- Statut du métèque
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Métèque
Dans la Grèce antique, le terme de métèque désigne l'étranger domicilié dans une cité, autre que celle dont il est originaire. Il ne comporte alors aucune connotation péjorative.
Le mot, attesté à partir du VIe siècle av. J.-C., vient du grec ancien μετοίκος / metoikos, de oἶκος / oikos, « maison, habitation » et de μετά / meta, dont la signification reste sujette à débat : dans le sens « avec », le mot signifierait « qui habite avec (s.e. les citoyens) ». L'interprétation de meta dans un sens de changement est plus vraisemblable : le métèque est « celui qui a changé de résidence ».
Sommaire
Statuts
Les Grecs différencient le métèque, étranger résidant, de l'étranger de passage. Ce dernier ne bénéficie d'aucun droit. En cas de problème, il doit s'adresser au proxène, citoyen protecteur des citoyens d'une autre cité. Ainsi, Cimon est le proxène de Sparte à Athènes. En outre, un traité bilatéral d'hospitalité (ξενία / xenía) peut être conclu entre deux cités. L'étranger de passage peut devenir métèque au bout d'un mois de résidence. Si le métèque athénien peut rester à Athènes toute sa vie, les métèques des autres cités sont moins bien lotis : les expulsions ne sont pas rares, Sparte pratiquant régulièrement la xénélasie, expulsion générale des étrangers.
Selon les cités, le métèque peut être astreint aux liturgies, comme la chorégie. En revanche, il est exempté de la triérarchie, qui implique le commandement d'une trière. Les métèques suffisamment aisés doivent à la cité un service hoplitique, qui est accompli en garnison. Il est très rare que les métèques partent effectivement en campagne. Il est toujours soumis à des contrôles, mais, plus ou moins importants selon le caractère cosmopolite ou non de la cité, et selon les conventions judiciaires bilatérales éventuelles entre cités.
On trouve souvent les métèques dans les métiers du commerce ou de la finance, et ils forment une bonne partie des employés administratifs. Nombreux sont également les métèques riches, au point que la figure du métèque parvenu et arrogant devient un classique des comédies grecques.
L'étranger homme libre et grec est exclu de la sphère politique, mais il appartient à la même communauté culturelle que le citoyen : langue, dieux, sanctuaires.
Les métèques à Athènes
Nous ignorons la date d'introduction d'un statut spécifique des métèques à Athènes. Il est probable qu'il remonte aux réformes de Clisthène.
Pour s'installer comme métèque à Athènes, l'étranger doit trouver un protecteur, le προστάτης / prostátês. Ce dernier a pour tâche initiale de faire inscrire son protégé dans un dème. Attendu que le métèque ne peut posséder ni de maison ni de terre en Attique, le prostatès est assez souvent son logeur. Quand le métèque est un esclave affranchi, il a pour prostatès son ancien maître.
Au moins à partir du IVe siècle av. J.-C., le métèque est assujetti à une taxe spéciale, le μετοίκιον / metoíkion, à hauteur de 12 drachmes pour un homme et de 6 pour une veuve. Les anciens esclaves doivent en outre s'acquitter du triobole des affranchis. Tous les étrangers enfin, métèques ou de passage, doivent verser les ξενικά / xeniká, pour pouvoir commercer sur l'agora.
Sur le plan judiciaire, le métèque bénéficie de garanties, qui restent inférieures à celle dont jouit le citoyen. Il peut intenter un procès au civil devant le polémarque et au pénal devant le tribunal du Palladion. En revanche, il ne peut prendre part à un tribunal. Il doit faire appel à un garant (le prostatès) s'il est accusé dans un procès civil. Dans un procès criminel, il est incarcéré avant tout verdict. Le meurtre d'un métèque, à l'instar de celui d'un esclave, n'est passible que de l'exil, tandis que celui d'un citoyen est passible de la peine capitale.
Évolution du sens en français contemporain
En français, le mot métèque a été utilisé dans un contexte xénophobe : il a notamment été employé dans les textes du penseur nationaliste Maurras (à partir de la fin du XIXe siècle). Le terme a pris une connotation péjorative et est passé dans le langage courant, devenant une insulte désignant les immigrés et dans un sens plus large les étrangers résidant en France. En 1969, le chanteur d'origine grecque Georges Moustaki en a fait une chanson, Le Métèque, reprise par Martial Tricoche en 2003 et Joey Starr en 2006.
Voir aussi
Bibliographie
- M.-F. Baslez, L'Étranger dans la Grèce antique, Les Belles lettres, coll. « Realia », Paris, 1984 ;
- Michel Clerc, Les métèques athéniens, Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, n° 64 (1893), Thorin et fils éditeurs, Paris ;
- Raoul Lonis, L'Étranger dans le monde grec, 2 vol., Presses universitaires de Nancy, coll. « Études anciennes », 1991 et 1993 ;
- (en) D. Whitehead, The Ideology of the Athenian Metic, Cambridge Philological Society, 1977.
Liens externes
- Georges Moustaki en a fait une chanson et un poème.
- Paroles de la reprise de Joey Starr.
- Portail de la Grèce antique
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