- Participation
-
Dans le domaine de la gouvernance et de la citoyenneté, la participation désigne des tentatives de donner un rôle aux individus dans une prise de décision affectant une communauté. Cette notion s'est appliquée à plusieurs champs distincts.
Elle est souvent évoquée dans le domaine de l'environnement (où des conventions internationales et directives européennes l'encouragent; telles la convention d'Aarhus[1] et les directives qu la déclinent). C'est une des conditions généralement reconnues de la soutenabilité du développement, rappelée par la Charte de l'environnement, adossée à la Constitution en France et qui rappelle que « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».On reconnaît généralement plusieurs étapes à la participation :
- information et éventuellement sensibilisation/formation quand l'information est complexe, pour savoir et faire savoir ;
- éventuellement sensibilisation/formation quand l'information est complexe, pour savoir et faire savoir ;
- éventuel travail de co-élaboration (sur un mode plus ou moins collaboratif)
- consultation ; pour recueillir des avis ;
- Analyse et restitution des avis recueillis
- mise en œuvre avec évaluation et information
La participation est plus ou moins collaborative selon les cas.
Sommaire
La participation des salariés aux résultats de l'entreprise en France
Article détaillé : Participation des salariés aux résultats de l'entreprise (France).Dans le langage gaulliste, on nommait participation le principe cherchant à associer plus étroitement les salariés à leur entreprise par le moyen des comités d'entreprise et du « partage à part égale entre propriétaires et salariés (entre ceux-ci, au pro rata de leurs salaires) de la partie des bénéfices dépassant une rémunération donnée (fixée à 5 % hors inflation) des capitaux propres. »
Né d'une ordonnance de 1967, le projet fut implanté dans certaines entreprises voulant se donner une image citoyenne, comme IBM, mais n'avait les faveurs ni du CNPF, ni de la gauche de l'époque.
Aujourd'hui, le versement d'une participation (de son intitulé exact « réserve spéciale de participation ») est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés.
Les fonds sont bloqués cinq ans, pour inciter à l'épargne populaire. Ils peuvent être débloqués de façon anticipée lors de certains événements : mariage, accession à la propriété, surendettement, rupture du contrat de travail (départ en retraite, démission, licenciement, décès, ...), etc.
Le dernier rapport important sur la question, « La participation pour tous », a été remis au Premier ministre, Dominique de Villepin, en septembre 2005 par les députés François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain.
La participation en politique
En sciences politiques, la participation est un terme plus général qui recouvre les différents moyens selon lesquels les citoyens peuvent contribuer aux décisions politiques.
Pour que la participation en toute connaissance de cause soit possible, un degré de transparence, par exemple la transparence radicale, est nécessaire, mais non suffisante.
La participation est recherchée surtout pour les décisions qui affectent en priorité certaines catégories de la population, en particulier dans le domaine de l'urbanisme et des rénovations urbaines ou dans celui de la gestion des ressources (eau, paysage...) et de l'environnement.
La consultante américaine Sherry R. Arnstein a distingué en 1969 huit niveaux de participation des citoyens aux projets les concernant[2]. Cette « échelle de la participation » est toujours utilisée par des sociologues pour analyser la manière dont les pouvoirs publics informent, voire font participer les citoyens aux prises de décision :
Contrôle citoyen : une communauté locale gère de manière autonome un équipement ou un quartier. Pouvoir effectif des citoyens Délégation de pouvoir : le pouvoir central délègue à la communauté locale le pouvoir de décider un programme et de le réaliser. Partenariat : la prise de décision se fait au travers d'une négociation entre les pouvoirs publics et les citoyens Conciliation : quelques habitants sont admis dans les organes de décision et peuvent avoir une influence sur la réalisation des projets. Coopération symbolique Consultation : des enquêtes ou des réunions publiques permettent aux habitants d'exprimer leur opinion sur les changements prévus. Information : les citoyens reçoivent une vraie information sur les projets en cours, mais ne peuvent donner leur avis. Thérapie : traitement annexe des problèmes rencontrés par les habitants, sans aborder les vrais enjeux Non-participation Manipulation : information biaisée utilisée pour « éduquer » les citoyens en leur donnant l'illusion qu'ils sont impliqués dans le processus. Si Sherry R. Arnstein repère des exemples de participation à chacun de ces huit niveaux aux États-Unis, la participation ne dépasse pas en France le cadre de la « non-participation » et de l'« information » dans le cadre des rénovations urbaines, selon l'analyse de J. Donzelot et R. Epstein[3]. Cette analyse ignore cependant l'importance des expériences menées en France à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Depuis plusieurs années, des agences dédiées à l'accompagnement des démarches de concertation et de débat public, telles que l'agence Sennse, s'appuient sur cette échelle pour aider les pouvoirs publics à dimensionner leur concertation.
Ecocitoyenneté ; participation des habitants aux grands projets, à l'urbanisme et au cadre de vie
La participation en urbanisme qui trouve aujourd'hui son prolongement dans la notion de gouvernance liée au développement durable et solidaire est issu des idées de mai 1968 et notamment celle d'autogestion. Les premières expériences sont nées au travers les luttes urbaines où les habitants s'opposent aux opérations de rénovation, à la destruction de leur quartier pour des opérations immobilières qui ont pour conséquence de les envoyer vivre en périphérie des villes, dans des grands ensembles, des ZUP sans âme et sans commerces ni équipements.
L'une de ces luttes qui fit sans doute la plus populaire à l'époque est celle de l'Alma-gare à Roubaix[4] dès 1964. Les habitants créent une association pour résister, non pas à la destruction du coron qu'ils habitent, mais à leur transfert vers une banlieue lointaine. En 1980, ils créent le premier APU (atelier public d'urbanisme) pour étudier avec la commune et aussi l'aménageur (SAEN) leur nouveau quartier. De ce mouvement naîtra celui des ateliers publics d'urbanisme notamment à Créteil. C'est à cette époque qu'apparaît aussi la notion de cadre de vie qui va être souvent ajoutée à celle d'urbanisme notamment dans les « manifestes » pour les élections municipales de la fin des années 1970.
Un certain nombre d'expériences vont se développer aussi pour des opérations de constructions neuves à l'instar des expériences menées par Léon Krier en Belgique comme La maison médicale de Woluwe Saint Pierre. Ces opérations sont soutenues par une part par le Plan Construction, service du ministère de l'Équipement de l'époque et font l'objet d'un suivi, d'une analyse et de publication avec le sociologue Albert Mollet. Parmi ces opérations de construction neuves, il faut citer par exemple la ZAC du mont Hermé de 400 logements près de Reims avec la SA HLM l'Effort rémois (architectes : Humbert Di Legge et Gilles Borderioux, urbaniste : François-Xavier Tassel, paysagiste : Jean-Jacques Dupuy), l'opération Diapason à Reims, le quartier de Crèche-Lievrauw à Lille... Il faut aussi noter les premières participations des habitants à la réhabilitation de leurs logements : le Petit Séminaire à Marseille, le quartier Prod'homme-Aubepines-Bergeronnette à Dreux, Nantes avec l'OPHLM et le sociologue G. Roy...
La participation va être aussi expérimentée pour les l'équipements publics et à ce titre suivies par la MIQCP (Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques)[5].
Ces expériences vont amener à inclure dans l'élaboration des documents comme des opérations d'urbanisme la notion de concertation avec la loi du 13 juillet 1991 puis la loi du 2 février 1995[6]. L'approche environnementale va plus loin en évoquant la notion plus large et aussi plus floue de « gouvernance ». La notion de concertation préalable à une opération d'urbanisme ou à un plan d'urbanisme s'est développée dans le contexte de la décentralisation des pouvoirs aux collectivités locales et aussi celui du développement de l'action des associations du cadre de vie et de la montée de l'écologie politique. Cependant, contrairement aux années 1970 et 1980, cette concertation se résume souvent à une information voire un dialogue et non pas à une participation effective des habitants aux opérations les concernant. Il s'agit avant tout de désamorcer les contentieux juridiques qui se sont multipliés depuis ces années et qui pour une part recouvrent des intérêts personnels en contradiction avec l'intérêt général, notion souveraine en droit public français.
Législation : Elle évolue en France et Europe en donnant une place plus définie à la participation dans le domaine de l'environnement, avec en France, chronologiquement quelques grandes étapes :
- Loi n°76-629 relative à la protection de la nature, 1976.
- Loi n°83- 630 (dite Bouchardeau) relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l’environnement, 1983.
- Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, 1992.
- Circulaire n°92-7 (dite Bianco) relative à la conduite des grands projets d’infrastructure, 1992.
- Loi n°95-101 (dite Barnier) relative à la protection de l’environnement, 1995.
- Loi n°2000-1208 (dite SRU) de solidarité et renouvellement urbain, 2000.
- Convention (européenne) d’Aarhus, de 1998. En vigueur en 2002 en France.
- Loi n°2002-276 relative à la démocratie de proximité, 2002.
- Loi constitutionnelle n°2005-205 (dite Charte de l’environnement), 2005.
- Loi n°2009-967 (dite Grenelle I) de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, 2009, puis Loi Grenelle 2
En France, suit à un recours de France nature environnement à propos de la réglementation sur les ICPE, le Conseil constitutionnel a rappelé en 2011 que « Information » n'équivaut pas à « participation » (Annulation par le Conseil constitutionnel ds dispositions des articles L. 511-2 et L. 512-7 du code de l'environnement pour non conformité à la Charte de l'environnement).
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Le site collaboratif Participation et démocratie a été initié en 2010 par le groupement d'intérêt scientifique Participation du public, décision, démocratie participative. Il agrège les chercheurs travaillant en sciences humaines et sociales sur cette thématique. Régulièrement actualisé, ce site recense les évènements liés à ce champ de recherche, ainsi que de nombreux travaux disponibles en ligne.
Notes et références
- Circulaire du 18 octobre 2007 relative à la mise en oeuvre des dispositions régissant le droit d’accès à l’information relative à l’environnement (Texte non paru au Journal officiel) NOR : DEVG0700268C L'une des déclinaisons françaises de la Convention d'Aarhus est la
- (en) A Ladder of Citizen Participation, Journal of the American Institute of Planners, vol. 35, n° 4, juillet 1969, pp. 216-224. Une note de cet article (non reproduite dans le document en lien ci-dessus) précise que Sherry R. Arnstein était à l'époque directrice de l'institut Community Development Studies for the Commons. Elle a exercé différents métiers au cours de sa vie, essentiellement comme consultante en politiques publiques sur les thèmes de la santé et de la participation. Quelques éléments biographiques sur Sherry Arnstein sont disponibles sur le site internet de l'AACOM, association dont elle a été la directrice exécutive à la fin de sa vie professionnelle : [PDF] (en) 2005 AICP National Planning Landmarks and Pioneers. Sherry R. Arnstein, [PDF]
- Jacques Donzelot et Renaud Epstein, Démocratie et participation : l'exemple de la rénovation urbaine, Esprit, juillet 2006, pp. 5 à 34.
- MOLLET Albert, Quand les habitants prennent la parole, Ed. Plan construction, Paris, 1981, ISBN : 2.1108.4389.6
- Collectif, Participation et constructions publiques, MIQCP, Paris, 1984
- Louis Althape, « La modernisation du droit de l'urbanisme, rapport du Sénat n° 265 », JORF, 2000
Wikimedia Foundation. 2010.