- L'Os de chagrin
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L'Os de chagrin (en russe : Шагреневая Кость), opus 37-38 (1990) – est un grand ballet (en trois actes) et opéra-entracte du compositeur russe Youri Khanon[1]. Son libretto a été écrit par Khanon même d’après le roman de Balzac La Peau de chagrin.
Historique
L’Os de chagrin a été composé en 1990 sur la commande du Théâtre de l’opéra Maly de Léningrad (Théâtre impérial Michel, aujourd’hui Théâtre Michel). L’opéra est basé entièrement sur les dialogues de Pauline et Raphaël, issus de la nouvelle de Balzac.
En 1992 un film-opéra d'avant-garde L’Os de chagrin (Chagrenevaia Kost) a été tourné par le Studio des films documentaires de Saint-Pétersbourg (comprenant des éléments du film documentaire et pseudo-documentaire) avec Youri Khanon dans le rôle principal.
Le grand ballet en trois actes L’Os de chagrin est écrit dans le genre du « ballet classique tendancieux » ou bien du « ballet aux commentaires ». Paradoxalement, c’étaient le Don Quichotte de Minkus et Parade de Satie qui ont servi de référence pour compositeur[2].
« Parade de Satie a été pour moi le point de départ. ...De la première page de la partition «L’Os de chagrin» luisent les mots impérissables : «Dédié à Erik Satie, père, camarade, communiste». L’opéra-ballet exécuté entre le deuxième et le troisième actes a également été inspiré de la «musique d’ameublement» de Satie. Comme l’annonce un chanteur, les spectateurs peuvent «se promener et manger de la viande», tandis qu’un spectacle vériste se développe sur scène, dédié aux rapports entre les amants, Pauline et Raphaël. A chaque fois que les passions sont surchauffées, suit un dance rocaille impassiblement calme : menuetto, passe-pied, bourrée. Cela continue jusqu’à la mort du héros et de l’auteur. Selon Balzac ils meurent de la toux, ce qui est très scénique[2]. »
Travaillant sur le libretto Youri Khanon a particulièrement remarqué à quel point « hâtivement et négligemment ce roman a été écrit ». Partout dans le texte on sent comment Balzac était pressé pour achever à temps. Sous la poussée des créanciers il a déployé une activité tellement intense, qu’il s’est mis dans un état d’une fatigue nerveuse. Le roman a gardé des empreintes de cette fatigue nerveuse, de l’activité intense et de la poussée des créanciers, ce qui lui donne une sorte de tension vaine. En regardant Balzac, l’auteur a décidé que le ballet L’Os de chagrin doit être la fête de la réduction de la vie[2]. Dès que le rideau se lève une ligne de Destinée (Ligne de Sterne) apparait, énorme et ossifiée[3].
Compositeur et auteur de libretto, Youri Khanon a créé un spectacle achevé qui présente un résumé, un « produit concentré » de la langue chorégraphique formelle. Son but est de montrer sur scène non seulement un ballet mais aussi « un ballet sur le ballet ». Le genre du spectacle a été défini par l’auteur comme « ballet d'arrière-garde ». C’est un renvoi au passé, tout en gardant l’odeur d’aujourd’hui[4].
— Comment est-il arrivé que la peau de chagrin ait pris la forme d’un « os » ? C’est la question qui se pose souvent. On peut répondre très facilement. Par exemple de cette façon : combien d’années sont passées depuis lors ? Tout ce qui ne se décompose pas, s'ossifie et puis se pétrifie. Dans le texte du roman le jardinier Vanière examine avec surprise un morceau de la peau de chagrin, après l’avoir trouvé dans le puits, et dit : « sec comme du bois, et point gras du tout ». Ainsi l’œuvre dans son ensemble illustre l'idée de l’ossification avec le temps de toute culture, y compris du ballet classique.
L’Os de chagrin est en quelque sorte le "reset" (le rejet) de la culture de ballet, cette dernière étant prise entre parenthèses et présentée sur scène avec celles-là. Soumis aux lois de ballet, il démontre toute une absurdité de la structure de ballet comme tel et de ses formes les plus osseuses et sclérosées[5]... Compositeur semble se lever de la fosse d'orchestre et jeter à la face des spectateurs des os, c'est-à-dire des clichés de ballet – des grands pas, des fouettés, des variations, des adages. Pourtant il en résulte un beau ballet romantique, mise en scène deux fois : le ballet tel quel, avec son allégresse dénuée de sens et son caractère conventionnel, et celui-ci pris entre parenthèses de notre époque et de l’attitude de l’auteur. C’est une des raisons à changer le nom du roman... Il a du y avoir d’autres raisons – solides, secs et fermes – du remplacement de la peau par « l’Os »[5].
L’attitude novatrice et excentrique de l’auteur a eu une résonance dans le milieu d’avant-garde. Par exemple, le premier numéro de la nouvelle revue littéraire Endroit de la presse (Mesto Petchati) commençait, comme par manifeste, par un essai L’Os de chagrin , qui consistait à un fragment de libretto du premier acte du ballet[3].
Notes et références
- [1] // Grove Dictionary of Music and Musicians, 2001. (en)
- (ru) Larissa Ussipova, «Iskhodnaya posicia» («Position de départ») dans la revue Sovietsky Ballet (Ballet Sovietique) Moscou, №1 – 1991, pр.48-49. ISSN 0207-4788,
- Moscou, St.-Pétersbourg, ed.Obscuri viri, ISBN 5-87852-007-9 tirage 5000 exemplaires, (ru) La revue des arts Mesto Petchati (Endroit de la presse), pp. 9-11, 1992,
- (ru) « Ballet d’avant-garde » dans le journal Tanets (Danse), №1-2, janvier 1991, p.3,
- (ru) Irina Morozova, «Vector zhit» («Vecteur à vivre») dans la revue Theatralnaya zhizn (La Vie de théâtre), Moscou, №12-1990, pp. 12-13.
Liens
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