- Patrice Joseph Lhoni
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Patrice Joseph Lhoni, né en 1930 et décédé en 1976 est un écrivain congolais (Congo-Brazzaville).
Biographie
Ancien professeur de français et fondateur du lycée Chaminade de Brazzaville sous la direction des frères Marianistes, il a été Secrétaire d’Administration, Directeur de la Régie Municipale des Transports Brazzavillois, Responsable du service culturel de la ville de Brazzaville en même temps qu’il assurait l’intérim du Secrétariat général de la Ville de Brazzaville.
Entre 1950 et 1960, il participa aux mouvements littéraires congolais notamment en qualité de journaliste à France Équateur de M. Senez (presse coloniale), La Semaine de l’AEF (actuellement La Semaine Africaine), dans Liaison (revue des cercles culturels de l’AEF) qu’il dirigea dans sa dernière année. Il a en outre été directeur de l’Institut d’Études Congolaises.
Œuvre littéraire
L’essentiel de l’œuvre de Patrice Joseph Lhoni était encore il y a peu inédite. Benoist Lhoni a rassemblé les manuscrits de l’auteur et les a proposés aux Éditions Acoria, qui ont accepté de reprendre la totalité des textes écrits par cet écrivain congolais, textes qu’elles ont répertoriés en plusieurs volumes, tant son œuvre est dense.
La vie intellectuelle de Patrice Joseph Lhoni a été marquée par une série d’influences qui expliqueront la diversité de sa production littéraire puisqu’il aborde tour à tour : les Contes (Guirlandes Fanées - Contes du Congo-Brazzaville, Éditions Acoria, 2005), l’Histoire (Histoire de Brazzaville inédite et à paraître prochainement aux Éditions Acoria), les Récits (Le Troisième jour suivi de l’Exode, Éditions Acoria, 2005), l’Anthropologie (Le Masque des mots, traduction de 500 proverbes Kongo en français, Éditions Acoria, 2005). Mais c’est à travers le théâtre qu’il trouve son allant et s’exprime sur les relations entre le colonisé et le colonisateur : Matricule 22, Les 3 Francs, Les Princes de Mbanza-Kongo, Liberté... pièces à travers lesquelles on perçoit les prémices de l’émancipation du colonisé et qui sous-tendent les premiers caractères révolutionnaires congolais fait à la fois d’anti-colonialisme et de nationalisme militants.
Préface du Théâtre complet de Patrice Joseph Lhoni
Quel dramaturge congolais peut affirmer ne pas être un « frère en littérature » de Patrice Joseph Lhoni ? De Guy Menga à Maxime Ndébéka, en passant par Sylvain Bemba, ou Sony Labou Tansi et Dieudonné Niangouna, le théâtre de P.J. Lhoni fut un exemple de construction dramaturgique. Nous avons, tous, grandi dans les bras des textes comme Matricule 22 et Les Trois Francs. Ces textes nous ont accompagnés à travers diverses mises en scène professionnelles ou amateurs. Le Théâtre national, les compagnies privées, les écoles et les lycées ont puisé dans une œuvre qui anticipait notre avenir en nous plaçant au centre de notre histoire. Le Congo, dès les années précédant les indépendances, se construit, avec des auteurs comme Tchicaya U Tam’si, Jean Malonga, Letembet-Ambilly, Guy Menga et Patrice Joseph Lhoni un regard tourné vers la question congolaise. C’est comme si l’espace du cri d’affirmation que lance le poète Tchicaya U Tam’si avec ces vers, « Sale tête de Nègre, Voici ma tête Congolaise » … affichait par anticipation l’exergue d’une quête littéraire à la congolaise, ainsi que le constateront Arlette et Roger Chemain. La voie d’un réalisme merveilleux était ouverte. En effet dès les années 60, comme le précise en 1982 Guy Menga dans le numéro 3 de la revue Culture française, « le Congo se dote donc d’un nombre assez important de troupes qui, faute de répertoire national, montent, adaptent et jouent des comédies ou des farces signées Molière, Marivaux ou Courteline. Car les auteurs ne prendront le train théâtral ainsi lancé qu’en marche à partir de 1962. Maurice Battambica, Guy Menga, Patrice Joseph Lhoni et Ferdinand Mouangassa seront les premiers à prendre place dans le compartiment réservé aux auteurs alors que dans celui des comédiens voyagent en nombre important les célébrités qui donneront ses premières lettres de noblesse à ce théâtre naissant. Ils s’appellent Élisabeth M’Passi, Pascal Mayenga, Marius Yelolo, Pascal Nzonzi, Victor NT’tua Kanda pour ne citer que les plus connus sans pour autant oublier les seconds rôles et les figurants tout aussi importants, tant il est vrai que la création théâtrale demeure avant tout une œuvre collective. Les premiers succès remportés par ces comédiens et auteurs qui font figure de pionniers, vont susciter un phénomène de création extraordinaire, chez les dramaturges surtout… » Je suis, à l’instar d’autres dramaturges congolais, indéniablement redevable de ces « pionniers » d’un théâtre proposant un nouvel espace commun à bâtir, à travers une relecture dramaturgique de notre histoire. Enfant, j’étais en quête de héros congolais, d’une mythologie qui me ferait comprendre le monde dans lequel je vivais. Je ne pouvais imaginer que « mon peuple » fut sans histoire, sans réalisations majeures, sans âme et sans projets d’avenir. Dans l’espace de diverses parcelles de résistance menée par des hommes comme André Matsoua, ou des héroïnes comme Tchimpa-Vita, le Congo m’est enfin apparu. Ni les flonflons des fêtes de l’indépendance, ni l’école ne me donnaient cette certitude d’avoir une histoire à moi, une histoire qui me liait à un peuple, une culture et un projet de société. J’ai trouvé dans l’œuvre dramatique de Patrice Joseph Lhoni, tous les questionnements de notre époque. La place du pouvoir dans la Cité, le respect des peuples et de leurs cultures, la probité et le respect des valeurs universelles, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. La pièce Liberté, qui donne la parole à des personnalités historiques et culturelles majeures du XXe siècle est une mise en abîme de l’histoire qui restituait déjà à chaque Congolais, sa part d’humanité, obstruée par des siècles d’infamies. De manière prémonitoire, à travers une analyse et une observation intelligente, qui n’enlèvent rien à la qualité littéraire, Patrice Joseph Lhoni nous installe dans notre modernité. Cela n’est pas étonnant lorsqu’on sait, quel rôle l’auteur a joué dans la mise en place d’une politique culturelle brazzavilloise et par conséquent, congolaise. Si l’œuvre de Patrice Joseph Lhoni annonce la fin d’un monde que l’irruption du colonialisme bouscule et transforme par la force, elle scelle de façon durable une interrogation sur l’avenir et la place des valeurs qui s’installent dans un rapport de force entre l’endogène et l’exogène. Une interrogation qui demeure d’actualité aujourd’hui, portée par une mondialisation galopante.
Caya Makhélé Écrivain Directeur des Éditions Acoria
Bibliographie
- Aux Éditions Acoria
- Le Troisième Jour suivi de L’Exode (Vol. 2 Récits), Collection Récits, ISBN 2-912525-45-4
- Guirlandes fanées, Contes du Congo Brazzaville (Vol. 3 Contes), Collection Contes d'ici et d'ailleurs, ISBN 2-912525-72-1
- Le Masque des Mots-Sous le toit de mon père (Vol. 4 Proverbes), Collection Proverbes, ISBN 2-912525-70-5
- Théâtre Complet Avec une préface de Caya Makélé(écrivain et directeur des Editions Acoria) vol.1
- Tome I ISBN 978-2-35572-053-6 (2011)
L'annonce faite à Mukoko ou Mbulu-Mbulu Quand le bras est malade Matricule 22 Mayindombi
- Tome II ISBN 978-2-35572-054-3 (2011)
Les Trois francs ou Malanda de Mbenseke Liberté Kombabeka reine de Bonga
- Tome III ISBN 978-2-35572-055-0 (2011)
Les princes de Mbanza-Kongo La tragédie de Tchimpa Vita ou les préparatifs du bûcher de Kilombo Les termites
- De Mfoa à Brazzaville (1880 -1970) (Vol. 5 Histoire) - à paraître
Catégories :- Écrivain congolais (RC)
- Naissance en 1930
- Décès en 1976
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