Tarification a l'activite

Tarification a l'activite

Tarification à l'activité

La Tarification à l'Activité (T2A) est un mode de financement des établissements de santé français issu de la réforme hospitalière du plan Hôpital 2007, qui vise à médicaliser le financement tout en équilibrant l'allocation des ressources financières et en responsabilisant les acteurs de santé.

La Tarification à l'Activité constitue un mode de financement qui vise à la mise en place d'un cadre unique de facturation et de paiement des activités hospitalières des établissements de santé publics et privés (EPS, PSPH, EP, SSR, PSY et CLCC) dans lequel l'allocation des ressources est fondée à la fois sur la nature et le volume de leurs activités. La logique de moyens qui prévalait jusque là cède la place à une logique de résultats conforme à l'esprit de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La T2A est un élément central de la « Nouvelle Gouvernance Hospitalière » mise en place par les ordonnances de mai et septembre 2005, dans la mesure où ce sont désormais les recettes issues des activités hospitalières qui vont déterminer les dépenses et non l'inverse.

Sommaire

Un financement repensé en cohérence avec la LOLF

La loi du 18 décembre 2003 (art. 22 à 34) modifie profondément les modalités de financement des établissements de santé, passant d'une logique de moyens à une logique de résultats. Jusqu'en 2003, les deux modalités de financement par l'Assurance Maladie distinguaient d'une part les Établissements publics de santé (EPS) et les Établissements privés participant au service public hospitalier (PSPH), et d'autre part les établissements hospitaliers à but lucratif (EHBL).

Financement des ESP/PSPH avant la réforme T2A

Les établissements publics de santé ainsi que les établissements privés participant au service public de santé recevaient, depuis la loi du 19 janvier 1983, une dotation globale de fonctionnement (DG) annuelle, reconduite chaque année en l'absence de toute négociation réelle entre l'autorité de tutelle et l'établissement. La DG était ainsi calculée sur la base de l'exercice précédent modulé du taux de croissance des dépenses hospitalières, déconnectant ainsi les moyens de l'évolution de l'activité.

Financement des établissements de santé à but lucratif avant la réforme T2A

La structure étant ici séparée des praticiens, les hôpitaux privés facturaient directement à l'Assurance Maladie les forfaits de prestation (rémunération de la structure) et les actes (rémunération des praticiens libéraux), sur la base de tarifs variables géographiquement et négociés avec l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH). Les forfaits de prestation étaient ainsi encadrés par la mise en place d'objectifs quantifiés nationaux (OQN) visant à réguler le financement par rapport à l'activité.

Mécanisme actuel de financement des activités de Médecine, Chirurgie, Gynécologie-Obstétrique, Odontologie (MCOO)

Depuis mars 2008, on dit même MCOO : Médecine, Chirurgie, Gynécologie-Obstétrique, Odontologie.

La disparité ainsi créée entre établissements publics et établissements privés complexifiait les dispositifs de contrôle du financement et la lecture des coûts du système hospitalier. La réforme de 2004 vise ainsi à simplifier le schéma d'allocation des ressources, tout en l'équilibrant : la T2A met en place un mode unique de financement pour les activités de Médecine, Chirurgie et Obstétrique (MCO) des établissements de santé publics et privés, basé sur une distribution des ressources en fonction du volume et de la nature de leurs activités. Désormais, les ressources sont calculées à partir d'une estimation d'activités et donc de recettes (le prix de chaque activité étant fixé par l'assurance-maladie via le mécanisme des GHM/GHS).

Modalités de financement

Les recettes des établissements de santé (publics et privés) étant générées par le niveau d'activité, les modalités de financement des activités MCO par l'assurance-maladie se trouvent naturellement et profondément intégrés à la logique de tarification à l'activité.

Le pourcentage de la T2A est en 2007 de 50% du budget des établissements publics et de 100% depuis le 1er janvier 2008.

Paiement au séjour : le mécanisme des GHM/GHS

Le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), autorisé par une circulaire du 5 août 1986 et rendu indispensable par la loi du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière qui impose aux établissements de santé publics et privés de procéder à l'évaluation de leurs activités de soin, et l'analyse des données qu'il fournit permet de classer le séjour de chaque patient au sein d'un Groupe homogène de malades (GHM). Les GHM sont identifiés par un code alpha-numérique combiné à un intitulé médical (ex : GHM 08M04W « fracture de la hanche et du bassin avec CMA »).

Par la suite, chaque GHM est associé à son pendant financier, le Groupe homogène de séjour (GHS), défini par l'Assurance Maladie. Le GHS, identifié par un code numérique, est en réalité le tarif applicable à un GHM donné : à chaque type de séjour correspond un et un seul GHS. Il est à noter la différence sensible constatée dans le calcul des tarifs selon que l'on se situe dans un établissement ex-DG ou ex-OQN : en effet, l'assiette de calcul est différente puisque dans les SPHP, les médecins sont des praticiens libéraux dont les tarifs viennent s'ajouter aux GHS. Cela étant, la liste des couple GHM/GHS est commune pour l'ensemble des établissements de santé en MCO, qu'ils soient publics ou privés.

Paiements supplémentaires associés aux GHS

Dans certaines situations très particulières, il arrive que des paiements annexes viennent s'ajouter. C'est notamment le cas pour le paiement de journées supplémentaires lors de séjours particulièrement longs (ex : GHM n°xxxxx GHS n°xxxx ; EXH : xxx€ par journée supplémentaires au delà du x ème jour). De même, des minorations (forfaitaire ou journalière) sont appliqués pour les séjours particulièrement courts. Enfin, dans le cas des prises en charge particulièrement lourdes dans des unités très spécialisées (réanimation, soins intensifs etc...), un supplément est ajouté à la base GHS. Le forfait GHS est minoré si le patient est sorti avant borne basse (délai minimal) (sauf en cas de décès, pas de minoration).

Cas spécifiques de facturation

  • Les actes nécessitant d'être pratiqués en milieu hospitalier mais ne requérant aucune hospitalisation (endoscopie sans anesthésie, mise en observation dans un environnement hospitalier...) sont financés par des forfaits regroupés sous l'appellation de Sécurité et environnement hospitalier (SEH).
  • Les urgences sont elles financées par la facturation d'un tarif au passage dénommé Accueil et traitement des urgences (ATU). Ce tarif est fixé nationalement et est unique quelle que soit la prise en charge (mais il demeure non cumulable avec la facturation d'un GHS). Il s'agit de forfaits. La prise en charge des prélèvements d'organes et des activités de greffe obéit aux mêmes modalités de financement par forfaits annuels.

Un forfait, dénommé forfait de petit matériel FFM est facturé dès lors que certains soins non programmés et non suivis d'hospitalisation, réalisés sans anesthésie et nécessitant la consommation de matériel de petite chirurgie ou d’immobilisation, sont délivrés au patient dans les établissements de santé qui ne sont pas autorisés à exercer l’activité d’accueil et de traitement des urgences. Le forfait FFM est associé à une liste d’actes limitative.

  • L’Hospitalisation à domicile (HAD), fondée sur le principe classique du tout compris, est depuis le 1er janvier 2005 soumise à une obligation d'évaluation et d'analyse des activités de soin par le biais de Résumés par Sous-Séquence (RPSS), elles-mêmes définies en amont par un groupe homogène de prise en charge (GHPC). Le GHPC est en réalité une combinaison de trois éléments essentiels dans la structuration des activités d'HAD: le mode de prise en charge principal (MP), le mode de prise en charge associé (MA) et un indice de mesure de la dépendance (indice de Karnofsky). Cette analyse permet donc de définir un schéma standard de tarification: à chaque GHPC est associé un indice de pondération (durée de prise en charge), donnant ainsi naissance à un groupe homogène de tarifs (GHT) appliqué par l'Assurance Maladie. Le mécanisme est le même que celui des GHS, si ce n'est que l'HAD implique une pondération entre le type d'activité de soin et la facturation.
  • L’insuffisance rénale chronique est financée sous forme :

De forfait GHS en hospitalisation complète ou pour des séances en centre. De forfaits dialyse « Dxx » en hémodialyse ou autodialyse hors centre. Les forfaits « Dxx » sont facturés pour chaque séance ou, dans le cadre de la dialyse péritonéale, pour chaque semaine de traitement. Des GHS séance de dialyse en hospitalisation sont facturables en sus d’un GHS d’hospitalisation.

  • Les prélèvements d’organes :

Ces prélèvements sont facturés sur la base de forfaits (PO1 à PO9)et l’activité de prélèvement bénéficie également d’un financement complémentaire sous la forme de forfait annuel(CPO).

Une incitation à l'innovation: le financement des MO et DMI

Si la règle générale du tarif tout compris invite l'Assurance Maladie à un remboursement unique par GHS, l'existence de médicaments onéreux (MO) et de dispositifs médicaux implantables (DMI) a poussé le ministère de la Santé à flexibiliser cette règle afin d'assurer l'égalité d'accès aux soins les plus innovants. Ainsi, les médicaments de lutte contre le cancer, les facteurs de coagulation et les médicaments dits « orphelins » sont intégralement remboursés par l'assurance-maladie. La tendance est d'ailleurs à la convergence des dispositifs de médicamentalisation onéreux : la liste des MO est désormais commune aux deux secteurs, et les disparités de financement des DMI se réduisent progressivement.

Mais si cette politique d'égal accès aux soins innovants est une avancée indéniable, l'apparition continuelle de nouveaux produits sur le marché et la généralisation de leur usage (les produits de santé actuellement facturés en sus ayant vocation à rejoindre les GHS) amène les ARH et le Ministère à restreindre l'extension des listes de MO et de DMI.

Les Missions d'intérêt général (MIG) et l'aide à la contractualisation (AC)

Les établissements MCO peuvent bénéficier de financements supplémentaires du fait de la prise en charge de missions d'intérêt général (recherche et l'enseignement ; SAMU, équipes mobiles de soins palliatifs, prise en charge des détenus, prise en charge de la toxicomanie,consultation de tabacologie, d'alcoologie, consultation diabète, etc...).

Enfin, en sus des financements MIG, une dotation pour l'Aide à la Contractualisation (AC) est mise à la disposition des ARH afin d'accompagner les Contrats d'Objectifs et de Moyens (COM) que doivent signer avec elles les établissements de santé.

Risques et effets indésirables: les difficultés de la transition

Le passage d'un financement dual Public/Privé à un système unique de Tarification à l'Activité n'est pas sans poser certaines difficultés et sans présenter des risques prévisibles. Actuellement, en mars 2008, les tarifs de l'hôpital public (dit ex-DG) sont supérieurs à ceux des établissements privés (dits ex-OQN), car ils intègrent les salaires des praticiens, contrairement aux tarifs des établissements du secteur privé dont les actes médicaux font l'objet d'un paiement direct par les patients aux praticiens. Les coûts de fonctionnement sont variables selon les établissements, ainsi que les plateaux techniques, mais également le recrutement est un peu différent : certaines précarités ou souffrances sociales peuvent être prises en charge à l'Hôpital et participer à diminuer la "rentabilité" des séjours. Un tel discours de rentabilité s'impose du fait des évolutions réglementaires qui poussent à une meilleure productivité, à renoncer parfois à des actes peu rentables.

Une transition délicate

Pour chacun des deux secteurs, le passage à la T2A s'avère délicat. Les pratiques sont appelées à changer, les modes de fonctionnement sont perturbés et les acteurs sont parfois troublés de voir les modalités de financement se transformer aussi radicalement. Le secteur anciennement sous Dotation globale de fonctionnement (EPS et PSPH) passe d'un paiement sous forme d'enveloppe annuelle à un financement lié à l'activité hospitalière, alors que le secteur privé antérieurement sous Objectifs Quantifiés Nationaux (OQN) doit désormais appliquer des tarifs nationaux au lieu des grilles anciennement négociées avec l'ARH.

Initialement prévu pour 2012, le passage à la T2A est passé à 100% à partir du premier janvier 2008.

Des risques prévisibles

Si le système T2A présente des avantages indéniables, il n'en demeure pas moins que certains désagréments sont d'ores et déjà connus du Ministère de la Santé et des Agence régionale de l'hospitalisation. Ainsi, la réduction des durées de séjour et le développement des prises en charge ambulatoires ainsi que de l'Hospitalisation à domicile (pour des patients non rentables) sont à prévoir. De même, la segmentation des séjours, la sélection des patients, l'inadaptation des soins en fonction de la gravité des besoins et la transformation de certains actes externes en hospitalisation sont annoncés par la DHOS comme des effets pervers potentiels.

Une politique de contrôle externe a donc été mise en place, répartissant son action en deux axes essentiels :

  • une surveillance systématique des informations transmises à l'Assurance Maladie
  • et un contrôle approfondi des établissements détectés par la surveillance automatique.

Pour répondre à la critique formulée par certains établissements lors des travaux préparatoires et pour parer au risque de transformation des actes externes en hospitalisation, une circulaire du 31.08.2006 prévoit une limitation claire entre les actes externes et les prestations d'hospitalisation. Toujours dans cette logique de contrôle du financement, le CBUS constitue une innovation de la T2A qu'il convient de rappeler plus en détails.

Le Contrat de Bon Usage (CBU) des médicaments et des produits de prestation

Le système de financement des MO implique évidemment que les établissements de santé respectent les règles de bonne pratique quant à l'usage de ces produits onéreux: le poids financier de ces médicaments sur l'Assurance Maladie le justifie aisément. C'est pour cette raison qu'on été créés, par décret du 24 août 2005 et mentionné à l'art. [L.162-22-7] du CSS, les Contrats de bon usage des médicaments et produits de prestation (CBUS). Ceux-ci visent à engager les ES dans une dynamique d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, tout en garantissant la pertinence des prescriptions médicamenteuses et des DM spécialisés. Le CBUS s'intègre par ailleurs dans la logique de contractualisation des relations internes et externes des établissements hospitaliers.

Le CBUS est composé d'une part par un calendrier d'exécution mentionnant les objectifs poursuivis (issus d'une négociation entre l'établissement et l'ARH) et les critères d'évaluation retenus, et d'autre part par les clauses de financement des MO et DMI en sus des prestations d'hospitalisation par l'Assurance Maladie. Afin de s'assurer de la coopération des établissements de santé et de la poursuite effective des objectifs précédemment cités, des pénalités sont prévues en cas de non respect des engagements souscrits. Un « Observatoire des Médicaments, des Dispositifs Médicaux et des Innovations Thérapeutiques » (OMEDIT) est mis en place au sein de chaque Agence Régionale D'Hospitalisation (ARH), avec pour mission de suivre et de gérer l'ensemble des CBUS de la région.


Controverses

La tarification à l'activité (T2A) est devenue brutalement la seule source de financement pour les activités de court et moyen séjours des établissements publics de santé (EPS). Or, les tarifs établis par l'État pour certains actes médicaux sont sous-évalués et ont plongé l'ensemble des EPS dans des déficits massifs. L'hôpital public doit ainsi assumer des activités qui lui coûtent plus qu'elles ne lui rapportent. Le système hospitalier français fonctionne depuis sa mise en place avec des objectifs contradictoires (conflit d'objectifs) : l'hôpital doit fournir plus de qualité des soins, plus de sécurité, plus d'offre de soins avec plus de contraintes budgétaires. De plus, les services hospitaliers se voient dans l'obligation d'avoir une activité cotable importante afin de maintenir leur budget ; ceci a conduit à diminuer les actes prescrits pour les soins effectués au domicile des patients, contribuant à réhospitaliser ces mêmes patients pour des soins mineurs qui se faisaient auparavant à leur domicile. L'augmentation de l'activité des services hospitaliers est due en partie à ce paradoxe ; certains patients se voient hospitalisés par exemple pour une série de pansements ou de perfusions, ou même parfois en consultation externe dans les services d'urgence pour une ablation de fils[1].

Notes et références de l'article

Voir aussi

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