Censure de l'Internet en République populaire de Chine

Censure de l'Internet en République populaire de Chine

Censure de l'Internet en République populaire de Chine

L'Assemblée nationale populaire de la République populaire de Chine a voté des lois sur la censure de l'Internet. Avec ces lois, selon les FAI, le gouvernement a mis en place différents systèmes de censure, détenus par les provinces, des sociétés privées ou des associations. Ce projet a pour nom « Bouclier d'or ». Les régions administratives spéciales de Hong Kong et de Macao ayant leur propre système légal, ces lois ne s'y appliquent pas.

Concrètement, cette censure sans égal dans le monde se vérifie par certains sites totalement inaccessibles, certaines censures temporaires mais le plus souvent facilement contournables : un site anonymiseur permet en effet d'accéder à une majorité des sites bloqués.

Cependant, la censure d'Internet en Chine sur certains sujets ciblés ne saurait minimiser le reste de l'information accessible où la critique du gouvernement chinois existe bel et bien, ainsi que des sources d'informations équivalentes à la France sur le reste du monde.

La coopération active de certains acteurs occidentaux majeurs du Web comme Microsoft Live, Yahoo, Google est critiquée.

Sommaire

La Grande Muraille pare-feu de Chine

La partie pare-feu de ce système est connue à l'extérieur de la Chine continentale sous le nom de Grande Muraille pare-feu de Chine en double référence à son rôle de pare-feu réseau et à la grande muraille. Constitué de pare-feux standards sur les serveurs proxy (passerelles Internet), ce système bloque les contenus en empêchant certaines adresses IP d'être routées. Lorsque des sites particuliers sont demandés, ce système engage sélectivement une méthode d'empoisonnement DNS. Cependant le gouvernement ne peut examiner à chaque instant l'Internet entier, cette méthode est donc limitée.

Deux niveaux de blocage des serveurs extérieurs sont mis en œuvre. La plupart des serveurs sont « filtrés » ; l'internaute attend indéfiniment, comme si le site était saturé. Certains serveurs sont « bloqués » ; tout se passe comme si le site refusait la connexion. Les sites filtrés sont accessibles à travers les sites relais anonymiseurs. Pour accéder aux sites bloqués, il faut faire appel à d'autres techniques. La plupart des sites anonymiseurs commerciaux ne sont pas eux-mêmes filtrés.

La censure en images : Google.cn

La porte d'accès au web, Google, existe en deux versions : Google.com (langue chinoise) et plus récemment Google.cn. Les interfaces sont similaires et les deux sites sont accessibles de Chine, bien que Google.com ait déjà été temporairement bloqué. Le test ci-dessous, à faire soi-même, est une recherche d'images sur Tiananmen, cette place historique est aussi le symbole de la répression du mouvement pro-démocratique en 1989.

Les sites extérieurs sujets à la censure

Un grand nombre de sites situés à l'extérieur de la Chine continentale sont sujets à une censure limitée dans le temps. Il est toutefois difficile d'en donner une liste exacte car les sites peuvent être accessibles dans certaines villes, mais ne l'est pas dans d'autres.

  • Le site de Wikipédia en chinois en particulier mais aussi dans les autres langues est bloqué (malgré un bref déblocage en octobre 2006) ; le site en langue chinoise est plus difficile d'accès que les autres[1]. En réponse à Wikipédia, le moteur de recherche Chinois Baidu a lancé Baidu Baike, une sorte de Wikipédia chinois soumis au contrôle.
  • FreeBSD.org, maintenant accessible, a été bloqué par le passé (décembre 2005).
  • Le site du Falun Gong et de nombreux sites ayant pour sujet le Falun Gong
  • Le site de Reporters sans frontières
  • Le gouvernement chinois essaie d'appliquer aux blogs tenus par des Chinois sur des sites extérieurs la même politique de vigilance qu'à l'intérieur, où de nombreux blogs sont censurés[2]. Pékin souhaite ficher les blogueurs anonymes. On recense 17,5 millions de blogueurs en RPC[2].
  • Et d'une manière plus générale, tout ce qui peut remettre en cause la légitimité du PCC, les critiques contre les leaders chinois (plus sérieuses que de simples caricatures...) et les vues différentes de celles du gouvernement.

La censure des informations extérieures s'exerce généralement sur des serveurs entiers, non sur des sites spécifiques. De ce fait, des sites parfaitement étrangers aux préoccupations politiques ne sont pas accessibles en Chine. Cela vaut également pour les serveurs de blogs[3] [4]. Régulièrement, des rédacteurs de blogs ou des responsables de sites annoncent à leurs lecteurs que les censeurs chinois se sont intéressés à leur publication[5]. En dehors du phénomène de censure massive des sites dont ils n'ont pas nécessairement conscience, beaucoup ont été victimes de Great FireWall of China, un hoax qui prétendait tester si un site était accessible depuis la Chine (février 2008 : le site est fermé).

Un certain désordre règne parfois, les gestionnaires techniques appliquant à la lettre les consignes qui leur parviennent. Ainsi le site de partage d'images Flickr n'est pas censuré, mais un des serveurs d'images l'est, si bien qu'une partie seulement des images s'affiche[6]. La lecture des blogs Blogspot a été censurée jusqu'au début d'avril 2008[7], mais pas leur mise à jour, les adresses internet étant différentes[8].

Les moteurs de recherche

Un élément du système consiste à interdire certains mots sur les moteurs de recherches, qu'ils soient internationaux (Yahoo! et Google) ou nationaux comme Baidu. Une telle recherche affiche une page d'erreur et une répétition de la même recherche bloque temporairement l'IP.

D’après Reporter Sans Frontières, Pékin filtre 400 à 500 mots tabous ou sensibles comme « Tibet »[9]. La Révolution culturelle et la pornographie sont également des sujets censurés[9].

En" général, les mots interdits le sont également insérés dans une expression. Par exemple, si 法轮 (falun ou « roue de la loi ») est bloqué, alors 法轮功 (Falun gong) et 转法轮 (Zhuan Falun ou « La roue de la loi qui tourne », le titre du livre de Li Hongzhi, le fondateur du Falun gong) le sont aussi.

Les résultats des recherches ne sont pas « filtrés ». Des pages provenant de sites censurés figurent dans les réponses, mais ne sont pas accessibles pour autant. La fonction « cache » (affichage d'une copie de la page indexée, mémorisée sur le site du moteur de recherche) est toujours neutralisée.

L'auto-censure des sites en RPC

Le blocage des sites Web occidentaux n'est pas la seule mesure mise en place et bien que le gouvernement n'ait que rarement besoin d'intervenir, la possibilité de censurer les fournisseurs de contenus en Chine continentale est bien plus efficace, car le gouvernement peut saisir n'importe quel site et emprisonner ses opérateurs.

Bien que le gouvernement n'ait pas les capacités physiques et matérielles pour surveiller toutes les discussions instantanées et les forums, la simple peur d'être fermés pousse les FAI à employer leur compte d'opérateurs, surnommés « grande maman », et mettent fin aux commentaires politiquement sensibles et les suppriment.

Cependant, certains FAI ont adopté des stratégies différentes : l'une d'entre elles est de laisser les contenus politiquement sensibles et de les retirer uniquement sur ordre du gouvernement. Ainsi ils restent visibles pendant quelques heures, rendant leur lecture possible pendant quelque temps. Lorsque le commentaire est supprimé, l'information est en réalité déjà publique. Un exemple significatif est l'explosion d'une école en 2001 : les autorités locales voulaient supprimer l'information que les feux d'artifices artisanaux responsables de l'accident avaient été fabriqués par des enfants. Pendant le temps nécessaire aux officiels locaux pour exiger la suppression de la mention, la nouvelle avait déjà été largement répandue.

Par ailleurs, les sites remplacent souvent les contenus censurés par des blancs, permettant ainsi au lecteur de s'en rendre compte et souvent de deviner ce qu'ils étaient.

L'organisation de la censure

La police de l'Internet comprend entre 30 000 et 40 000 agents en Chine[10]. Ils sont assistés d'environ 280.000 honkers chargés d'orienter les débats dans les forums et, le cas échéant, de dénoncer les internautes s'éloignant trop de la ligne officielle[11].

À l'approche des JO de Pékin 2008, chaque jour, 20 000 et 30 000 cyberpoliciers surveillent, bloquent et censurent l'Internet.[12] Toujours pour les JO, à Pékin, 300 000 miliciens bénévoles sont mobilisés dans un objectif de surveillance et de délation.[13] Selon Reporters sans frontières, 52 cyberdissidents sont emprisonnés pour avoir révélé des « secrets d'État[10]. » Les bannissements de sites paraissent le plus souvent non coordonnés et événementiels, avec des sites bloqués et d'autres aux contenus similaires autorisés. Les blocages sont souvent durcis pour des occasions spéciales. Un exemple est le New York Times qui a été débloqué quand les journalistes ont demandé dans un entretien à Jiang Zemin, les raisons du blocage, celui-ci a répondu qu'il allait s'en occuper. Durant un sommet de la Coopération Économique Asie-Pacifique à Shanghai en 2001, les médias normalement bloqués comme CNN, NBC et le Washington Post sont devenus accessibles. Depuis 2001, le contrôle des contenus a été grandement assoupli à une base permanente, et les trois sites précédemment cités sont désormais accessibles de Chine continentale. En fait, la plupart des sites web d'informations sont accessibles, bien qu'un petit nombre (dont la BBC) soit toujours bloqué.

Le blog en français de Pierre Haski édité depuis la France a même été censuré par les cyberpoliciers chinois.[14]

Les agences de Chine continentale publient souvent des règlements sur l'Internet, mais ils sont souvent non mis en vigueur ou ignorés. Un des problèmes majeurs de la mise en vigueur est la détermination de la juridiction compétente. Il en résulte beaucoup de conflits bureaucratiques entre plusieurs ministères et les bureaux du central et locaux. L'organe d'information du Conseil d'État est mandaté pour réguler l'Internet mais beaucoup d'agences de sécurité de Chine continentale le sont aussi.

Plusieurs universitaires ont relevé que la vitesse à laquelle le gouvernement sort des nouveaux règlements sur l'Internet est le symptôme de leur inefficacité. En effet ces nouveaux règlements ne font jamais référence aux anciens, qui apparaissent oubliés.

L'aide technique des sociétés étrangères à la censure

Un sujet de controverse est la légitimité de la fourniture par des sociétés étrangères, d'équipements contribuant à la censure en RPC. D'une part il est clairement malsain que des entreprises s'enrichissent grâce à la censure. Mais d'autre part les équipements fournis par des sociétés comme l'américain Cisco Systems sont des infrastructures Internet standards qui aident le flux d'information. Sans ces équipements, le gouvernement n'aurait pu développer autant l'Internet.

Cependant, des organisations de défense des Droits de l'Homme comme Human Rights Watch, de médias comme Reporters sans frontières font remarquer que si ces entreprises arrêtaient leur aide technique à la censure, son efficacité en serait d'autant diminuée.

Une situation semblable concerne les fournisseurs de contenus comme Yahoo!, AOL et Google qui obéissent aux exigences du gouvernement, incluant des moniteurs internes, dans le but d'être autorisés à opérer en Chine continentale. Ainsi, en respect des lois, Microsoft a commencé à censurer les blogs MSN Spaces.

En revanche, les sites pouvant aider à contourner la censure, comme Freenet et Peek-a-Booty sont bloqués.

La responsabilité des entreprises

La collaboration avec les autorités par ces multinationales pour censurer l'Internet n'est pas appréciée par tout le monde. De nombreuses critiques se portent à leur encontre, notamment Google, ou Yahoo.

Le 7 novembre 2005, une alliance d'investisseurs et de chercheurs représentant 36 sociétés aux États-Unis, en Europe et en Australie et au total 21 milliards de dollars de chiffre d'affaires ont incité le monde des affaires à protéger la liberté d'expression et ont mis en place une surveillance des sociétés faisant des affaires dans les pays violant les Droits de l'Homme, comme la Chine.

Le 21 décembre 2005, l'ONU, l'OSCE, OEA ont mandaté spécialement sur la liberté d'expression des entreprises Internet pour « [...] travailler ensemble [...] pour résister aux tentatives d'officiels de contrôler ou restreindre l'usage d'Internet. »[15]

Contournements par les internautes

Les dix animaux mythiques de Baidu, au départ des canulars rigolos que des internautes ont mis sur Baidu Baike, l'encyclopedie chinois, sont devenus des mèmes très répandus en Chine.[16],[17] Ces dix canulars furent crées en reponse à la censure accrue et draconienne sur la toile chinoise, et sont devenus des icônes de l'opposition des internautes à la censure politique.[18],[19]

L'utilisation de proxy situés à l'étranger permet aux internautes d'accéder aux contenus censurés en RPC[20]. La pratique est répandu, au moins chez les jeunes à l'aise en informatique. Par exemple, lors du parcours de la Flamme en 2008 à Paris, les manifestations tibétaines ont été censurés par la télévision chinoise. Cependant les internautes chinois ont eu rapidement accès aux images censurés, ce qui a déclenché les boycotts anti-francais. [21].

Références

  1. Le 2 avril 2008, Wikipedia est accessible, à l'exception de la langue chinoise qui reste censuré au même niveau élevé. Constaté sur un abonnement internet de simple particulier.
  2. a  et b Pascale Nivelle, « Pékin muselle ses blogs », dans Libération du 25/10/2006, [lire en ligne]
  3. Le 15 février 2008, étaient censurés, entre autres : blogspot, hautetfort, livejournal, over-blog, wordpress.
  4. Le 1e avril 2008, blogspot et wordpress sont accessibles. Les autres serveurs de blog cités par la note précédente restent censurés.
  5. Le site des Verts, parti politique français. Le site est accessible en Chine, ainsi tous ceux qui sont cités sur la page.
  6. Flickr: Voir les photos sur le thème du crépuscule. Les images provenant de farm1.static.flickr.com ne sont pas visibles en Chine ; celles provenant de farm3.static.flickr.com sont visibles.
  7. Accès libre constaté à Tianjin sur un abonnement internet de simple particulier le 2 avril 2008
  8. Lecture: (nom du blog=)blogspot.com ; mise à jour www.blogger.com
  9. a  et b Pascale Nivelle, « À Pékin, les JO se rapprochent, pas les libertés », dans Libération du 11-04-2008, [lire en ligne]
  10. a  et b Sylvie Kauffmann, Martine Jacot, Brice Pedroletti, « La censure sur Internet : Etats contre cyberdissidents », dans Le Monde du 29/08/2007, [lire en ligne]
  11. Chine : les bons petits soldats d'Internet - Le Monde -06/08/2008
  12. Chine : LaGrandecensure.com
  13. À Pékin, les policières à petits pieds surveillent les étrangers chevelus
  14. Comment les dictateurs chinois maîtrisent le Web
  15. (en) [pdf] International Mechanisms for Promoting Freedom of Expression.
  16. (zh)【贴图】百度十大神兽_水能载舟亦能煮粥
  17. (zh)Les saisis canulars des bêtes légendaires et obscènes dans un dictionnaire
  18. (en)Wines, Michael : Un jeu de mots agite les censeurs du net chinois, New York Times (11 March 2009). Consulté le 12 mars 2009.
  19. (en)Bobbie Johnson, La vérité sur la Chine et ses jeux de mots vulgaires, The Guardian, 13 mars 2009
  20. China Daily vol 29 No 9142 « Chinese netizens have been using proxy servers to access the information blocked by the governement for a long time, FOE is just more a convenient tool » Hu Yong, à propos de la nouvelle technologie développé par les états-unis « Feed Over Email »
  21. RSF affirmait le contraire Chine - Rapport annuel 2008, RSF, 2008. Le sinologue Jean-Luc Domenach affirme que le président de RSF ment : les internautes sont plus main que la police, la population chinoise a bien vu les manifestations pro-tibétaines à Paris et elle en a été très remontée. Jean-Luc Domenach, sinologue: « À Pékin, on trouve des T-shirts pour la Corse libre

Voir aussi

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