Sophie Paléologue

Sophie Paléologue

Sophie Paléologue (initialement Zoé Paléologue) (vers 1455-7 avril 1503), est la nièce du dernier empereur byzantin, Constantin XI, et la seconde femme du grand-prince de Moscou Ivan III.

Sophie Paléologue

Les Paléologues après la chute de Constantinople

Les empereurs Jean VIII et Constantin XI sont morts sans héritiers. Les deux derniers fils de Manuel II Paléologue, Démétrios et Thomas Paléologue, se partagent le gouvernement du despotat de Morée depuis l'avènement de Constantin XI en 1449 (Démétrios règne à Mistra et Thomas à Patras). Ils ne songent nullement à une contre-attaque destinée à reconquérir Constantinople : au lieu de s'épauler, les deux frères passent leur temps à combattre l'un contre l'autre, ce qui facilite les attaques ottomanes. En 1458, le sultan Mehmet II entreprend de liquider les derniers vestiges de l'Empire byzantin et dirige en personne la conquête de la Morée achevée en 1460.

Devant l'avancée des Ottomans, les deux frères adoptent une attitude différente. Démétrios se range du côté ottoman avant que le sultan ait achevé la conquête de la Morée. Il reçoit de Mehmet II en apanage la ville thrace d'Aenos, les îles de Lemnos, Imbros et Samothrace, le tout assorti d'une somme confortable. En 1467, il perd son apanage pour avoir refusé, en raison de son âge et de son infirmité, de fournir au sultan l'aide militaire attendue. Sa fille Hélène qui a été donnée en mariage au sultan meurt en 1467 de la peste. Devenu moine sous le nom de David, Démétrios meurt à Andrinople en 1470.

Constatant que tout espoir de conserver ses possessions est perdu, Thomas Paléologue quitte la Morée et rejoint Corfou en avril 1460 où il s'efforce par tous les moyens de rallier les princes occidentaux à sa cause. Il tente d'abord de se réfugier à Raguse mais les autorités de la ville, craignant le ressentiment du sultan, refusent de l'accueillir. Après des discussions avec la papauté, il gagne l'Italie en 1462 où il se place sous la protection du pape Pie II (1458-1464) : il apporte à Rome la tête de saint André reconnu comme le fondateur du siège patriarcal de Constantinople. Le pape lui décerne le titre de despote de Morée qu'il conserve jusqu'à sa mort en 1465. Ses enfants le rejoignent à Rome quelques mois avant sa mort : ses deux fils, André, né en 1453 et en qui Sphrantzès voit le continuateur de la famille des Paléologues; Manuel, né en 1455 et sa seconde fille, Zoé, probablement née vers 1456.

Les enfants Paléologue sont pris en charge par le cardinal Bessarion et sont élevés dans l'esprit de l'Union des Églises. Il est lié à la Morée, qu'il connaît bien pour avoir effectué une partie de ses études à Mistra.

Zoé est le dernier enfant de Thomas Paléologue et de la princesse génoise Catherine Zaccaria. Elle devient par défaut et tardivement dépositaire de l'héritage byzantin. L'intérêt historique s'est concentré autour d'elle après son mariage russe. Ses trois aînés peuvent prétendre à l'héritage avec plus de raisons.

Sa sœur aînée Hélène a épousé en 1446 Lazar II Brankovic, le troisième fils du despote de Serbie Georges Brankovic, qui a fait allégeance aux Ottomans (il n'a participé ni à la bataille de Varna en 1444 ni à la seconde bataille de Kosovo en 1448). Lazar ne conserve son despotat que deux ans, de 1456 à 1458. devenue veuve, Hélène marie sa fille aînée également prénommée Hélène au dernier roi de Bosnie Stefan Tomasevic (1461-1463) qui est catholique. Se considérant un temps comme l'héritière des Paléologues, elle s'arroge le titre de despote qu'elle transmet à son beau-fils. Aux yeux des orthodoxes, une souverain catholique ne peut être héritier de ces droits. Après la conquête définitive de la Serbie par les Ottomans, Hélène Brankovic se réfugie à Rome où elle meurt en 1473 après être devenue nonne.

Son frère André est considéré par le pape comme l'unique héritier du despotat de Morée et de l'Empire byzantin. Le pape lui confère le titre de despote de Morée qu'il conserve jusqu'à sa mort à Rome en 1502. Le décès du cardinal Bessarion en 1472 le prive de son protecteur. Toujours à la recherche d'argent, il rend visite à sa sœur Sophie à Moscou de 1479 à 1481 puis en 1490. Se considérant comme l'héritier des Paléologues, il distribue des privilèges et des titres de noblesse. Peut-être tente-t-il de monnayer ses droits sur l'Empire byzantin à son beau-frère Ivan III de Moscou? De retour en Occident, André vend ses droits héréditaires d'abord au roi de France Charles VIII (1498) puis aux souverains espagnols Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille (1502). Il perd définitivement ses droits : aux yeux des orthodoxes, un prince unioniste ne peut être acquéreur légitime de ces droits.

Son frère cadet Manuel se lasse de vivre à Rome d'autant que le pape a réduit sa pension. Il quitte l'Italie dès 1476 et se réfugie auprès du sultan qui l'accueille favorablement, lui donnant une pension et un apanage. Il ne parvient jamais aux hautes charges de l'État ottoman auxquelles il pouvait espérer. Manuel se marie avec une personne dont nous ignorons la condition. Deux fils naissent de cette union : l'aîné, Jean, conserve la religion de son père; le cadet, André, se convertit à l'islam et prend le nom de Mehmet Pacha.

Une union dynastique arrangée par le Vatican

La Chronique de Nikon ainsi que l'Histoire russe de Tatichtchev prétendent que le roi de France et le duc de Milan ont demandé la main de Zoé Paléologue mais que ces prétendants catholiques ont été éconduits car la princesse est demeurée orthodoxe. Au moment du départ de Zoé en Russie, André Paléologue est toujours considéré comme l'héritier légitime des Paléologues : en témoignent les présents adressés par Ivan III aux frères de Sophie après le mariage de leur sœur. Ils sont d'ailleurs appelés tsarevitchi dans les chroniques russes. Mais, dans le même temps, le Sénat vénitien fait d'Ivan III l'héritier légitime de la dernière dynastie impériale au cas ou André mourrait sans héritier.

Les premières tentatives pour marier Zoé à des prétendants catholiques se sont soldées par des échecs. Isidore de Kiev essaye de marier Zoé avant la mort de Thomas Paléologue. Ses espoirs se tournent vers la maison Gonzague de Mantoue. Isidore a plusieurs entrevues avec le marquis Lodovico III qui cherche une épouse pour son fils aîné Federico : le nom de famille de la princesse ainsi que l'éclat de Byzance séduisent le marquis. Ce dernier s'informe sur l'état de la fortune de la famille Paléologue et constate qu'elle survit uniquement grâce à la générosité du pape. Lodovico Gonzague refuse alors la proposition que lui fait le cardinal Bessarion. En 1462, le jeune Federico épouse Marguerite de Bavière, richement dotée.

Une nouvelle alliance est envisagée avec la famille Lusignan qui règne à Chypre. Il est envisagé de marier Zoé avec le futur Jacques II de Chypre, fils illégitime de Jean II de Chypre et d'une femme grecque de Patras. Après la mort de Jean II en 1458, sa sœur Charlotte est reconnue par le pape Pie II héritière légitime du trône. Les négociations entrent dans l'impasse et sont finalement interrompues en 1467. Jacques II épouse la vénitienne Catherine Cornaro dont la famille a prêté d'importantes sommes au royaume de Chypre. C'est alors que Bessarion caresse une autre alliance plus intéressante pour le Vatican.

En 1469, le pape Paul II offre Sophie en mariage au grand-prince Ivan III, en espérant ainsi voir entrer la grande-principauté de Moscou orthodoxe dans le giron catholique. Le cardinal Antoine Bonumbre lui sert d'escorte pendant le voyage, mais se voit interdire son entrée dans Moscou. Le mariage a tout de même lieu dans la cathédrale de la Dormition de Moscou, au Kremlin, le 12 novembre 1472. Zoé se convertit à l'orthodoxie et prend le prénom de Sophie.

Les chroniques russes ne mentionnent aucune influence de Sophie Paléologue sur son époux. Elle a fait venir des artistes d'Italie qui, comme Ridolfo da Fioravante, surnommé Aristote, ont été les architectes de plusieurs cathédrales du Kremlin. L'idée de faire de Moscou une Troisième Rome vient également du symbole du mariage d'Ivan et de Sophie[1].

De Maria de Tver, sa première femme, Ivan III avait eu un fils prénommé lui-aussi Ivan. Cet Ivan mourut avant son père, mais son fils, Dimitri Ivanovitch, devait hériter de la couronne de Russie. Cependant, Sophie Paléologue intrigua pour que ce soit un fils de sa lignée qui succède à Ivan III. En 1505, Vassili III, fils aîné d'Ivan III et de Sophie, devient effectivement le nouveau souverain de Russie.

Notes et références


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