- Théorème de Morley
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En mathématiques, et plus précisément en géométrie plane, le théorème de Morley, découvert par Frank Morley (en) en 1898, affirme que :
« Les intersections des trissectrices des angles d'un triangle forment un triangle équilatéral »Le triangle équilatéral ainsi défini par le théorème de Morley s'appelle le « triangle de Morley » du triangle de départ.
Sommaire
Démonstrations
Première démonstration
Cette méthode simple utilise les lois trigonométriques.
On peut en effet déterminer, d'après la loi des sinus, la longueur de la plupart des segments à partir des côtés du triangle. Par ailleurs, le théorème d'Al-Kashi nous permet de déterminer et de comparer les autres, notamment QR, PR, et PQ - les trois côtés du triangle rouge, celui qui est censé être équilatéral.
On définit les angles a, b et c tels que :
Puisque dans tout triangle on a :
notre changement de variable ci-dessus donne :
- .
De plus, pour simplifier les calculs on adopte une unité telle que le rayon du cercle circonscrit au triangle est 1. On a alors :
- AB = 2 sin(3c)
- BC = 2 sin(3a)
- AC = 2 sin(3b).
Dans le triangle BPC, d'après la loi des sinus, on a :
On peut développer sin(3a) :
- sin(3a) = 3sin(a) - 4sin3(a)
- 3sin(a) - 4sin3(a) = 4sin(a)[(√3/2)² - sin²(a)]
- 4sin(a)[(3/2)² - sin²(a)] = 4sin(a)[sin²(60°) - sin²(a)]
- 4sin(a)[sin²(60°) - sin²(a)] = 4sin(a)[sin(60°) + sin(a)][sin(60°) - sin(a)]
- 4sin(a)[sin(60°) + sin(a)][sin(60°) - sin(a)] = 4sin(a) 2sin[(60°) + a)/2]cos[(60°) - a)/2] × 2sin[(60°) - a)/2]cos[(60°) + a)/2]
- sin(a) 2sin[(60°) + a)/2]cos[(60°) - a)/2] × 2sin[(60°) - a)/2]cos[(60°) + a)/2] = 4sin(a)sin(60° + a)sin(60° - a)
Ce qui nous permet de simplifier l'expression de BP :
Mais que l'on peut appliquer également à BR :
Al-Kashi nous donne : PR² = BP² + BR² - 2BPBR cos(b). Si on développe, on obtient :
Or, (60° + a) + (60° + c) + b = 120° + (a + b + c) = 120° + 60° = 180 °. Parmi les triangles ayant pour angle 60° + a, 60° + c et b dont le rayon du cercle circonscrit est 1, si on applique Al-Kashi, on a :
- sin²(b) = sin²(60° + a) + sin²(60° + c) - 2 sin(60° + a) sin(60° + c) cos(b)
- PR = 8 sin(a) sin(b) sin(c)
- PQ = 8 sin(b) sin(a) sin(c)
- QR = 8 sin(a) sin(c) sin(b)
- PR = PQ = QR
Le triangle PQR est donc bien équilatéral.
Deuxième démonstration
Cette démonstration est basée sur un article d'Alain Connes[1]. Elle utilise les nombres complexes et donne un calcul rapide de l'affixe des sommets du triangle équilatéral.
Plaçons-nous dans le plan euclidien orienté que nous pourrons ultérieurement identifier au corps des complexes. Désignons par P, Q et R les 3 intersections de trisectrices dont on veut montrer qu'elles forment un triangle équilatéral. En outre plaçons les points P', Q' et R' symétriques de P, Q et R respectivement par rapport à BC, CA, AB (voir figure ci-contre). Désignons enfin respectivement par la détermination principale (comprise entre et ) des angles .
Soient maintenant les rotations de centres respectifs A, B, C et d'angles respectifs .
- (i) P (resp. Q, R) est le point fixe de (centre de cette rotation) (resp. ).
En effet h transforme P en P' et g transforme P' en P (immédiat: voir figure). Il en est de manière analogue pour Q et R.
- (ii) (application identique).
En effet la somme des angles des rotations composantes est 2π et on obtient donc une translation. Mais A est invariant puisque h3 (rotation de centre C et d'angle 2γ ) transforme A en A' symétrique de A par rapport à BC, g3 transforme A' en A et finalement f3 laisse A invariant. Par suite cette translation est l'application identique.
Il est tout à fait remarquable que les seules propositions (i) et (ii) ci-dessus sont suffisantes pour en déduire le caractère équilatéral du triangle PQR.
Ainsi, nous allons désormais travailler dans le corps des complexes en conservant les notations que nous avons introduites.
Nous définissons simplement les rotations par
- .
Un calcul rapide montre que (i) équivaut à
Quant à (ii) on montre aisément l'équivalence avec
- (iii)
Comme , on voit que ou . Supposons pour fixer les idées que (cela correspondra dans l'application à un triangle ABC de sens positif). On a alors
On peut alors vérifier que P + jQ + j2R = 0, ce qui est une caractérisation classique du caractère équilatéral direct du triangle PQR.
Démonstration de P + jQ + j2R = 0
avec Π = (a1 − j)(a2 − j)(a3 − j)
Le coefficient de b1 dans le numérateur de l'expression ci-dessus estLe coefficient de b2 dans le même numérateur est
Enfin le coefficient de b3 dans le même numérateur est a1(a2 − j)(a3 − j)a2 + ja2(a3 − j)(a1 − j)
Finalement, en utilisant ces résultats et en remplaçant on obtient
.
Naturellement si le triangle ABC est de sens rétrograde, on devra prendre et on obtient PQR équilatéral de sens rétrograde.Dans le cas où ABC est de sens direct, on a en fait
et donc et expressions analogues pour . Il est donc très aisé de déterminer P, Q et R.
Triangle de Morley
Longueur des côtés
Chaque côté du triangle de Morley mesure :
- 8R sin A/3.sin B/3.sin C/3,
où R désigne le rayon du cercle circonscrit au triangle de départ.
Orientation du triangle de Morley
- Orientation par rapport au triangle de départ : le côté B'C' du triangle de Morley situé le plus près du sommet A fait avec le côté BC du triangle de départ un angle égal à (C-B)/3, où C et B désignent les angles BCA et ABC.
- Orientation par rapport à la deltoïde de Steiner : le triangle (équilatéral) formé par les points de rebroussement de la deltoïde de Steiner et le triangle (équilatéral) de Morley, ont leurs côtés parallèles.
Historique
Après la découverte de ce théorème par Frank Morley à la fin du XIXe siècle, les collègues de ce dernier trouvaient le résultat si beau qu'ils lui ont donné le nom de « miracle de Morley ». Comme l'écrit Richard Francis, « Apparemment ignoré par les géomètres antérieurs ou hâtivement abandonné en raison d'incertitudes liées à la trisection et à la constructibilité, le problème n'apparut réellement qu'il y a un siècle ». Par ailleurs, même si Morley a proposé une solution au problème, la preuve rigoureuse du théorème a été plus tardive[2].
Notes et références
- Alain Connes, « A new proof of Morley's theorem », dans Publ. Math. IHES, vol. S88, 1998, p. 43–46 [texte intégral](en)
- Clifford Pickover, Le Beau Livre des Maths : De Pythagore à la 57e dimension, Dunod, 2010 (ISBN 978-2-10-054640-4), p. 296
Liens externes
Catégories :- Théorème de géométrie
- Géométrie du triangle
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