- Unionisme (États-Unis)
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L'unionisme américain était un courant politique qui s'est développé dans la décennie de 1850 et dans les premières années de la décennie 1860, avant et durant la guerre de Sécession[1].
Sommaire
Plusieurs types d'unionistes
A l'origine, l'unionisme fut le fait de minorités au sein des deux grands partis politiques américains de la première moitié du dix-neuvième siècle : les Whigs et les Démocrates. C'est en réaction aux idées sécessionnistes qui se répandaient chez les Whigs et les Démocrates du Sud, que ces dissidents se formèrent en Parti Républicain en 1854, mettant peu à peu un terme à l'existence des Whigs dans le Nord. L'unionisme fut donc un fait largement républicain : c'était la base de la doctrine du parti, avant même l'abolitionnisme.
Toutefois, contrairement à la norme de la politique américaine, il y eut aussi des unionistes chez les Démocrates ; et ces factions furent elles-mêmes divisées.
Unionistes républicains
Les unionistes républicains étaient intransigeants sur le droit de sécession des États du Sud (regroupés en États confédérés d'Amérique) et affirmaient qu'il s'agissait d'une usurpation : ces États ne pouvaient pas quitter l'Union et ne l'avaient pas fait, ils en faisaient toujours partie et n'étaient que la proie d'une rébellion d'envergure par laquelle les postes officiels avaient été usurpés. En conséquence, la quasi-totalité des unionistes républicains était pour la guerre en tant que moyen de rétablir l'unité.
Comme ces unionistes dominants étaient surtout issus des États du nord-est de la fédération, on leur donna communément le nom de nordistes. Durant la Guerre de Sécession, les forces militaires « nordistes » se désignaient elles-mêmes sous le nom de troupes fédérales.
Parmi les unionistes républicains, il y en avait de "durs" (partisans d'une victoire totale et d'une capitulation sans conditions du Sud) et de "modérés" (désireux d'éviter des destructions trop vastes). Dans les moments d'abattement, lors des grandes défaites de l'Union, de nombreux unionistes pensèrent à abandonner leur résolution pour reconnaître le Sud indépendant.
Ce débat se compliquait de la question du reconstructionnisme : il s'agissait en fait d'une querelle en coulisses entre le Congrès et le Président.
- Pour le premier, les États confédérés existaient encore en tant qu'États de l'Union et il suffirait de nouvelles élections pour qu'ils soient réintégrés. Cette solution les aurait laissés quasiment semblables à ce qu'ils étaient avant la guerre.
- Pour le second, ces Etats s'étaient déchus de leurs droits et devaient être régis par l'exécutif, qui pourrait alors tout changer de leur législation, en attendant leur réadmission au Congrès. Cela signifiait notamment que Lincoln pourrait y abolir l'esclavage[2] et y confisquer les biens des planteurs, âme de la révolte, et ainsi démanteler la société sudiste ; projet qu'on lui prêtait volontiers malgré ses dénégations fréquentes[3].
Unionistes démocrates
Les unionistes démocrates reconnaissaient le droit de sécession, ou préféraient ignorer la question, et souhaitaient obtenir la réunion par des négociations. Leur chef de file étaient le général George B. McClellan, général en chef au début de la guerre, qui espérait obtenir la réunion par une victoire militaire limitée. Leur objectif consistait à prendre le pouvoir par les urnes dans plusieurs Etats, afin de retirer du combat les troupes qui en étaient issues, ce qui forcerait le gouvernement à cesser les hostilités et mènerait à une paix négociée entre les Etats, le gouvernement fédéral ayant été rendu impuissant.
Malgré plusieurs victoires électorales, ils ne parvinrent jamais à imposer leurs motions, le système politique américain permettant au gouvernement de toujours paralyser leurs initiatives : ainsi le gouverneur républicain du Maryland n'appela jamais la magistrature démocrate à siéger, et gouverna par décrets et emprunts.
Unionistes confédérés
Il y eut des unionistes dans le Sud, qui se firent surtout entendre dans la seconde moitié de la guerre. Mais là comme dans le Nord, ils échouèrent à s'imposer. Cela vient d'une part du patriotisme exalté de nombreux Sudistes, qui voyaient la réunion comme une trahison ; d'autre part de l'absence de partis politiques structurés dans le Sud, qui empêcha les unionistes de coordonner leur action.
L'existence d'un unionisme sudiste, grossie par l'incertitude, eut cependant un effet non négligeable sur le début de la guerre en poussant Lincoln à parfois retenir ses armées, dans l'espoir qu'une attitude conciliante permette à certains Etats de revenir à l'Union.
Le rôle d'Abraham Lincoln
C'est l'élection d'Abraham Lincoln, candidat républicain, à la présidence des Etats-Unis qui provoqua la Sécession dans les premiers mois de 1861, et qui acheva par contrecoup la polarisation entre unionistes et sécessionnistes. A cette date, A. Lincoln tenait plus ou moins la ligne médiane de son parti :
- il était abolitionniste modéré, partisan d'une interdiction de l'esclavage sur tout le territoire de la République nord-américaine, mais pas de mesures coercitives ni trop rapides, qui auraient selon lui posé plus de problèmes qu'elles n'en auraient résolu ;
- il croyait aux intérêts supérieurs des Etats du nord de la fédération, qu'il jugeait plus apte à développer le continent que les structures agricoles du Sud ;
- il était partisan d'une politique économique protectionniste à l'égard des produits manufacturés européens et en particulier britanniques ; politique que le Sud refusait car les droits de douane auraient donné trop de ressources au gouvernement fédéral ;
- il souhaitait combattre l'influence de plus en plus forte des États ruraux du Sud (avec leurs grandes plantations de coton exportatrices vers les concurrents européens) ;
- avocat de formation, il contestait le droit des États sécessionistes de quitter l'Union et de constituer leur propre confédération, au nom des "Articles de confédération et d'union perpétuelle" votés par le Congrès des représentants des anciennes colonies anglaises, séparées de la Couronne britannique, à Philadelphie en 1778. La Cour suprême des États-Unis lui donnera d'ailleurs raison dans les premiers mois de la guerre.
Dans le même temps, Lincoln ne voulait pas aggraver les tensions par une politique unilatérale : il navigua constamment entre les différentes ailes de son parti (abolitionnistes, modérés, libéraux...) et sut toujours tenir compte des structures politiques et juridiques de son pays, aidé en cela par sa profession d'avocat. Il attendit aussi longtemps avant de proclamer l'émancipation des esclaves noirs, afin de ne pas s'aliéner les nombreux habitants du Nord qui refusaient l'égalité raciale : il ne le fit que lorsque l'opinion publique eut admis que les Noirs avaient gagné leurs droits en servant dans l'armée.
Les unionistes, criminels de guerre ?
Les confédérés ou sudistes ont souvent accusé les troupes fédérales de cruauté, de pillage, de viols et de meurtres sur les civils, ainsi que l'utilisation pour la première fois des bombardements massifs sur les villes. Ils attribuent tout cela aux unionistes qui auraient ourdi un plan délibéré de destruction du Sud.
Il convient cependant de remarquer :
- que les Sudistes se rendirent eux-mêmes coupables de négligence dans leurs camps de prisonniers, entraînant la mort de nombreux soldats de l'Union ;
- que les civils fusillés au Kansas ou dans la vallée de la Shenandoah étaient pour la plupart des guérilleros sudistes, ou des gens qui les soutenaient, et avaient donc eux-mêmes choisi d'être les cibles de la répression fédérale ;
- que la destruction partielle de certaines villes comme Atlanta fut certainement accidentelle, et activement combattue par les troupes nordistes lorsque leurs chefs arrivèrent sur les lieux ;
- que, si certains engagés volontaires nordistes (surtout ceux qui avaient été alléchés par la prime d'engagement en 1863) se sont effectivement rendus coupables de crimes de guerre, les traînards et déserteurs des troupes confédérées le furent aussi, de l'aveu même de certains Sudistes ; ce qui se produit d'ailleurs dans toutes les armées et à toutes les époques ;
- que l'action de William Tecumseh Sherman lorsque son armée traversa le Sud de part en part, si elle fut effectivement très dure, ne fit quasiment pas de pertes en vies humaines, son but étant avant tout de paralyser l'économie sudiste et de détruire la volonté de combattre des populations ;
- qu'il y eut peu de sièges de villes occupées lors desquels l'Union put utiliser son artillerie de façon intensive : la plupart des opérations eurent lieu soit dans des agglomérations qui avaient été évacuées (comme Fredericksburg), soit autour de villes qui ne furent pas elles-mêmes lieu de combats (comme à Atlanta).
Notes et références
- James M. McPherson : La Guerre de Sécession (1861-1865), Robert Laffont, 1991 (ISBN 2-221-06742-8). Prix Pulitzer 1989. Titre original: Battle Cry of Freedom : The Era of the Civil War. Le contenu de cet article est largement tiré du livre de
- Il suffisait pour cela que les assemblées constituantes, nécessaires pour écrire la Constitution des nouveaux États et pour demander leur admission, soient forcées d'y inclure une clause de liberté universelle. ce fut le cas en Louisiane, sous administration militaire dès 1862.
- Lincoln passa la guerre à expliquer, en public comme en privé, qu'il n'avait guère de préférences personnelles quant à ses buts, malgré son horreur personnelle de l'esclavage ; mais qu'il ferait tout ce qui serait nécessaire pour la gagner, jusqu'à l'abolition si cela devait s'avérer efficace. La guerre décida pour lui.
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