Histoire de la construction

Histoire de la construction

La construction et ses acteurs à travers les âges, en France et dans le monde.

Sommaire

Au néolithique

Une maison d'hiver eskimo à Plover Bay (Provideniya), district de Tchoukotka, en Russie, photographié par Edward S Curtis, membre de l'expédition Harriman en Alaska en 1899. La structure des murs est constituée d'os de baleine et remplie de tourbe et de mousse; le toit est couvert de peaux de morses

Le bois, le feuillage et les peaux d'animaux furent les premiers constituants de l'architecture naissante des pays tempérés. Pour les régions du globe où la végétation est rare, ainsi pour la plupart des rivages méditerranéens, ce fut l'argile qui fut le matériau le plus utilisé. Il est intéressant de retrouver ensuite l'argile et le bois associés, dans une architecture plus mûre, constituant les structures dites à maison à pans de bois[1]

L'argile

Les premières cités découvertes dans l'ancienne Mésopotamie étaient construites en terre crue, avant même l'invention de l'écriture. Malheureusement ce matériau se dégrade plus rapidement que la pierre, et il existe donc peu de vestiges aussi marquants que les pyramides d'Égypte. Ainsi le Moyen-Orient et l'Asie centrale comptent de nombreux sites exceptionnels tels que Tchoga Zanbil (Iran), Mari (Syrie), Shibam (Yémen) ou Merv (Turkménistan).

Beaucoup de techniques utilisées dans les temps anciens se retrouvent encore pratiquées en France au XVIIIe siècle et jusqu'à nos jours: Le torchis, la bauge, le pisé, les briques en terre crue (adobe).

La chaux

Article détaillé : Chaux (matière)#Histoire.

La Grèce antique

Architekton

Article détaillé : Architecte.
Ordre dorique: -[1] tympan du fronton -[2] acrotère -[3] cimaise (du fronton) -[4] geison -[5] mutule -[7] frise -[8] triglyphe -[9] métope -[10] regula -[11] goutte -[12] larmier -[13] architrave -[14] chapiteau -[15] abaque -[16] échine -[17] colonne -[18] cannelure -[19] stylobate

La première mention connue du mot architecte, αρχιτεκτων (αρχι-archi, chef de - et de τεκτων - tekton, charpentier.), apparaît au Ve siècle av. J.‑C. dans le livre d'Hérodote, Histoires (3, 60) décrivant le tunnel de Samos: « l'architecte chargé de ce travail fut le Mégarien Eupalinos, fils de Naustrophos »[2]. Hérodote utilise ce mot pour le constructeur du pont de bateaux permettant de franchir l'Hellespont en -513 (Histoires 4,88): "Darius Ier fut très satisfait de ce pont de bateaux et récompensa richement son architecte, Mandroclès de Samos". Pour Hérodote, le mot architecte donné à Eupalinos qui est un des "auteurs des trois plus grands ouvrages que possède la Grèce" ou à Mandroclès de Samos n'a pas pour lui le sens qu'il a pris aujourd'hui, c'est plus un technicien de la construction ou un ingénieur.

Il est possible que ce mot ait été utilisé parce que les premiers temples étaient construits en bois. C'est au VIIe siècle avant J.-C. que ce fait la transition entre construction en bois des temples vers la construction en maçonnerie[3]. Quand Pausanias visite l'Héraion d'Olympie au IIe siècle, il y voit encore certaines colonnes en bois.

L'architecture religieuse grecque est codifiée, et se base sur des règles de proportion arithmétiques. Les ordres architecturaux, organisent les proportions, les formes et l'ornementation de toute partie construite. Les grecs ne reconnaissaient que trois ordres: l’ordre dorique, l’ordre ionique et l’ordre corinthien.

Cette manière de composer l'architecture trouvera à resurgir à toutes les époques de l'histoire. Les architectes n'auront de cesse de se revendiquer de la grèce classique: les romains ajoutent l’ordre toscan et l’ordre composite. Le De architectura (Livres III et IV) de Vitruve, architecte romain du Ier siècle av. J.‑C., seul livre majeur qu’il reste sur l’architecture de l’Antiquité classique, définit la théorie des trois ordres (ionique, dorique, corinthien. Vitruve sera la grande référence des architectes pour qualifier le renouveau du recours à des formes antiques, à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, jusqu'en 1850 environ.

Originairement en bois, recouverts d'argile cuite peinte de couleurs vives, destinée à protéger le bois, les temples qui procèdent de la maison grecque (puisque le temple est la maison des dieux) seront progressivement construits en marbre (dans les Cyclades) ou en calcaire gris coquillé (dans le Péloponnèse) accédant ainsi à une dimension monumentale. Dans cette nouvelle architecture, toute de pierre constituée, charpente comprise, les éléments fonctionnels tels métopes et triglyphes de la frise dorique qui étaient à l'origine des plaques de terre cuite qui protégeaient de l'humidité la charpente en bois, accèdent à une valeur purement décorative. Même chose les annelets des colonnes, qui à l'origine étaient les cerclages des colonnes en bois[4].

Le temple est couvert de tuiles, corinthiennes ou laconienne, rectilignes ou curvilignes, enterre cuite ou en pierre, entre 60cm et 1 m, estampillée de dates de lettres ou de destination. Selon l'auteur grec Pausanias, l'inventeur des tuiles en marbre est un certain Byzès de Naxos[5].

Un soin particulier est accordé aux charpentes renforcées parce que supportant des tuile en pierre. Elles sont en pin de Macédoine, en chêne du Péloponnèse en cèdre ou en cyprès issu de la région de Sicyone ou même d’Égypte. Les charpentiers tous comme les peintres et sculpteurs sont itinérants[5]. Contrairement à l'image de marbre blanc que nous a laissé l'usure du temps, les temples grecs étaient peints. Une coloration canonique se met en place: les lignes horizontales sont en rouge, les verticales en bleu ou en bleu-noir, les fûts de colonnes restent clairs[5]..

Périclès et le Parthénon

Façade ouest du Parthénon, -449 à -438
Érechthéion, détail

Suite à ses victoires sur les perses au cours des guerres médiques, Athènes devient la puissance dominante du monde grec durant toute la période du Ve siècle av. J.‑C. La Ligue de Délos, alliance militaire initialement créée pour repousser l'ennemi perse, évolue d'une coordination de forces armées grecques sous l'égide des Athéniens vers une confédération étatique soutenue militairement, financièrement, et culturellement par Athènes. C'est de la trésorerie de l'alliance que Périclès (-495, -429), qui se maintient habilement à la tête de l’État athénien de -461 jusqu'à sa mort, tire les fonds nécessaires à son ambitieux plan de construction centré sur l'« Acropole d'Athènes », plan qui comprend les Propylées, le Parthénon pour commémorer les guerres médiques et la statue d'Athéna, sculptée par son ami, Phidias[6]. En 449 av. J.-C., Périclès propose un décret autorisant l'utilisation de 9 000 talents pour financer le programme de reconstruction des temples d'Athènes[7].

À l'époque, comme nous le dit Plutarque (46 - 125), dans sa « Vies des hommes illustres », ces monuments suscitent dans l'administration et chez ses ennemis, les accusations les plus virulentes à l'encontre de Périclès: détournement de fond à son seul profit, goût démesuré du faste. (Angelos Vlachos, un académicien grec, souligne que l'utilisation de la trésorerie de l'alliance, initié et exécuté par Périclès, serait l'un des plus importants détournements de fonds de l'histoire humaine, mais qui permit toutefois de financer quelques-unes des créations artistiques les plus merveilleuses du monde antique[8],[9]).

Périclès tient lui un tout autre langage:

« Vous ne devez à vos alliés nul compte de ces deniers, disait-il au peuple, puisque c’est vous qui faites la guerre pour eux, et qui retenez les barbares loin de la Grèce, tandis qu’eux ne vous fournissent pas un cheval, pas un vaisseau, pas un homme, et qu’ils ne contribuent que de leur argent. Or, l’argent, du moment qu’il est donné, n’est plus à celui qui l’a donné, mais à celui qui l’a reçu, pourvu seulement que celui-ci remplisse les engagements qu’il a contractés en le recevant. Or, vous avez rempli tous vos engagements, en ce qui concerne la guerre. Vous êtes suffisamment pourvus de tout ce qu’il faut pour la faire ; et si, grâce à vous, le trésor est surabondant, n’est-il pas juste que vous l’employiez à des ouvrages qui procurent à votre ville une gloire éternelle, et après l’achèvement desquels Athènes continuera de jouir d’une opulence qu’entretiendra le développement des industries de tout genre ? Une foule de besoins nouveaux ont été créés, qui ont éveillé tous les talents, occupé tous les bras, et fait, de presque tous les citoyens, des salariés de l’État: ainsi, la ville ne tire que d’elle-même et ses embellissements et sa subsistance. Ceux que leur âge et leurs forces rendent propres au service militaire reçoivent, sur le fonds commun, la paye qui leur est due. Quant à la multitude des ouvriers que leurs professions exemptent présentement du service militaire, j’ai voulu qu’elle ne restât point privée des mêmes avantages, mais sans y faire participer la paresse et l’oisiveté. Voilà pourquoi j’ai entrepris, dans l’intérêt du peuple, ces grandes constructions, ces travaux de tous genres, qui réclament tous les arts et toutes les industries, et qui les réclameront longtemps. Par ce moyen, la population sédentaire n’aura pas moins de droits à une part des deniers communs, que les citoyens qui courent les mers sur nos flottes, ou qui gardent nos places éloignées, ou qui font la guerre. Nous avions la matière première, pierre, airain, ivoire, or, ébène, cyprès ; nous l’avons fait travailler et mettre en œuvre, par tout ce qu’il y a d’artisans : charpentiers, mouleurs, fondeurs, tailleurs de pierre, brodeurs, doreurs, sculpteurs en ivoire, peintres, orfèvres. Et nous employons sur mer, au transport de tous ces objets, les équipages et les vaisseaux du commerce, les matelots et les pilotes de l’État : sur terre, ces travaux occupent les charrons, les voituriers, les charretiers, les cordiers, les tisserands, les cordonniers, les paveurs, les mineurs. Et chaque métier occupe encore, comme fait un général, une armée de manœuvres qui n’ont d’autre talent que l’usage de leurs bras, et qui ne sont, pour ainsi dire, que des outils et des forces, au service des chefs d’atelier. Ainsi le travail distribue et répand au loin l’aisance, dans tous les âges et dans toutes les conditions.[10]. »

Ainsi, Périclès réussit à mener une politique de prestige redoutablement efficace. L’acropole d’Athènes atteste encore aujourd'hui de la puissance de la Grèce et de sa splendeur d’autrefois. Plutarque rajoute:

« Ces édifices s’élevaient, déployant une grandeur étonnante, une beauté et une grâce inimitables ; car les artistes s’appliquaient à l’envi à surpasser, par la perfection de l’œuvre, la perfection du plan même. Et ce qu’il y avait de plus surprenant, c’était la rapidité de l’exécution. En effet, cette multitude d’ouvrages, dont il semblait que chacun ait dû exiger les efforts continus de plusieurs générations pour arriver à son achèvement, fut toute exécutée et terminée durant les années florissantes de l’administration d’un seul homme[10]. »

Pour la construction du Parthénon on rouvre la carrière du mont Pentélique qui fournit un marbre de bonne texture dont la dureté permet la confection de détail d'une grande finesse. Le Parthénon nécessitera la taille et le transport d'au moins 20 000 blocs de marbre pesant au total 100 000 tonnes. Ici, rien n'est droit, aucune pierre n'est un parallélépipède parfait. Chaque pierre est unique taillée pour l'endroit de l'édifice où elle va être placée[4].

Au Parthénon et aux Propylées, le plafond est en pierre et à caissons, pratique qui se développe au Ve siècle av. J.‑C.. Une grande plaque creusée de plusieurs alvéoles repose sur de fortes poutres transversales dans le pronaos et la galerie du Parthénon. Rehaussé de peinture, un motif floral s'épanouit au fond du caisson, une rosace, une fleur de liseron ou de lotus[5].

Outre le nom de Phidias, l'histoire à retenu le nom des architectes impliqués dans la construction du Parthénon, Ictinos et Callicratès

Archimède, Héron d'Alexandrie

Article détaillé : Sciences grecques.
Levier

Au IIIe siècle av. J.‑C., le physicien, mathématicien et ingénieur, Archimède de Syracuse(287 av. J.-C. - 212 av. J.-C.) réalise quelques percées dans les domaines de l'hydrostatique et de la mécanique statique. On attribue à Archimède le principe de quelques machines simples: le levier, le plan incliné, la poulie et la vis (la vis d'Archimède). Il imagine une multitude de machines composées, mais négligea de les décrire, et il n'en reste, pour ainsi dire, que la renommée.

On peut juger de l'état où était alors la théorie de la mécanique, par le profond étonnement où il jeta le roi Hiéron, son parent, quand il lui dit qu'avec un point fixe, il soulèverait le globe de la terre: « Da mihi ubi consistant, et terram commovebo ». Cette proposition n'est cependant qu'une conséquence fort simple de l'équilibre du levier : en allongeant un des bras et diminuant à proportion le poids attaché à son extrémité , on peut faire équilibre à un poids quelconque appliqué au bras le plus court[11].

La limace, ou vis d'Archimède, machine hydraulique très-simple et très-commode pour élever les eaux à de petites hauteurs, fût utilisé en Égypte, et on s'en servait pour dessécher les marais, les fleuves, etc. Archimède est crédité aussi de cette invention par Diodore de Sicile, toutefois Vitruve bien que grand admirateur d'Archimède, ne le cite pas comme inventeur. On soupçonne donc que la vis d'Archimède est antérieure à celui-ci[11].

Un siècle plus tard, Ctésibios et Héron d'Alexandrie, son disciple, inventèrent les pompes, le syphon recourbé, et la fontaine de compression, qu'on appelle encore aujourd'hui la fontaine de Héron, l'Éolipyle, probablement le premier moteur. On doit plus spécialement à Ctésibios une machine du même genre, composée de deux pompes aspirantes et foulantes, de telle manière que par leur action alternative, l'eau est sans cesse aspirée et poussée dans un tuyau montant intermédiaire[11].

Ces machines sont les ancêtres de tous les dispositifs de levage et outils qui faciliteront les travaux pénibles et libéreront l'artisan des tâches lourdes, celles que l'on retrouve dans la construction.

La Rome antique

Intérieur du Panthéon au XVIIIe siècle, avec le décor d'origine, par Giovanni Paolo Panini
Reconstitution d'un mur peint de la maison des Vettii à Pompéi
Intérieur de la villa des Mystères à Pompéi

Plusieurs images s'opposent et se complètent dans l'image du romain : d'abord celle du soldat, conquérant, administrateur, peux amène à s'émouvoir de l'art; d'autre part celle de l'esthète, amateur d'art, collectionneur; ensuite celle de l'homme pratique, ingénieur, technicien, constructeur et planificateur. L'un ne fonctionnant sans l'autre, la capacité romaine de mettre en place et de gérer des chantiers d'une grande complexité conduira à la construction de grand ensembles urbanistiques, à la généralisation des aqueducs, à la constructions de chefs-d'œuvre comme le Panthéon.

L'expression « travail de Romain » nous est restée désignant une tâche, un travail difficile, une œuvre énorme et considérable[12].

Les Romains excelleront dans les techniques d'ingénierie (l’emploi massif du béton (opus caementicium), coulé entre des parements de briques (opus latericium)), de la construction, ainsi que les machines (les machines de levage, les machinatio de Vitruves)

L'artisan romain quoique souvent méprisé parviendra à se distinguer dans la sculpture, la peinture ainsi que dans l'art de la mosaïque.

La Rome étrusque. La Rome grecque

Né pour conquérir le monde, esprit pratique et administratif plutôt qu'artiste Rome avait pour devise ces préceptes de Virgile :

« ROMAIN, SOUVIENS-TOI DE COMMANDER AU MONDE! TES ARTS, LES VOICI : IMPOSER LA PAIX, PARDONNER AUX VAINCUS ET DOMPTER LES SUPERBES[13]. »

« À Rome, l’art dans toutes ses parties fut étrusque jusqu’au jour où il fut grec. Les Romains n’y apportèrent jamais ce génie naturel qui crée, pas plus dans les temps modernes que dans l’antiquité. On ne peut dire qu’il y ait une école romaine. Au Moyen Âge, Rome seule en Italie ne produit pas un grand artiste, comme elle ne produit point de poètes et à peine des chroniqueurs[14] ».

Mais si le Romain n'avait pas le génie créateur, il avait un sentiment très-vif du beau et du grand; les Étrusques le lui avaient légué, c'était devenu le propre de son génie. Quand les guerres samnites et puniques lui eurent donné Tarente, Capoue, Syracuse, l'Italie méridionale et la Sicile, avec les merveilleux chefs-d'œuvre que les artistes grecs y avaient semés, ce rude soldat se sentit subjugué pour la première fois[15].

Mais reconnaître une supériorité, avouer une impuissance, n'était pas dans sa nature. Le Romain était un esprit pratique; son parti fut bientôt pris. Il dépouilla les provinces conquises au fur et à mesure de la conquête, et transplanta à Rome les productions de leur génie. Pendant deux siècles entiers, de -266 à -62, la Grande Grèce, la Sicile, Athènes, Corinthe, la Grèce entière, la Macédoine, l'Asie Mineure envoyèrent tour à tour à Rome leurs trésors sur les chars des triomphateurs : avec Scipion l'Asiatique, l'argenterie ciselée, les tapisseries, les bronzes; avec Mummius, les marbres, les corinthes, les peintures; avec Pompée, les perles et les pierreries[15].
À leur suite arrivèrent les artistes, les uns captifs, les autres mandés à Rome pour des travaux d'embellissement. L'art grec émigra tout entier et se naturalisa romain; Rome avait absorbé Athènes. Ce n'était pas encore assez pour l'amour-propre du vainqueur. Il sentait en lui-même, sans l'avouer, la supériorité des Grecs; il ne sut jamais le leur pardonner. De là, ce superbe dédain dont l'écho se répète jusque sous les Empereurs[16].

Damophile, Gorgas, Timomaque, Arcésilas, Pasitélès et tant d'autres, furent appelés de Grèce à Rome par César, par Lucullus, etc. La disette des artistes devint telle en Grèce qu'il ne se trouva pas, dans Athènes même, un architecte pour terminer le temple de Jupiter olympien, et qu'on dut en faire venir de Rome[17].

Les collèges d'artisan et les esclaves

« Rome eut, dès la plus haute antiquité, quelques collèges ou corporations ouvrières dont l'organisation semble avoir été contemporaine de ses premières institutions politiques et religieuses. Pline et Plutarque les font remonter au règne de Numa(-715,-673); Florus les attribue à Servius Tullius, et un passage de Denys d'Halicarnasse prouve qu'au temps de Tarquin le Superbe(-543,-509) ces associations particulières étaient déjà assez puissantes pour se rendre redoutables à la tyrannie[18]..
Elles avaient leurs chefs, leurs assemblées, leurs règlements; elles fournissaient à leurs dépenses par des contributions volontaires, et, à certaines époques, les membres d'un même collège, unis sous le nom de sodales, se rassemblaient autour d'un autel commun »
. Les collèges avaient chacun leur divinité, leurs fêtes sacrées.
Servius Tullius (VIe siècle av. J.‑C.) renversa la vieille constitution aristocratique de Romulus. Il accorda aux artisans quelques privilèges politiques. Les artisans n'avaient pas de place dans la curie, ils en auront dans les classes qui formaient une organisation politique et militaire. Des forgerons et des charpentiers furent ainsi intégré, et rien n'empêche de croire qu'ils purent voter au Champ de Mars, à côté des riches citoyens auxquels ils étaient adjoints. Ces mesures furent annulée par le successeur de Tullius, puis rétablies par la loi des douze tables[18].
Toutefois, Rome, patricienne et guerrière, ne pouvait être favorable au développement de l'industrie. Denys d'Halicarnasse affirme en parlant des premiers temps de la république, qu'il n'était pas permis à aucun romain de se faire marchand ou artisan. Plus tard, au milieu de la corruption de l'empire, Sénèque s'indignait encore qu'un écrivain eût osé attribuer aux philosophes l'invention des arts. « Elle appartient, s'écrie-t-il, aux plus vils des esclaves. La sagesse habite des lieux plus élevés: elle ne forme pas les mains au travail ; elle dirige les âmes... Encore une fois, elle ne fabrique pas des ustensiles pour les usages de la vie. Pourquoi lui assigner un rôle si humble ?
Rome fut donc dans un premier temps une nation sans industrie. Tite-Live nous apprend que, pour construire le temple de Jupiter (Vers -500), Tarquin fut obligé de faire venir des ouvriers d'Étrurie. Par la suite de ses conquêtes, s'enrichit du commerce et sombra dans le vice. L'artisan, dû affronté la concurrence des esclaves. Régulus n'avait qu'un seul serviteur pour l'aider à cultiver sa terre, et la plupart des patriciens vivaient, de son temps, dans la même simplicité. Cent cinquante ans après, à l'époque de la Deuxième Guerre servile vers -104, quatre cents esclaves sortaient armés de la maison d'un simple chevalier romain. Le plus grand nombre formait une classe d'ouvriers dont les propriétaires exploitaient le travail, vendaient les produits ou louaient même les services. Ils avaient sur les artisans libres deux avantages qui les firent préférer : ils étaient plus dociles, parce qu'on pouvait les instruire, les châtier et, jusqu'au siècle des Antonins, les mettre à mort à son gré; leur main-d'œuvre revenait moins cher, parce que le maître ne leur devait et ne leur donnait souvent que la nourriture. Chacun composait sa maison selon ses goûts. Crassus qui faisait bâtir avait des ouvriers et des architectes. Ainsi les artisans esclaves se substituèrent aux artisans libres dans les villes et dans les champs[18].
« Ainsi les classes ouvrières, organisées en collèges, étaient, depuis les premiers temps de Rome, méprisées et suspectes. Humbles et faibles depuis Numa jusqu'aux guerres puniques, parce que Rome n'avait pas de commerce; puis étouffées et avilies par la concurrence des esclaves; poursuivies par le sénat, parce qu'elles étaient devenues l'asile de tous les misérables et l'espoir de tous les séditieux, elles furent encore, après la chute de la République et la fin des troubles civils, redoutées et proscrites pendant plus d'un siècle par les empereurs Jusqu'au jour où ils sentirent la nécessité de recourir à ces mêmes collèges pour soutenir l'industrie languissante[18]. »

Les collèges d'artisan dans la Gaule romaine

Avant que Rome n'envahisse la Gaule de -58 à -51, l'art architectural est malheureusement difficile à appréhender car il n'a pas survécu aux années, les Gaulois construisant essentiellement en bois et torchis.

La Gaule conquise ne fût pas longue à se faire à la paix romaine et entretint très vite des rapport commerciaux avec Rome. L'industrie devint florissante et la Gaule s'enrichit. Les arts n'étaient pas plus négligés que les travaux manuels. Les monuments tels le pont du Gard, l'arc d'Orange, le théâtre antique d'Orange, la maison Carrée, le temple de Diane et les arènes de Nîmes, le théâtre et les arènes d'Arles, la porte de Mars à Reims en attestent. Les maisons les plus modestes se revêtirent d'une couche de peinture ; on vit s'élever de toutes parts des portiques, des arcs de triomphe, des cirques, des théâtres, des thermes, des temples. Les proportions furent, en général, nobles et gracieuses; l'ornementation riche sans profusion. Les années qui séparent Trajan des trente tyrans marquèrent l'époque la plus brillante de l'architecture gauloise.
Les villes gauloises avaient, comme Rome, des artisans esclaves, des maîtres exploitant pour eux-mêmes ou louant à d'autres le travail de nombreuses familles. Elles avaient aussi des artisans libres qui s'y étaient, comme à Rome, organisés en collèges. L'esclavage ne paraît même pas avoir exercé sur eux une influence aussi funeste qu'en Italie, parce qu'en Gaule la population servile ne fut jamais aussi nombreuse. Les collèges y étaient, par conséquent, moins turbulents et moins méprisés, et les artisans, vivant dans leurs associations sous la loi romaine, sans être sous le coup de la réprobation qui les frappait à Rome, contribuèrent pour une large part à la grande prospérité du pays.

Développement des collèges

Le premier empereur qui se montra favorable aux associations ouvrières, fut Alexandre Sévère (222 à 235).. Dans l'intérêt du commerce et de l'approvisionnement de Rome, il établit dans la ville un grand nombre de fabriques; pour y attirer les marchands, il leur accorda les privilèges les plus étendus. Enfin il organisa en collèges les marchands de vins, les marchands de légumes, les cordonniers et tous les métiers en général. Il fit plus : il leur donna une sorte de constitution municipale en mettant à leur tête des défenseurs tirés de leur sein, et en réglant la juridiction à laquelle ressortiraient leurs procès. Dès le troisième siècle, on les classes ouvrières partout formées en collèges et partagées pour ainsi dire en trois groupes dont les membres jouissent d'autant moins de la liberté individuelle qu'ils ont avec l’État des rapports plus intimes. Ces trois groupes comprennent les manufactures de l'État, les professions nécessaires à la subsistance du peuple et les métiers libres.

L’ingénierie romaine

Thermes de Caracala Piliers massifs, uniques vestiges du caldarium.

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Les ingénieurs de l'époque romaine disposent d'instruments qui exploitent des connaissances scientifiques acquises anciennement. Elles acquièrent leur pleine efficacité grâce à la capacité romaine de mettre en place et de gérer des chantiers d'une grande complexité. Héritiers et les continuateurs des rois hellénistiques successeurs d'Alexandre et fondateurs de villes, les Empereurs romains s'appuient sur le même personnel d'architectes et d'ingénieurs. Mais ils en élargissent le champ d'intervention à l'ensemble de l'Empire[19].

Les grands progrès accomplis dans l'art de construire sont mises en œuvre dans les grands chantiers urbains des cités provinciales à l'imitation de ceux de la ville de Rome. La construction d'aqueducs en bénéficie au même titre que toutes les activités du bâtiment. Ainsi la construction des ouvrages d'art que sont les ponts d'aqueducs n'aurait pu être menée à bien sans la mise au point du système de la voûte clavée « à poussée ». « L'honneur revient aux architectes romains de l'époque tardo-républicaine, d'avoir osé libérer la voûte qui n'était qu'un trou dans une masse pour en faire un volume à l'air libre ».

Mais l'autre secret de la réussite est la maîtrise acquise dans la confection de l'opus caementicium. Ce congloméra réalisé à partir d'un mélange de mortier de chaux et de tout venant, les caementa, coulé dans un coffrage en bois ou entre deux parois de petit appareil, permettra de réaliser les volumes considérables de maçonneries que requièrent les aqueducs, ponts, basiliques, etc., une architecture monumentale performante, tant du point de vue économique que du point de vue du temps de réalisation[20]. Aucune qualification de la main-d'œuvre n'est exigée et une bonne partie des matériaux étaient employés sans préparation préalable.

La qualité des mortiers permet de réaliser une voûte qui, la prise terminée et le cintre retiré, se comporte comme « un monolithe dans lequel on a creusé un volume », la « voûte concrète[21] ».

Les romains découvrirent les propriétés du pouzzolane (roche volcanique ainsi appelée parce que se trouvant dans le voisinage de Pouzzoles au pied du Vésuve[22],[23]). Celui-ci, mêlé à de la chaux et des moellon et de l'eau, « donne de la solidité aux édifices ordinaires, mais encore les môles qu'elle sert à construire dans la mer acquièrent sous l'eau une grande consistance »(Vitruve. De architectura. Livre II, ch. 6)[24]. Ces vertus permettant au mortier de résister à l'eau et même de faire prise en milieu très humide est due à la présence d'une grande quantité de silicate d'alumine. En ajoutant à la chaux aérienne de la pouzzolane, on la transforme artificiellement en chaux hydraulique. Ce n'est qu'en 1818 que Louis Vicat expliquera les principes de cette réaction, dans sa théorie de l'hydraulicité[25].

La même transformation s’opère lorsque l'on mêle de la céramique pilée au mortier, ce que les romains réalisèrent pour leurs revêtements étanches.

L'opus caementicium a vu son parement évoluer en fonction de la disponibilité de matériau et de l'évolution des techniques de mise en œuvre[20], laissé apparent, enduit, paré de briques, de pierre ou de marbres.

Émergence du christianisme

Les invasions barbares commencent au IIIe siècle quand les Francs, les Alamans, les Saxons, les Huns, les Avars, les Bulgares, les Goths et les Vandales rencontrent, envahissent, pillent et déstabilisent l'Empire romain.

Pendant la crise du troisième siècle, la condition des artisans devient pus pénible à mesure que diminue la richesse. Au IIIe siècle, Dioclétien, pendant son dix-huitième consulat, rendit une ordonnance pour fixer le prix des marchandises et le salaire des ouvriers[26]: une journée de maçon est payée 50 deniers, de manœuvre, 25, de menuisier en bâtiment, 50, de marbrier, 60, de forgeron 50, d'ouvrier en mosaïque 60. (Le prix d'un poulet 60 Deniers) (sagum gallicum, la sai gauloise). La peine de mort était infligée à quiconque ne se conformait pas à ce tarif. Mais il était tellement en disproportion avec la valeur réelle des objets, que partout on désobéit aux ordres de Dioclétien[18].

Le partage de 395. En rouge la pars occidentalis, en violet la pars orientalis. Le long des frontières de l’Empire, les traits noirs correspondent au limes

En 395, lorsque meurt l'empereur Théodose Ier, il a attribué à ses deux fils, Honorius et Arcadius un Empire d'Occident et un Empire d'Orient. Cette division de 395 est traditionnellement considérée comme un point de départ pour l'Empire byzantin.

En Occident, la culture nouvelle qui se développe en Gaule, après la période impériale, est avant tout chrétienne, et à plusieurs égards augustinienne, le latin continue à constituer la langue de la culture et surtout, celle exclusive de l'écrit (le premier document écrit en langue vernaculaire étant les serments de Strasbourg, datés de 842).

Au VIe siècle qu'on assiste progressivement à l'essor des écoles cléricales qui prennent le relai du réseau scolaire antique, qui s'était désintégré lors des invasions barbares. Ce processus culmine avec la Renaissance carolingienne.

À partir du milieu du VIIe siècle, temps de crise, les patronymes germaniques se multiplient au sein des élites, indiquant par là que le centre de gravité de l'Europe se déplace vers le nord et que les équilibres du monde antique sont rompus.

En 312, Constantin, au départ adepte de Sol invictus (le Soleil Invaincu), se convertit au christianisme lors de sa campagne contre Maxence. S’organisant en suivant le modèle administratif de l’Empire, L’Église progresse rapidement dans l’Empire romain.

Vers 450, l’autorité pontificale avec le pape Léon le Grand, à partir du IVe siècle, un personnage nouveau se détache de l’évêque, le prêtre, au VIe siècle, une nouvelle cellule religieuse rurale, la paroisse.

L'empire byzantin

À partir de 324, Constantin transforme la cité grecque de Byzance en une « Nouvelle Rome », à laquelle il donne son nom, Constantinople. Il l'inaugure après douze ans de travaux, en 330. Constantinople est bâtie sur un site naturel défensif qui la rend pratiquement imprenable alors que Rome est sans cesse sous la menace des Germains[27].

L'apogée de l'Empire byzantin avec les conquêtes de Justinien.

Au Ve siècle, l’Orient connaît une longue période de prospérité économique. Au VIe siècle, Justinien (527-565) consacre une grande partie de son règne à reprendre aux Barbares les terres de la romanité, un travail juridique impressionnant est accompli à travers la codification du droit romain (ce que l'on appelle plus tard le « Corpus juris civilis ») que l’Occident médiéval adoptera.

Avec le soutien de Justinien, le monachisme prend une grande importance en Orient, et devient un véritable contre-pouvoir qui se manifestera lors de la crise de l'iconoclasme. En Occident, le monachisme recevra une impulsion décisive sous la dynastie carolingienne. Dans toutes les contrées anciennement romaines, les monastères joueront un rôle précieux de conservateurs de la culture antique.

Sous le règne d’Héraclius (610-641) l’Empire d’Orient prend un caractère de plus en plus grec. Le titre de Basileus remplace celui d’Auguste, les provinces deviennent des thèmes. C’est aussi l’époque des premières conquêtes arabes. Après la bataille du Yarmouk en 636, la Syrie, Jérusalem, l’Égypte, la Mésopotamie sont définitivement perdues après six siècles de romanité. L'Afrique romaine passe sous la domination arabe après la chute de Carthage en 698. En Orient, le monde grec orthodoxe (dit byzantin) et le monde arabo-musulman remplacent définitivement le monde romain.

Le sac de Constantinople lors de la Quatrième croisade en 1204 sonnera le glas de l'empire byzantin. La chute de Constantinople, le 29 mai 1453, marque la fin de l’Empire byzantin, ainsi qu'une nouvelle ère d'expansion pour l’Empire ottoman. Ces deux événement seront en partie à l'origine de l'expansion commerciale et artistique de la République de Venise et l'émergence de la Renaissance italienne.

Renaissances médiévales

La renaissance carolingienne[28], première période de renouveau culturel majeur au Moyen Âge à l'échelle de l'Occident, est une période d'importants progrès intellectuels, notamment grâce à la redécouverte de la langue latine, à la sauvegarde de nombreux auteurs classiques, et à la promotion des arts libéraux.

Au Moyen Âge et jusqu'à la Révolution française, la corporation était le mode d'organisation de la plupart des professions. Les corporations étaient des associations de personnes exerçant le même métier, qui réglementaient à l’échelle de chaque ville la profession.

Le chantier des cathédrale, met en valeur une distinction entre métiers qui va s’accentuant. Mis à part le cas particulier de l'architecte et de l'appareilleur, une véritable supériorité est accordée aux maçons, tailleurs de pierre, les charpentiers, et, à un autre degré, les métiers du fer et du feu, les serruriers et les verriers[29].

L'architecture romane, qui précède le gothique, se caractérise par des arcs en plein cintre et des voûtes. Ces voûtes romanes sont massives et très lourdes, elles nécessitent des murs d'appui épais, le plus souvent renforcés par des contreforts accolés de place en place.

Avec l'architecture ogivale, l'architecture gothique (ou opus francigenum) amène une solution élégante aux problèmes de forces que connaît le roman. L'idée centrale de la Croisée d'ogives est de faire des voûtes qui reposent non pas directement sur des murs, mais sur ces ogives croisées, et les ogives elle-mêmes convergent vers des piliers. Le mur lui-même ne sert à rien et peut être vidé (pour placer des vitraux) et la poussée reçue au sommet des piliers peut être facilement compensée par des arcs-boutants. La statuaire fait des progrès remarquables, les cathédrale se parent de gargouilles et de statues.

Les architectes et les appareilleurs

Croquis du Carnet de Villard de Honnecourt

Eugène Viollet-le-Duc dans son « Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle » affirme que la profession telle que nous la connaissons ne s'est pas encore constituée: « Pour ne pas sortir de notre sujet, les corps de métiers attachés aux bâtiments se composaient, au XIIIe siècle, des charpentiers, des maçons, des tailleurs de pierre, des plâtriers et morteliers, des imagiers, des peintres et tailleurs d'images (sculpteurs), des faiseurs de ponts. Quant aux maîtres des œuvres, à ce que nous appelons aujourd'hui des architectes, ils ne paraissent pas avoir jamais formé un corps; nous ne pouvons avoir même qu'une idée assez vague de la nature de leurs attributions jusqu'au XVe siècle. Nous voyons qu'on les appelait dans les villes pour bâtir des édifices, et qu'on leur accordait des honoraires fixes pendant la durée du travail (voy. Architecte); mais présidaient-ils aux marchés passés avec les divers chefs d'ouvriers ? établissaient-ils des devis ? réglaient-ils les comptes ? Tout cela paraît douteux. Dès la fin du XIIIe siècle, on voit des villes, des abbés ou des chapitres, passer des marchés avec les maîtres des divers corps d'état sans l'intervention de l'architecte. Celui-ci semble conserver une position indépendante et n'encourir aucune responsabilité; c'est un artiste, en un mot, qui fait exécuter son œuvre par des ouvriers n'ayant avec lui d'autres rapports que ceux de fournisseurs ou de tâcherons vis-à-vis un intendant général.

Le système de régie n'était pas habituellement employé; les ouvriers de chaque métier travaillaient à leurs pièces; l'architecte distribuait la besogne, et un piqueur relevait probablement le travail de chacun. Sur la grande inscription sculptée à la base du portail méridional de la cathédrale de Paris, l'architecte Jean de Chelles est désigné sous le titre de tailleur de pierre, latomus. Robert de Luzarches, ainsi que ses successeurs, Thomas et Regnault de Cormont, prennent le titre de maîtres dans l'inscription du labyrinthe de la cathédrale d'Amiens.

Il est certain qu'un maçon ou tailleur de pierre ne pouvait concevoir et faire exécuter les diverses parties d'un édifice à l'érection duquel le charpentier, le serrurier, le sculpteur, le menuisier, le verrier devaient concourir. Et dans l'architecture gothique, les divers membres de la construction et de la décoration sont trop intimement liés, pour que l'on puisse admettre un instant que chaque corps d'état pût agir isolément sans un chef suprême. Une des qualités les plus remarquables de cette architecture, c'est que tout est prévu, tout vient se poser à la place nécessaire et préparée. Il fallait donc une tête pour prévoir et donner des ordres en temps utile.

Quoi qu'il en soit, si les corporations attachées aux bâtiments ont beaucoup travaillé pendant le moyen âge, si elles ont laissé des traces remarquables de leur habileté, au point de vue politique elles ne prennent pas l'importance de beaucoup d'autres corporations. On ne les voit guère se mêler dans les troubles des communes, réclamer une extension de privilèges, imposer des conditions, former ces puissantes coalitions qui inquiétèrent si longtemps la royauté[30]. »

Des noms nous sont parvenus tels

Les ouvriers

Gothique rayonnant : chœur de la basilique de Saint-Denis 1135
Rose de la façade nord, cathédrale Notre-Dame de Paris 1163

Pour Eugène Viollet-le-Duc vers 1860, « il est bien certain qu'au moyen âge, entre le maître de l'œuvre et l'ouvrier il n'y avait pas la distance immense qui sépare aujourd'hui l'architecte des derniers exécutants; ce n'était pas certes l'architecte qui se trouvait placé plus bas sur les degrés de l'échelle intellectuelle, mais bien l'ouvrier qui atteignait un degré supérieur. Pour ne parler que de la maçonnerie, la manière dont les tracés sont compris par les tailleurs de pierre, l'intelligence avec laquelle ils sont rendus, indique chez ceux-ci une connaissance de la géométrie descriptive, des pénétrations de plans, que nous avons grand-peine à trouver de notre temps chez les meilleurs appareilleurs. L'exécution matérielle des tailles atteint toujours une grande supériorité sur celle que nous obtenons en moyenne. Mais si nous allons chercher des corps de métiers plus relevés, comme par exemple les sculpteurs, les tailleurs d'ymages, il nous faut beaucoup d'années et des soins infinis pour former des ouvriers en état de rivaliser avec ceux du moyen âge[30]. »

« Avant l'établissement régulier des corporations, vers le milieu du XIIIe siècle, l'ouvrier était-il libre, comme celui de notre temps, ou faisait-il partie d'un corps, obéissant à des statuts, soumis à une sorte de juridiction exercée par ses pairs? Les marques de tâcherons que l'on trouve sur les pierres des parements de nos monuments du XIIe siècle et du commencement du XIIIe siècle, dans l'Île-de-France, le Soissonnais, le Beauvoisis; une partie de la Champagne, en Bourgogne et dans les provinces de l'Ouest, prouvent évidemment que les ouvriers tailleurs de pierre, au moins, n'étaient pas payés à la journée, mais à la tâche. Suivant le mode de construire de cette époque, les pierres des parements faisant rarement parpaing et n'étant que des carreaux d'une épaisseur à peu près égale, la maçonnerie de pierre se payait à tant la toise superficielle au maître de l'œuvre, et la pierre taillée, compris lits et joints, à tant la toise de même à l'ouvrier. Celui-ci marquait donc chaque morceau sur sa face nue afin que l'on pût estimer la valeur du travail qu'il avait fait.

Il faut bien admettre alors que l'ouvrier était libre, c'est-à-dire qu'il pouvait faire plus ou moins de travail, se faire embaucher ou se retirer du chantier comme cela se pratique aujourd'hui. Mais vers le milieu du XIIIe siècle, lorsque les règlements d'Étienne Boileau furent mis en vigueur, ce mode de travail dut être modifié.

Les ouvriers durent d'abord se soumettre aux statuts de la corporation dont ils faisaient partie; le salaire fut réglé par les maîtrises, et chaque affilié ne pouvant avoir qu'un, deux ou trois apprentis sous ses ordres, devenait ainsi, vis-à-vis le maître de l'œuvre, ce que nous appelons aujourd'hui le compagnon, ayant avec lui un ou plusieurs garçons.

Alors le salaire se régla par journées de compagnon et d'aide, et chaque compagnon devenait ainsi comme une fraction d'entrepreneur concourant à l'entreprise générale, au moyen d'un salaire convenu et réglé pour telle ou telle partie. Aussi les marques de tâcherons ne se voient plus sur nos monuments des provinces du domaine royal à dater du milieu du XIIIe siècle.

Le maître de l'œuvre, chargé de la conception et de la direction de l'ouvrage, se trouvait en même temps le répartiteur des salaires, faisant, comme nous dirions aujourd'hui, soumissionner telle partie, telle voûte, tel pilier, tel portion de muraille par tel et tel compagnon. C'est ce qui explique, dans un même édifice, ces différences d'exécution que l'on remarque d'un pilier, d'une voûte, d'une travée à l'autre, certaines variations dans les profils, etc. Les matériaux étant fournis par celui qui faisait bâtir, ils étaient livrés à chacun de ces compagnons après avoir été tracés par le maître de l'œuvre, car le maître de l'œuvre était forcément appareilleur1. Le système de construction admis par les architectes du Moyen Âge les obligeait à se mettre en rapport direct avec les ouvriers. Et encore aujourd'hui ne peut-on procéder autrement quand on veut l'appliquer. Il résultait naturellement de ces rapports continuels entre l'ordonnateur et l'exécutant un cachet d'art très-fortement empreint sur les moindres parties de l'œuvre, comme l'expression d'une même pensée entre l'esprit qui combinait et la main qui exécutait[30]. »

Les bénévoles

Les moyens ordinaires de l'art et de l'industrie n'auraient jamais suffi pour exécuter de pareilles merveilles: la foi y suppléait. Les populations ne s'intéressaient à aucune chose autant qu'à la construction de leur église; tous les âges et tous les sexes concouraient avec la même ardeur, de leur argent ou de leurs bras , à l'œuvre commune. Chartres fut, dans l'ouest de la France, la première ville dont la cathédrale ait été construite ainsi par le zèle spontané des fidèles[18].

Les Corporations

Le plus ancien acte d'organisation pour les maçons en France, fait partie du livre des métiers d'Étienne Boileau, rédigé en 1268; nommé Prévôt de Paris par le roi Louis IX: Il est question « Des Maçons, Tailleurs de pierre, 1es Plastriers et des Mortelliers[31] » (fabricants d'auges de pierre qu'on appelle mortiers).
Les maçons et les plâtriers devaient le guet et la taille; mais les mortelliers ainsi que les tailleurs de pierre étaient dispensé du guet, dès le temps de Charles-Martel, suivant la tradition que constatent les statuts. Leur juridiction était dès lors dans l'enclos du palais, elle était connue sous le nom de maçonnerie[32].

« Au temps de la féodalité, le rôle de la corporation fut de protéger ses membres dans une société où la force faisait seule le droit.

Un individu isolé, sans nom, n'ayant d'autre fortune que le travail de ses mains, aurait succombé ; une société pouvait résister. Séparés, les gens de métiers seraient sans doute demeurés dans une condition analogue à celle des paysans cultivateurs ; unis, ils devinrent les bourgeois des communes et des bonnes villes. La corporation fut le premier degré de l'émancipation du tiers état, le germe de ses libertés politiques. Le forgeron commença à s'unir au forgeron son voisin, à lui prêter secours dans l'occasion, à régler à l'amiable avec lui les petits différends que faisaient naître leurs relations journalières, et dans lesquels n'aurait pu intervenir la justice brutale du seigneur. Ainsi se formèrent de toutes parts, dans l'intérêt de la défense mutuelle, des groupes d'hommes de la même profession; ils eurent bientôt des chefs, des assemblées. La corporation se constitua, précédant la commune, parce qu'elle était d'un besoin plus immédiat et d'une organisation plus simple; survivant à sa destruction, parce qu'elle portait moins ombrage à des pouvoirs rivaux, et que d'ailleurs l'artisan y était plus étroitement attaché. À l'époque de la guerre de Cent Ans, lorsque la misère dépeuplait les villes, ce fut encore autour de la corporation que se serrèrent les derniers artisans, sous son abri qu'ils passèrent leurs plus mauvais jours et qu'ils trouvèrent la force et la protection nécessaires pour reprendre leurs travaux. La corporation sauva peut-être l'industrie d'une ruine complète au XVe siècle, comme elle lui avait permis de naître et de se développer au XIIIe siècle[33]. »

Défense mutuelle de ses membres, garantie des pratiques des meilleurs procédés de fabrication, protection contre la fraude, « on ne saurait méconnaître les services rendus au moyen âge par la corporation : elle a été la tutrice et la sauvegarde de l'industrie naissante, et elle a enseigné au peuple à se gouverner par lui-même[33]. »

« Elle a fait plus: elle a donné aux riches artisans des dignités , aux pauvres des secours d'argent, à tous les joies de la camaraderie dans ses fêtes et ses banquets; pendant tout le moyen âge, elle a été, avec le christianisme et les communes, la grande affaire des petites gens, la source de leurs plaisirs et l'intérêt de toute leur vie. Mais que d'abus, que de maux compensent ces bienfaits! L'égoïsme était un des vices dominants de la corporation. Les artisans qui s'associaient pour se protéger contre la violence devenaient à leur tour violents et injustes. Ils faisaient du titre de membre de la corporation, et par suite du droit de travailler, une sorte de privilège qu'ils se réservaient autant que possible pour eux et pour leurs enfants, et dont ils cherchaient à rendre l'acquisition coûteuse et pénible, quelquefois même impossible à tout aspirant étranger. Ils imaginèrent les longs apprentissages, le nombre restreint des apprentis, le chef-d'œuvre, et des droits divers qu'ils rendirent toujours plus onéreux avec le temps. Dans certaines communautés, le nombre des réceptions annuelles, dans d'autres le nombre des maîtres exerçant le métier, était fixé par les règlements. La plus grande partie des jeunes gens se trouvaient ainsi exclus souvent des professions pour lesquelles ils auraient eu le plus de goût et le plus de talent; ceux même qui étaient parvenus à se faire compagnons n'arrivaient qu'en très-petit nombre à la maîtrise, et étaient condamnés à passer leur vie dans une condition inférieure. (...) Utile dans un temps où les lois générales de la société ne suffisent pas à protéger la personne de l'artisan, la corporation devenait nuisible dès qu'elle n'était plus indispensable[33]. »

Sans jamais manifester la volonté de les détruire, les rois successifs tentèrent mais sans y parvenir de les plier à leur volonté. Ce fut chose faite avec la Révolution française qui décida de la fin des corporations considérées comme un obstacle à la liberté du travail, du commerce et de l’industrie.

Le Compagnonnage s'affirme face au corporations

L'apparition des première sociétés compagnonniques se situe dans les derniers siècles du Moyen Âge. D'abord clandestin ,le Tour de France du compagnonnage s'affirme de plus en plus comme la voie de promotion professionnelle et sociale. Les premiers ouvriers itinérants posent les fondations du compagnonnage désireux de s'émanciper des corporations et confréries. Les premiers métiers acceptés entre le commencement du XIIIe siècle et la fin du XIVe siècle furent les tailleurs de pierre, les charpentiers, les menuisiers et les serruriers. Toutes les listes de préséances en circulation dans les divers Compagnonnage confirment l’ancienneté et la primauté de ces corps d' état qui couvrent les trois matériaux de base indispensables à toutes construction : pierre, bois et fer. Sans pouvoir être daté de manière précise, le compagnonnage émerge à l'époque de l'histoire associant corporations, cathédrales et croisades[29].

Les statuts du compagnonnage sont définis autour d'axes majeurs tels les usages et coutumes de métier, les obligations d'entraide et de solidarité, la formation professionnelle. Les notions de fidélité et de serment sont sacralisées, la discrétion à l'égard de tout étranger à la confrérie est soulignée. La philosophie du compagnonnage : la liberté et la possibilité de voyager de chantier en chantier, de ville en ville[29].

Les raisons historiques de l'émergence compagnonnique se trouvent entre autres dans l'immobilisme des corporations. En 1298, le livre des métiers d’Étienne Boileau, interdit pratiquement à tout ouvrier de voyager. S'il n'est pas fils ou gendre de maître, le Compagnon de la corporation ne peut espérer aucunement être maître à son tour de par les verrous et règles (cérémonies, acquisition d'une boutique, et matériaux coûteux, ainsi que le temps nécessaire à la composition du chef-d’œuvre, soumis à l'approbation du maître de corporation) instaurés par la corporation. En voyageant librement, les compagnons du Devoir bravent l'ordre public et le pouvoir royal[29]..

Soumis souvent à la clandestinité, l'histoire des compagnons est émaillée de procès et de luttes pour imposer ses droits. Toutefois ce sont très souvent les dissensions internes, querelles dégénérant souvent en rixes meurtrières qui entameront les fondements et la crédibilité du mouvement[29]..

La Révolution française interdira les corporations mais dans le même mouvement tous rassemblements entre ouvriers[29]. Le compagnonnage en rentrant dans l'époque moderne devra se réajuster à un monde qui change.

Renaissance italienne

La Renaissance est une période historique qui eut comme origine la Renaissance italienne. En effet la Renaissance naquit à Florence grâce aux artistes qui pouvaient y exprimer librement leur art : une Pré-Renaissance se produisit dans plusieurs villes d'Italie dès le XIVe siècle (Trecento), se propagea au XVe siècle dans la plus grande partie de l'Italie, en Espagne, dans certaines enclaves d'Europe du Nord et d'Allemagne, sous la forme de ce que l'on appelle la première Renaissance (Quattrocento), puis gagna l'ensemble de l'Europe au XVIe siècle (Cinquecento).

Les états du centre et du nord de l'Italie, bien plus prospères, comptent parmi les plus riches d’Europe[34]. Les croisades ont tissé des liens commerciaux durables avec le Levant, et la quatrième croisade a éliminé l’Empire byzantin, rival commercial des Vénitiens et des Génois. Les principales routes de commerce venant de l’est traversent l’Empire byzantin ou les pays arabes et vont jusqu’aux ports de Gênes, Pise et Venise.

Une nouvelle classe dominante émerge, constituée de marchands qui gagnent leur situation par leurs compétences financières, adaptant à leur profit le modèle aristocratique féodal qui a dominé l’Europe au Moyen Âge. La montée en puissance des communes en Italie est une particularité du Moyen Âge tardif, celles-ci accaparant le pouvoir des évêques et des seigneurs locaux.

Les cités États d’Italie croissent énormément et gagnent en puissance, devenant de ce fait entièrement indépendantes du Saint-Empire romain germanique. Dans le même temps, les infrastructures commerciales modernes voient le jour : sociétés par actions, système bancaire international, marché des changes systématisé, assurance et dette publique. Florence devient le centre de cette industrie financière, propulsant le florin au statut de devise principale du commerce international.

Renaissance française

En France, à partir de Louis XII et de François Ier (à partir du début de son règne en 1515, correspondant à la bataille de Marignan), les guerres d'Italie font connaître la Renaissance italienne en France, avec un siècle de retard. Léonard de Vinci apporte en France le savoir-faire des artistes de la Renaissance italienne.

La manifestation la plus évidente de la Renaissance en France est l'édification de châteaux résidentiels dans le Val de Loire ainsi qu'en Île-de-France. Les prémices sont constituées par des châteaux dans un style prérenaissance construits dans le Berry, près de Bourges (capitale du roi Charles VI, proche de l'actuelle route Jacques-Cœur), alors que le nord de la France n'est pas encore totalement remis des séquelles de la guerre de Cent Ans.

François Ier fait appel à des artistes italiens pour la construction de ces châteaux : Chambord aurait été ainsi conçu par Domenico Bernabei da Cortona dit « Boccador ». Le château d'Ancy-le-Franc, lui, a été conçu par l'architecte italien Sebastiano Serlio non pour le roi mais pour un grand seigneur du royaume, Antoine III de Clermont, et ses salles sont ornées de fresques attribuées au Primatice et à d'autres peintres de l'École de Fontainebleau, ce qui témoigne de l'influence qu'ont eu les demeures royales, ici le château de Fontainebleau décoré par ces mêmes artistes, sur le goût de la haute société à partir du règne de François Ier.

Mais peu à peu les architectes français commencent à s'approprier le nouveau style Renaissance : des architectes tels que Pierre Lescot et Philibert Delorme définissent les canons architecturaux de cette architecture qui dureront pour au moins 200 ans.

Sous le règne de Louis XIV

Colbert

Sous le contrôle de Louis XIV, Colbert s'active à donner une indépendance économique et financière à la France. La royauté absolue s'érige en tutrice des classes ouvrières, protège et réglemente le travail, crée des manufactures, anime les beaux-arts et les arts manuels, mais substitue trop souvent sa volonté à la liberté individuelle, et écrase l'industrie sous ses règlements et sous ses impôts[18].

Des encouragements et des pensions sont, accordés à des artistes et à des savants français et étrangers. Les Les Gobelins deviennent, dès 1662, un vaste atelier où des peintres, des sculpteurs, des ciseleurs, des orfèvres, des ébénistes, des tapissiers, rivalisent pour orner les palais du Louvre, continué, le château de Fontainebleau, agrandi, le château de Versailles commencé.

L'Académie royale de peinture et de sculpture, qui existait depuis 1648, reçoit des règlements meilleurs et les fonds nécessaires pour enseigner les beaux-arts ; des artistes sont envoyés à Rome aux frais du roi. L'Académie des inscriptions et médailles en fondée en 1663; celle d'architecture, en 1671.

Surintendant des arts et des manufactures, il s'appliqua d'abord à étudier la situation du pays et celle du commerce en général. Il entretint une correspondance suivie avec les intendants, avec les maires, avec les ambassadeurs français résidant dans les pays manufacturiers :

« Il vit et il entendit répéter que partout il existait des statuts de corporations et des règlements locaux, que partout ces règlements étaient assez mal observés, grâce à la négligence ou à la complicité des jurés, et que de là venaient le désordre et le dépérissement de l'industrie. Il vit que la France tirait de l'étranger beaucoup plus de marchandises qu'elle ne lui en envoyait ; que, malgré les manufactures de Tours et de Lyon, l'Italie lui fournissait toujours des soieries, des étoffes d'or et d'argent, de l'or filé ; que Venise lui enlevait chaque année plusieurs millions avec ses glaces et ses dentelles ; que l'Angleterre, la Hollande, l'Espagne, l'approvisionnaient de laines,de drogues, de teintures, de cuirs et de savons. Il vit qu'à l'intérieur du royaume le commerce des provinces entre elles était gêné et presque étouffé par les entraves des douanes; qu'à l'extérieur, les grandes compagnies et les colonies tentées par Richelieu étaient ruinées, que tout le commerce maritime de la France était encore aux mains des Anglais et des Hollandais[33]. »

Colbert décide de copier les productions des États voisins pour rendre la France indépendante de leurs fournitures ; il n'hésite pas à débaucher des ouvriers étrangers pour former les ouvriers des manufactures françaises ; il utilise fréquemment l'octroi de monopoles, rétablit les anciennes manufactures, en crée de nouvelles. Il favorise ainsi la production de glaces, Manufacture royale de glaces de miroirs (composantes du futur groupe Saint-Gobain) et de tapis Les Gobelins.

Les corps de métier

Il ne supprime pas les corps de métiers. « Loin de là, dans ses règlements sur la teinture et sur la draperie, il les reconstituait fortement, comme une garantie de l'exécution des ordonnances ; il réglait l'élection annuelle des jurés, leurs assemblées, leurs visites dans les ateliers, les conditions de l'apprentissage, l'expérience, le chef-d'œuvre, la maîtrise. Sur cette matière comme sur beaucoup d'autres, Colbert n'avait pas la prétention de rompre avec le passé ; il en continuait et régularisait les institutions. Mais il continuait aussi l'œuvre de la royauté, en faisant tout partir d'elle et aboutir à elle[33]. »

« Le 23 mars 1673, il publia plusieurs édits qui (...)imposaient sur les métiers déjà constitués une taxe pour confirmation de leurs statuts et privilèges, et constituaient en communautés tous ceux qui ne l'avaient pas été jusque-là. Quatre artisans de chaque métier durent rédiger des projets de statuts dans les nouveaux corps et les soumettre à l'approbation des officiers royaux. Il y eut, comme on le pense bien, des résistances, des réclamations de la part des artisans auxquels on imposait des statuts et un impôt, et de la part des anciennes corporations qui redoutaient la rivalité des corporations nouvelles. Des provinces, telles que la Champagne, se rachetèrent à prix d'argent de cette servitude, et conservèrent, comme par le passé, la liberté de l'industrie.(...)Le nombre des corporations, qui était de soixante à Paris en 1672, fut de quatre-vingt-trois quelques mois après la publication de l'édit ; il s'élevait à cent vingt-neuf en 1691. »

« Il réforma la juridiction, enleva aux juges féodaux la connaissance des procès des artisans, ordonna, pour plus de régularité et de promptitude, que les différends concernant les manufactures seraient jugés par le maire et les échevins de chaque ville, et le seraient sans avocat, sans frais d'épices et sans appel, quand la somme ne dépasserait pas cent cinquante livres. »

Les architectes affirment leur spécificité

Étienne-Louis Boullée. Projet de reconstruction de l'Opéra de Paris, 1781.

Tout au long du XVIe siècle, les architectes se battent pour affirmer la spécificité de leur rôle, pour faire admettre leur statut et leur place dans le processus de construction. Ils imposent une valorisation de leur rôle qui, en tant qu'intellectuels, les conduit à rejeter tout travail manuel, le considérant comme subalterne et méprisable. Les architectes éprouvent le désir de se démarquer de la corporation mais une fois la rupture accomplie, s'est imposée une nouvelle nécessité: le maintien et la défense de leurs privilèges et de leurs intérêts. En 1671, en France, sous l'instigation de Colbert, est créée de l'académie royale d'architecture[35].

François Blondel est le premier à y professer un cours d'architecture: « S'il est donc quelque préférence , quelque prédilection attachée à une de nos connaissances, elle ne peut convenir qu'à celles qui, en devenant les plus utiles, supposent le plus de génie, de dignité, et annoncent le plus de magnificence. Si ce que nous avançons n'est pas sans fondement, on doit convenir de la supériorité que l'Architecture doit avoir sur tous les Arts. Nous ne répéterons point ce qui regarde son utilité, elle est incontestable. Mais nous sommes forcés de convenir que c'est un Art difficile, et qu'un bon Architecte, tel que nous l'entendons, ne peut être considéré comme un homme ordinaire[36]. » Pendant la Renaissance, les architectes évoquaient dans l'ordre trois grands principes: solidité, commodité, décoration. Avec Blondel, le discours s'inverse, l'élément de décoration venant au premier plan.

Le XVIIe siècle, va bâtir un décor stable. Les lois de la perspective régissent toute composition architecturale. L'architecte y est en premier lieu ordonnateur du point de vue. Dans cette architecture de décor, la perspective à point de vue central façonne la réalité construite. L'architecture est avant tout une chose dessinées. Fin XVIIIe siècle, chez des architectes comme Étienne-Louis Boullée, pour qui l'art de bâtir n'est que la partie technique de l'architecture,le dessin d'architecture se suffit à lui-même. Ce repli sur le dessin présenté comme le seul moyen d'expression restant aux architectes, est expliqué comme le fait remarqué Taffuri comme étant la conséquence d'une impossibilité d'une mise en projet concrète. Qu construit à l'époque, ce ne sont pas les architectes académiciens mais les architectes-bourgeois et les entrepreneurs en bâtiment, grâce aux modèles architecturaux dominants[35].

La Révolution française

La suppression des corporations en France

En 1776, Turgot initiait le mouvement vers une économie plus libre en proposant un édit, qui prévoyait de supprimer les corvées, les maîtrises et les jurandes (autres noms des corporations). La nuit du 4 août 1789 l'Assemblée nationale de supprimer les privilèges et le 17 mars 1791, le Décret d'Allarde supprime les corporations et proclame ainsi le principe de liberté de commerce et d'industrie. Cela implique que, sous réserve du respect de l'ordre public institué par la loi, l'exercice des professions est désormais libre. Il peut toutefois, dans certains cas, être soumis à déclaration.

L’optique de l’époque était de réagir contre le système extrêmement hiérarchisé des corporations et donc d’effacer tout aspect contraignant, toute rigidité, considérés comme contraire à la liberté du travail, du commerce et de l’industrie.

Ainsi la Révolution française décide de la fin des corporations. Les droits d'accès au métier sont directement perçus par l'État sous le nom de patente.

Le savoir-faire des corporations et leurs modèles sont mis dans le domaine public, tandis qu'une loi institue la propriété privée des brevets et fonde l'Institut national de la propriété industrielle.

Des corporations de droit public subsistent toutefois jusqu'à de nos jours, notamment celle des architectes

Interdiction du « syndicalisme »

Dans un climat de défiance vis-à-vis des regroupements professionnels, la loi Le Chapelier est votée le 14 juin 1791. Cette loi, restée fameuse dans l'histoire du monde ouvrier, interdit toutes coalitions ou regroupements d'ouvriers sous peine de mort, on dirait syndicats de nos jours. La grève n'existe pas.

La révolution industrielle

Principe de la machine à vapeur à balancier de Newcomen
Convertisseur Bessemer de Republic Steel en soufflage en 1941

La révolution industrielle se caractérise par le passage d'une société à dominante agricole et artisanale à une société commerciale et industrielle dont l'idéologie est technicienne et rationaliste.

Un modèle de société se développe sur le modèle de la croissance. Croissance démographique, croissance des moyens de production, croissance de la consommation matière première (houille et minerai de fer en premier), croissance des moyens de communication[37]. Les premiers espaces à s'être industrialisés sont la Grande-Bretagne à la fin du XVIIIe siècle, puis la France au début du XIXe siècle : ce sont les pays de la première vague. L'Allemagne et les États-Unis, quant à eux, se sont industrialisés à partir du milieu du XIXe, le Japon à partir de 1868 puis la Russie à la fin du XIXe : ce sont des pays de la deuxième vague.

Quelques découvertes importantes favorisent l’émergence de révolution industrielle. En 1709, à Coalbrookdale (shropshire), l'Ironmaster Abraham Darby I utilise le coke en remplacement du charbon de bois, pour produire la fonte. Thomas Newcomen, forgeron également, fait breveter une pompe utilisée dans les mines. Ce outil, perfectionné pendant des décennies débouche sur la premières machines à vapeur par James Watt.

L'usine

Dans la course à l'industrialisation, deux secteurs précèdent les autres: le textile et la sidérurgie. Dans le textile la Water frame de Richard Arkwright, dans la sidérurgie, les nouveaux fours Hoffmann, autorisent la production en continu. Les premières usines où le travail est mécanisé sont construite, dans le but d'organiser des machines: l'ouvrier, lui devient un employé. La production s'y fait en série et en continu, une nouvelle organisation du travail s'y opère qui n'est plus lié aux cycles du jour et de la nuit depuis que les ateliers sont éclairé au gaz d'éclairage. Le développement des moyens de transport et surtout le chemins de fer, fait communiquer des régions et des pays qui doivent soudain harmoniser leurs heures. Le tic tac des horloges donnent le rythme et trouvent un écho dans le tic-tac des machines, désormais, le temps de l'ouvrier se calque sur le rythme de l'usine[37].

En termes de construction, de nouvelles programmations voient le jour pour les usines, gares, les hauts fourneaux, etc., qui n’avaient jamais existé auparavant qui amènent de nouvelles solutions techniques performantes

La standardisation

Les premiers jalons de la standardisation sont posés par la production industrielle en continu. Des accessoires, des éléments de décoration, de colonnes et de poutrelles sont fabriqués en fonte. La conception d'un bâtiment passe par la connaissance du catalogue des fonderies[37].

La machine

Une pelle à vapeur abandonnées en Alaska

Le 24 Février 1839, William Otis (1813–1839) invente et fait breveter la pelle à vapeur (en), ancêtre de la pelle mécanique hydraulique. Les multiples usages de la pelle mécanique passent par la réalisation des terrassements, et tous les travaux de génie civil à commencer par le Canal de Panama où il en fût fait grand usage[38]:

« Nous avons eu, de notre temps, un exemple remarquable du service rendu par les machines à une entreprise qui avortait faute d'ouvriers. On n'avait jamais pu amener, pour les travaux de l'Isthme de Suez, une quantité d'ouvriers européens en rapport avec l'importance du cube à déblayer, et on avait dû se contenter du faible travail fourni par les ouvriers indigènes; mais lorsque, dans des circonstances que nous n'avons pas à apprécier ici, cette ressource fut enlevé à la compagnie de l'Isthme de Suez, on put craindre l'ajournement indéfini de cette grande œuvre. L'emploi de moyens mécaniques puissants proposés et réalisés par deux ingénieurs, MM. Korel et Lavalley, a heureusement changé cette situation, et l'achèvement du canal est aujourd'hui une chose complètement assurée. Si jamais on entreprend le percement de l'Isthme de Panama ou la construction d'un canal à point de partage par le lac de Nicaragua, ce ne sera qu'à l'aide d'appareils mécaniques puissants. Bien plus encore qu'à l'Isthme de Suez, les conditions climatériques s'opposeront à la réunion d'un grand nombre d'ouvriers, et ce n'est qu'à la condition d'avoir un personnel restreint que l'on pourra prendre des précautions hygiéniques convenables.

La difficulté du travail en lui-même conduit aux mêmes conclusions et il faudra remplacer l'homme par des machines[39]. »

L'ère de l'acier

Articles détaillés : Construction en acier, acier, fer forgé et fonte.
Le Iron Bridge, ou pont de Coalbrookdale, par Abraham Darby II. Premier grand pont métallique au monde.- 1779 - fonte
Sayner Hütte (de)- 1865 -fonte

High Level Bridge » (1847 - 1849) est un grand pont en fer forgé

Forth Bridge - (1847 - 1849) - acier

Début XIXe siècle, l'essor de la production d'acier modifie de manière fondamentale la manière de construire. La construction était jusque là limitée par l'utilisation du bois et de matériaux exclusivement sollicités à la compression, telles la pierre ou la brique. L'usage de l'acier permet tout à coup de construire des bâtiments aux performances structurelles inégalées.

L'utilisation du fer, de la fonte et de l'acier dans des ossatures porteuses se fait en trois étapes:

En 1859, William Rankine dans son Manual of civil engineering, sur base de l'expérience acquise dans la construction en bois, établit les base de la théorie de l'élasticité et les règles permettant à l'ingénieur dedimensionner les structures directement sur la planche à dessin de même que de déterminer la résistance des rivets. Il devient alors possible de calculer les ossatures porteuses les plus simples. Dans les années 1930, le soudage modifie de manière fondamentale les techniques de fabrication. « La stabilité ne doit plus être assurée par des angles résistant à la flexion, ni par des renforts diagonaux, mais débouche sur le principe de la construction en cadres qui, par la suite, va fortement influencer l'architecture. Le principe de calcul ne tient plus compte de la seule théorie de l'élasticité, mais aussi celle de la plasticité[40]. » L'acquisition des connaissance pour ce type de structure est beaucoup plus laborieux que la construction en pierre ou en bois, tant pour les ingénieurs que pour les architectes

L'acier se retrouve dans des projets de gare, de halles et de ponts. La pierre ne se retrouve plus que dans une façade, ou dans une pilastre

En 1837, la ferme Polonceau par Camille Polonceau, transforme la manière de concevoir un espace couvert. En 1902, la poutre Virenddeel par Arthur Vierendeel, transforme la manière de concevoir un pont (Pont Vierendeel).

L'acier sera début XXe siècle concurrencé par le béton armé.

L'ère du béton

Article détaillé : Histoire du béton.

En 1861, François Coignet, pionnier de l'industrie du béton, décrit les avantage de cette nouvelle invention[41].:

« Au moyen d'un simple mélange de sables, de chaux, de pouzzolanes et de ciments quelconques, mais en se conformant aux conditions indiquées, on obtient une pâte de pierre, capable de résister à toutes les causes de destruction et de recevoir par le moulage toutes les formes voulues. Cette possibilité de faire de la pierre entraîne pour l'art de construire les conséquences les plus remarquables et les plus importantes. En effet, selon qu'on moulera cette pâte de pierre dans des moules spéciaux, hors du lieu où elle devra être employée, par conséquent par un moulage antérieur à l'emploi, ou qu'on la moulera immédiatement, directement sur la maçonnerie même qu'il s'agit d'édifier, on créera deux branches bien distinctes d'emploi des bétons agglomérés. Dans le premier cas, si dans des ateliers spéciaux on moule de menus blocs séparés, des pavés, des dalles, des marches d'escalier, des briques, des parpaings, des cubes plus considérables, des pierres avec ou sans ornement, on aura, par ce moyen industriel, donné naissance à des pierres artificielles, ayant reçu par le moulage la forme que la taille donne aux pierres, et que, comme les pierres ordinaires, il faudra porter ensuite à pied d'œuvre, prêtes à être employées. Ces pierres artificielles, susceptibles de recevoir un fini complet et les formes les plus élégantes au besoin, peuvent purement et simplement, mais avec une grande économie, être substituées à la pierre de taille, au moellon, à la brique. La préparation des pierres artificielles moulées constitue l'une des deux grandes branches d'emploi des bétons agglomérés, et n'apporte d'autres changements aux procédés dè bâtir actuellement en usage, sinon de substituer de la pierre artificielle moulée à de la pierre naturelle taillée.

Mais si, au contraire, on porte le béton à l'état de pâte ferme et plastique sur la maçonnerie même qu'il s'agit de bâtir, et qu'on le soumette à une vigoureuse agglomération exercée sur cette maçonnerie elle-même, par ce moyen on pourra construire à l'état monolithe les masses les plus gigantesques; et, par la suppression de tous joints, tassements et retraits, on aura réalisé sur la maçonnerie ordinaire une économie, une solidité, une force de résistance dont ne peuvent approcher même les meilleures constructions de pierres de taille. Ce mode de moulage et d'agglomération des bétons sur le mur même constitue la seconde branche d'emploi, et de beaucoup la plus importante, sinon au point de vue des avantages industriels, au moins au point de vue de l'art et de l'importance des applications. Cette importance est d'autant plus grande qu'elle n'a pas d'analogie dans les moyens actuels de construction.

(...)Pendant que la construction en maçonnerie ordinaire, en y comprenant l'extraction des pierres, la taille et la pose, exige l'emploi d'ouvriers d'art existant en petit nombre et obtenant des salaires élevés, les constructions en béton ne demanderaient le concours que de simples manœuvres, que l'on pourrait se procurer partout en nombre illimité, et moyennant des salaires beaucoup moins élevés, première source incontestable d'une grande économie dans la main-d'œuvre. »

La chronologie des découvertes du béton:

L'ingénieur

L'avènement de la machine comme instrument de production, va nécessité une étude approfondie des procédés de fabrication. En réponse à cette exigence, l'industrie va donner naissance à un nouveau type d'intellectuel: l'ingénieur; « c'est à lui que seront dévolues la recherche et l'innovation technologique. Spécialiste en science appliquée, l'ingénieur est aussi un cadre technique qui organise le processus de production. Les ingénieurs s'inscrivent dans la division moderne du travail[35]. »

En 1795, à l'École polytechnique récemment fondée, Gaspard Monge enseigne la géométrie descriptive nouveau mode de représentation en deux dimensions permettant de décrire des objets avec précision : Il faut dit-il «  diriger l'éducation nationale vers la connaissance des objets qui exigent de l'exactitude, ce qui a été totalement négligé jusqu'à ce jour, et accoutumer les mains de nos artistes au maniement des instruments de tous les genres, qui servent à porter la précision dans les travaux, et à mesurer ses différents degrés : alors les consommateurs, devenus sensibles à l'exactitude, pourront l'exiger dans les divers ouvrages, y mettre le prix nécessaire; et nos artistes, familiarisés avec elle dès l'âge le plus tendre, seront en état de l'atteindre. Il faut, en second lieu, rendre populaire la connaissance d'un grand nombre de phénomènes naturels, indispensable aux progrès de l'industrie, et profiter, pour l'avancement de l'instruction générale de la nation, de cette circonstance heureuse dans laquelle elle se trouve, d'avoir à sa disposition les principales ressources qui lui sont nécessaires. Il faut enfin répandre, parmi nos artistes, la connaissance des procédés des arts, et celle des machines qui ont pour objet, ou de diminuer la main-d'œuvre, ou de donner aux résultats des travaux plus d'uniformité et plus de précision; et, à cet égard, il faut l'avouer, nous avons beaucoup à puiser chez les nations étrangères. On ne peut remplir toutes ces vues qu'en donnant à l'éducation nationale une direction nouvelle. Le premier est de représenter avec exactitude, sur des dessins qui n'ont que deux dimensions, les objets qui en ont trois, et qui sont susceptibles de définition rigoureuse[42]. »

En 1891, Léon Eyrolles, conducteur de travaux des Ponts et Chaussées, pose les bases de la future École spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l'industrie et fonde un nouveau type d'éducation pour les métiers de la construction.

Le devis

Le devis serait également le fait des ingénieurs:

« Les devis et marchés en matière de construction sont, dans un sens général, l'ensemble des conventions qui interviennent entre le propriétaire et les constructeurs, pour régler le mode d'exécution d'une construction déterminée. C'est l'entrepreneur de bâtiment qui contracte le marché, et non pas l'architecte : celui-ci est un artiste, qui conçoit la forme et la disposition des constructions, dresse les plans et devis, dirige les travaux, vérifie et règle les mémoires, fournit, en un mot, son talent et ses soins, et non les matériaux ni la main d'œuvre. Aussi la loi ne le soumet pas à la patente. (...) Si l'architecte entreprend d'exécuter la construction avec marché et fourniture de matériaux, il n'est plus seulement architecte, il est entrepreneur de bâtiments. Cette exécution, en effet, avec marché et fourniture de matériaux, n'appartient qu'à l'entrepreneur qui, se livrant à la spéculation des travaux de construction, est un commerçant patenté. Il faut ainsi distinguer entre l'architecte et l'entrepreneur, pour n'appliquer à chacun que les règles du droit qui le concernent. Le contrat appelé devis et marché se forme dans des circonstances particulières qu'il est utile de rappeler. Lorsqu'un propriétaire veut faire exécuter une construction de quelque importance, il commence ordinairement par demander à un architecte une esquisse d'ensemble de la construction, et un aperçu général plutôt fort que faible de la dépense. Si ces indications sommaires le décident à construire, il fait dresser un plan en coupe et en élévation, présentant tous les détails de construction qu'il est possible de figurer; il fait ensuite dresser sur ce plan un Devis des travaux, c'est-à-dire un état détaillé des ouvrages de toute nature dont se composera la construction. Le devis comprend deux parties : 1° le devis descriptif, qui indique en détail la position et les dimensions générales de la construction, les distributions et les dimensions particulières, la nature, la qualité, la quantité et le mode d'emploi des matériaux, et enfin le mode d'exécution des travaux; 2° le devis estimatif, qui énonce le prix détaillé de tous les matériaux et de la main-d'œuvre, et se termine par un résumé exprimant le prix total de la construction, si elle est faite à forfait. Après avoir établi les plans et devis, le propriétaire et l'architecte dressent le Marché. C'est un acte contenant les clauses et conditions générales, suivant lesquelles le propriétaire et l'entrepreneur qui sera choisi s'engageront, chacun de son côté, à exécuter les travaux conformément aux plans et devis qui demeureront annexés au marché. Les devis et le marché, réunis ensemble, constituent ce qu'on appelle le cahier des charges[43] »

Saint-simonisme

Pour en finir avec les révolutions des XVIIIe et XIXe siècles, les guerres, l'intolérance, l'égoïsme et l'Ancien Régime avec ses privilégiés, ses inégalités, ses injustices, son obscurantisme et son féodalisme, Saint-Simon propose un changement de société. Il préconise une société fraternelle dont les membres les plus compétents (industriels, scientifiques, artistes, intellectuels, ingénieurs…) auraient pour tâche d'administrer la France le plus économiquement possible, afin d'en faire un pays prospère, où régneraient l'esprit d'entreprise, l'intérêt général et le bien commun, la liberté, l'égalité et la paix:

« Un industriel est un homme qui travaille à produire ou à mettre à la portée des différents membres de la société , un ou plusieurs moyens matériels de satisfaire leurs besoins ou leurs goûts physiques; ainsi, un cultivateur qui sème du blé, qui élève des volailles, des bestiaux, est un. industriel; un charron, un maréchal, un serrurier, un menuisier, sont des industriels; un fabricant de souliers, de chapeaux , de toiles , de draps, de cachemires, est également un industriel; un négociant, un roulier, un marin employé sur des vaisseaux marchands, sont des industriels. Tous les industriels réunis travaillent à produire et à mettre à la portée de tous les membres de la société, tous les moyens matériels de satisfaire leurs besoins ou leurs goûts physiques, et ils forment trois grandes classes qu'on appelle les cultivateurs, les fabricants et les négociants. (...)La classe industrielle doit occuper le premier rang, parce qu'elle est la plus importante de toutes; parce qu'elle peut se passer de toutes les autres, et qu'aucune autre ne peut se passer d'elle; parce qu'elle subsiste par ses propres forces , par ses travaux personnels. Les autres classes doivent travailler pour elle, parce qu'elles sont ses créatures, et qu'elle entretient leur existence; en un mot, tout se faisant par l'industrie, tout doit se faire pour elle[44]. »

XVIIIe siècle

Construction rurale et agricole en France

En France, en 1825, on ne peut que s'insurger « contre le mauvais état des bâtiments ruraux et les vices de leur construction. Les réflexions qu'il applique au département de la Seine-Inférieure, sont malheureusement communes à toute la France, et particulièrement aux provinces du centre, où l'on voit pèle-mêle entassés dans le même trou, hommes, femmes, enfants et animaux de toute espèces [45]. » Plusieurs moyens président pour construire un bâtiment rural[45]:

  • beaucoup de bâtiment sont construits en torchis, qui consistent en une charpente dont les interstices sont remplis avec de la terre argileuse mêlée de foin ou de paille. Ils présentent plusieurs désavantages dont celui d'être dispendieux en bois.
  • avec du caillou silex, ou avec du bloc marneux posé en mortier de chaux et sable, ou simplement avec de la poudre marneuse délayée à consistance de mortier: les rives de la Seine ne sont bordées que d'habitations construites avec des blocs de marne; les encoignures sont consolidées avec de petites pierres ou gros blocs, provenant de la même carrière. Rarement on rencontre dans ces constructions l'emploi de la brique qui est très-coûteux.
  • avec de la bauge montée par assises de dix-huit pouces de hauteur, sur une base en caillou et mortier: en Picardie et en Champagne une grande quantité de maisons sont bâties de bauge ou terre d'argile, mêlée de paille, construction qui a l'avantage de réserver le bois pour les ouvrages où son emploi est indispensable. Un bâtiment élevé en terre bien pétrie, sur une épaisseur convenable, et isolé du sol d'environ trois pieds , au moyen d'une base en caillou ou bloc posé en mortier, présente beaucoup de solidité et surtout d'économie. Il ne manque à ces bâtiments que des dimensions mieux calculées, et des distributions plus commodes, et lorsqu'ils sont attaqués par un incendie le toit et la charpente disparaissent, mais les quatre murs restent souvent intacts et dans leur parfait aplomb. La construction en bauge, pour les bâtiments ruraux, est donc préférable , sous tous les rapports, à celle que l'on fait en torchis, parce qu'elle est plus saine et moins dispendieuse.
  • avec de la terre sèche battue au pisoir, sur une base en caillou : l'architecte François Cointeraux (1740-1830), auteur d'un ouvrage sur la construction des maisons rurales en terre[46], a fait élever, aux environs de Paris, beaucoup de bâtiments en terre sèche, battue avec une masse qu'il appelle usoir. On élève une base en caillou et mortier avec des chaînes de brique,jusqu'à une hauteur de 3 pieds au-dessus du sol, sur une épaisseur de vingt à vingt-deux pouces. Sur cette base on pose deux tables de dix pieds de longueur et de deux pieds et demi de large; ces tables , posées sur leur champ, sont écartées l'une de l'autre de dix-huit à vingt pouces, qui est la dimension convenable pour l'épaisseur d'un mur en terre; leur aplomb est entretenu au moyen de poteaux et de traverses liées ensemble avec des coins et des cordes. Ces tables, ainsi disposées , forment les deux côtés d'un caisson dans lequel on verse de la terre sèche, qui d'abord est pétrie avec le pied, puis avec une masse en bois, appelée pisoir. Le caisson rempli de terre ainsi battue, se détache facilement et offre une portion de mur très-uni, de dix pieds de long et de deux pieds et demi de haut, pour laquelle on a employé trois ouvriers qui ont travaillé pendant trois heures au plus. Ces tables sont ensuite reportées sur une autre partie du bâtiment, pour faire une portion de mur de même dimension que la première, et ainsi de suite autour du bâtiment à construire. Ce genre de construction, qui me parait préférable à la bauge, peut être employé avec avantage pour faire un bâtiment rural, un logement de fermier, et une maison de maître, quelles que soient ses dimensions et son importance.

Le pisé exigeant de la terre sèche peut être exécuté sans interruption; la bauge, au contraire, qui nécessite une grande quantité d'eau, ne peut être exécutée que par assises de dix-huit pouces de hauteur, qu'il faut laisser sécher avant d'en faire une autre, afin de lui donner la consistance nécessaire pour soutenir le fardeau d'une assise. Enfin le bâtiment en bauge, clos et couvert, doit être bien sec avant d'être habité sans danger, ce qui n'a pas lieu avec le pisé, qui, étant très sec , peut être habité de suite.

  • avec des briques desséchées au soleil et posées avec un mortier d'argile, à la manière adoptée en Lorraine: l'exécution facile et peu coûteuse. On laboure en plusieurs sens une portion de terre dont la surface est calculée en raison de la dimension du bâtiment à construire; il bat avec une masse cette portion de terre et la forme en surface unie; puis, avec des règles et un tranchant,il coupe cette terre battue en lignes droites, espacées de 8 à 9 pouces,et par d'autres transversales de quatre à cinq pouces de distance. Tous ces carreaux ainsi tracés présentent un champ couvert de briques. Il laisse cette terre bien sécher et prendre le plus de consistance possible, et, après un temps convenable, il enlève chaque carreau qui Lui présente la forme d'une brique qui a deux pouces environ d'épaisseur. C'est avec de pareilles briques qu'il élève son bâtiment, en posant chaque assise, à la manière ordinaire , sur un lit de la même terre délayée en consistance de mortier.

Les métiers

En 1767, on distingue douze sortes d'ouvriers servant à la construction des édifices[47]:

Les architectes et le néoclacissisme

Article détaillé : Architecture néoclassique.

Le néoclassicisme est un mouvement artistique qui s'est développé dans la peinture, la sculpture, et l'architecture entre 1750 et 1830 environ. Contrairement au romantisme il sacrifie les couleurs pour la perfection de la ligne. Né à Rome au moment où l'on redécouvre Pompéi et Herculanum, le mouvement se propage rapidement en France par l'intermédiaire des élèves peintres et sculpteurs de l'Académie de France à Rome, et en Angleterre grâce à la pratique du Grand Tour de la jeunesse noble britannique, et dans le reste du monde.

En 1767, l'Architecte établit les plans, fait la description de tous les matériaux nécessaires , il fixe les prix de tous les ouvrages qui entrent dans la construction d'un Édifice: « Les Matériaux ne font pas tous d'une même qualité. L’étude d'un architecte doit avoir pour but d'en connaître toutes les propriétés, toutes les différences , et de s'en faire une pratique; de manière qu'au toucher et au coup-d'œil, il en porte un jugement sûr, et à l'abri de toutes les fraudes des Marchands[47] ».

L'Architecture a trois parties principales: l'Ordonnance, la Disposition ou la Distribution et la Bienséance.

  • L'Ordonnance est « ce qui donne à toutes les parties d'un Bâtiment, la juste grandeur qui leur est propre, par rapport à leur usage. Dans l'Ordonnance, ont parle des cinq Ordres architecturaux de leurs proportions, et de la manière de les mesurer. La mesure s'appelle Module, et c'est toujours le diamètre du bas de la tige de la colonne. Par cette mesure divisée en 60 minutes, et « moyenne entre celles dont les Anciens, et dont les Modernes se sont servis », est déterminée sans fraction la hauteur des Piédestaux, des Colonnes, des Entablements, et de tous les divers membres qui les 1a composent ; de même que la saillie de leurs Bases, de leurs Chapiteaux et de leurs Corniches. »
  • La Distribution est « l'arrangement convenable de ces parties. C'est la Distribution qui décide des longueurs , des largeurs, et des hauteurs d'un Édifice. »
  • La Bienséance est ce qui fait, que cette distribution est telle « qu'on n'y puisse rien trouver qui soit contraire à la nature, à l'accoutumance, et à l'usage des choses. La Bienséance exige qu'un Édifice n'ait ni plus ni moins de magnificence, qu'il n'en convient à sa destination c'est-à-dire, que la décoration des Bâtiments ne doit pas être arbitraire qu'il faut qu'elle soit toujours relative au rang et à la qualité de ceux qui l'habitent, et conforme à l'objet que l'on a eu en vue. Pour dire quelque chose de moins vague, distinguons les Édifices publics d'avec les Maisons particulières. »[47]

XIXe siècle

Le Printemps des peuples

Victor Horta - Vestiges de la Maison du Peuple - 1896

Charles Fourier pose en 1808 les bases d'une réflexion sur une société communautaire dans son ouvrage Théorie des quatre mouvements et des destinées générales, qu’il poursuivit sous forme d’un grand traité dit de l’Association domestique et agricole. Cet ouvrage monumental est publié, bien qu’inachevé, en 1822. Dans le but d’être mieux compris, il se contraignit ensuite à rédiger un résumé de sa théorie, intitulé Le Nouveau Monde industriel et sociétaire, qu’il publie en 1829.

Jean-Baptiste André Godin, sensible à l'idée de la redistribution des richesses industrielles aux ouvriers, souhaite créer une alternative à la société industrielle en plein développement à son époque, et offrir aux ouvriers le confort dont seuls les bourgeois pouvaient alors bénéficier. À partir de 1859, il entreprend de créer un univers autour de son usine de Guise, le familistère, dont le mode de fonctionnement peut être considéré comme précurseur des coopératives de production d'aujourd'hui. Il favorise le logement en construisant le Palais Social (logements modernes pour l'époque), des lavoirs et des magasins d'approvisionnements, l'éducation en construisant une école obligatoire et gratuite, les loisirs et l'instruction avec la construction d'un théâtre, d'une piscine et d'une bibliothèque. Tous les acteurs de l'entreprise avaient accès aux mêmes avantages quelle que soit leur situation dans l'entreprise. La construction du familistère de Guise s'étend de 1859 à 1884. Au cours de cette période, l'activité de la manufacture se développe considérablement pour employer jusqu'à 1500 personnes.

En 1847, Karl Marx écrit dans le Manifeste communiste : « L'histoire de toute société jusqu'à nos jours est l'histoire de luttes de classes ». S'inspirant du matérialisme antique (sa thèse d'admission au doctorat portait sur l'atomisme de Démocrite et Épicure et sa théorie du clinamen, qui lui permettait de préserver la liberté de la volonté humaine au sein d'une théorie physique déterministe) et se voulant une critique de l'économie politique, la pensée de Karl Marx est résolument matérialiste.

L'année 1848 voit une floraison de révolutions à travers l’Europe, appelées dans leur ensemble le Printemps des peuples ou le Printemps des révolutions.

En 1864, la loi Ollivier abroge La loi Le Chapelier et met fin à l'interdiction des corporations, des rassemblements ouvriers et du compagnonnage. En 1884, la loi Waldeck-Rousseau, votée le 21 mars 1884 autorise les syndicats en France.

L'ouvrier

Le maçon est un ouvrier qui exécute les constructions en pierres naturelles ou artificielles, et les enduits eu mortier. Ils se répartissent en:

  • Les manœuvres et les garçons qui exécutent les parties du travail qui n'exigent guère que de la force.
  • les compagnons qui posent la pierre et font les enduits,
  • les maîtres-compagnons qui surveillent et dirigent plusieurs ouvriers dont ils assurent l'ensemble,
  • le maître qui prépare les détails, dirige les hommes et surveille la nature aussi bien que l'emploi des choses, constituent les principaux éléments de la maçonnerie. Chacune de ces classes de travailleurs renferme une spécialité d'autant plus tranchée qu'elle s'éloigne davantage des deux extrêmes. Le maître se distingue, par la faculté de comprendre en même temps l'ensemble et les détails, l'unité et la variété, l'idée et son exécution, est un architecte, moins l'esprit d'invention peut-être[32].

Eugène Viollet-le-Duc à propos du niveau d'instruction des ouvriers:

« On s'occupe beaucoup des ouvriers depuis quelques années; on pense à assurer leur bien-être, à trouver des refuges pour leur vieillesse; le côté matériel de leur existence s'est sensiblement amélioré. Mais pour ce qui est du bâtiment, on ne s'est peut-être pas assez occupé de leur instruction, de relever la façon. Le système de la concurrence, qui certes présente de grands avantages, a aussi des inconvénients: il tend à avilir la main d'œuvre, à faire employer des hommes incapables de préférence à des hommes habiles, parce que les premiers acceptent des conditions de salaire inférieures, ou bien parce qu'ils font en moins de temps et plus mal, il est vrai, tel travail demandé. Ce n'est pas là un moyen propre à améliorer la situation morale de l'ouvrier. Les chantiers ouverts sur plusieurs points de la France pour la restauration de nos anciens édifices du moyen âge ont formé des pépinières d'exécutants habiles, parce que, dans ces chantiers, la perfection de la main-d'œuvre est une condition inhérente au travail. Tout cela est à considérer, mais ce qu'il faudrait, c'est un enseignement pour les ouvriers de bâtiments; le système des corporations n'existe plus, il serait nécessaire de le remplacer par un système d'enseignement appliqué. En attendant, les architectes, sur leurs chantiers, peuvent prendre une influence très-salutaire sur les ouvriers qu'ils emploient, s'ils veulent se donner la peine de s'occuper directement du travail qui leur est confié, et s'ils ne dédaignent pas de leur expliquer eux-mêmes les moyens les plus propres à obtenir une exécution parfaite[30]. »

XXe siècle

Les architectes

L'Art nouveau est un mouvement artistique de la fin du XIXe et du début du XXe siècle qui s'appuie sur l'esthétique des lignes courbes. Né en réaction contre les dérives de l’industrialisation à outrance et la reproduction sclérosante des grands styles, c'est un mouvement soudain, rapide, mais également très bref et puissant puisqu'il connaîtra un développement international concomitant : Tiffany (d'après Louis Comfort Tiffany aux États-Unis), Jugendstil en Allemagne, Sezessionstil en Autriche, Nieuwe Kunst aux Pays-Bas, Stile Liberty en Italie, Modernisme en Catalogne, Style sapin en Suisse, Style Moderne en Russie. Le terme français « Art nouveau » s’est imposé en Grande-Bretagne, en même temps que l’anglomanie en France a répandu la forme Modern Style au début du XXe siècle[48].

De 1920 à 1939, l'Art déco est une continuation à l'Art nouveau

Le Mouvement moderne, l’Architecture moderne, parfois également dit modernisme, est un courant de l’architecture avec le mouvement du Bauhaus, caractérisé par un retour au décor minimal et aux lignes géométriques pures, une tendance à la subordination de la forme au prédicat fonctionnel et une exergue de la rationalité, grâce notamment au déploiement de techniques et de matériaux nouveaux.

Aux États, les gratte-ciel

Le gratte-ciel, naît aux États-Unis vers la fin du XIXe siècle. La reconstruction de Chicago après le grand incendie de 1871 a permis l’émergence d’une nouvelle approche de la construction d’immeubles afin de réduire les coûts liés à l’augmentation du prix des terrains. Il fallait trouver un moyen pour se protéger en même temps de l’eau (surélévation) et du feu (ossature d’acier emballée de revêtements pare feu et non plus de bois), ce moyen devait être rapide, solide, facile d’assemblage. C’est ainsi que William Le Baron Jenney fut amené à élaborer un système de structure interne sur laquelle repose tout l’édifice, le mur extérieur n’ayant plus rien à porter. Il tira également parti de l'invention de l'ascenseur mécanique et notamment de l'ascenseur de sécurité par Elisha Otis. Les premiers architectes de ce que l’on a appelé plus tard l’école de Chicago ont créé par leurs œuvres et par leur influence un modèle de développement urbain qui a caractérisé toutes les villes américaines au XXe siècle.

XXIe siècle

Information et construction

L'invention du microprocesseur en 1969, l'apparition des premiers ordinateurs personnels dans les années 1970, de la DAO (dessin assisté par ordinateur), la CAO (conception assisté par ordinateur), FAO (Fabrication assistée par ordinateur) transforment le travail de conception et de construction des bâtiments. Les logiciels à destination de la construction se développent à partir des années 1990, chacun des métiers de la construction ayant le sien. Des logiciels sophistiqués permettent de simuler le comportement des structures sollicitées à leur dernière extrémité ou des solutions formelles audacieuses. Le BIM (Building Information Modeling) s'intéresse au processus de production et la gestion des données de construction tout au long de la conception d'un bâtiment. Les logiciels BIM sont des logiciels de modélisation dynamique utilisant les trois dimensions. Ils visent à à faciliter les échanges d'informations et l'interopérabilité par rapport aux autres logiciels. La mise au point de standards comme les IFC (Industry Foundation Classes) visent à remplacer un système d'information fragmenté en une solution interopérable autour d'un modèle de donnée commun; tous les acteurs d'un projet de bâtiment (architectes, ingénieurs, bureaux d'étude, maître d'ouvrage, entreprises...) enrichissent un modèle commun du projet; le modèle informatique permet de caractériser une construction sous toutes ses facettes, et ce durant toutes les phases de son cycle de vie.

Notes et références

  1. Jean-Pierre Adam. La Construction romaine. Matériaux et techniques. Sixième édition. Grands manuels picards. 2011
  2. Universidad de Salamanca : Louis Callebat, "Architecte", histoire d'un mot, dans Histoire de l'architecte, Flammarion, Paris, 1988
  3. Jean Charbonneaux, Roland Martin, François Villard, Grèce archaïque, pp. 2-17, Galimard (collection "L'univers des formes"), Paris, 1968
  4. a et b Gwen-Haël Denigot. Le temple un édifice où le temps s'arrête. Extra Le vif l'express 4 au 10 novembre 2011.
  5. a, b, c et d Stéphanie Pioda. Les charpentiers au faîte de leur art. Extra Le vif l'express 4 au 10 novembre 2011.
  6. J. M. Hurwit, The Acropolis in the Age of Pericles, 87 etc.
  7. Terry Buckley, Aspects of Greek History, p. 206
  8. Angelos Vlachos, Thucydides' Bias, p. 62
  9. Thucydide, Histoire de la guerre du Péloponnèse [détail des éditions] [lire en ligne] (2.65)
  10. a et b Plutarque. Vies des hommes illustres. Traduction par Alexis Pierron. 1 Charpentier, 1853
  11. a, b et c Charles Bossut. Histoire générale de mathématiques depuis leurs origines jusqu'à l'année 1808. (Livre numérique Google)
  12. Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition, 1932-1935
  13. Romane, memento : hae tibi erunt artes; pacisque imponere morem, parcere subiectis, et debellare superbos. Debellare superbos Virgile, l’Énéide, 6, 851-852.
  14. Jean-Jacques Ampère. L’Histoire romaine à Rome. 1862 Bibliothèque nationale de France. Sur Wikisource
  15. a et b Édouard Bonnaffé. Les Collectionneurs de l'ancienne Rome, notes d'un amateur. Aubry, 1867 Livre numérique Google
  16. En vérité, dit Cicéron (qui affecte dans ses Verrittes d'ignorer jusqu'au nom des maîtres les plus accrédités de la Grèce), en vérité on ne saurait imaginer combien les Grecs attachent d'importance à toutes ces choses que nous méprisons (contemnimus). Nos ancêtres permettaient aux peuples tributaires de conserver ces objets d'art, si frivoles à nos yeux, afin qu'ils y trouvassent une consolation, un amusement dans leur esclavage. » Ailleurs il appelle les objets d'art des bagatelles, des joujoux bons pour amuser les enfants. Dans Bonnaffé. Les Collectionneurs de l'ancienne Rome, notes d'un amateur. Aubry, 1867
  17. Vitruve, VII, i5.
  18. a, b, c, d, e, f et g E. Levasseur. Histoire des classes ouvrières en France : depuis la conquête de Jules César jusqu'à la Révolution, volume 1. Librairie de Guillaumin et Cie, 1859 Livre numérique Google
  19. Philippe Leveau. L'archéologie des aqueducs romains ou les aqueducs romains entre projet et usage. Sur le site traianvs.net
  20. a et b Stefano Camporeale, Hélène Dessales, Antonio Pizzo. Arqueología de la construcción. CSIC, 2008 Google books
  21. Adam J.-P., La Technique romaine, matériaux et techniques. Paris, 2° éd., 1989
  22. Pouzzoles autrefois Putéoli, d'où le nom de pulvis Puteolanus que lui donnent Sénèque (Quest. Nat., liv. III) et Pline (Hist. nat., liv. xxxv, ch. 13). Vitruve l'appelle Baianus et CumanusL'architecture de Vitruve. Tome 1 / traduction nouvelle par M. Ch.-L. Maufras C.-L.-F. Panckoucke (Paris).1847 sur gallica.bnf.fr
  23. Le volcanisme athogien sur volcans-ardeche.com
  24. Vitruve dans son De architectura. Livre II, chapitre 6
  25. Louis Joseph Vicat. Traité pratique et théorique de la composition des mortiers, ciments et gangues a pouzzolanes et de leur emploi dans toutes sortes de travaux. Livre google
  26. « Le prix des denrées, dit-il dans le préambule, négociées dans les marchés ou apportées journellement dans les villes, a tellement dépassé toutes les bornes, que le désir effréné du gain n'est modéré ni par l'abondance des récoltes, ni par l'affluence des denrées. C'est pourquoi nous ordonnons que dans tout notre empire on se contente désormais des prix que nous avons fixés dans le tableau suivant1 :
  27. Alain Ducellier, Michel Kaplan et Bernadette Martin, Le Proche-Orient médiéval, Hachette, 1978, p.24
  28. BnF - Trésors carolingiens : Renaissance carolingienne
  29. a, b, c, d, e et f François Icher. Les Compagnons ou l'amour de la belle ouvrage. Découverte Gallimard.
  30. a, b, c et d Eugène Viollet-le-Duc Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle
  31. Étienne Boileau, Georges-Bernard Depping. Règlements sur les arts et métiers de Paris, rédigés au 13e siècle, et connus sous le nom du Livre des métiers d'Étienne Boileau. Crapelet, 1837. Numérisé par Google
  32. a et b Ange de Saint-Priest. Encyclopédie du dix-neuvième siècle: répertoire universel des sciences, des lettres et des arts avec la biographie de tous les hommes célèbres. (Livre numérique Google)
  33. a, b, c, d et e E. Levasseur. Histoire des classes ouvrières en France : depuis la conquête de Jules César jusqu'à la Révolution, volume 2. Librairie de Guillaumin et Cie, 1859 Livre numérique Google
  34. Élisabeth Crouzet-Pavan d'après Giuliano Pinto, Villes de Flandre et d'Italie : relectures d'une comparaison traditionnelle, chap. 22 [1]
  35. a, b et c René Vittone. Bâtir : Manuel de construction. Presses polytechniques et universitaire romandes. 2010.
  36. Jacques François Blondel. Cours d'architecture ou traité de la décoration, distribution et construction des bâtiments: contenant les leçons données en 1750 et les années suivantes dans son école des arts, Volume 1. Desaint, 1771. (Livre numérique Google)
  37. a, b et c Adriaan Linters, Industria, Architecture industrielle en Belgique, Pierre Mardaga éditeur 1986
  38. Construccion del Canal de Panama
  39. François Prosper Jacqmin, Ecole nationale des ponts et chaussées (France). Des machines à vapeur: Leçons faites en 1869-1870 à l'École impériale des ponts et chaussées, Volume 1. Garnier frères, 1870(Livre numérique Google)
  40. Helmut C. Schulitz, Werner Sobek, Karl J. Habermann. Construire en acier. PPUR presses polytechniques, 2003. Google books
  41. François Coignet. Bétons agglomérés appliqués à l'art de construire. E. Lacroix, 1861. Livre numérique Google.
  42. Gaspard Monge. Géométrie descriptive. Modèle:Vve Courcier, 1820. (Livre numérique Google)
  43. Frémy-Ligneville. Traité de la législation des bâtiments et constructions : doctrine et jurisprudence civiles et administratives, concernant les devis et marchés, la responsabilité des constructeurs, leurs privilèges et honoraires ...Carilian-Gœury et Dalmont, 1848 Livre numérique Google
  44. Henri Saint-Simon (comte de), Catéchisme des industriels, Imprimerie de Sétier, 1823 (Livre numérique Google)
  45. a et b A. Sénac, J. J. Jung. Bulletin des sciences agricoles et économiques : Quatrième section du Bulletin universal des sciences et de l'industrie, Volume 3. 1825 (Livre numérique Google)
  46. Cointeraux, François École d'architecture rurale, ou Leçons par lesquelles on apprendra soi-même à bâtir solidement les maisons de plusieurs étages avec la terre seule, ou autres matériaux les plus communs et du plus vil prix. Constructions économiques pour les campagnes, ou Batimens incombustibles ([Reprod.]) / par François Cointeraux,... ; rapport des commissaires de la Société royale d'agriculture. Paris . 1790. Sur (Livre numérique Google)
  47. a, b et c Jean Raymond de Petity. Encyclopédie élémentaire ou introduction à l'étude des lettres, des sciences et des arts, Volume 2. 1767. Livre numérique Google
  48. L'Art nouveau vu en 1900

Voir aussi

Liens internes

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