Signe (sémiologie)

Signe (sémiologie)

Signe (sémiologie)

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La notion de signe ouvre un large champ qui relève d'une science : la sémiologie.

Selon Le Petit Robert (1987), signe = "chose perçue qui permet de conclure à l'existence ou à la vérité (d'une autre chose, à laquelle elle est liée)", mais aussi "objet matériel simple (figure, geste, couleur, etc.) qui, par rapport naturel ou par convention, est pris, dans une société donnée, pour tenir lieu d'une réalité complexe".

Exemples : "le rire, signe de la joie" ; les "signes extérieurs de richesse" ; "S [icone] pour un virage" ; "le signe x, multiplié par" ; "la couleur, signe [indice] d'un orage imminent" ; "lettres, chiffres, traits inscrits sur un agenda pour rappeler un rendez-vous, panneaux routiers" [signe-signal] ; "balance, signe-symbole de l'idée abstraite de justice" ; "chiffres et symboles de l'arithmétique et de l'algèbre" ; "le signe linguistique, unité de langue, unité minimale de la phrase".

Sommaire

Définitions de "signe"

"Quelque chose qui tient lieu d'autre chose" (aliquid stat pro aliquo).

Pour saint Augustin, "un signe est une chose qui, outre l'espèce ingérée par les sens, fait venir d'elle-même à la pensée quelque autre chose" (De magistro. Du maître, 389), et offre la particularité très commode de pouvoir la désigner en son absence.

Pour John Locke, le signe est une relation de renvoi.[1]

Charles Pierce : "Un signe est quelque chose tenant lieu de quelque autre chose pour quelqu'un, sous quelque rapport ou à quelque titre" (Écrits sur le signe, trad. fr., 1978, p. 215).

Karl Bühler : "Le signe est quelque chose qui est à la place d'autre chose" (Sprachtheorie, 1934).

Pierre Guiraud : "Un signe est un stimulus - c'est-à-dire une substance sensible - dont l'image mentale est associée dans notre esprit à celle d'un autre stimulus qu'il a pour fonction d'évoquer en vue d'une communication. (...) Nous définirons le signe comme la marque d'une intention de communiquer un sens" (La sémiologie, 1971, p. 29-30).

Un signe est une chose ou un phénomène remarquable et significatif, dont la perception constitue un indice concernant l'occurrence d'un événement passé ou futur, ou bien la connaissance d'un état présent, mais caché. Un signe est également un objet, un geste, une représentation d'objet, ou une représentation abstraite ayant une signification naturelle ou conventionnelle pour un groupe humain donné.

pour simplifier encore plus, on peut définir le signe étant: une entité composée de deux dimensions : 

a) Une dimension concrète, accessible à l’oreille, à l’œil, au toucher ou à l’odorat. b) Une dimension abstraite : c’est l’idée provoquée par la dimension concrète. Ex : lorsque le mot table est prononcé, ce que perçoit l’oreille c’est la dimension concrète et ce que comprend le récepteur, c’est la dimension abstraite. L’objet lui-même, la chose et le référent mais n’a rien à voir avec le signe. Les deux dimensions sont associés l’une à l’autre sans aucune possibilité de séparation comme le recto et le verso d’une feuille. La formule : soi le signifiant (S°), le signifié (S é ) et le rapport de signification ( R ) La formule relative à la signification est : S° R S é Lorsque le rapport est simple ou direct comme dans cet exemple on parle de dénotation. Le code de la dénotation : est utilisé dans les domaines qui nécessitent un maximum de clarté, de précision, de pragmatisme tel que l’enseignement, le domaine militaire et en règle générale le travail. Le code de la connotation : on utilise le code de la connotation lorsque le rapport entre S° et S é devient complexe, il s’agit d’abord de décoder le dénoté et de l’interpréter dans un deuxième temps pour obtenir le S é de connotation. on peut dire alors que lorsqu’un message est reçu, il faut absolument le soumettre au test de la connotation pour vérifier si le message réel se trouve plus loin que le message apparent. Dans certaines circonstances, le fait de ne pas identifier le connoté conduit à des catastrophes.

Faces du signe : deux ou trois ou quatre ?

La tradition sémiotique distingue trois faces, trois pôles : une triade.

Déjà, Frege[2], en 1892, distinguait sens (Sinn), référence (dénotation, Bedeutung), représentation (Zeichen). Le sens est l'expression ou la proposition, c'est la signification, la pensée exprimée, il peut être commun à plusieurs personnes. La référence est l'objet désigné, ce qu'une expression linguistique désigne. Deux expressions peuvent avoir des sens différents et se référer à un même objet : les expressions "l'étoile du matin" et "l'étoile du soir" renvoient au même objet, la planète Vénus. Une expression peut avoir un sens sans avoir de référence : l'expression "le corps céleste le plus éloigné de la Terre" a un sens mais pas de référence. D'autre part, la représentation est une unité mentale subjective et individuelle. Le sens est objectif et invariable, la représentation est subjective et fluctuante d'un individu à l'autre.

Dès 1897, le logicien Charles Peirce estime que le signe est une triade : representamen, objet, interprétant. [1] Un representamen (signe matériel) dénote [2] un object, un objet (un objet de pensée) grâce à [3] un interpretant, un interprétant (une représentation mentale de la relation entre le representamen et l'objet, un sens). Le représentamen est premier (c'est la pure possibilité de signifier), l'objet est deuxième (c'est ce qui existe et dont on parle), mais ce processus s'effectue en vertu d'un interprétant (c'est ce troisième terme qui donne à la relation de signification son caractère dynamique). Par exemple, le mot « chat » est le representamen, l'objet est ce qui est désigné par ce mot, et le premier interprétant est la définition reçue de ce mot : le concept de chat. (Encyclopédie de la philosophie, Le livre de poche, 2002, p. 1503).

"Un Signe, ou Representamen, est un Premier, qui entretient avec un Second, appelé son Objet, une telle véritable relation triadique qu'il est capable de déterminer un Troisième, appelé son 'Interprétant', pour que celui-ci assume la même relation triadique à l'égard du dit Objet que celle entre le Signe et l'Objet."[3]

Le triangle sémiotique, imaginé en 1923 par Charles Ogden et Ivor Richards[4], admet trois éléments : 1) le symbole (terme, expression linguistique), 2) la référence (concept, unité de pensée), 3) le référent (objet, partie du monde perceptible ou concevable : la Tour Eiffel, la vitesse).

En 1938, Charles W. Morris[5] distingue dans le signe quatre facteurs : 1) "le véhicule du signe", "ce qui agit comme signe" ; 2) le designatum, "ce à quoi le signe réfère" ; 3) "l'effet produit sur un certain interprète" ; 4) "l'interprète", la personne pour qui le signe a fonction de signe. Exemple de Morris : un voyageur [A : acteur, l'interprète] se prépare à se comporter d'une façon appropriée [I : interprétant] à une certaine région géographique [D : designatum], en vertu de la lettre [S : véhicule du signe] qu'il a reçue d'un ami.

"Les médiateurs sont les véhicules du signe ; les prises-de-connaissance sont les interprétants ; les agents du processus sont les interprètes ; ce dont on prend connaissance, ce sont les designata... Ces propriétés (être un signe, un designatum, un interprète, ou un interprétant) sont des propriétés relationnelles que les choses acquièrent en participant au processus fonctionnel de la sémiosis [processus par lequel quelque chose fonctionne comme signe]."

D'autre part, Morris distingue trois "dimensions" du signe : sémantique, syntaxique, pragmatique. La dimension sémantique regarde la relation entre le signe et ce qu'il signifie ; la dimension syntaxique regarde la relation des signes entre eux ; enfin la dimension pragmatique regarde la relation entre les signes et les utilisateurs des signes. Selon Jean-Marie Schaeffer, dans la perspective de Saussure, la notion de dimension sémantique est "le lieu d'une ambiguïté, puisqu'elle peut concerner les relations entre signifiant et signifié (designatum) ou alors celles entre le signe global et le référent (denotatum), on est évidemment obligé de distinguer entre relation sémantique (interne au signe) et relation référentielle.[6]

Enfin, Morris distingue quatre usages du signe : l'information, l'évaluation, la stimulation, la systématisation.[7]

La tradition sémiologique distingue deux faces, une dyade. Selon Ferdinand de Saussure, qui est un linguiste au regard psychosociologique,[8], le signe (linguistique) est une entité à deux termes : le signifiant et le signifié. Ces deux termes sont psychiques, et unis par un lien "arbitraire" (conventionnel). Il y un une "image acoustique" ("le signifiant") et un "concept" ("le signifié"). "L'idée (signifié) de 'soeur' n'est liée par aucun rapport intérieur avec la suite des sons /sœr/ qui lui sert de signifiant." Cela dit, Saussure, quand il sort de son examen interne du signe, oppose signifié et référent (réalité extra-linguistique).

Le nombre des faces augmente, avec les recherches. "Les principaux termes qui entrent dans la définition du signe sont : (1) le stimulus (le signal physique employé, par exemple un son vocal) ; (2) le signifiant (le modèle dont le stimulus constitue une manifestation, par exemple un phonème) ; (3) le signifié (le sens, le contenu du signe) ; le concept (la représentation mentale à laquelle correspond le signifié), (4) soit logique, (5) soit psychologique et (6) le référent (ce dont on parle quand on emploie tel signe)" (Louis Hébert).

Classifications des signes

Charles Peirce[9] (1903), dans les signes, quant à la signification, différenciait [1] l'icone, où il existe une similitude entre signifiant et signifié (le panneau Z pour un virage), [2] l'indice, dont le caractère est d'être lié par contiguïté au signifié (la fumée pour le feu) et [3] le 'symbole' qui exige la connaissance d'une règle conventionnelle pour être relié au signifié (le mot pour le concept, le caducée pour le médecin) ; Charles Pierce, en logicien, prend le mot "symbole" au sens de signe conventionnel. Dernièrement, le linguiste Thomas A. Sebeok[10] (1975) a proposé de porter le nombre des signes à six. Aux trois signes mentionnés, il ajoute [4] le signal, signe naturel ou conventionnel qui déclenche une réaction ; [5] le symptôme, signe non arbitraire, automatique, forcé, où le signifiant et le signifié sont associés par une espèce de lien naturel, c'est le sens médical, et [6] le nom, qui a pour classe son extension (Jacques Corraze, Les communications non verbales, PUF, 1980, p. 47-48). Le genre signe comprend donc presque une dizaine d'espèces.

  • archétype (matrice de symboles, image primordiale : le Père regroupe les symboles du géniteur, du chef, du patron, du pape...) ; la notion vient de Carl-Gustav Jung (1912)
  • allégorie (figuration d'un être abstrait : une faucheuse évoque la mort ; un personnage aux yeux bandés portant une balance et un glaive sert d'allégorie pour la justice)
  • emblème (objet représentant un ensemble de valeurs : la drapeau est l'emblème de la patrie)
  • icone [mot écrit sans accent] (signe où le représentant ressemble au représenté : l'onomatopée imite un bruit naturel, le portrait ressemble à la personne représentée) ; la notion vient de Charles Peirce (1903) ; émoticône : Sourire
  • image (forme concrète reproduisant une réalité concrète : la photo rend le modèle)
  • indice (rapport causal : l'élévation de la voix est l'indice d'une excitation, la fumée prouve le feu)
  • insigne (objet montrant l'appartenance à une institution : les galons sont des insignes militaires, le losange est l'insigne de la marque Renault)
Logo et insigne de Renault de 1992 à 2006
  • logo (le nom dans un graphisme typographique spécial : le nom « RENAULT » écrit avec une police spécifique ou bien avec une police de caractère spécialement étudiée pour la circonstance, ou encore le nom écrit avec un certain style pour en rendre l'aspect original)
  • métaphore (emploi d'un terme auquel on substitue un autre qui lui est assimilé après la suppression des mots introduisant la comparaison, tels que "comme" : dire d'un roi qu'il est un lion est une métaphore)
  • nom (substantif, mot désignant les objets, les phénomènes, les qualités, les sentiments, les personnes, les peuples... : le mot français "arbre" est un signe linguistique associant le signifiant, la forme sonore /aʁbʁ/ au signifié, au concept d'arbre)
  • schème (figure simplifiée : la forme géographique de la France a pour schème l'hexagone)
  • signal (signe déclenchant une réaction : le rouge du feu d'interdiction de la circulation routière demande un arrêt, "viens !" est un signal)
  • symbole : (signe naturel, substitut non conventionnel du réel : le loir, engourdi pendant l'hiver, est le symbole de la paresse)
  • symptôme (phénomène visible qui permet de déceler un état ou une évolution : la fièvre est un symptôme de maladie, l'idéalisme est pour Nietzsche un symptôme de décadence)[11].

Bibliographie

  • Roland Barthes, Mythologies, Paris, Seuil, 1975.
  • Pierre Guiraud, La sémiologie, Paris, PUF, coll. "Que sais-je ?".
  • Charles Morris, Signs, Language and Behavior, New York, 1946.
  • Charles Peirce, Écrits sur le signe, trad., Paris, Seuil, 1978.
  • L. J. Prieto, Messages et signes, Paris, 1966.
  • Ferdinand de Saussure, Cours de linguistique générale (1916), Payot.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. John Locke, Essai sur l'entendement humain (1690).
  2. Gottlob Frege, Sens et dénotation (1892), in Écrits logiques et philosophiques, trad., Seuil, 1971, p. 102-126.
  3. Charles Peirce, Écrits sur le signe, trad., 1978.
  4. Charles Ogden et Ivor Richards, The Meaning of Meaning, Paul Kegan, Londres, 1923.
  5. Charles W. Morris, Foundations of the Theory of Signs, article pour l'International Encyclopedia of Unified Science, vol. I, n° 2, Chicago, 1938, p. 77-138, repris in Writings on the General Theory of Signs, La Haye, 1971. Trad. fr. par J.-P. Paillet, Langages, n° 35, sept. 1974, p. 17.
  6. Oswald Ducrot et Jean-Marie Schaeffer, Nouveau dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, Seuil, 1995, p. 217.
  7. Charles W. Morris, Signs, Language and Behavior, Englewood Cliffs, 1946.
  8. Ferdinand de Saussure, Cours de linguistique générale, reconstitué en 1916, Payot, 1972.
  9. Charles Peirce, Elements of logic (1903). Recueil : Écrits sur le signe, Seuil, 1978.
  10. T. A. Sebeok, Six species of signs, Semiotica, 1975, 13, 3, p. 233-260.
  11. Nietzsche, Le crépuscule des idoles, "Le problème de Socrate" : Oeuvres, Robert Laffont, coll. "Bouquins", t. II, p. 957.
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