
                             Ex uca beebei .jpg

La communication parents-jeunes

  • développée chez les animaux pratiquant les soins aux jeunes (nombreuses espèces de poissons, crocodiles, oiseaux, mammifères).
  • les signaux permettent :
    • la reconnaissance parents-jeunes (processus particulièrement développé lorsque le risque de confusion est élevé, tel dans les colonies doiseaux marins et de pinnipèdes)
    • la quémande alimentaire par les jeunes est utilisée par les jeunes pour solliciter le nourrissage par leurs parents et il s'agit d'une démonstration extravagante qui peut être couteuse pour la fitness des jeunes. La quémande alimentaire est un signal informatif en partie honnête puisque l'intensité de la quémande est en principe corrélée à létat de satiété. Cependant elle peut aussi être un signal malhonnête résultant de la compétition entre les jeunes d'une même nichée.

Des expériences ont été menées sur la quémande alimentaire chez le Moineau domestique (Passer domesticus), afin de tester les deux hypothèses suivantes:

- Les parents sont-ils sensibles à l'intensité de la quémande alimentaire des oisillons? Être un parent sensible à la quémande de ses oisillons permet de diminuer deux risques opposés : le risque de perdre trop de temps en revenant trop tôt au nid (gain de temps pour les parents donc augmentation de leur fitness) et le risque de négliger certains oisillons au hasard à plusieurs reprises.

- L'intensité de la quémande alimentaire a-t-elle une origine génétique? Lintensité de la quémande des oisillons a une origine génétique relativement faible. En revanche, de nombreux facteurs sociaux et environnementaux induisent des variations de lintensité de la quémande (environnement éducatif commun aux oisillons et compétition frères-sœurs).

La compétition territoriale

  • caractéristiques des signaux territoriaux : en principe grande portée (ex. chants des oiseaux) et/ou rémanence temporelle (ex : marquage par les carnivores).
  • la structure du signal peut être corrélée aux capacités physiques de lémetteur (permet lévitement des affrontements physiques directs).
  • les signaux peuvent parfois permettre la reconnaissance entre compétiteurs voisins (et ainsi permettre déviter des combats = principe du « cher ennemi »).

La reconnaissance de parentèle et/ou du groupe social

Il sagit ici dun rôle tout à fait primordial des communications animales.

  • souvent observée lors des interactions parents-jeunes, la reconnaissance de parentèle peut sétendre aux autres membres du groupe familial. Ex. sociétés dinsectes eusociaux (certains Hyménoptères, Isoptères).
  • la mise en place de la reconnaissance de parentèle peut seffectuer selon deux grandes modalités :
    • par reconnaissance phénotypique (ex. chez la souris, les individus préfèrent des congénères à odeur semblable ; or les molécules odorantes dépendent du CMH des individus)
    • par apprentissage (ex. la jeune otarie apprend à reconnaître la voix de sa mère dans les 2-5 jours qui suivent sa naissance).

La reconnaissance du groupe social est importante pour permettre des relations de réciprocité entre individus (entre-aide, altruisme…) Elle est lapanage des groupes possédant une forte structure et hiérarchie. Les singes (babouins) en sont un bon exemple, mais également les hyènes car ces 2 espèces possèdent une construction sociale assez similaire. Cette reconnaissance est, entre autres, acoustique et visuelle.

Tout dabord, singes et hyènes savent tout deux reconnaître les individus qui leur sont apparentés :

  • Reconnaissance mère/petit : chez la hyène, lorsque le cri dun petit est passé au haut-parleur, la mère sapproche de celui-ci et cherche même son petit. Il en est de même pour les singes (vervets.)
  • Reconnaissance de la « famille » : lorsque le cri dun petit est passé au haut-parleur, les individus qui lui sont apparentés (frères et sœurs, tante, cousins…) cherchent activement le petit, dautant plus sils sont fortement apparentés.

Ces 2 espèces à fort réseau social sont donc capables de reconnaître le cri dun de leur proche. Mais sont-elles capables de reconnaître les relations daffiliation qui existent entre différents individus ? Sont-elles capables de dire que tel individu est parent de tel autre ?

  • Les babouins en seraient tout à fait capables ! En effet, les femelles babouins peuvent reconnaître des liens qui unissent des individus non apparentés, et même adapter leur comportement en fonction des individus impliqués dans une relation. Par exemple, lorsquune femelle entend une dispute entre un de ses parents et un autre individu, elle se montrera ensuite plus distante si elle doit interagir avec un apparenté de cet individu.

De même, dautres exemples existent chez différentes espèces de singes : en effet, chez les singes vervets, lorsque le cri dun petit est passé au haut-parleur, toutes les autres femelles regardent la mère, ce qui signifie quelles associent bien un petit avec sa mère. Chez les macaques, une femelle entraînée serait capable dassocier des photos de petit avec celles de leurs mères, ce qui montre encore une fois que ces singes sont capables de reconnaître visuellement des individus affiliés.

  • Chez les hyènes, en revanche, un tel processus serait pour linstant impossible. En effet, lorsque le cri dun petit donné est passé au haut-parleur, les autres individus ne se tournent pas plus vers la mère que vers un autre individu. Cependant, les hyènes évoluant dans des groupes de plus dune vingtaine dindividus et reconnaissant très bien leur position hiérarchique au sein de celui-ci, il est difficile de croire quelles sont incapables de reconnaître les affiliations entre individus. Dautres investigations sont nécessaires pour le prouver.

Le degré de reconnaissance sociale semble donc lié à la complexité de lorganisation du groupe social, mais aussi à lévolution. Certains animaux semblent donc plus aptes que dautres, les singes étant les maîtres en la matière.

Le signalement du statut social

  • dans un groupe social (ex. chez insectes, poissons, oiseaux, mammifères), le signalement du statut de lindividu est une donnée importante permettant la structuration du groupe (dominant/dominé, reproducteur/non reproducteur, sexe, âge, signatures individuelles et de groupe, …). Ces signaux sont souvent corrélés à létat physiologique du moment (ex. protrusion sexuelle des singes femelles), mais aussi à lhistoire passée de lindividu (notion de « badges de statut »).

Exemple de signalement visuel du statut social chez un Cichlidé.jpg

La coordination sociale

  • Les stratégies de communication antiprédatrices
  • Signaux dalarme et de détresse, dont la structure est adaptée à la fonction (voir lexemple des singes vervets cités plus haut ; il y a également des exemples chez les oiseauxmésanges qui modifient la longueur de leur cri dalarme en fonction de la taille du prédateur repéré). Ce sont souvent des signaux que leur structure rend difficiles à localiser par le prédateur.
  • Les collaborations au sein du groupe social
  • coopération pour la recherche de nourriture (ex. danse des abeilles ; chasse en groupe des grands carnivores).
  • utilisation de signaux lors des alliances sociales (ex. au sein des groupes de singes)

Conclusion

La communication est le processus fondateur de toute interaction sociale. Il serait judicieux dans cette conclusion daborder les notions daltruisme et de bénéfice réciproque (amenée par les cris dalarme, les quémandes alimentaires des jeunes). Les rapports coûts/bénéfices et un élargissement à la théorie des jeux sont aussi envisageables (tant que ces notions restent maniées avec circonspection ; on attend du candidat quil sache faire la différence entre théorie et preuve expérimentale).

Communication et évolution

Deux aspects peuvent être différenciés :

  • les contraintes pesant sur les mécanismes de communication et les adaptations associées (on sintéresse alors à lévolution des communications animales)
  • le rôle des communications animales dans lévolution des espèces (en en particulier leur intervention dans les phénomènes de spéciation).

Contraintes anatomo-physiologique sur la production et la réception des signaux

Adaptations structure-fonction

  • la taille de lanimal, sa température interne, son organisation anatomo-morphologique sont autant de facteurs qui contraignent les possibilités démission et de réception des signaux. Ces facteurs sont souvent liés à des contraintes phylogénétiques (ex. les oiseaux chanteurs ont une syrinx et un contrôle nerveux moteur associé qui leur permet démettre des signaux acoustiques potentiellement complexes ; les crocodiles nont pas dorgane émetteur donde sonore spécialisé), et peuvent être modulés par des facteurs ontogénétiques (maturité sexuelle) ou dépendants de lenvironnement (température externe chez hétérothermes par exemple). En conséquence, chaque animal dispose dune gamme de signaux de communication potentiels. Cette gamme diffère entre les espèces, les populations, voire les individus.

« Co-évolution » émetteur-récepteur

  • correspondance (pas toujours parfaite) entre caractéristiques du signal émis par lémetteur et possibilités de réception par lanimal récepteur (idée de co-évolution organes émetteursorganes récepteurs ; ex. correspondance entre les fréquences des sons émis et les fréquences pouvant être perçues par loreille
  • idem pour électrorécepteurs des poissons communiquant par ondes électriques).

Contraintes sociales et évolution des signaux

Sélection sexuelle

  • notions demballement dit « de Fisher » et conséquence sur les signaux de communication
  • théorie du Handicap et question de « lhonnêteté du signal » (hypothèse = un signal porte une information fiable quant aux caractéristiques intrinsèques de lémetteur)
  • théorie de l'exploitation sensorielle des signaux par le récepteur & biais sensoriel

Relations parents-jeunes et interactions inter-jeunes

Chez les espèces présentant des soins aux jeunes, les parents et les jeunes peuvent avoir des intérêts divergents (théorie du conflit parents-jeunes).

exemple conflit parent-jeune chez la hyène
Exemple de relation entre parent et jeune chez la hyène tachetée

De plus, les jeunes peuvent être en compétition pour laccès aux ressources parentales. Se mettent donc en place des stratégies de signalisation lors de la quémande alimentaire (exagération des signaux, signalisation concurrente des jeunes ou au contraire coopération lors de lémission…).

exemple de relation inter-jeune chez les otaries des Galapagos
Exemple de relation entre les jeunes chez les otaries des Galapagos

Corrélation système de communication / système social

La « complexité » (attention à ce terme, pris ici sans jugement de valeur !) dun système de communication va dépendre a minima du répertoire de signaux (nombre de signaux différents), de la variété des informations transmises, de la plasticité du système (possibilités dapprentissage). Elle sera donc corrélée à la « complexité » du système social de lespèce : plus les individus vivent des interactions sociales variées, complexes (compétition, collaboration, réconciliationchez les Primates par exemple) et changeantes au cours du temps, plus le système de communication est élaboré.

Les récepteurs non désirés

La présence de prédateurs, de parasites potentiels ou dindividus concurrents peut représenter une contrainte importante sur les signaux (risque dêtre repéré). On constate lutilisation de signaux discrets et/ou difficilement localisables (ex. cris dalarme aigus des passereaux, cris de copulation à faible intensité de nombreuses espèces de vertébrés).

Contraintes environnementales et adaptation des communications

  • adaptation des organes émetteurs et récepteurs aux contraintes physiques de lenvironnement (ex. chaîne des osselets de loreille moyenne qui traite de la différence dimpédance air-eau).
  • lenvironnement va atténuer et dégrader le signal (« bruitage » du signal). On peut observer des adaptations pour communiquer en présence de bruit de fond (la notion de bruit de fond sapplique à tous les canaux de communication et pas seulement aux signaux acoustiques ; ex. feuillage agité par le vent gêne la perception visuelle de signaux optiquessaccades de la tête - envoyés par un lézard à ses congénères: caractéristiques du signal (ex. utilisation de sons basse fréquence et peu modulés en forêt, moins sensibles à labsorption par la végétation ; production de signaux chimiques rémanents ; signaux présentant un fort rapport signal/bruit, codage de linformation dans des paramètres résistants, redondance de linformation), choix des modalités démission (ex. utilisation dun terrier comme caisse de résonance chez la courtilière ; postes de chant chez oiseaux) et du moment démission, capacités du système neuro-physiologique à extraire un signal du bruit de fond. Possibilité de jouer sur les modifications imposées par lenvironnement à la structure des signaux pour cibler tel ou tel récepteur et éviter le « parasitage » de linformation (ex. les signaux pré-copulatoires se propagent souvent mal, évitant dattirer des compétiteurs ; exemple = différence entre le chant territorial du grillontrès fort et portant loin- et le chant de courdintensité faible et réserver au partenaire sexuel). Utilisation de signaux chimiques plus ou moins volatils, rémanents ou non, adaptée à leur rôle biologique.

Communication et évolution des espèces

Dire que le premier rôle des signaux de communication est de permettre la reconnaissance de lespèce lors de la rencontre des deux sexes est une hypothèse raisonnable (sil ny pas de reconnaissance du signal, lappariement mâle-femelle na pas lieu). Les signaux de communication peuvent alors facilement jouer le rôle de barrière prézygotique.

  • lexistence de populations allopatriques entraîne la dérive des signaux de communication (apparition de « dialectes », soit liés à une dérive génétique, ex. drosophile des îles Hawaï ; soit culturelle, ex. oiseaux chanteurs, suite à des « erreurs » de copie du chant du père). Cette dérive, si elle est suffisamment importante, peut amener lapparition dune barrière prézygotique plus ou moins étanche (les signaux mâles dune population nont plusou moins - deffet attracteur sur les femelles de lautre population). Il est à noter quune dérive culturelle des signaux de communication peut être très rapide, beaucoup plus rapide quune dérive génétique.
  • une autre possibilité est que la modification des signaux de communication soit un effet secondaire dune différenciation adaptative entre populations. Ex. cas des pinsons de Darwin : lévolution du bec (liée aux contraintes alimentaires) entraîne des modifications du tractus vocal avec pour conséquence des modifications des signaux sonores produits, pouvant ainsi amener une barrière prézygotique entre des populations de la même espèce (Rq. par ailleurs, les pinsons de Darwin ont connu et connaissent encore le premier cas : dérive des signaux suite à une allopatrie).

Conclusion

La communication est marquée par plusieurs étapes depuis la production et lémission du signal jusquaux décisions du récepteur basées sur le signal reçu. Les divers mécanismes de lévolution (dérive génétique et culturelle, sélections naturelle et sexuelle) peuvent opérer indépendamment et différemment à chacune de ces étapes. Suite à leur importance primordiale lors des processus dappariement, les signaux de communication peuvent être dune importance primordiale lors des processus de spéciation.

Communication animale et applications

On envisage ici deux domaines les connaissances acquises concernant les communications animales permettent denvisager une action sur les processus naturels, soit en termes de protection de la Nature, soit en termes de lutte contre les nuisances provoquées par certaines espèces.

Biologie de la conservation

Le fait que les signaux de communication soient signés, cest-à-dire quils puissent porter lidentité de lespèce, dune population, voire des individus, permet denvisager lidentificationet donc le suivi- des animaux sur la base de ces signaux.

  • suivi acoustique (méthode non invasive ; utilisée pour suivi des migrations doiseaux, despèces menacées). Ces méthodes sont employées de façon routinière en mer pour le suivi des Cétacés (espèces non facilement observables & chaque espèce de baleines émet un chant qui lui est propre).
  • Mesure de la biodiversité (forêt tropicale, océan). Un enregistrement sonore en forêt tropicale ou ailleurs permet de recenser les espèces présentes. Si cette méthode est depuis longtemps employée pour recenser les oiseaux par exemple (méthode des « points découte »), des approches automatisées sont en développement afin dêtre applicables sur le long terme et dans des environnements difficilement accessibles.

Gestion des risques biotiques

On détourne le rôle biologique de certains signaux (cris de détresse, phéromones dattraction sexuelles) au profit des activités humaines.

  • un premier exemple est celui des effaroucheurs acoustiques positionnés sur la plupart des aéroports européens pour faire face au « péril aviaire » (le danger que représentent les oiseaux lors des décollages et atterrissage des avions). Ils sont également employés par certaines piscicultures et au sein durbanisations lorsquelles subissent des invasions doiseaux (étourneaux par exemple). Les effaroucheurs peuvent envoyer des cris de synthèse, imitant les caractéristiques de cris de détresse doiseaux (on utilise le fait que ces cris ont une valeur interspécifique).
  • un second exemple est celui des pièges phéromonaux pour le contrôle des ravageurs de culture.

Conclusion générale

Nous avons envisagé les communications intraspécifiques chez les animaux aux différentes échelles dexplication et dobservation, tant du point de vue proximal (production des signaux, codage de linformation, transmission et réception des signaux, rôles biologiques de la communication), quévolutif (adaptations des communications aux contraintes biologiques et environnementales, rôle des communications dans lévolution des espèces). Il est remarquable que lenvironnement physique détermine considérablement la nature et la structure des signaux employés, avec pour conséquence une assez grand homogénéité au sein du Règne Animal. Les signaux sonores et visuels sont employés par de nombreux groupes phylogénétiquement très éloignés ; on croit pouvoir affirmer que les signaux chimiques sont employés par tous. Dans létat actuel des connaissances et si lon excepte les signaux électriques de certains poissons, aucun groupe animal ne semble avoir développé un canal de communication particulièrement original par rapport aux autres ; lhomme fournit bien sûr une exception notable avec des signaux de communication nouveaux (ex. utilisation dondes électromagnétiques) développés dans un cadre technologique (notion de phénotype étendu). Par ailleurs, la communication animale est un exemple de la non-linéarité de lévolution phylogénétique. Chez les vertébrés par exemple, on trouve des systèmes particulièrement complexes de communication (signalisation multi-modale, apprentissage, …) chez des lignées aussi différentes que les oiseaux et les primates. Le devoir a montré la diversité des échanges dinformation, confirmant limportance de la communication en particulier chez les animaux ayant développé des formes de socialité élaborée. Nous avons également vu que la communication animale est un processus dynamique, connaissant une évolution soumise à des contraintes et des bénéfices. Ainsi, des bases théoriques comme les observations montrent que les animaux tentent de résoudre les conflits avec le plus faible coût énergétique possible : les signaux de communication participent de cette stratégie. Quelles interrogations émergent de ces constats ? Les questions proposées par Tinbergen restent dactualité. Sur le plan proximal, la comparaison des systèmes de communication, des modalités de codage de linformation, des rôles des signaux dans la vie quotidienne des animaux nont pas fini de livrer leurs secrets. En particulier, le fonctionnement des réseaux de communication les protagonistes sont tour à tour émetteurs, récepteurs et parasites de linformation, commence tout juste dêtre compris. Par ailleurs, létude du comportement animal ne saurait être dissociée de ses bases neurophysiologiques. Même si des développements importants sont encore nécessaires, des méthodes modernes dinvestigation du fonctionnement cérébral in vivo et sur des animaux non anesthésiés, telles certaines approches électrophysiologiques, commencent maintenant denvisager lactivité nerveuse en situation, lorsque lanimal échange des informations avec des congénères. On attend beaucoup des nouvelles approches dimagerie fonctionnelle (IRMf, approches biophotoniques). Sur le plan des principes évolutifs, beaucoup de travail a été accompli ces dernières années pour théoriser la communication animale, en particulier en utilisant des concepts issus de léconomie et de la théorie des jeux. Beaucoup reste à faire. En particulier, la théorie doit être résolument confrontée aux réalités expérimentales. Sur un autre plan, le rôle majeur des communications animales dans les processus dévolution des êtres vivants na été queffleuré. En ce qui concerne notre propre espèce, une interrogation majeure demeure celle du langage. Non quil faille le placer en haut dune hypothétique échelle de valeurchaque système de communication possède ses propres spécificités-, mais lenvisager en tant que processus intrinsèquement lié aux liens sociaux qui unissent les humains permettrait dapporter un éclairage sur ses modalités. La question de la récursivité (le fait de pouvoir construire une infinité de phrases avec un nombre limité de mots) est-il propre à notre espèce ? Peut-on déceler des pré requis à cette aptitude chez dautres Primates ? Enfin, les concepts élaborés dans le cadre de létude des communications animales et de la théorie de linformation sont dune portée générale et pourraient être utiles dans lanalyse dautres systèmes naturels (ex. relations plantes-pollinisateurs, hôte-parasite, voire aux échelles intra-organisme et intra-cellulaire).

Equipes de recherche sur la communication animale (France)

The BioAcoustics Team (Université Paris XI & Université de Saint-Etienne)

Ethologie Animale et humaine (Université Rennes I)

Ethologie et Cognition Comparée (Université Paris X)

Liens utiles (sociétés savantes)

Société française pour l'Etude du Comportement Animal

Liens utiles (journaux)

Bioacoustics


Notes et références


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Communication animale de Wikipédia en français (auteurs)

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