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Carmen de Hastingae Proelio
Le Carmen de Hastingae Proelio (Chanson de la bataille d'Hastings) est le nom donné à un poème en latin racontant la conquête normande de l'Angleterre, et qui a été longtemps identifié comme étant le poème perdu écrit par Guy[1], évêque d'Amiens, et mentionné par le chroniqueur Orderic Vital. Il a été découvert en 1826 par Georg Heinrich Pertz dans un manuscrit daté d'environ 1100, et est aujourd'hui conservé à la bibliothèque royale de Belgique.
Description
Le poème, dont le ton suggère un exercice littéraire, débute avec une description de la flotte du duc ancrée à Saint-Valery-sur-Somme et attendant le vent favorable (septembre 1066). Il se termine avec le couronnement à Westminster de Mathilde de Flandre (décembre 1066). La description de la bataille d'Hastings occupe un tiers de l'œuvre environ. Il décrit plusieurs scènes qui ne sont rapportées dans aucune des sources contemporaines, comme la provocation du jongleur Taillefer devant les Anglais, les quatre meurtriers d'Harold, le rôle de négociateur d'Ansgard[2] dans le siège de Londres, la présence d'Apuliens, de Calabrais et de Siciliens[3] à la bataille.
Il est composé de 835 lignes de pentamètres et d'hexamètres, et il manque la fin. Il a été publié pour la première fois par Henry Petrie en Angleterre, et par Francisque Michel en France dans les années 1840.
Controverse sur l'origine de l'œuvre
Dans un premier temps, ce poème a été identifié comme étant celui de Guy, évêque d'Amiens de 1058 à 1075. L'existence de ce poème est mentionnée par le chroniqueur Orderic Vital dans son Historia ecclesiastica :
- « Gui, évêque d'Amiens, composa un poème métrique, dans lequel, à l'imitation de Virgile et de Stace, qui chantèrent les exploits des héros, il fit la description de la bataille de Senlac[4], blâmant et condamnant Harold, mais louant beaucoup et glorifiant Guillaume[5] ».
- « [Mathilde de Flandre] passa la mer avec un grand concours d'hommes et de femmes nobles [pour se faire couronner reine d'Angleterre en 1068]. Parmi les clercs qui remplissaient auprès d'elle les fonctions du culte divin, on remarquait le célèbre Guy, évêque d'Amiens, qui déjà avait mis en vers le récit de la bataille d'Harold contre Guillaume[6] ».
En 1944, G. H. White argumenta que ce poème n'est pas une source originale, mais probablement un travail réalisé à partir de sources du XIIe siècle. Cette vision fut un temps acceptée, mais Sten Körner puis Frank Barlow rejetèrent cette vision à la fin des années 60, et conclurent que l'œuvre était la source la plus ancienne existante sur le sujet, plus complète que le Gesta Normannorum Ducum de Guillaume de Jumièges, plus honnête et plus fiable que le Gesta Guillelmi de Guillaume de Poitiers, et qu'elle était plus explicite que la Tapisserie de Bayeux.
En 1978, R. H. C. Davis rappela qu'Orderic Vital avait mentionné son utilisation du poème de Guy d'Amiens et du Gesta Guillelmi de Guillaume de Poitiers comme sources pour son œuvre. Pourtant, Vital n'utilise rien du Carmen de Hastingae Proelio qui ne soit déjà présent dans le Gesta Guillelmi de Guillaume de Poitiers. Davis argumente qu'il est étrange que Vital ne reprenne pas les scènes inédites contenues dans le Carmen, et qu'il les aurait rapportés sans aucun doute s'il en avait eu la connaissance. Davis, s'appuyant sur d'autres incohérences, conclut que ce poème est un exercice littéraire écrit dans une école du nord de la France ou du sud de la Flandre, entre 1125 et 1140, et qu'il n'a par conséquent rien à voir avec le poème de Guy d'Amiens.
La controverse sur le sujet est toujours d'actualité.
Voir aussi
Notes et références
- ↑ Fils d'Enguerrand Ier, comte de Ponthieu
- ↑ Ancêtre de la famille de Mandeville en Angleterre.
- ↑ La Sicile n'était pas encore sous domination normande en 1066. Il s'agit d'un élément parmi d'autres qui font penser que ce poème a été écrit après 1125.
- ↑ Nom sous lequel Vital désigne la bataille d'Hastings. Il aurait emprunté le terme à Gui d'Amiens.
- ↑ Orderic Vital, Histoire de la Normandie, Éd. Guizot, 1826, tome 2, livre III, p.151-152.
- ↑ Orderic Vital, ibid, tome 2, livre IV, p. 173.
Sources
- R. H. C. Davis, « The Carmen de Hastingae Proelio », dans The English Historical Review, vol. 93, n° 367 (1978), p. 241-261.
Bibliographie
- The Carmen de Hastingae Proelio of Guy Bishop of Amiens, édité par Catherine Morton et Hope Muntz, Oxford at the Clarendon Press, 1972.
- The Carmen de Hastingae Proelio of Guy Bishop of Amiens, édité et traduit par Frank Barlow, Clarendon Press, 1999.
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