Satî

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Dans l'épopée hindoue du Mahâbhârata, Satî, qui porte aussi le nom de Dakshayani , est l'aînée des filles de Prasuti et Daksha. Elle aime Shiva, mais son père, Daksha, qui s'est disputé avec le dieu, interdit leur mariage.

gravure du sacrifice d'une veuve (1851)

Satî passe outre et Daksha se venge en invitant tous les dieux sauf Shiva à un sacrifice dédié à Vishnou. Satî se jette dans le feu sacrificiel pour laver l'affront fait à son mari. Shiva, l'ayant appris, se précipite au palais, tue un grand nombre d'invités et décapite Daksha, lui remplaçant plus tard la tête avec celle d'une chèvre. Satî renaît ensuite sous la forme de Pârvatî et retrouve ainsi son époux.

La satî est, par suite, aussi le nom du sacrifice des veuves qui se jettent dans le bûcher crématoire de leur époux.

Sommaire

La Satî, coutume funéraire

La légende de Satî, épouse de Shiva, ou celle de Sita, épouse de Rama dans le Ramayana, sont souvent évoquées pour justifier l'origine du sati. Cependant, ni l'une ni l'autre ne sont veuves lorsqu'elles décident de monter sur le bûcher.

Néanmoins, Savitri offre son enveloppe charnelle afin que son atman rejoigne celui de son mari.

Les Véda ne font pas non plus mention du sacrifice des veuves. Dans l'Atharva-Veda, le quatrième Veda, où sont exposés les rites de la cérémonie funéraire, il n'est fait aucune mention, ni surtout prescription, de la satî : il indique que la veuve doit monter sur le bûcher funéraire, se coucher auprès de son mari, puis redescendre avant que la crémation ne commence.

La pratique de la Satî est tardive en Inde (VIe siècle apr. J.-C.) et limitée à la caste des kshatriyas.[1]

Les épouses des guerriers rajpoutes étaient familières de la « satî ». On découvre souvent à l'entrée des forts du Rajasthan des symboles de mains indiquant le nombre de veuves de haut rang ayant pratiqué la satî lors d'un événement historique lié à l'histoire de ce fort (15 au fort de Jodhpur par exemple).

Les mains de « Satî »

Législation sur le satî

1812 voit la première réaction officielle de l'administration anglaise qui, par la personne de son Gouverneur Général, établit les règles suivantes à destination des officiers de police :

  1. empêcher, autant que possible, toutes les pressions exercées sur les femmes hindoues de la part de leurs proches, des Brahmanes ou d'autres personnes, visant à les inciter à s'immoler,
  2. prévenir les usages criminels de drogues et de liqueurs pour l'accomplissement de cet objet,
  3. s'assurer que la femme ait bien l'âge minimum requis par les « lois hindoues » pour le sacrifice,
  4. se renseigner, dans la mesure du possible, sur une éventuelle grossesse de la femme
  5. et à en prévenir la crémation dans ce cas.

Cependant, en 1818, on ne compte pas moins de 839 cas de satî au Bengale, dont 544 dans le secteur de Calcutta, ce qui a été considéré comme une « épidémie » de satî en réaction à la prétention des Britanniques à s'ingérer dans les pratiques religieuses. La puissance coloniale va alors adopter une position en retrait concernant les problèmes religieux tout en observant les éventuelles évolutions de la société indienne qui pourraient aller dans son sens. Les dix années qui suivent voient précisément la formation de deux camps opposés sur le problème de la satî, Mrityunjay Vidyalankar et le réformateur social Ram Mohan Roy rejoignant celui des adversaires de cette pratique.

La satî (« vertueuse », fidèle jusque dans la mort), symbole du dévouement total de l'épouse à son mari, qui consiste pour la veuve à monter sur le bûcher du défunt et mourir brûlée vive.

Le 4 décembre 1829, le Gouverneur Général Lord William Bentick de la présidence du Bengale, soutenu par Ram Mohan Roy, promulgue le Sati Prevention Regulation Act interdisant la pratique. Il est rapidement suivi par les autres présidences de l'Inde, Madras et Bombay. Contestée devant les tribunaux, cette règlementation fut toutefois entérinée en 1832 par le prédécesseur du Comité judiciaire du Conseil privé, la plus haute instance judiciaire de l'Empire colonial britannique.

Malgré ces efforts, cette coutume perdura; le second empereur moghôl, Humâyûn (1508-1556), avait déjà tenté de l'interdire, suivi par Akbar, puis Aurangzeb en 1663 [2].

Aujourd'hui encore, des rares cas de satî perdurent (Roop Kanwar (en) en 1987, conduisant à la promulgation du Commission of Sati (Prevention) Act); un nouveau cas s'est présenté en 2008 [3].

Satî dans le Bhâgavata Pourâna (du sanskrit, IXe siècle)

« Après avoir ainsi accablé d'injures Daksha, au milieu du sacrifice, Satî s'assit par terre en silence, se tournant du côté du Nord, puis, ayant porté de l'eau à ses lèvres et s'étant enveloppée dans son vêtement de couleur jaune, elle ferma les yeux et entra dans la voie du Yôga.
Ayant supprimé également toute inspiration et toute expiration, maîtresse de sa position, après avoir rappelé de la région du nombril le souffle vital nommé Vdâna, et avoir peu à peu arrêté dans son cœur à l'aide de sa pensée, ce souffle qu'elle venait de fixer dans sa poitrine, la déesse irréprochable le fit remonter jusqu'à sa gorge et de là jusqu'au milieu de ses deux sourcils.
C'est ainsi que, voulant abandonner ce corps que le plus grand des êtres avait tant de fois placé par tendresse sur son sein, la vertueuse Satî, poussée par la colère de Daksha, soumit son corps à l'épreuve qui consiste à renfermer en soi-même le feu du souffle vital.
Pensant ensuite au nectar du lotus des pieds de son époux, du Précepteur de l'Univers, elle ne vit plus autre chose ; et son corps, purifié de tout péché, parut tout d'un coup embrasé par le feu qu'y avait allumé la Contemplation. »

— Satî abandonne son corps[4].

Notes et références

  1. Encyclopédie des religions, Gerhard J. Bellinger, ISBN 2253131113
  2. XVII. Economic and Social Developments under the Mughals de Muslim Civilization in India, par S. M. Ikram, publié par Ainslie T. Embree New York: Columbia University Press, 1964. Site web maintenu par Frances Pritchett, Université de Columbia.
  3. Woman jumps into husband's funeral pyre, Times of India, 13 octobre 2008
  4. tr. E. Burnouf, Imprimerie royale, 1844, dans Trésor de la poésie universelle, Roger Caillos/Jean-Clarence Lambert, Gallimard (6e édition)

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