- Howiesons Poort
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Le Howiesons Poort (ou HP) est l'un des faciès lithiques préhistoriques du Middle Stone Age d'Afrique australe. Il doit son nom au site archéologique de Howieson’s Poort, un abri-sous-roche proche de Grahamstown en Afrique du Sud[1]. Une étude publiée en 2008 indique qu'il a duré environ 5 000 ans, entre approximativement 65 000 et 59 500 ans BP[2].
Les humains de cette période comme les auteurs de la culture Stillbay qui précède ont abandonné des vestiges indiquant leur capacité au symbolisme[3] et leur aptitude à se livrer à des échanges culturels de dons[4].
Le Howiesons Poort est caractérisé par des outils présentant un certain nombre de caractéristiques de ceux du Paléolithique supérieur, période qui ne débutera que 25 000 ans plus tard, vers 40 000 ans BP. Le Howiesons Poort a été décrit comme un faciès culturel « à la fois "moderne" et "non moderne" »[5]. Il est présent dans de nombreux sites sud-africains mais aussi en Namibie et au Zimbabwe.
Sommaire
Historique
Les vestiges lithiques du Howiesons Poort ont été décrits dès 1927 par P. Stapleton, un jésuite enseignant au St Aidan's College, et par John Hewitt, zoologiste et directeur du musée d'Albany[6],[7].
Le nom du faciès a été proposé par A.J.H. Goodwin et Clarence van Riet Lowe in 1929 pour désigner des vestiges qu'ils avaient découverts[8]. Jusqu'aux années 1970, le Howiesons Poort était considéré comme une variante du Magosien, et donc comme intermédiaire chronologiquement et technologiquement entre le Middle Stone Age et le Later Stone Age.
Chronologie
Les avancées en matière de méthodes de datation (optically stimulated luminescence) ont permis de déterminer que le Howiesons Poort débutait vers 64,8 ka BP et finissait vers 59,5 ka BP, soit une durée d'environ 5,3 ka[2]. Ces dates correspondent au stade isotopique 4, un épisode aride marqué par une baisse du niveau marin en Afrique australe[9].
Dans la séquence du Middle Stone Age sud-africain, le Howiesons Poort succède au Stillbay après un hiatus de 7 000 ans[2].
Technologie
Le Howiesons Poort est caractérisé par différents types d'outils. Les plus notables correspondent à des éléments issus d'armes composites. Ces pièces sont parfois appelées segments, croissants ou microlithes. Ils consistent en des segments géométriques de lames qui étaient emmanchés sur des hampes de projectiles à l'aide d'un adhésif composé d'ocre chauffée et de résine végétale[10]. Des résidus organiques préservés à l'extrémité de ces outils montrent non seulement qu'ils étaient emmanchés, mais aussi qu'ils étaient utilisés comme éléments d'armes de chasse[11].
Les niveaux du Howiesons Poort de la grotte de Sibudu ont livré la plus ancienne pointe de projectile en os[12]. La présence d'un pourcentage élevé d'ossements de petite antilope (céphalophe bleu) a été interprété comme une preuve de l'utilisation de pièges[13].
À l'Howiesons Poort, les roches à grain fin telles que la silcrète et le quartz (?Le quartz n'est pas une roche?) constituent une part plus importante des vestiges que dans les industries du Paléolithique ancien ou du Later Stone Age[4]. Les outils du Howiesons Poort ne semblent pas très éloignés par leur forme de ceux du Later Stone Age, notamment ceux du Wilton ; ils sont toutefois plus grands que ceux du LSA mais plus petits que les outils sur éclats et sur lames caractéristiques des autres faciès du Middle Stone Age[4]. Ils ont d'ailleurs été décrits comme « pleinement "Paléolithique supérieur" dans pratiquement tous les sens technologiques et typologiques »[14]. Les industries du Howiesons Poort semblent constituer une anomalie non seulement par leur apparition très ancienne mais aussi parce qu'elles sont suivies par des industries du Middle Stone Age très similaires à celles qui précèdent le Howiesons Poort. Ce changement semble graduel[5].
Symbolisme
Comme le Stillbay qui précède, le Howiesons Poort est caractérisé par des vestiges témoignant d'une pensée symbolique, tels que des blocs d'ocre gravés ou des perles en coquille d'œuf d'autruche et en coquillage[3]. L'utilisation de l'ocre est particulièrement fréquente et diversifiée, ce qui a été interprété comme le reflet d'une culture symbolique d'une complexité croissante[3].
Il a été noté que « L'ocre n'était pas seulement collectée et ramenée au site mais [qu'] il existe des preuves de son utilisation sous forme de poudre grâce à la découverte de crayons en ocre présentant des facettes polies. L'ocre a pu avoir de nombreux usages mais il est possible qu'elle ait été utilisée pour des peintures corporelles, et donc qu'elle ait eu une fonction symbolique »[15].
Disparition
La fin du Howiesons Poort a suscité un certain nombre de questions. Lyn Wadley a noté par exemple que « si la production de lames à dos du Howiesons Poort était un marqueur important de la modernité comportementale, il est difficile d'expliquer pourquoi elle aurait duré plus de 20 000 ans avant d'être remplacée par une technologie "pré-moderne" ? »[16].
Il a été suggéré que les lames à dos jouaient un rôle lors d'échanges de cadeaux sous forme d'équipements de chasse ; ces échanges auraient cessé avec un changement culturelle et la fabrication de ces outils auraient alors été stoppée. Cette idée était appuyée par le fait que le transport de matières premières sur de longues distances (que ce type d'échanges aurait encouragé) est réduit après le Howiesons Poort[4],[17].
Il est peu probable que la fin du Howiesons Poort soit liée à un changement climatique dans la mesure où elle ne semble pas corrélée à un tel événement[2]. Selon Z. Jacobs et ses collègues, « Même si la fin du Howiesons Poort est survenue durant une période de radoucissement climatique, cela est également le cas pour le MSA récent et le MSA final à Sibudu. Le Stillbay et le post-Howiesons Poort ne peuvent être corrélés de manière fiable à un épisode tempéré ou frais. En conséquence, il est impossible d'identifier une tendance climatique particulière qui soit associée de façon significative et spécifique à une industrie du MSA. Le Stillbay coïncide approximativement avec la super-éruption du volcan Toba et avec la fin des grandes sécheresses en Afrique tropicale, tandis que le Howiesons Poort n'est associé à aucun événement connu de ce genre. Les facteurs environnementaux peuvent avoir été responsables de l'occupation épisodique et de l'abandon d'abris-sou-roche, mais n'ont pas nécessairement été la force induisant les changements technologiques… La cause de ces deux explosions d'innovation technologique, proches et pourtant séparées dans le temps, reste une énigme, tout comme la raison de leur disparition. Bizarrement, toutes deux sont contemporaines du goulot d'étranglement génétique survenu entre 80 et 60 ka et des expansions des populations humaines modernes qui ont suivi, en Afrique et hors d'Afrique »[2].
Sites
- Afrique du Sud[15]
- grottes de Klasies River[18]
- abri de Howieson’s Poort
- grotte de Sibudu Cave
- Peers Cave
- Diepkloof
- Nelson Bay
- Boomplas
- Border Cave
- Umhlatuzana
- Rose Cottage Cave
- Cave of Hearths
- Sehonghong, Moshebi's Shelter /Ntloana Tsoana
- Montagu
- Namibie[15]
- Apollo 11
- Aar l
- Bremen IC
- Haalenberg
- Pockenbanck
- Zimbabwe[15]
- Matopos : Nswatugi
Citations
- Symbolisme
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La chaîne d'opération suivie lors de la fabrication des outils à dos du Howiesons Poort va au-delà de ce qui est nécessaire pour des activités purement fonctionnelles
Sarah Wurz[15]
- Relations avec le Later Stone Age
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Le Howiesons Poort était une industrie très originale et innovante ; mais elle n'a pas perduré et n'est pas à l'origine du LSA. En un sens, elle était à la fois "moderne" et "non-moderne". C'est en cela qu'elle est intéressante.
Sylvain Soriano, Paola Villa et Lyn Wadley[5]p. 700
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Le Howiesons Poort ne peut plus être considéré comme le produit d'une "influence néo-anthropique" émanant d'Europe mais il serait tout aussi erroné de voir le Howiesons Poort comme une anticipation précoce du Paléolithique supérieur.
Sarah Wurz[15]
Références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Howiesons Poort » (voir la liste des auteurs)
- J. Deacon, « An Unsolved Mystery at the Howieson's Poort », dans South African Archaeological Bulletin, vol. 50, no 162, 1995, p. 110–120 [texte intégral, lien DOI]
- Z. Jacobs, « Ages for the Middle Stone Age of southern Africa: implications for human behavior and dispersal », dans Science, vol. 322, no 5902, 2008, p. 733–5 [lien PMID, lien DOI]
- I. Watts, « Ochre in the Middle Stone Age of southern Africa: ritualized display or hide preservative? », dans S. Afr. Archaeol. Bull., vol. 57, no 175, 2002, p. 64–74 [texte intégral]
- S.H. Ambrose, « Howiesons Poort lithic raw material procurement patterns and the evolution of modern human behavior: a response to Minichillo (2006). », dans Journal of Human Evolution, vol. 50, no 3, 2006, p. 365–9 [lien PMID, lien DOI]
- S Soriano, « Blade technology and tool forms in the Middle Stone Age of South Africa: the Howiesons Poort and post-Howiesons Poort at Rose Cottage Cave », dans Journal of Archaeological Science, vol. 34, 2007, p. 681–703 [lien DOI]
- P Stapleton, « Stone implements from a Rock-Shelter at Howieson's Poort near Grahamstown », dans S. Afr. J. Sci., vol. 24, 1927, p. 574–587
- P. Stapleton, « Stone implements from a Howieson's Poort, near Grahamstown », dans S. Afr. J. Sci., vol. 25, 1928, p. 399–409
- Goodwin A.J.H. et van Riet Lowe C. (1929). The Stone Age cultures of South Africa. Annals of the South African Museum, 27.
- J.K. Feathers, « Luminescence dating in less than ideal conditions: case studies from Klasies River main site and Duinefontein », dans South Africa. J. Archaeol. Sci., vol. 29, 2002, p. 177–194 [lien DOI]
- Wadley, L.; Hodgskiss, T.; Grant, M., « From the Cover: Implications for complex cognition from the hafting of tools with compound adhesives in the Middle Stone Age, South Africa. », dans Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 106, no 24, juin 2009, p. 9590–4 (ISSN 0027-8424) [lien PMID, lien DOI]
- M. Lombard, « Finding resolution for the Howiesons Poort through the microscope: micro-residue analysis of segments from Sibudu Cave, South Africa », dans Journal of Archaeological Science, vol. 35, 2008, p. 26–41 [lien DOI]
- L. Backwell, « Middle Stone Age bone tools from the Howiesons Poort layers, Sibudu Cave, South Africa », dans Journal of Archaeological Science, vol. 35, 2008, p. 1566–1580 [lien DOI]
- J.L. Clark, « Animal exploitation strategies during the South African Middle Stone Age: Howiesons Poort and post-Howiesons Poort fauna from Sibudu Cave. », dans Journal of human evolution, vol. 54, no 6, 2008, p. 886–98 [lien PMID, lien DOI]
- L.B. Vishnyatsky, « 'Running ahead of time' in the development of Palaeolithic industries », dans Antiquity, vol. 68, 1994, p. 134–140 [texte intégral]
- S. Wurz, « The Howiesons Poort Backed Artefacts from Klasies River: An Argument for Symbolic Behaviour Author(s) », dans South African Archaeological Bulletin, vol. 54, no 169, 1999, p. 38–50 [texte intégral, lien DOI]
- L. Wadley, « What is Cultural Modernity? A General View and a South African Perspective from Rose Cottage Cave », dans Cambridge Archaeological Journal, vol. 11, no 2, 2001, p. 201–221 [lien DOI] (p. 203)
- H.J. Deacon, « Southern Africa and modern human origins », dans Philos. Trans. R. Soc. Lond. B. Biol. Sci., vol. 337, no 1280, 1992, p. 177–83 [lien PMID, lien DOI]
- (en) R. Singer et J. Wymer, The Middle Stone Age at Klasies River Mouth in South Africa, Chicago, The University of Chicago Press, 1982, Hardback (ISBN 978-0-226-76103-9) (LCCN 81016081)
- Afrique du Sud[15]
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