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Centrale nucléaire de Gentilly
La centrale nucléaire de Gentilly est une centrale nucléaire d'Hydro-Québec située à Bécancour au Québec. La centrale, située sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent, à la hauteur de Trois-Rivières possède une capacité de 675 MW. Elle est la seule centrale nucléaire en opération au Québec[1].
Sommaire
Historique
Article détaillé : Histoire d'Hydro-Québec.Le développement d'une centrale nucléaire au Québec a fait l'objet d'un débat passionné dans les années 1960 et au début des années 1970 entre les partisans de cette forme d'énergie et ceux qui favorisaient la construction de grands projets hydroélectriques pour répondre à la très forte croissance des besoins.
Au lendemain de la seconde nationalisation de l'électricité de 1963, un lobby favorisant le développement de l'énergie nucléaire est actif à l'intérieur d'Hydro-Québec. En cela, ils rejoignent les objectifs du gouvernement du Canada, qui s'inquiète de la signification politique et symbolique de la prise de contrôle de l'électricité par la majorité francophone aux dépens du monde des affaires anglo-protestant. Le gouvernement de Lester B. Pearson à Ottawa redouble d'efforts afin « partager les bénéfices du Canada avec les citoyens francophones du pays[2] ».
Ces partisans du nucléaire au sein de l'entreprise peuvent compter sur le soutien de Jean-Claude Lessard, ancien haut-fonctionnaire fédéral et président d'Hydro-Québec de 1960 à 1969. M. Lessard est d'ailleurs nommé membre du conseil d'administration d'Énergie atomique du Canada (EACL), à compter de 1963, ce qui marquait un changement de cap majeur pour Hydro-Québec, qui boycottait l'entreprise nucléaire fédérale depuis 1954[2]. Le groupe pro-nucléaire s'exprime au moment de la décision d'investir dans le projet de la chute Churchill, au Labrador[3], où les coûts prévus du développement nucléaire servaient d'étalon pour évaluer la faisabilité et la désirabilité de développer de nouveaux aménagements hydroélectriques. L'économiste et haut-fonctionnaire Jacques Parizeau est l'un des principaux tenants de cet argument[2].
Gentilly-1
Hydro-Québec engage les discussions au cours de l'été 1964 et Énergie atomique du Canada Limitée (EACL) étudie la possibilité de construire un réacteur de 250 MW, version augmentée du réacteur expérimental de Douglas Point, en Ontario. La société fédérale pose comme condition à l'aide financière d'Ottawa que le réacteur soit d'un type expérimental. Le président d'EACL, Lorne Gray propose alors à l'entreprise publique québécoise un réacteur à eau naturelle bouillante, qui offrait plusieurs avantages, notamment le fait que la vapeur produite par le réacteur peut être utilisée par les turbines[2].
Avant de s'engager plus avant, le gouvernement Lesage pose certaines conditions. Dans une lettre adressée au premier ministre Pearson le 6 avril 1965, Lesage propose un site à Saint-Édouard-de-Gentilly — aujourd'hui un secteur de Bécancour. Québec demande aussi à obtenir qu'Ottawa défraie une partie des coûts de construction de la centrale, comme ce fut le cas lors de la construction du rédacteur de Douglas Point. Le cabinet québécois approuve le projet en février 1966, quelques mois avant de subir la défaite lors de l'élection générale[2].
Le nouveau gouvernement de Daniel Johnson poursuit la même politique à l'égard du développement nucléaire et les travaux de construction peuvent commencer sur le site à compter de l'automne 1966. Malgré les conflits de travail qui stoppent les travaux pendant cinq mois, le réacteur CANDU-BLW de la centrale Gentilly-1 a été mis en service en novembre 1970[4].
Dès le départ, la centrale connaît sa part de problèmes. D'abord, une pénurie d'eau lourde retarde la mise en marche de la centrale de 266 mégawatts, les approvisionnements d'eau lourde étant destinés en priorité aux réacteur de Pickering[5]. Par ailleurs, Gentilly-1 est affligé de plusieurs problèmes techniques[6] et ne produit de l'électricité que pendant deux brèves périodes, totalisant 183 jours, en 1972. La centrale, qui demeure la propriété de EACL, a été mise en état de conservation en 1980 en vue de son démantèlement éventuel[4].
Gentilly-2
Article détaillé : Réacteur CANDU.Au début des années 1970, plusieurs porte-paroles du Parti québécois, notamment le député Guy Joron et le conseiller économique du parti, Jacques Parizeau, prêtent leur voix à cette opposition[3]. Dans une entrevue qu'il accorde au Devoir à l'époque, l'économiste, qui deviendra premier ministre du Québec dans les années 1990, se fait ironique. « Ce n'est pas parce qu'il y a une rivière canadienne-française et catholique qu'il faut absolument mettre un barrage dessus[3]. »
Les nouveaux grands patrons d'Hydro-Québec — dont le président Roland Giroux et les commissaires Yvon De Guise et Robert A. Boyd[7] — sont cependant solidement derrière le projet de développement du complexe hydroélectrique de la Baie-James, dans le Nord-du-Québec. Le financier Giroux soutient que les bailleurs de fonds internationaux « sont encore très méfiants vis-à-vis du nucléaire. Si on leur apporte un bon projet hydroélectrique, et celui de la Baie-James en est un, ils vont vite montrer où va leur préférence[3]. » L'ingénieur Boyd invoque l'incertitude qui plane déjà à cette époque sur l'énergie nucléaire, recommande de maintenir une certaine expertise dans ce domaine mais soutient qu'il faut « repousser cette échéance le plus loin possible[3]. »
Gentilly-2 est un réacteur CANDU-6 de 675 mégawatts, qui a été construit sur le même site à partir de 1973. Mais les circonstances changent au cours de la construction, les coûts augmentent et l'opposition du public au développement de l'énergie nucléaire s'organise[8]. Élu en novembre 1976, le gouvernement du Parti québécois publie un livre blanc sur l'énergie au printemps de 1978, qui revoit les estimations de croissance de la demande électrique à la baisse, écarte la construction d'une éventuelle centrale Gentilly-3, tout en indiquant une préférence à l'égard de la poursuite du développement hydroélectrique[9].
La nouvelle politique du gouvernement québécois n'arrête toutefois pas la construction de la centrale de Gentilly-2. Le réacteur a été mis en service commercial par Hydro-Québec le 1er octobre 1983, après une période de construction échelonnée sur 10 ans[4], soit quatre ans de plus que prévu[10]. Ce réacteur est très semblable à celui de la centrale nucléaire de Point Lepreau, situé à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de Saint-Jean au Nouveau-Brunswick, les deux centrales ayant été construites à la même période. Ce modèle de réacteur a été exporté en Corée du Sud, Argentine, Roumanie et en Chine.
Contrairement à Gentilly-1, Gentilly-2 offre un bon rendement depuis sa mise en service. Après quatre années d'exploitation à la moitié de sa puissance, la centrale produit environ 4,3 TWh d'énergie annuellement, soit 2,97 % des approvisionnements en électricité d'Hydro-Québec[11].
Sa situation géographique, lui confère une importance particulière au sein du réseau électrique québécois, puisqu'elle permet de stabiliser la tension dans les lignes qui acheminent les grandes quantités d'énergie hydroélectrique produite dans les centrales du nord du Québec[12].
Réfection
Après plusieurs années d'études, le gouvernement du Québec a annoncé, le 19 août 2008, la réfection de la centrale de Gentilly-2. L'opération de réfection nécessitera la fermeture de la centrale entre le printemps de 2011 et l'automne de 2012. Le projet, d'un coût total estimé à 1,9 milliard de dollars canadiens, prolongera la vie utile de la centrale jusqu'en 2040[13]. Les opérations de rénovation comprennent la réfection du réacteur et du groupe turbine alternateur et le remplacement des ordinateurs de contrôle. Le projet comprend aussi l'agrandissement des installations de gestion des déchets radioactifs solides, dont une première phase s’est terminée en 2008[14].
Hydro-Québec mise sur l'expérience acquise pendant la réfection de la Centrale nucléaire de la Pointe Lepreau, une centrale presque identique située au Nouveau-Brunswick et gérée par Énergie NB, pour optimiser son programme de réfection[15].
Hydro-Québec soutient que l'électricité produite à Gentilly-2 après la réfection aura un prix de revient de 7,2 cent le kilowatt-heure et que ces coûts comprennent les coûts de réfection, les frais d'exploitation durant 25 ans, le coût de démantèlement et le transfert des déchets radioactifs vers un lieu de dépôt permanent dans un lieu qui reste à être déterminé[12].
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Site web de la centrale
- Vue satellite sur WikiMapia : La centrale de Gentilly
Notes et références
- ↑ (en) Louis-Gilles Francoeur, « Un dépotoir nucléaire à Blanc-Sablon ? », dans Le Devoir, 2 juin 2009
- ↑ a , b , c , d et e (en) Robert Bothwell, Nucleus, the history of Atomic Energy of Canada, University of Toronto Press, Toronto, 1988 (ISBN 0-8020-2670-2), p. 332-339.
- ↑ a , b , c , d et e André Bolduc, Du génie au pouvoir : Robert A. Boyd, à la gouverne d'Hydro-Québec aux années glorieuses, Libre expression, Montréal, 2000, 259 p. (ISBN 2-89111-829-4).
- ↑ a , b et c Hydro-Québec, Historique des centrales Gentilly-1 et Gentilly-2, Trois-Rivières, 2002, pdf, 6 p. (ISBN 2-550-26819-9).
- ↑ Bothwell (1988), op. cit., p. 410.
- ↑ Bothwell (1988), op. cit., p. 428.
- ↑ Robert Bourassa, L'énergie du Nord : La force du Québec, Libre Expression, Montréal, 1985, 224 p. (ISBN 2-89037-252-9), p. 26.
- ↑ Bothwell (1988), op. cit., p. 433.
- ↑ Bothwell (1988), op. cit., p. 441.
- ↑ Vincent David, L'énergie au Québec, Rapport présenté au comité de l'énergie, Conseil de planification et développement du Québec, 1975, p. 23-24.
- ↑ Hydro-Québec, « Faits sur l’électricité d’Hydro-Québec : Approvisionnements énergétiques et émissions atmosphériques », 2007. Consulté le 23 mars 2009.
- ↑ a et b Dominique Forget, « Rénovation extrême », dans Québec Science, vol. 47, no 6, Mars 2009, p. 22-25 (ISSN 0021-6127).
- ↑ Gouvernement du Québec, « Réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2 - Une contribution importante à la sécurité énergétique du Québec », 19 août 2008. Consulté le 16 mars 2009
- ↑ Hydro-Québec, Rapport annuel 2008 : L'énergie de notre avenir, Montréal, avril 2009, pdf (ISBN 978-2-550-55044-0), p. 31.
- ↑ Hydro-Québec Production, « Réfection de la centrale nucléaire de Gentilly-2 ». Consulté le 18 mars 2009.
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