Principe de fermat

Principe de fermat

Principe de Fermat

Le principe de Fermat est un principe physique qui sert de fondement à l'optique géométrique. Il décrit la forme du chemin optique d'un rayon lumineux et s'énonce ainsi :

La lumière se propage d'un point à un autre sur des trajectoires telles que la durée du parcours soit extrémale.

Il permet de retrouver la plupart des résultats de l'optique géométrique, en particulier les lois de la réflexion sur les miroirs, les lois de la réfraction, etc.

Une conséquence première du principe de Fermat est la propagation rectiligne des rayons lumineux dans les milieux homogènes. En effet, dans un milieu homogène, le temps de parcours est proportionnel à la longueur du trajet, et le chemin le plus court pour aller d’un point à un autre est et a toujours été la ligne droite.

Sommaire

Historique

Ce principe doit son nom à Pierre de Fermat, qui l'a énoncé en 1657 mais qui n'a soumis son mémoire, Synthèse pour les réfractions qu'en 1662. Il s'oppose, par cela, à René Descartes, qui dans sa dioptrique, expliquait les lois de l'optique en comparant la lumière à une balle soumise à diverses forces. Fermat se base sur un principe moral :« La nature agit toujours par les voies les plus courtes et les plus simples »[1]

Pierre Louis Moreau de Maupertuis en complète la conception, créant le Principe de moindre action.

Durées de parcours stationnaires ou minimales

Chemins optiques stationnaires lors de la réflexion dans un miroir concave

Le principe de Fermat a été énoncé ci-dessus sous sa forme commune mais on doit l'énoncer sous la forme plus rigoureuse :

La lumière se propage d'un point à un autre sur des trajectoires telles que la durée du parcours soit stationnaire.

En effet si, dans la plupart des cas, on rencontre des chemins dont la durée de parcours est minimale, il ne faut pas oublier pour autant que d'autres situations peuvent exister. Par exemple, pour aller d'un point A à un point B situés à l'intérieur du miroir concave représenté ci-contre, en se réfléchissant une seule fois sur la surface, la lumière peut emprunter deux parcours de durée minimale (en rouge) et un parcours de durée maximale (en vert) parmi les parcours constitués de deux segments AM et BM. L'étude de la longueur du chemin AMB = AM + MB ferait apparaître trois extrema locaux, deux minima et un maximum, correspondant à ces trajets.

Le terme stationnaire peut être compris à partir de cet exemple. Si le point quelconque M effectue un déplacement infiniment petit du premier ordre à la surface du miroir, la variation du chemin optique est également du premier ordre. En revanche, si l'on considère les trois zones qui correspondent aux extrema, alors un déplacement du premier ordre du point entraîne une variation du chemin optique du second ordre ou plus faible encore. En d'autres termes, lorsque le point M se déplace sur le miroir, la variation du chemin optique est rapide presque partout mais très lente au voisinage des trois points particuliers où elle devient quasi nulle, d'où l'emploi du mot « stationnaire ».

Toutefois, si deux points sont reliés par un chemin suffisamment court, ce chemin minimise la durée par rapport aux autres chemins possibles les plus proches. Pour reprendre l'exemple de la parabole, si les deux points sont sur le trajet vert et sont assez proches de son point de « rebond » sur la parabole, alors pour la longueur du chemin AMB = AM + MB il n'y a plus trois extrema, mais un seul qui est un minima[2].

Le même problème se retrouve dans l'énoncé du principe de moindre action, qui est à la mécanique ce qu'est le principe de Fermat à l'optique, dans la définition des surfaces minimales (qui ne sont pas forcément... minimales) ou dans celle des géodésiques.

Formulation du principe de Fermat à l’aide du chemin optique

Cas d’un milieu homogène

Le chemin optique de la lumière pour aller d'un point A vers un point B dans un milieu homogène, noté L(A,B), est défini comme étant un nombre proportionnel au temps mis par le rayon pour aller de A à B, le coefficient de proportionnalité étant tel que L(A,B) est égal à la distance AB pour un parcours dans le vide. Appelant v la célérité de la lumière dans le milieu, et c celle dans le vide, on a donc L(AB)=\alpha\tfrac{AB}{v} et \alpha\tfrac{AB }{c}=AB, d’où  L(A,B)= \tfrac{c}{v}AB ; le coefficient de proportionnalité n=\tfrac{c}{v} est appelé l’indice de réfraction du milieu. Le chemin optique est donc défini par :

L(A,B) = n\cdot AB

La lumière se propage « plus difficilement » dans les milieux autres que le vide. Exemple : Un rayon lumineux traverse une couche d'eau de 5 cm d'épaisseur. Parallèlement, un autre rayon lumineux traverse 5 cm d'air. L'eau à pour indice de réfraction n = 1,33 et l'air un indice sensiblement égal à celui du vide n = 1. Dans l'eau, le rayon lumineux aura parcouru une distance D = 1,33.5 = 6,65cm. Dans l'air, le rayon aura parcouru une distance D' = 1.5 = 5cm. Le rayon aura parcouru un chemin optique plus long dans l'eau que dans l'air.

Cas d'un milieu continu quelconque

On considère deux points infiniment voisins et distants d'une distance ds. Le chemin optique séparant ces deux points est défini par dL = n.ds ; dL est la différentielle de chemin optique ou encore, l'élément unitaire infinitésimal de chemin optique. Pour trouver le chemin optique L(AB) séparant deux points A et B sur cette courbe, il suffit de faire la somme intégrale de tous les éléments dL sur la coordonnée curviligne s délimitée par les points A et B :

L(AB)=\int_{AB} n \, \mathrm ds

Le principe de Fermat s’énonce alors :

Entre deux points A et B, atteints par la lumière, le chemin optique suivi le long du trajet est stationnaire.

Conséquences

Principe du retour inverse de la lumière

Le trajet suivi par la lumière pour aller d'un point à un autre ne dépend pas du sens de propagation de la lumière.

La stationnarité du chemin optique permet de procéder à quelques considérations. Entre deux points A et B, tous deux sur la trajectoire curviligne d'un rayon lumineux se propageant dans un milieu inhomogène, on peut exprimer l'intégrale de chemin optique comme il suit :

L(AB) = \int_{AB}n \, \mathrm ds=\int_{BA}n \, (-\mathrm ds)=\int_{BA}n \, \mathrm ds'

En considérant que ds' = − ds est l'élément de coordonnée curviligne de B vers A, on peut alors écrire L(AB) = L(BA). Dans le cas de l'étude d'un système optique, cela signifie que l'on pourra étudier la propagation de la lumière et le trajet des rayons lumineux sans se soucier du sens de propagation.

Attention : en pratique, l'utilisation irréfléchie de ce principe aboutit à des absurdités. On sait par exemple qu'un objectif ne donne jamais une image ponctuelle d'un point lumineux, mais une tache toujours plus ou moins floue. Il serait enfantin de penser que les rayons formant cette tache, renvoyés dans l'objectif par un miroir plan, pourraient reformer de l'autre côté un point-image net ... Ce n'est pas le principe qui est en cause ici, mais le fait de vouloir l'appliquer de façon fautive.

Lois de Snell-Descartes

Loi de Descartes.gif

Un plan P de vecteur normal \vec n sépare deux milieux d’indices de réfractions n1 et n2. Un rayon lumineux part d'un point A1 situé dans le premier milieu, traverse P en M et atteint un point A2. Le problème est de trouver la position de M à partir du principe de Fermat.

Le chemin optique de A1 à A2 est L = n1A1M + n2A2M donc

\begin{align}\mathrm dL&= n_1{\overrightarrow {A_1M} \over A_1M}\mathrm d\overrightarrow M+n_2{\overrightarrow {A_2M} \over A_2M  }\mathrm d\overrightarrow M \\ 
& = 
\left ( n_1{\overrightarrow {A_1M} \over A_1M}+n_2{\overrightarrow {A_2M} \over A_2M  }\right) \mathrm d\overrightarrow M  \end{align}.

La condition de stationnarité de L, dL = 0, se traduit donc par le fait que n_1\tfrac{\overrightarrow {A_1M}}{A_1M}+n_2\tfrac{\overrightarrow {A_2M}}{A_2M} est orthogonal au plan P, soit colinéaire à \vec n ; le rayon lumineux est donc inclus dans le plan passant par A1 et A2 et orthogonal à P (première loi de Descartes) et \left(n_1\tfrac{\overrightarrow {A_1M} }{A_1M}+n_2\tfrac{\overrightarrow {A_2M}}{A_2M }\right)\wedge  \vec n = \vec 0 donne : n1sini1 = n2sini2 (deuxième loi de Descartes).

Cette démonstration est due essentiellement à Maupertuis en 1744, près d’un siècle après l’énoncé par Fermat de son principe.

Une jolie illustration en est donnée par le problème dit « du maître-nageur ». Celui-ci, situé sur la plage en A1 doit aller secourir un noyé situé en A2. Comme il court plus vite qu'il ne nage, son trajet optimal (en temps) est celui qui suit les lois de la réfraction, que nous venons de déterminer.

On démontre que si la surface de séparation des deux milieux est une surface quelconque, les deux lois de Descartes sont conservées (mais il peut y avoir plusieurs chemins possibles).

Généralisation des lois de Descartes au cas d’un milieu continu quelconque

Cas d'un trajet plan

En rapportant le plan à un repère Oxy, on a

L(AB)=\int_{AB} n  \mathrm ds=\int_{a}^{b}n\sqrt{1 + y'^2}  \mathrm dx=\int_{a}^{b} f(x,y,y')\mathrm dx  ;

l’équation d'Euler-Lagrange du calcul des variations exprimant la stationnarité de cette intégrale s’écrit \tfrac{\mathrm d}{\mathrm dx } \left(\tfrac{\partial f}{\partial y'}\right) = \tfrac{\partial f}{\partial y}. Nous allons résoudre le cas particulier où n ne dépend que de x : on obtient alors \tfrac{\mathrm d}{\mathrm dx }\Bigl(\tfrac{ny'}{\sqrt{ 1+ y'^2}}\Bigr)=0, autrement dit  n\tfrac{ \mathrm dy}{ \mathrm ds}=\rm cte ; or si on désigne par i l’angle que fait la tangente à la courbe avec Ox, cette condition s’écrit :

 n\cdot\sin i=\rm cte

Ceci constitue en quelque sorte une version infinitésimale de la seconde loi de Descartes, laquelle est en fait une traduction locale du principe de Fermat.

L’équation différentielle de la trajectoire est donc : y'=\tfrac{k}{\sqrt{n^2-k^2}}.

Traversée d'un rayon lumineux dans une bande où l'indice de réfraction est inversement proportionnel à la distance au centre de la bande : la trajectoire est un arc de cercle, comme démontré ci-contre.

On retrouve évidemment que pour n constant, les trajectoires sont des droites ; mais si on prend n = \left(\tfrac{a}{x}\right)^{1/\alpha}, la courbe se paramétrise simplement en

\begin{cases}
x={a \over k^\alpha}(\sin t)^\alpha \\ 
y={a\alpha \over k^\alpha} \int(\sin t)^\alpha\mathrm dt\end{cases}.

C'est une courbe de Ribaucour.

Par exemple pour α = 1 (l'indice de réfraction est inversement proportionnel à l'abscisse) on obtient

\begin{cases}x={a \over k}\sin t \\ y ={a \over k}\cos t + b \end{cases},

autrement dit les trajectoires sont des cercles.

Pour α = 2 (l'indice de réfraction est inversement proportionnel à la racine carrée de l'abscisse) on obtient

\begin{cases}x ={a \over 2k}(1-\cos 2 t) \\ y ={a \over 2k}( 2t - \sin 2t) + b\end{cases} :

la courbe est une cycloïde. Ce cas est historiquement intéressant : c'est par cette méthode que Jean Bernoulli a prouvé que la courbe brachistochrone (minimisant le temps de parcours d'un point matériel) est la cycloïde, en montrant que le problème de mécanique et celui d'optique sont en fait équivalents.

Cas général

On considère maintenant un milieu inhomogène continu à 3 dimensions. On montre que les lois de Descartes généralisées, issues du principe de Fermat, s'énoncent sous la forme suivante :

  1. Le plan osculateur à la trajectoire en un point M contient la normale à la surface d'indice de réfraction constant passant par M.
  2. Si on désigne par i l’angle que fait la tangente à la courbe avec cette normale, on a la relation : \|\overrightarrow\operatorname{grad} (n)\|  \sin i = \tfrac{n}{R}R est le rayon de courbure de la courbe.

Bibliographie

  • José Philipe Pérez, Optique : fondements et application
  • Ouvrage de mécanique générale des Séries Schaum
  • Born & Wolf, Principles of optics
  • Georges Bruhat, Optique
  • Jean Bass, Exercices de mathématiques, Masson, 1965, p. 381-385

Voir aussi

Liens internes

Liens externes

Notes et références

  1. Giorello G, L'économie de la nature, Les génies de la science, août-septembre 2007, p56-65
  2. Voir le chapitre 3, p117-134, et les exercices E3.4 et E3.5, p144-145, du livre Mécanique : de la formulation lagrangienne au chaos hamiltonien de Claude Gignoux et Bernard Silvestre-Brac, éditeur EDP-Sciences, 2002, ISBN 2868835848
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